Rapport n° 296 (1995-1996) de M. Pierre FAUCHON , fait au nom de la commission des lois, déposé le 27 mars 1996
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LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION
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EXPOSÉ GÉNÉRAL
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ANNEXE - BULLETIN DE LA COMMISSION DES LOIS DU
MERCREDI 27 MARS 1996
N° 296
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996
Annexe au procès-verbal de la séance du 27 mars 1996.
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur 1a proposition de loi, MODIFIÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, relative à la responsabilité pénale pour des faits d' imprudence ou de négligence,
Par M. Pierre FAUCHON,
Sénateur.
Cette commission est composée de : MM. Jacques Larché, président ; René-Georges Laurin, Germain Authié, Pierre Fauchon, François Giacobbi, Charles Jolibois, Robert Pagès, vice-présidents ; Michel Rufin, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, Paul Masson, secrétaires ; Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert Badinter, Pierre Biarnès, François Blaizot, André Bohl, Christian Bonnet, Mme Nicole Borvo, MM. Philippe de Bourgoing, Charles Ceccaldi-Raynaud, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Charles de Cuttoli, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Christian Demuynck, Michel Dreyfus-Schmidt, Patrice Gélard, Jean-Marie Girault, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Lucien Lanier, Guy Lèguevaques, Daniel Millaud, Georges Othily, Jean-Claude Peyronnet, Claude Pradille, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Jean-Pierre Schosteck, Jean-Pierre Tizon, Alex Türk, Maurice Ulrich.
Voir les numéros :
Sénat : Première lecture : 406, 255, 361 (1994-1995), 32 et T.A. 30 (1995-1996).
Deuxième lecture : 250 (1995-1996).
Assemblée nationale (10ème législ.) : Première lecture : 2354, 2443 et TA. 488
LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION
Réunie le mercredi 27 mars 1996, sous là présidence de M. Jacques Larché, président, la commission a examiné la proposition de loi n° 250 (1995-1996) modifiée par l'Assemblée nationale, relative à la responsabilité pénale pour des faits d'imprudence ou de négligence. En préambule, M. Pierre Fauchon, rapporteur, a rappelé que le texte initial de cette proposition de loi traduisait les conclusions du groupe de travail sur la responsabilité pénale des élus locaux, constitué au sein de la commission à l'initiative du président Jacques Larché et présidé par M. Jean-Paul Delevoye. II a précisé que la solution du groupe de travail consistait à demander au juge d'apprécier la responsabilité pénale de l'élu pour des faits non intentionnels commis dans l'exercice de ses fonctions par référence non plus à un chef d'entreprise mais, d'une manière concrète, en tenant compte notamment de ses compétences, de ses pouvoirs et des difficultés propres à sa mission. Il a justifié l'exigence d'une appréciation in concreto par la spécificité de la fonction d'élu local, lequel ne peut être assimilé ni à un chef d'entreprise ni à un particulier gérant ses propres affaires. M. Pierre Fauchon, rapporteur, a ensuite indiqué que, lors de la première lecture, le Sénat, sur la proposition du Gouvernement, avait inséré le principe de l'appréciation in concreto au sein de l'article 121-3 du code pénal afin de le rendre applicable à toute hypothèse, sans distinguer si le prévenu a ou non la qualité d'élu local, ce principe étant rappelé dans les textes particuliers aux élus locaux et aux fonctionnaires. Il a précisé que le texte inséré au sein du code pénal ne concernait qu'une forme d'infraction non intentionnelle, à savoir celle résultant du manquement à une obligation de sécurité prévue par la loi ou le règlement. Puis, le rapporteur a présenté le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale, soulignant que celle-ci y avait apporté une triple modification : - l'extension du champ d'application de l'appréciation in concreto à toutes les infractions non intentionnelles et non plus aux seules infractions liées au manquement à une obligation de sécurité prévue par la loi et les règlements. Le rapporteur a déclaré ne pas avoir d'objection sur c point ; - une modification d'ordre rédactionnel, consistant à exiger du juge qu'il apprécie les éléments constitutifs du délit en tenant compte des circonstances de l'espèce et, notamment, des missions ou des fonctions de l'auteur des faits, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait. Le rapporteur a fait part de son scepticisme sur la portée réelle de cette modification, estimant que les juges prenaient d'ores et déjà en considération les circonstances de l'espèce ; - la suppression des articles reprenant le principe de l'appréciation in concreto dans les textes relatifs aux élus locaux et aux fonctionnaires. Le rapporteur s'est déclaré fermement opposé à cette suppression, la reprise du principe général dans des textes particuliers lui paraissant présenter un double avantage : d'une part, assurer une meilleure information des élus ; d'autre part, dans la mesure où serait reprise la rédaction adoptée par le Sénat en première lecture, mettre sans ambiguïté aucune la preuve de la négligence ou de l'imprudence à la charge de l'accusation. À l'issue d'un large débat, la commission a adopté la proposition de loi sous réserve de trois amendements : - donnant une nouvelle rédaction à l'article premier A afin d'insérer après le deuxième alinéa de l'article 121-3 du code pénal un nouvel alinéa qui spécifie qu'« il n'y a point de délit si l'auteur des faits a accompli les diligences normales, compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait » ; - rétablissant l'article premier dans une rédaction qui spécifie expressément dans les dispositions du code général des collectivités territoriales relatives aux conditions d'exercice des mandats locaux, le principe de l'appréciation in concreto de la faute d'imprudence ou de négligence de l'élu local et de prévoir que la condamnation de celui-ci sera subordonnée à la preuve de son manque de diligence compte tenu du contexte dans lequel il exerce la mission ; - rétablissant, dans une rédaction similaire à celle de l'article premier, l'article premier bis relatif à la responsabilité des fonctionnaires. |
EXPOSÉ GÉNÉRAL
Mesdames, Messieurs,
Le Sénat est saisi en deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale le 22 février dernier, relative à la responsabilité pénale pour des faits d'imprudence ou de négligence.
Rappelons que cette proposition de loi a eu pour origine des condamnations pénales récentes d'élus locaux pour des faits non intentionnels, qui ont suscité une vive et légitime émotion parmi des élus désormais appelés à répondre pénalement, et donc personnellement, de toute sorte de dommages, y compris les moins prévisibles, survenus sur le territoire de leur collectivité.
Constitué au sein de la commission des Lois sur l'initiative du président Jacques Larché et placé sous la présidence de M. Jean-Paul Delevoye, le groupe de travail sur la responsabilité pénale des élus locaux a mis en évidence le fait que l'assimilation des élus locaux à des chefs d'entreprise amenait les juridictions répressives à adopter un raisonnement abstrait, qui ne tenait aucun compte des modalités concrètes d'exercice du mandat local et en particulier des contraintes auxquelles les élus locaux ont à faire face.
Le groupe de travail a également souligné que la généralisation de la mise en cause d'élus locaux pour des faits involontaires commis dans l'exercice de leur mission comportait un triple risque pour la démocratie locale : le risque d'un déficit de candidatures né du découragement des élus locaux, le risque d'une professionnalisation de la fonction d'élu local, la paralysie de la gestion locale par le risque pénal.
Excluant toute démarche susceptible de créer une sorte d'immunité voire d'impunité au profit d'une catégorie de citoyens et refusant de même de créer un délit d'imprudence ou de négligence propre aux élus locaux, le groupe de travail avait néanmoins retenu l'idée selon laquelle l'appréciation de la négligence ou de l'imprudence, s'agissant d'un élu local, ne pouvait faire abstraction des conditions dans lesquelles celui-ci exerce sa mission. Elle doit ainsi tenir compte des contraintes, notamment financières et techniques, auxquelles l'élu doit faire face. Elle doit également intégrer les exigences de la démocratie qui veut que tout citoyen puisse accéder aux fonctions électives.
La proposition de loi présentée par le président Jacques Larché, M. Jean-Paul Delevoye et votre rapporteur, cosignée par nos collègues François Blaizot, André Bohl, Philippe de Bourgoing, Yann Gaillard, Lucien Lanier et Michel Rufin, a traduit la recommandation législative du groupe de travail. Elle a donc tendu à permettre la prise en considération par les tribunaux des contraintes inhérentes à la gestion locale lorsqu'ils auront à apprécier la responsabilité pénale des élus locaux pour imprudence ou négligence.
Pour répondre à cet objectif, la proposition de loi était composée -dans sa rédaction initiale- d'un article unique qui, modifiant le code des communes (article L. 122-15-1), subordonnait la mise en jeu de la responsabilité pénale du maire pour des faits d'imprudence ou de négligence commis dans l'exercice de ses fonctions à la preuve qu'il n'avait « pas accompli toutes diligences normales compte tenu des moyens dont il disposait et des difficultés propres aux missions que la loi lui confie ».
Cette disposition était étendue aux présidents et vice-présidents de la délégation spéciale, aux présidents des établissements publics de coopération ainsi qu'aux présidents des conseils généraux et régionaux.
Sur la proposition de votre commission des Lois, le dispositif soumis aux travaux du Sénat fut complété par un article additionnel (article 2) qui -reprenant une proposition de loi de notre collègue Hubert Haenel- étendait aux districts la règle selon laquelle les syndicats de communes sont civilement responsables des accidents survenus à l'un de leurs membres ou à leur président.
Ainsi conçu le dispositif était limité aux seuls élus locaux, sans que la commission des Lois ait pour autant exclu que son champ d'application puisse être, le cas échéant, élargi.
Telle fut la démarche en définitive adoptée par le Sénat qui, à l'initiative du Gouvernement, décida de donner un caractère de portée générale à la réforme proposée.
Le Garde des Sceaux a, en effet, fait valoir à l'appui de cette solution que « la proposition de loi pose, en réalité, le principe selon lequel la faute d'imprudence ou de négligence doit être appréciée en fonction des circonstances de l'espèce et de la situation particulière de la personne poursuivie. Dès lors, on ne voit pas quel argument permettrait de refuser qu'une telle règle, commandée par l'équité et le bon sens, soit étendue à l'ensemble des citoyens ».
C'est pourquoi, souscrivant à la suggestion du Gouvernement, le Sénat a fait figurer la règle de l'appréciation in concreto à l'article 121-3 du code pénal qui définit la faute pénale.
Tel a été l'objet de l'article premier A (nouveau) qui, complétant l'article 121-3 précité, précisait -dans la rédaction prévue par le Sénat- que « le manquement à une obligation de sécurité ou de prudence prévue par la loi ou les règlements constitue une imprudence ou une négligence à moins qu'il ne soit établi que l'auteur du manquement a accompli toutes diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que des moyens et du pouvoir dont il disposait ».
Outre cette extension du champ d'application de la proposition de loi, le texte de portée générale adopté par le Sénat devait avoir pour effet de sup primer définitivement les délits matériels.
Rappelons que la suppression de ces délits pour lesquels seule une faute contraventionnelle était exigée a constitué l'un des objets de la réforme du code pénal. Or, le législateur a néanmoins laissé subsister de tels délits. En application des articles 221-6 et 221-19 du nouveau code pénal, en effet, les délits d'atteinte involontaire à la vie ou à l'intégrité de la personne peuvent être constitués non seulement en cas d'imprudence, de négligence ou de maladresse, mais aussi en cas de « manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou les règlements ».
Dans une telle hypothèse, la faute requise est purement contraventionnelle. Elle est constituée par la simple constatation du manquement aux prescriptions légales ou réglementaires, son auteur ne pouvant s'en exonérer qu'en rapportant la preuve de la force majeure.
Le texte adopté par le Sénat, sur la proposition du Gouvernement, a donc eu pour effet de supprimer cette responsabilité purement objective en disposant expressément que le manquement à une obligation de sécurité ou de prudence prévue par la loi ne peut être considéré comme fautif dès lors que l'auteur de ce manquement a accompli toutes diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses fonctions ou de ses missions, de ses compétences ainsi que des moyens et du pouvoir dont il disposait.
Ainsi, comme l'a souligné le Garde des Sceaux devant le Sénat, le texte a eu une « double portée. D'une part, il pose expressément le principe nouveau selon lequel le manquement à une obligation légale ou réglementaire ne constitue pas nécessairement à lui seul une faute. D'autre part, il donne une définition générale de la faute d'imprudence ou de négligence mettant en évidence la nécessité de procéder à une appréciation in concreto de celle-ci. »
Ayant ainsi adopté un texte de portée générale figurant dans le code pénal, le Sénat n'en a pas moins jugé nécessaire de maintenir un texte spécifique applicable aux élus locaux et d'adopter l'article unique de la proposition de loi -devenu l'article premier- qui insérait dans le code des communes un article L. 122-15-1 disposant que « conformément à l'article 121-3 du code pénal, le maire ou un élu municipal le suppléant ne peut être condamné pénalement pour des faits d'imprudence ou de négligence commis dans l'exercice de ses fonctions que s'il est établi qu'il n'a pas accompli toutes diligences normales compte tenu de ses compétences, des moyens et du pouvoir dont il disposait et des difficultés propres aux missions que la loi lui confie. ».
Etaient ainsi visées toutes les imprudences ou négligences et pas seulement les manquements à une obligation de sécurité prévue par une loi ou un règlement.
Conformément au texte initial de la proposition de loi, la même disposition était rendue applicable aux président et vice-présidents de la délégation spéciale, aux présidents des établissements publics de coopération et aux présidents de conseils généraux ou régionaux.
Le maintien de dispositions particulières aux élus locaux était fondé sur une double motivation : d'une part, affirmer clairement dans les textes qui régissent les collectivités territoriales -plus spécifiquement ceux qui traitent des conditions d'exercice des mandats- quelles sont les règles applicables à la mise en jeu de la responsabilité des élus pour des faits d'imprudence ou de négligence ; d'autre part, mettre, sans ambiguïté aucune, la preuve à la charge de l'accusation dans un souci de protection des élus locaux pleinement justifié par la situation spécifique dans laquelle ceux-ci se trouvent.
Cette dernière solution n'est pas contraire à une disposition non plus qu'à un principe de caractère constitutionnel, notamment l'égalité devant la loi. Le Conseil constitutionnel a posé les principes applicables en la matière dans une décision du 7 novembre 1989 : « considérant que le principe d'égalité devant la loi pénale ne fait pas obstacle à ce qu'une différenciation soit opérée par le législateur entre agissements de nature différente ; que, toutefois, pour des infractions identiques la loi pénale ne saurait, dans l'édiction des crimes ou des délits, ainsi que des peines qui leur sont applicables, instituer au profit de quiconque une exonération de responsabilité à caractère absolu, sans par là même porter atteinte au principe d'égalité » (décision n° 89-262 DC du 7 novembre 1989 sur la loi relative à l'immunité parlementaire).
En outre, sur la proposition du Gouvernement qui a fait valoir que la situation des fonctionnaires, sans pouvoir être assimilée purement et simplement à celle des élus locaux s'en rapprochait à maints égards, le Sénat a adopté, en dépit des réserves de votre commission des Lois qui a considéré que le texte général pouvait répondre suffisamment à la préoccupation concernant les fonctionnaires, un article premier bis qui reproduisait, dans la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires (article 11 bis A), une disposition identique.
Examinant la proposition de loi en première lecture, le 22 février dernier, l'Assemblée nationale a souscrit à la démarche du Sénat tendant à affirmer expressément dans la loi le principe selon lequel le juge doit apprécier in concreto la réalité de la faute d'imprudence ou de négligence.
L'Assemblée nationale a néanmoins substantiellement modifié le dispositif adopté par le Sénat, d'une part, en retenant une nouvelle rédaction de l'article premier A qui complète l'article 121-3 du code pénal, d'autre part, en supprimant les articles premier et premier bis qui traitaient respectivement de la responsabilité des élus et de celle des fonctionnaires.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale, constatant que l'objet de l'article 2 était désormais satisfait par l'article L. 5211-8 du nouveau code général des collectivités territoriales qui retient la responsabilité des établissements publics de coopération intercommunale pour les accidents survenus aux membres de leurs organes délibérants et à leurs présidents dans l'exercice de leurs fonctions, a supprimé cet article.
Enfin, sur l'initiative du Gouvernement, qui a jugé nécessaire de bien mettre en évidence que la réforme de l'article 121-3 du code pénal a pour unique objet de définir la faute pénale mais qu'elle n'a aucune incidence sur les règles relatives à la responsabilité civile, l'Assemblée nationale a complété la proposition de loi par un article 3 modifiant l'article 470-1 du code de procédure pénale. L'article 470-1, issu d'une loi du 8 juillet 1983, permet au tribunal correctionnel qui relaxe une personne poursuivie pour homicide ou blessures involontaires de la condamner à des dommages et intérêts en application des règles de droit civil. Il serait désormais applicable dans toutes les hypothèses d'infraction non intentionnelle.
Pour ce qui est de l'article premier A, la nouvelle rédaction retenue par l'Assemblée nationale sur la proposition de sa commission des Lois a eu un triple objet.
D'une part, elle prend en compte tous les cas d'infractions non intentionnelles. Elle mentionne ainsi, outre le manquement à une obligation de sécurité, l'imprudence et la négligence. Elle mentionne également l' inattention et la maladresse, réalisant ainsi une harmonisation avec la rédaction des articles 221-6 et 222-19 relatifs aux homicides ou blessures involontaires. Elle cherche ainsi à faire apparaître clairement que l'appréciation in concreto de l'existence même de la faute s'impose dans tous les cas.
D'autre part, elle supprime toute allusion à la question de la preuve, la commission des Lois de l'Assemblée nationale ayant fait valoir que cette question n'avait pas sa place dans un texte pénal de fond.
Enfin, la mise en danger d'autrui correspondant à une faute spécifique située entre les infractions intentionnelles et non-intentionnelles, l'Assemblée nationale a souhaité distinguer cette faute des autres infractions non intentionnelles afin de faire mieux apparaître la hiérarchie des fautes.
Pour ce qui est des articles premier et premier bis, l'Assemblée nationale, contre l'avis du Gouvernement, a adopté des amendements de suppression de ces articles qui concernaient respectivement la responsabilité des élus et celle des fonctionnaires.
Elle a suivi, ce faisant, la position de sa commission des Lois qui -contrairement à l'avis de son rapporteur- a considéré que la déclinaison d'un principe général inscrit à l'article 121-3 du code pénal dans des législations particulières, d'une part, pouvait créer des risques de redondance dans une législation déjà touffue et complexe, d'autre part, s'exposait au risque d'oublier certaines catégories.
Votre commission des Lois observe que deux questions doivent être distinguées : d'une part, celle qui concerne la rédaction des dispositions nouvelles que le Gouvernement, pour des raisons déjà indiquées par votre rapporteur et approuvées par le Sénat en première lecture, a souhaité faire figurer à l'article 121-3 du code pénal ; d'autre part, celle qui concerne l'existence d'un texte spécifique aux élus locaux, question qui a fondé toute la démarche du Sénat en la matière.
S'agissant, en premier lieu, de l'article premier A , qui insère des dispositions de portée générale à l'article 121-3 du code pénal, votre commission des Lois a estimé que la nouvelle rédaction retenue par l'Assemblée nationale soulevait certaines difficultés.
Votre commission des Lois relève que la rédaction proposée aboutirait à une modification importante du nouveau code pénal dont l'utilité n'apparaît pas évidente. Or, celui-ci étant entré en vigueur tout récemment, il paraît souhaitable de ne lui apporter que des modifications strictement nécessaires.
D'une part, certains de nos collègues se sont interrogés sur l'opportunité d'étendre le champ d'application de ces dispositions à l' inattention et à la maladresse. M. Robert Badinter a notamment fait observer que cette extension du champ d'application de l'appréciation in concreto à toutes les infractions non intentionnelles pouvait avoir pour conséquence de généraliser les cas d'infractions par inattention ou maladresse alors que, en l'état actuel du droit, ces cas concernent les seuls homicides ou blessures involontaires.
Votre rapporteur a cependant fait valoir que la mention « lorsque la loi le prévoit » répondait à cette préoccupation.
D'autre part, la formulation retenue par l'Assemblée nationale pour exprimer le principe de l'appréciation in concreto, à savoir que « les éléments constitutifs du délit sont appréciés en tenant compte des circonstances de l'espèce et, notamment, des missions et des fonctions de l'auteur des faits, de ses compétences, ainsi que du pouvoir et des moyens dont il dispose », est apparue à votre commission des Lois sans portée réelle.
En effet, il n'est pas contesté à la lecture de la jurisprudence, que les magistrats procèdent à une appréciation concrète des faits. Mais la démarche abstraite de la jurisprudence consiste à définir le degré de prudence ou de négligence qu'on est en droit d'attendre d'un élu local en ignorant la situation spécifique dans laquelle ce dernier se trouve pour se contenter d'une référence à ce qu'on aurait pu attendre d'un chef d'entreprise « normal » dans des circonstances identiques.
Votre commission des Lois a eu le souci prioritaire de ne pas modifier un texte publié récemment après une élaboration longue et consensuelle. C'est pourquoi elle a considéré qu'il convenait de s'en tenir à l'insertion d'un alinéa supplémentaire à l'article 121-3 du code pénal qui, répondant à l'objectif proposé par le Gouvernement, accepté par le Sénat et l'Assemblée nationale, spécifie qu'« il n'y a point de délit si l'auteur des faits a accompli les diligences normales, compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait. »
Cette disposition a le double mérite, d'une part, de caractériser l'appréciation in concreto à partir des diligences normales qu'aurait dû accomplir l'auteur des faits et, d'autre part, de spécifier que ces diligences s'apprécient compte tenu, le cas échéant, de la nature des missions ou fonctions, des compétences ainsi que des moyens et du pouvoir dont celui-ci disposait.
Quant à l'affirmation par l'article premier du principe de l'appréciation in concreto dans les textes particuliers aux élus locaux -c'est-à-dire désormais dans le code général des collectivités territoriales- votre commission des Lois considère qu'elle conserve toute son utilité en dépit de l'adoption d'une disposition de portée générale. Elle constitue le fondement même de toute la démarche qui a présidé à l'élaboration et à l'adoption de la présente proposition de loi par le Sénat.
Elle s'appuie sur la spécificité de la situation de l'élu local que le groupe de travail de votre commission des Lois ainsi que les débats en première lecture devant le Sénat avaient parfaitement mis en évidence et qu'il paraît utile de rappeler.
À la différence d'un particulier ou d'un chef d'entreprise, l'élu local est investi d'une mission d'intérêt général, qui lui est confiée par ses concitoyens, d'une responsabilité multiforme dont la définition ne dépend pas de lui, pour lesquelles il n'a reçu aucune formation particulière et qui ne fait pas l'objet d'une rémunération.
Pour faire face à ses missions multiples et de plus en plus diversifiées, l'élu local dispose de moyens financiers et techniques limités.
L 'équité aussi bien que la démocratie sont donc mises en cause lorsque la responsabilité de l'élu local, pour des faits d'imprudence ou de négligence, est appréciée sans tenir aucun compte des conditions spécifiques de son action.
Cette spécificité est, par ailleurs, confirmée par l'existence de textes particuliers régissant les conditions d'exercice des mandats locaux désormais regroupés dans les parties du code général des collectivités territoriales relatives respectivement à. la commune, au département et à la région. Il serait paradoxal que ces dispositions insérées dans ce qui est désormais le texte de référence des collectivités territoriales ne traitent pas du sujet essentiel que constitue la mise en jeu de la responsabilité des élus.
La spécificité de la situation des élus locaux est également affirmée, en matière pénale, par l'existence de plusieurs dispositions qui leur sont propres ou qui aggravent leur responsabilité s'ils sont les auteurs d'une infraction.
C'est précisément cette spécificité qui a conduit le Sénat à adopter un dispositif plus protecteur pour les élus locaux en ce qui concerne la charge de la preuve, dispositif auquel l'Assemblée nationale n'a pas voulu souscrire parce qu'elle l'a analysé comme une simple déclinaison du principe général prévu par le code pénal.
Enfin, outre la question de la preuve susmentionnée, le rappel d'un principe général dans des textes particuliers peut correspondre au rôle expressif de la loi. Comme l'a rappelé M. Roger Romani, ministre chargé des relations avec le Parlement, lors des débats devant l'Assemblée nationale, le projet de loi sur le terrorisme, en cours de discussion, prend soin de préciser que les militaires et les fonctionnaires de la police nationale, des douanes et de l'administration pénitentiaire font partie de la catégorie des personnes dépositaires de l'autorité publique ou chargées d'une mission de service public. De même, la nouvelle définition de l'abus de confiance résultant de l'article 314-1 n'a pas entraîné la suppression de nombreux textes prévoyant le détournement de certains biens ou de certaines sommes.
Enfin, bien que l'article 121-1 du code pénal pose déjà le principe du caractère personnel de la responsabilité pénale, l'article L.263-2 du code du travail précise néanmoins que la responsabilité pénale du chef d'entreprise pour les infractions de manquement aux règles d'hygiène ou de sécurité exige
une faute personnelle.
Pour toutes ces raisons, votre commission des Lois a jugé indispensable de rétablir l'article premier de la proposition de loi afin de spécifier expressément dans les dispositions du code général des collectivités territoriales qui traitent des conditions d'exercice des mandats locaux, le principe de l'appréciation in concreto de la faute d'imprudence ou de négligence de l'élu local et de prévoir que la condamnation de celui-ci sera subordonnée à la preuve de son manque de diligence compte tenu du contexte dans lequel il exerce sa mission.
Elle vous propose également, conformément à la position retenue par le Sénat en première lecture, de rétablir l'article premier bis relatif à la responsabilité des fonctionnaires.
En revanche, l'objet de cette disposition étant satisfait par l'entrée en vigueur du code général des collectivités territoriales, elle vous suggère de maintenir la suppression de l'article 2.
Enfin, l'article 3 (nouveau) issu des travaux de l'Assemblée nationale affirme à juste titre que les précisions apportées aux règles de la responsabilité pénale ne doivent pas avoir d'incidence sur les règles relatives à la responsabilité civile qui pourra, le cas échéant, être mise en jeu. Votre commission des Lois vous propose donc d'adopter cet article conforme.
Sous le bénéfice de ces observations et sous réserve des amendements qu'elle soumet à votre approbation, votre commission des Lois vous propose d'adopter la présente proposition de loi.
ANNEXE - BULLETIN DE LA COMMISSION DES LOIS DU MERCREDI 27 MARS 1996
La commission a examiné, sur le rapport de M. Pierre Fauchon, la proposition de loi n° 250 (1995-1996) modifiée par l'Assemblée nationale, relative à la responsabilité pénale pour des faits d'imprudence et de négligence.
M. Pierre Fauchon, rapporteur, a rappelé que le texte initial de cette proposition de loi traduisait les conclusions du groupe de travail sur la responsabilité pénale des élus locaux, constitué au sein de la commission à l'initiative du président Jacques Larché et présidé par M. Jean-Paul Delevoye.
Il a précisé que la solution du groupe de travail consistait à demander au juge d'apprécier la responsabilité pénale de l'élu par référence non plus à un chef d'entreprise mais, d'une manière concrète, en tenant compte notamment de ses compétences, de ses pouvoirs et des difficultés propres à sa mission. Il a justifié l'exigence d'une appréciation in concreto par la spécificité de la fonction d'élu local, lequel ne peut être assimilé ni à un chef d'entreprise ni à un particulier gérant ses propres affaires.
M. Pierre Fauchon, rapporteur, a ensuite indiqué que, lors de la première lecture, le Sénat, sur la proposition du Gouvernement, avait inséré le principe de l'appréciation in concreto au sein de l'article 121-3 du code pénal afin de le rendre applicable à toute hypothèse, sans distinguer selon que le prévenu avait ou non la qualité d'élu local, ce principe étant rappelé dans les textes particuliers aux élus locaux et aux fonctionnaires. Il a précisé que le texte inséré au sein du code pénal ne concernait qu'une forme d'infraction non intentionnelle, à savoir celle résultant du manquement à une obligation de sécurité prévue par la loi ou le règlement.
Puis, le rapporteur a présenté le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale, soulignant que celle-ci y avait apporté une triple modification :
- l'extension du champ d'application de l'appréciation in concreto à toutes les infractions non intentionnelles et non plus aux seules infractions liées au manquement à une obligation de sécurité prévue par la loi et les règlements. Le rapporteur a déclaré ne pas avoir d'objection sur ce point ;
- une modification d'ordre rédactionnel, consistant à exiger du juge qu'il apprécie les éléments constitutifs du délit en tenant compte des circonstances de l'espèce et, notamment, des missions ou des fonctions de l'auteur des faits, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait. Le rapporteur a fait part de son scepticisme sur la portée réelle de cette modification, estimant que les juges prenaient d'ores et déjà en considération les circonstances de l'espèce ;
- la suppression des articles reprenant le principe de l'appréciation in concreto dans les textes relatifs aux élus locaux et aux fonctionnaires. Le rapporteur s'est déclaré fermement opposé à cette suppression, la reprise du principe général dans des textes particuliers lui paraissant présenter un double avantage : d'une part, assurer une meilleure information des élus ; d'autre part, dans la mesure où serait reprise la rédaction adoptée par le Sénat en première lecture, mettre sans ambiguïté aucune la preuve de la négligence ou de l'imprudence d'un élu local à la charge de l'accusation.
M. Robert Badinter a fait observer que l'extension par l'Assemblée nationale du champ d'application de l'appréciation in concreto à toutes les infractions non intentionnelles pouvait avoir pour conséquence de généraliser les cas d'infractions par inattention ou maladresse alors que, en l'état actuel du droit, ces cas concernent les seuls homicides ou blessures involontaires.
Constatant que le rapporteur proposait, pour l'article 121-3 du code pénal, de revenir à une rédaction proche de celle adoptée par le Sénat en première lecture, il a estime peu souhaitable, pour éviter toute difficulté d'interprétation, d'exiger la preuve que la personne prévenue ait accompli « toutes » diligences normales.
Observant que le texte proposé par le rapporteur consistait à demander au juge de tenir compte, « le cas échéant », de la nature des missions ou des fonctions du prévenu, il s'est interrogé sur l'utilité d'une telle expression.
Après avoir partagé les observations de M. Robert Badinter, M. Jean-Marie Girault a considéré que la distinction entre les élus locaux et les simples citoyens quant à la charge de la preuve de l'imprudence ou de la négligence pouvait constituer une atteinte à l'égalité devant la loi pénale.
Rappelant les vives inquiétudes suscitées chez les élus locaux par le sentiment de voir leur responsabilité pénale mise en jeu de plus en plus fréquemment, M. Philippe de Bourgoing s'est associé à l'ensemble des observations présentées par le rapporteur.
M. Jacques Larché, président, a estimé que les sénateurs, représentants des collectivités territoriales, étaient particulièrement bien placés pour prendre la juste mesure de l'inquiétude des élus locaux face à une mise en jeu plus fréquente de leur responsabilité pénale. Il a jugé nécessaire de reprendre le principe de l'appréciation in concreto dans un texte spécifique aux élus locaux.
M. Jean-Jacques Hyest a vu dans la proposition de loi issue des travaux de l'Assemblée nationale une inversion de la solution retenue par le Sénat, qui avait mis en avant la spécificité du manquement à une obligation de sécurité prévue par la loi ou les règlements alors que le texte adopté par les députés mettait cette hypothèse sur le même plan que l'imprudence ou la négligence.
M. Patrice Gélard a approuvé les propos de MM. Robert Badinter et Jean-Jacques Hyest. Estimant en outre contestable de modifier une disposition générale du code pénal sans en analyser toutes les conséquences, il s'est déclaré partisan d'un retour au texte adopté par le Sénat en première lecture.
M. Michel Dreyfus-Schmidt a approuvé la modification de l'Assemblée nationale consistant à énumérer tous les cas d'infractions non intentionnelles, y compris la maladresse et l'inattention.
M. Robert Badinter lui a rappelé que la maladresse ou l'inattention ne pouvaient donner lieu à condamnation qu'en cas de blessures ou d'homicide, le texte de l'Assemblée nationale paraissant les généraliser à toutes les infractions non intentionnelles.
M. Pierre Fauchon, rapporteur, lui a objecté que ces cas n'étaient pas généralisés dans la mesure où ils ne pourraient donner lieu à condamnation que lorsque la loi le prévoirait.
M. Michel Dreyfus-Schmidt a critiqué la distinction proposée par le rapporteur concernant la charge de la preuve de l'imprudence ou de la négligence. Il a ajouté que, en pratique, les élus locaux poursuivis se voyaient reprocher non pas de ne pas avoir accompli toutes les diligences normales mais bien de n'avoir pris aucune précaution.
M. Jean-Pierre Schosteck a estimé nécessaire de supprimer la référence à la maladresse et à l'inattention. Il a considéré que le problème de la responsabilité pénale des élus locaux résultait de la multiplication des incriminations dans des domaines comme l'environnement, et de la faculté de remonter la chaîne de responsabilité jusqu'au plus haut niveau sans tenir compte des moyens concrets des élus. Il a illustré son propos en rappelant la condamnation d'un maire pour défaut d'installation d'une station d'épuration alors que les moyens financiers de la commune ne lui permettaient pas de la réaliser.
M. André Bohl a fait observer que l'objectif de la proposition de loi était avant tout de remédier à un problème pouvant donner lieu à des situations tragiques, ayant pu aller jusqu'au décès, provoqué par le sentiment d'une atteinte à la dignité.
M. Michel Dreyfus-Schmidt a estimé qu'il appartenait au législateur de prendre la mesure des textes répressifs qu'il adoptait et d'éviter de multiplier les incriminations.
M. Pierre Fauchon, rapporteur, a supposé que, en visant les hypothèses de maladresse et d'inattention, l'Assemblée nationale n'avait pas souhaité généraliser leur champ d'application mais seulement tenir compte de l'existence de ces cas d'infractions non intentionnelles dans certains articles du code pénal.
Il a approuvé la suggestion de M. Robert Badinter consistant à apprécier le comportement du prévenu non pas par référence à toutes les diligences normales mais seulement par référence aux diligences normales qu'il aurait dû accomplir.
Il a en revanche estimé souhaitable de conserver l'expression « le cas échéant », l'article 121-3 du code pénal ayant vocation à s'appliquer à des personnes n'étant pas investies de missions ou de fonctions.
M. Robert Badinter s'est rallié à ce point de vue.
M. Pierre Fauchon, rapporteur, a reconnu l'importance du problème soulevé par M. Jean-Marie Girault quant au risque de rupture du principe d'égalité devant la loi. Il a néanmoins fait observer que le texte général pouvait être interprété comme faisant peser la charge de la preuve sur l'accusation. Il a ajouté que la jurisprudence du Conseil constitutionnel permettait au législateur de prévoir des règles de procédure différentes dès lors qu'elles concernaient des agissements de nature différente et qu'elles ne conduisaient pas à une exonération absolue de responsabilité.
Il s'est déclaré sensible aux observations de M. Jean-Jacques Hyest, estimant peut-être plus prudent de s'en tenir au manquement à une obligation de sécurité prévue par la loi ou les règlements et de ne pas improviser pour les autres cas d'infractions non intentionnelles.
La commission a ensuite procédé à l'examen des articles.
À l'article premier A (appréciation in concreto de l'imprudence ou de la négligence), M. Pierre Fauchon, rapporteur, a approuvé la distinction opérée par l'Assemblée nationale entre la mise en danger délibérée et les autres cas d'infraction non intentionnelle. Il a en revanche reconnu que l'énumération de ceux-ci pouvait soulever certaines difficultés.
M. Michel Dreyfus-Schmidt a estimé souhaitable de tenir compte de l'observation de M. Jean-Marie Girault en mettant expressément à la charge de l'accusation la preuve de l'imprudence ou de la négligence.
M. Pierre Fauchon, rapporteur, s'est opposé à cette solution, qui lui a paru aller trop loin dans la mesure où elle concernerait, notamment, les accidents de la circulation.
M. Robert Badinter a rappelé le souci récurrent de la commission de ne modifier le code pénal, récemment réformé, que dans les hypothèses où cela s'avérait strictement nécessaire. Il a en conséquence suggéré de limiter la modification de l'article 121-3 à l'insertion d'un seul alinéa, comprenant une phrase aux termes de laquelle, conformément à la proposition du rapporteur, il n'y aurait point de délit dès lors que l'auteur des faits aurait accompli les diligences normales, compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences, de son pouvoir et de ses moyens. Après que MM. Pierre Fauchon, rapporteur, et Daniel Hoeffel eurent approuvé cette suggestion, la commission a adopté un amendement en ce sens.
M. Jacques Larché, président, a fait observer que, après s'être doté d'un nouveau code pénal, le Canada avait prévu un moratoire législatif de trois années.
Sur la proposition de son rapporteur, la commission a ensuite adopté un amendement tendant à rétablir l'article premier (responsabilité des élus locaux) afin de préciser dans le code général des collectivités territoriales que les élus locaux ne pourraient être condamnés pénalement pour des faits non intentionnels commis dans l'exercice de leurs fonctions que s'il était établi qu'ils n'avaient pas accompli les diligences normales compte tenu de leurs compétences, du pouvoir et des moyens dont ils disposaient ainsi que des difficultés propres aux missions que la loi leur confie.
Elle a ensuite adopté un amendement tendant à rétablir l'article premier bis (responsabilité des fonctionnaires) afin d'apporter la même précision à propos des fonctionnaires et agents non titulaires de droit public.
Puis, la commission a approuvé l'ensemble de la proposition de loi ainsi modifiée.