Rapport n° 341 (1995-1996) de M. Michel RUFIN , fait au nom de la commission des lois, déposé le 2 mai 1996

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N ° 34 1

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996


Annexe au procès-verbal de la séance du 2 mai 1996.

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur :

1°) le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE, portant modification de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l' enfance délinquante,

2°) la proposition de loi de MM Jean-Jacques HYEST, Jean-Paul AMOUDRY, Denis BADRÉ, Jacques BAUDOT, Michel BÉCOT, Jean BERNADAUX, François BLAIZOT, Marcel DENEUX, Georges DESSAIGNE, André DULAIT, André ÉGU, Jean FAURE, Jacques GENTON, Pierre HÉRISSON, Rémi HERMENT, Daniel HOEFFEL, Jean HUCHON, Claude HURIET, Pierre LAGOURGUE, Alain LAMBERT, Édouard LE JEUNE, Jean-Louis LORRAIN, Jacques MACHET, Jean MADELAIN, Kléber MALÉCOT, René MARQUÈS, Louis MERCIER, Michel MERCIER, Louis MOINARD, Jean-Marie POIRIER, Jean POURCHET, Guy ROBERT, Michel SOUPLET et Xavier de VILLEPIN tendant à lutter contre la violence dans les établissements scolaires,

Par M. Michel RUFIN,

Sénateur.

1- Cette commission est composée de : MM. Jacques Larché, président ; René-Georges Laurin, Germain Authié, Pierre Fauchon, François Giacobbi, Charles Jolibois, Robert Pagès, vice-présidents ; Michel Rufin, Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, Paul Masson, secrétaires ; Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert Badinter, Pierre Biarnès, François Blaizot, André Bohl, Christian Bonnet, Mme Nicole Borvo, MM. Philippe de Bourgoing, Charles Ceccaldi-Raynaud, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Charles de Cuttoli, Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Christian Demuynck, Michel Dreyfus-Schmidt, Patrice Gélard, Jean-Marie Girault, Paul Girod, Daniel Hoeffel, Lucien Lanier, Guy Lèguevaques, Daniel Millaud, Georges Othily, Jean-Claude Peyronnet, Claude Pradille, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Jean-Pierre Schosteck, Jean-Pierre Tizon, Alex Türk, Maurice Ulrich.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (l0 ème législ.) : 2573, 2655, et TA. 512.

Sénat : 300 et 262 (1995-1996).

Délinquance et criminalité.

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

Réunie le jeudi 4 mai 1996 sous la présidence de M. Jacques Larché, la commission des Lois a examiné, sur le rapport de M. Michel Rufin, le projet de loi portant modification de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante.

M. Michel Rufin a rappelé l'esprit de l'ordonnance de 1945, caractérisé par le primat de l'éducatif, en ce qu'elle prévoit une procédure, dirigée par le juge des enfants, prenant en considération la personnalité du mineur et conduisant à des mesures éducatives (admonestation, placement, remise aux parents, réparation à l'égard de la victime...) plutôt qu'à des sanctions pénales.

Il a ensuite fait observer que la journée d'auditions publiques organisée par la commission le 25 avril 1996 avait mis en avant l'augmentation et le rajeunissement de la délinquance des mineurs, ainsi que la part croissante prise par les crimes et délits contre les personnes. Il a ajouté que plusieurs intervenants avaient déploré le développement d'un sentiment d'impunité chez les jeunes délinquants qu'ils avaient notamment expliqué par un intervalle trop long entre la commission d'une infraction et la réponse judiciaire, lorsque celle-ci intervenait.

Le rapporteur a ensuite indiqué que le projet de loi avait précisément pour objet d'accélérer dans la mesure du possible le cours de la justice des mineurs et prévoyait à cette fin deux nouveaux dispositifs :

- la convocation par officier de police judiciaire aux fins de jugement , en vertu de laquelle le procureur pourrait faire traduire directement devant le juge des enfants un mineur contre lequel il existerait des charges suffisantes d'avoir commis un délit. Le juge des enfants ainsi saisi pourrait se prononcer rapidement sur la culpabilité. Il pourrait également prononcer en même temps un rappel à la loi (dispense de peine, admonestation, remise aux parents ou mesure de réparation), à condition de disposer de renseignements suffisants sur la personnalité du mineur. À défaut, il devrait renvoyer à une prochaine audience, qui interviendrait dans les six mois, pour prononcer la mesure. Dans ce dernier cas, il y aurait donc « césure » pénale, à savoir un décalage dans le temps entre, d'une part, la déclaration de culpabilité et, d'autre part, le prononcé de la sanction ;

- la comparution à délai rapproché , en vertu de laquelle le procureur de la République pourrait, lorsque le mineur aurait déjà fait l'objet de procédures, demander au juge des enfants de le renvoyer devant la juridiction de jugement dans un délai compris entre un et trois mois. Le juge des enfants ne pourrait refuser de faire droit à cette requête que par une ordonnance motivée susceptible d'appel à l'initiative du seul procureur de la République, porté devant le président de la chambre spéciale des mineurs de la cour d'appel.

M. Michel Rufin a estimé que ce projet de loi apportait une réponse utile au problème de la délinquance juvénile sans mettre en cause les principes fondamentaux de l'ordonnance de 1945, et notamment le rôle pivot du juge des enfants.

Sur sa proposition, la commission a adopté vingt-trois amendements tendant notamment :

- à assurer que, dans le cadre des nouvelles procédures, le juge des enfants disposerait non seulement d'informations suffisantes sur la personnalité du mineur mais aussi sur les moyens appropriés à sa rééducation ;

- à renforcer les droits du mineur poursuivi en assurant une meilleure information de son avocat ;

- à assouplir les conditions du recours à l'ajournement du prononcé de la peine devant le tribunal pour enfants. Après avoir rappelé que plusieurs intervenants avaient, lors de la journée d'auditions du 25 avril, appelé de leurs voeux la création d'un dispositif de « césure » pénale devant le tribunal pour enfants (et non devant le seul juge des enfants), le rapporteur a estimé préférable de répondre à cette attente en facilitant le recours à l'ajournement du prononcé de la peine. Après avoir fait observer que cette procédure permettait à la juridiction de se prononcer rapidement sur la culpabilité tout en s'accordant un délai de réflexion sur la peine dès lors que certaines conditions étaient réunies (reclassement du coupable en voie d'être acquis, dommage causé en voie d'être réparé et trouble résultant de l'infraction sur le point de cesser), il a été suivi dans sa proposition consistant à permettre au tribunal pour enfants d'ajourner le prononcé de la peine dès lors que la personnalité du mineur laisserait espérer sa rapide réinsertion.

Ce projet de loi sera examiné en séance publique les mardi 14 et mercredi 15 mai 1996.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Les relations entre les jeunes et les adultes sont depuis longtemps marquées du sceau de l'ambivalence : avenir de la société, et donc porteur d'espoir, le jeune est également considéré comme un sujet de trouble, d'indiscipline, de mise en cause des valeurs inculquées.

Notre époque n'échappe pas à cette réalité séculaire. Aujourd'hui comme hier, l'adolescent inquiète, voire dérange.

Mais les adultes ne portent-ils pas eux-mêmes une part de responsabilité de la délinquance juvénile ? Personne reconnue comme « particulièrement vulnérable » par le code pénal, le jeune n'est-il pas avant tout la victime des maux de notre société, tels que chômage, exclusion, désunion familiale, crise du système éducatif ?

La question est fondamentale car on ne saurait trouver des solutions à la délinquance juvénile sans en avoir bien perçu les véritables causes.

De même, il convient de prendre la mesure du bien-fondé d'affirmations récurrentes sur ce sujet telles que : « la délinquance des mineurs est en constante augmentation », « elle prend des formes de plus en plus violentes », « elle est le fait d'individus toujours plus jeunes et pour lesquels elle devient une délinquance d'habitude »...

C'est pour mieux en analyser les causes, apprécier son évolution et les solutions susceptibles d'être apportées à l'épineux problème de la délinquance juvénile, que votre commission, à l'initiative de son président, M. Jacques Larché, a procédé à une journée d'auditions publiques le jeudi 25 avril 1996.

Le problème de la délinquance des mineurs ne se limitant pas à la procédure pénale, ni même au droit en général, elle a a ainsi souhaité entendre des personnes venant d'horizons divers. Outre M. Jacques Toubon, Garde des Sceaux, ministre de la justice, sont intervenus devant elle non seulement des juristes spécialisés dans le droit des mineurs (magistrats, avocats), mais également des éducateurs, des enseignants, des policiers et des membres du corps préfectoral.

Les différentes interventions (dont le compte-rendu fera l'objet d'un rapport d'information ; Sénat 1995-1996, n° 343), ainsi que les auditions auxquelles a procédé votre rapporteur, ont mis en avant un très large consensus sur la nécessité de conserver l'esprit général de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, caractérisé par ce que M. le Garde des Sceaux a appelé « le primat de l'éducatif ».

On ne saurait pour autant considérer l'ordonnance de 1945 comme un texte intangible, insusceptible de modifications. Bien au contraire, il appartient au législateur d'en préserver les principes fondamentaux en adaptant ses dispositions à l'évolution de la société.

Or, force est de constater que, depuis plusieurs années, la délinquance juvénile connaît une véritable mutation qui devait, tôt ou tard, poser la question de l'adaptation de l'ordonnance de 1945.

Les policiers, les magistrats et les éducateurs, auxquels votre rapporteur tient à rendre le plus grand hommage, n'ont pas ménagé leurs efforts pour faire face à cette évolution.

Le Gouvernement a fait de la protection judiciaire de la jeunesse l'une de ses priorité.

Aujourd'hui, c'est au législateur qu'il est demandé d'intervenir afin de doter la justice des mineurs de nouveaux instruments lui permettant de s'adapter à une « nouvelle donne » sociale dans le respect des principes fondamentaux de l'ordonnance de 1945.

I. LES PRINCIPES DIRECTEURS DE L'ORDONNANCE DU 2 FÉVRIER 1945

En vertu de l'article 122-8 du nouveau code pénal, « les mineurs reconnus coupables d'infractions pénales font l'objet de mesures de protection, d'assistance, de surveillance et d'éducation dans les conditions fixées par une loi particulière » .

Cette loi, bien antérieure à l'entrée en vigueur du nouveau code pénal, est l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante.

Allant au-delà de l'édiction de mesures particulières, cette ordonnance se présente comme un « quasi-code » du droit pénal des mineurs, regroupant aussi bien des dispositions de fond que de procédure -et qui, nonobstant ces dispositions de procédure, pourrait utilement être intégrée au sein du code pénal dont on rappellera qu'il contient un livre V consacré au droit pénal spécial-. C'est donc avec quarante ans d'avance que la France a consacré dans son droit interne le principe fondamental énoncé par l'Assemblée nationale des Nations-Unies le 29 novembre 1985 dans « l'Ensemble des règles minima des Nations-Unies concernant l'administration de la justice pour mineurs » (règles de Beijing) : « on s'efforcera d'établir, dans chaque pays, une série de lois, règles et dispositions expressément applicables aux délinquants juvéniles et des institutions et organismes chargés de l'administration de la justice pour mineurs » .

Comme l'a rappelé M. Christian Kulyk, juge d'instruction à Montbelliard, lors de son audition par votre Commission, l'ordonnance de 1945 est un « modèle de protection » en ce qu'elle vise avant tout à prendre en considération la personnalité du mineur (par opposition au « modèle de justice » dans lequel est prioritairement considérée l'infraction commise).

A. UNE PROCÉDURE PRENANT EN COMPTE LA SPÉCIFICITÉ DU MINEUR

Le traitement judiciaire du mineur délinquant, adulte en devenir, nécessite une approche particulière, permettant de prendre en considération la spécificité de sa personnalité. Aussi la connaissance des affaires impliquant un mineur relève-t-elle en priorité de magistrats spécialisés, et notamment du juge des enfants. La procédure fait également intervenir un service spécialisé, le service éducatif auprès du tribunal (SEAT), et garantit au mineur poursuivi des droits particuliers.

1. Une procédure confiée à des magistrats spécialisés

Créé dès 1945, le juge des enfants est un magistrat spécialisé. Véritable pivot de l'ordonnance de 1945, il est, aux termes de l'article L.532-1 du code de l'organisation judiciaire, « choisi compte tenu de l'intérêt qu'il porte aux questions de l'enfance et de ses aptitudes ». Des sessions de formation sont organisées par le Centre de recherche interdisciplinaire de Vaucresson.

Clé de voûte de l'ordonnance de 1945, il peut juger une affaire qu'il a instruite, par dérogation au principe de la séparation des fonctions d'instruction et des fonctions de jugement. Il exerce également les fonctions du juge de l'application des peines pour les mineurs.

a) L'instruction

En vertu de l'article 5 de l'ordonnance, « aucune poursuite ne pourra être exercée en matière de crime contre les mineurs sans information préalable.

En cas de délit, le procureur de la République en saisira, soit le juge d'instruction, soit par voie de requête le juge des enfants et, à Paris, le président du tribunal pour enfants.

(...)

En aucun cas, il ne pourra être suivi contre le mineur par les procédures prévues aux articles 393 à 396 du code de procédure pénale ou par voie de citation directe ».

L'instruction d'une affaire mettant en cause un mineur relève donc soit du juge des enfants, soit d'un juge d'instruction.

Il convient de souligner que, dans cette dernière hypothèse, c'est encore un magistrat spécialisé dans les problèmes des mineurs qui intervient. De même, le ministère public est représenté par un magistrat du parquet spécialisé. C'est ce qui résulte des termes de l'article L.522-6 du Code de l'organisation judiciaire : « au sein de chaque tribunal de grande instance dans le ressort duquel le tribunal pour enfant a son siège, un ou plusieurs juges d'instruction désignés par le premier président sur la proposition du procureur général et un ou plusieurs magistrats du parquet désignés par le procureur général sont chargés spécialement des affaires concernant les mineurs » .

La répartition des compétences entre le juge des enfants et le juge d'instruction obéit aux règles suivantes :


• en cas de crime, le juge d'instruction dispose d'une compétence exclusive ;


• en cas de délit, le juge d'instruction a une compétence concurrente avec le juge des enfants. Le procureur de la République dispose d'un libre choix. En pratique, le juge des enfants est le plus souvent saisi afin de lui permettre de connaître le mineur -qu'il est appelé à juger- le plus tôt possible.

Le juge d'instruction intervient plutôt dans les affaires complexes pour lesquelles la recherche de la vérité nécessite de nombreuses investigations.

Le contrôle de l'instruction relève de la chambre d'accusation au sein de laquelle doit siéger le conseiller délégué à la protection de l'enfance.

b) Le jugement

Comme l'instruction, il relève d'une juridiction spécialisée :

1.- En matière de crime

En cas de crime commis par un mineur de seize ans au moins, l'affaire relève de la cour d'assises des mineurs (article 20 de l'ordonnance).

Comme pour les majeurs, cette juridiction comprend un jury de neuf jurés tirés au sort.

Des dispositions ont été prévues pour assurer une certaine spécialisation des magistrats :

- les fonctions du ministère public sont remplies par le procureur général ou un magistrat du parquet spécialement chargé des affaires de mineurs ;

- les assesseurs sont en principe des juges des enfants.

Pour ce qui est des crimes commis par les mineurs de seize ans, la juridiction compétente est le tribunal pour enfants.

2.- En matière de délit

En matière délictuelle, le jugement est prononcé soit par le juge des enfants soit par le tribunal pour enfants.

Cette dernière juridiction, présidée par le juge des enfants, comprend deux assesseurs choisis parmi les personnes « qui se sont signalées par l'intérêt qu'elles portent aux questions de l'enfance et par leurs compétences » (article L.522-3 du code de l'organisation judiciaire).

Aux termes de l'article 8 de l'ordonnance, c'est au juge des enfants qu'il appartient de décider s'il juge le mineur en chambre du conseil ou s'il le renvoie devant le tribunal. Cette décision est prise en fonction de la mesure envisagée, seul le tribunal pour enfants pouvant prononcer les sanctions les plus graves, et notamment une condamnation pénale (article 2 de l'ordonnance).

Les décisions du juge des enfants et du tribunal sont susceptibles d'appel. Dans les cours d'appel où il existe plusieurs chambres, une chambre spéciale est formée, présidée par le conseiller délégué à la protection de l'enfance.

2. Les services éducatifs auprès des tribunaux

En 1987, un service éducatif auprès du tribunal (SEAT) a été institué auprès de chaque tribunal de grande instance pourvu d'un tribunal pour enfants.

Ces structures, qui comprennent notamment des éducateurs, sont chargées d'une fonction consultative. En vertu de l'article 12 de l'ordonnance, le SEAT « établit, à la demande du procureur de la République, du juge des enfants ou de la juridiction d'instruction, un rapport écrit contenant tous renseignements utiles sur la situation du mineur ainsi qu'une proposition éducative » . Au surplus, le SEAT « est obligatoirement consulté avant toute réquisition ou décision de placement en détention provisoire du mineur ou de prolongation de la détention provisoire » .

3. Une protection renforcée des droits du mineur poursuivi

La procédure applicable aux mineurs délinquants se caractérise notamment par un strict encadrement du recours à la garde à vue et à la détention provisoire et par certaines spécificités par rapport aux majeurs en ce qui concerne les droits de la défense.

a) La garde à vue

Selon l'article 4 de l'ordonnance, le mineur de treize ans (c'est-à-dire âgé de moins de treize ans) ne peut être placé en garde à vue.

Ce principe est absolu pour les mineurs de dix ans. En revanche, entre dix et treize ans, le mineur peut être retenu à la disposition d'un officier de police judiciaire avec l'accord préalable et sous le contrôle d'un magistrat du parquet ou d'un juge d'instruction spécialisé dans la protection de l'enfance ou d'un juge des enfants. Encore convient-il de préciser qu'une telle décision ne peut être prise qu'à titre exceptionnel et s'il existe des indices graves et concordants laissant présumer que le mineur a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d'au moins sept ans d'emprisonnement. Cette retenue, d'une durée maximale de dix heures, peut exceptionnellement être prolongée pour dix heures au maximum.

S'il a entre treize et seize ans, le mineur peut faire l'objet d'une garde à vue mais celle-ci ne peut être prolongée en cas de délit puni de moins de cinq ans d'emprisonnement.

Quel que soit son âge, le mineur placé en garde à vue (ou retenu) dispose de garanties particulières par rapport à un majeur et notamment de la faculté de s'entretenir avec un avocat dès le début de la mesure.

b) La détention provisoire

La détention provisoire est interdite pour les mineurs de treize ans ainsi que, en matière correctionnelle, pour les mineurs de treize à seize ans.

Lorsque la détention provisoire est possible, elle est limitée dans le temps dans les conditions suivantes :

Matière

Age du mineur

Durée maximale
de la détention provisoire

Délit

Moins de 16 ans

Détention provisoire impossible

16 ans au moins

- un mois + une prolongation d'un
mois si la peine encourue n'excède pas 7 ans d'emprisonnement

- un an (prolongation comprise) dans les autres cas

Crime

13-16 ans

- 6 mois + 6 mois de prolongation

16 ans au moins

- deux ans (prolongation comprise)

c) La protection des droits de la défense du mineur poursuivi

Aux termes de l'article 4-1 de l'ordonnance, « le mineur poursuivi doit être assisté d'un avocat ». Par dérogation à l'article 114 du code de procédure pénale, le mineur ne peut renoncer totalement au bénéfice d'un

conseil : l'article 10, alinéa 1, précise qu'« à défaut de choix d'un défenseur par le mineur ou ses représentants légaux le juge d'instruction ou le juge des enfants fera désigner par le bâtonnier un avocat d'office » .

Par ailleurs, les parents du mineur, son tuteur, ou la personne ou le service auquel il est confié sont avisés des poursuites par le juge d'instruction ou le juge des enfants.

B. LES MESURES SUSCEPTIBLES D'ÊTRE PRONONCÉES À L'ÉGARD DES MINEURS DÉLINQUANTS : LE PRIMAT DE L'ÉDUCATIF

1. Le caractère exceptionnel de la sanction pénale

Selon l'article 2 de l'ordonnance de 1945, le recours aux sanctions pénales contre les mineurs doit revêtir un caractère exceptionnel. Seul le tribunal pour enfant est habilité à les prononcer, à l'exclusion du juge des enfants.

Pour les mineurs de treize ans, le législateur (ordonnance de 1945 et article 122-8, alinéa 2, du code pénal) interdit purement et simplement le prononcé de toute sanction pénale.

Les mineurs de plus de treize ans peuvent se voir infliger des sanctions pénales mais bénéficient en principe (et de manière absolue pour les treize-seize ans) de l'excuse de minorité en vertu de laquelle :

- le tribunal pour enfants et la cour d'assises des mineurs ne peuvent prononcer une peine privative de liberté supérieure à la moitié de la peine fixée ou à vingt ans de réclusion si la peine fixée est la réclusion à perpétuité (article 20-2 de l'ordonnance) ;

- les mêmes juridictions ne peuvent prononcer une peine d'amende d'un montant supérieur à la moitié de l'amende encourue ou excédant 50.000 F.

L'ordonnance écarte en outre, en cas de condamnation d'un mineur, les dispositions relatives à la période de sûreté et l'interdiction du territoire français. Elle précise qu'aucune interdiction, déchéance ou incapacité ne peut résulter de plein droit d'une condamnation pénale prononcée à l'encontre d'un mineur.

Les mineurs âgés d'au moins seize ans peuvent également être condamnés à exécuter un travail d'intérêt général dans les conditions et suivant les modalités prévues pour les adultes (durée comprise entre quarante et deux-cent quarante heures...).

2. Une large panoplie de mesures éducatives

L'article 8 de l'ordonnance de 1945 envisage six séries de mesures susceptibles d'être prononcées par le juge des enfants :


• La dispense de peine (article 8-2°) : elle intervient, après que le mineur ait été déclaré coupable, « s 'il apparaît que son reclassement est acquis, que le dommage causé est réparé et que le trouble résultant de l'infraction a cessé » ;


• L'admonestation (article 8-3°), qui peut également être prononcée en cas de contravention (article 21) ;


• La remise aux parents, au tuteur, à la personne qui avait la garde du mineur ou à une personne digne de confiance (article 8-4°) ;


• La mise sous protection judiciaire (article 8-5°), à condition que le mineur ait au moins seize ans ;


• Le placement (article 8-6°), qui peut intervenir soit dans un établissement public ou privé (d'éducation ou de formation professionnelle) habilité, soit dans un établissement médical ou médico-pédagogique habilité, soit dans un internat approprié aux mineurs délinquants d'âge scolaire, soit auprès du service de l'assistance à l'enfance.


• La liberté surveillée (articles 8, dernier alinéa, et 19) qui présente la particularité de pouvoir accompagner n'importe quelle autre mesure.

3. La médiation-réparation

Consacrée par la loi du 4 janvier 1993, la médiation-réparation, qui fait l'objet de l'article 12-1 de l'ordonnance de 1945, est une mesure particulière de responsabilisation du mineur par rapport à l'acte commis : elle débouche en effet sur une mesure d'aide ou de réparation à l'égard de la victime ou dans l'intérêt de la collectivité.

Cette mesure peut être proposée :

- par le procureur de la République ;

- par la juridiction d'instruction ;

- par la juridiction de jugement.

Dans les deux premiers cas, la mesure est subordonnée à l'accord du mineur et des titulaires de l'exercice de l'autorité parentale. Dans tous les cas, une mesure d'aide ou de réparation à l'égard des la victime ne peut être prononcée qu'avec l'accord de celle-ci.

Il convient de souligner la faculté de proposer cette mesure avant même l'engagement des poursuites -faculté qui se situe dans la droite ligne des règles de Beijing préconisant d'éviter, dans toute la mesure du possible, le recours à une procédure judiciaire pour les mineurs délinquants-.

Certaines critiques ont pourtant été émises à rencontre de ce procédé, considéré par certains comme une sorte de « délégation » de la justice des mineurs au parquet.

La médiation-réparation présente néanmoins des avantages essentiels : elle revêt un caractère pédagogique indéniable puisque, en participant activement à la réparation du dommage qu'il a causé, le délinquant prend conscience de l'existence d'interdits sociaux et du risque de sanction en cas de violation de la loi ; elle permet en outre aux victimes d'obtenir une réparation adaptée au préjudice subi dans un délai relativement rapide.

Telles sont les raisons qui ont conduit le législateur à mettre l'accent sur cette forme de réponse à la délinquance juvénile en fixant pour objectif, dans la loi de programme du 6 janvier 1995, un nombre annuel de médiations-réparations de 9.000.

II. UN CONTEXTE SOCIAL EN MUTATION

Les auditions publiques auxquelles a procédé votre Commission ainsi que les informations statistiques fournies à votre rapporteur ont mis en avant l'évolution récente de la délinquance juvénile, qui se caractériserait non seulement par une augmentation, mais également par un changement de nature. Au-delà de ce constat d'ensemble, il est également possible, quoique de manière moins nette, de s'interroger sur la réponse judiciaire apportée à la délinquance juvénile.

A. UNE DÉLINQUANCE EN ÉVOLUTION

1. L'évolution quantitative : le sentiment d'une augmentation de la délinquance juvénile

Les statistiques fournies à votre rapporteur mettent en avant une tendance de long terme à une augmentation du nombre de mineurs mis en cause par les services de police et de gendarmerie en métropole : 126 149 en 1995 contre 72 742 en 1973.

Force est néanmoins de constater le caractère quelque peu irrégulier de cette évolution qui, comme le retrace le tableau ci-après, résulte d'alternances d'années diverses, marquées tantôt par des augmentations, tantôt par des diminutions.

Évolution du nombre de mineurs mis en cause
par la police et la gendarmerie

Année

Nombre de

mineurs mis en

cause pour crime

ou délit

Évolution

( %)

Pourcentage des

mineurs dans le

total des personnes

mises en cause

1986

90 501

11,2

1987

93 470

+ 3,3

12

1988

92 143

-1,4

12

1989

94 302

+ 2,3

12,3

1990

98 284

+ 4,2

13

1991

101 631

+3,4

13,2

1992

98 864

-2,7

13,9

1993

92 212

-6,7

13,5

1994

109 338

+ 18,5

14,1

1995

126 149

+ 15,4

15,9

Le sentiment d'une augmentation de la délinquance juvénile peut néanmoins résulter d'une double évolution :

- sur une courte période, les années 1994 et 1995 ont été caractérisées par un fort accroissement du nombre de mineurs mis en cause (+36,8 % en deux ans) ;

- sur plus long terme, et à l'exception de l'année 1993, la part des mineurs dans le total des personnes mises en cause pour crime ou délit ne cesse de croître (+ 4,7 points en dix ans).

Les auditions publiques auxquelles a procédé votre Commission ont permis de mettre en avant plusieurs explications à cette évolution parmi lesquelles ont tout particulièrement été évoquées la carence éducative des parents et l'insuffisance manifeste de moyens dont disposent les institutions. Toutefois, au-delà de ce constat quantitatif, il convient également de se pencher sur l'évolution qualitative de la délinquance juvénile au cours des dernières années.

2. L'évolution qualitative

a) Une délinquance juvénile de plus en plus marquée par la violence.

La principale forme de la délinquance des mineurs demeure constituée par l'ensemble vols-recels. Mais, alors que les jeunes poursuivis pour ces infractions représentaient 73,5 % de l'ensemble des mineurs mis en cause en 1988, ils ne représentaient plus que 66 % de cet ensemble en 1994.

Inversement, le nombre d'infractions contre les personnes n'a cessé de croître pour représenter en 1994 8,9 % des crimes et délits imputés aux mineurs contre 5,9 % en 1973. Le tableau suivant met d'ailleurs en avant une tendance inquiétante à l'accélération de ce phénomène au cours des dernières années

: Mineurs mis en cause par les services de police et de gendarmerie pour crimes et délits contre les personnes (en métropole)

Années

Nombre

% parmi l'ensemble
des mineurs mis en cause

1988

6 571

7,1

1989

7 195

7,6

1990

7 113

7,2

1991

8 012

7,9 %

1992

8 552

8,6

1993

8 972

8,4

1994

11 207

8,9

Au total, le ministère de l'Intérieur évalue à 57,56 % l'augmentation du nombre de crimes et délits contre les personnes commis par des mineurs sur la période 1988-1994.

b) Une délinquance juvénile de plus en plus difficile à appréhender.

Sur le plan qualitatif, l'évolution de la délinquance juvénile est marquée par quatre autres caractères qui la rende plus difficile à appréhender.

1.- Une délinquance plus précoce

Les graphiques figurant ci-après mettent en évidence la part croissante prise par les moins de seize ans dans l'ensemble de la délinquance juvénile, 1988 apparaissant à cet égard comme une année charnière. Qu'il s'agisse des crimes, des délits ou des contraventions, leur part parmi les mineurs condamnés à plus que doublé durant la période 1987-1993.

MINEURS CONDAMNÉS POUR CRIMES ET DÉLITS

RÉPARTITION PAR TRANCHE D'ÂGE ET PAR TYPE D'INFRACTION

Mineurs de moins de 16 ans (en % de l'ensemble des mineurs condamnés)

Mineurs de 16 à 18 ans (en % de l'ensemble des mineurs condamnés)

Ce rajeunissement de la délinquance des mineurs provient en fait de la tranche d'âge 13-16 ans, la seule à donner lieu à une augmentation du nombre de condamnations sur la période 1984-1994 (comme le démontre le tableau ci-après réalisé à partir des données du casier judiciaire national).

Nombre de mineurs condamnés

Âge

1984

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

Moins de 13 ans

toutes infractions

3.343

3.170

2.743

1.981

768

1.144

1.353

1.342

1.350

1.402

dont délits

3.263

3.094

2.684

1.940

734

1.094

1.308

1.289

1.291

1.321

13-16 ans

toutes infractions

10.864

10.813

10.402

8.172

6.986

11.315

14.332

14.947

15.252

13.625

dont délits

10.487

10.370

9.978

7.885

6.678

10.758

13.590

14.205

14.556

12.880

16-18 ans

toutes infractions

44.642

47.799

44.851

34.199

9.953

18.356

22.829

24.054

24.120

17.691

dont délits

42.267

44.650

42.096

32.172

9.364

16.986

21.201

22.436

22.589

16.513

2.- Le développement d'une délinquance d'habitude

Aujourd'hui, la délinquance des mineurs est largement le fait de multirécidivistes ou -terme plus approprié pour ceux qui n'ont pas fait l'objet d'une condamnation- de « multi-réitérants ».

Bien entendu, il convient de noter que, comme l'ont rappelé plusieurs des personnes entendues par votre commission des Lois, dans 70 % des cas la décision du juge des enfants est suffisamment ressentie par le mineur pour l'empêcher de récidiver. Encore convient-il que cette décision intervienne, et dans des délais point trop éloignés de la commission de l'infraction. Par ailleurs, même s'ils sont peu nombreux, les mineurs multiréitérants représentent bien le « noyau dur » de la délinquance juvénile.

Cette situation ne laisse pas d'inquiéter dans la mesure où elle génère un phénomène de « caïdat », dans lequel la légitimité du chef de bande est proportionnelle à son « palmarès ».

3.- Une délinquance moins isolée

La délinquance juvénile est de moins en moins le fait d'individus isolés. Elle prend davantage la forme d'une délinquance commise en réunion, par des bandes organisées. Cette évolution rend plus difficile la connaissance du mineur, de sa personnalité.

4.- La multiplication des « incivilités »

Parallèlement aux actes de violence, des comportements moins graves (insultes, infractions à la circulation, fraudes aux transports, petites dégradations...) peuvent, par leur répétition, générer un sentiment d'insécurité. Or, ces comportements, appelés parfois « incivilités », tendent à se multiplier, même s'il est difficile de mesurer avec certitude l'ampleur de ce phénomène.

B. LE SENTIMENT D'UNE RÉPONSE JUDICIAIRE INADAPTÉE

1. La tendance à la diminution des mesures éducatives

Même si elle admet la possibilité de prononcer des mesures pénales, l'ordonnance de 1945 considère que celles-ci doivent demeurer l'exception. Or, le casier judiciaire national met en évidence une tendance à l'augmentation continue de la part de ces mesures parmi l'ensemble des décisions prononcées pour crime ou délit.

Mesures prononcées a l'égard
des mineurs condamnés pour crimes et délits

1990

1991

1992

1993

Mesures pénales

16 705

17 733

20 208

14 701

42,6 %

43,2 %

48,6 %

45 %

Mesures éducatives

22 526

23 288

21 383

17 999

57,4 %

56,8 %

51,4 %

55 %

Ensemble des décisions

39 231

41 021

41 591

32 700

Certes, les mesures éducatives demeurent majoritaires et ont même connu une progression relative en 1993. Mais le taux de 55 % enregistré cette dernière année ne saurait occulter la sensible baisse de ces mesures sur long terme : près des trois-quart des décisions au début des années 1960 ; deux tiers au début des années 1990 ; plus de 60 % en 1987 ; 55 % en 1993.

Parmi les sanctions pénales prononcées contre les mineurs, les peines privatives de liberté occupent une place prépondérante : 11 776 décisions (dont 8 978 avec sursis total) en 1993, contre 1829 peines d'amende, 662 travaux d'intérêt général et 402 dispenses de peine.

S'agissant des mesures éducatives, au nombre de 17 999 en 1993, elles sont dominées par l'admonestation (12 037) et la remise à personne (5 433), loin devant la mise en liberté surveillée (304), la mise sous protection judiciaire (119) et le placement dans un établissement (99).

Paradoxalement, cet accroissement relatif des sanctions pénales n'empêche pas le développement d'un sentiment d'impunité des mineurs délinquants.

2. Le développement d'un sentiment d'impunité des mineurs délinquants

Dans un rapport publié en octobre 1995, le Syndicat des commissaires et hauts fonctionnaires de la police nationale (SCHFPN) dénonçait « l'inadaptation de la réponse judiciaire à l'égard du mineur délinquant » . Selon cette organisation, « cette impunité judiciaire conforte le jeune dans l'idée que tout est permis, favorise sa persistance dans un comportement délinquant, accroît son arrogance à l'égard des adultes en général et de tout détenu d'une parcelle de l'autorité en particulier » .

S'il paraît incontestable que l'impunité est un facteur essentiel de la délinquance juvénile, encore convient-il de souligner que son évolution apparaît particulièrement difficile à appréhender.

Cela étant, et même si l'on ne peut conclure d'une manière certaine à son augmentation, l'impunité judiciaire -ou tout au moins le sentiment d'impunité- existe bien et constitue l'un des facteurs essentiels de la délinquance juvénile.

a) Une évolution difficile à appréhender

Selon certains, on ne saurait affirmer sans nuances l'existence et le développement d'un phénomène d'impunité des jeunes délinquants, ne serait-ce qu'en raison du nombre relativement élevé des mineurs incarcérés : 561 au 1er janvier 1996, contre 525 au 1er janvier 1990 (mais 835 en 1985).

Néanmoins, le nombre de jeunes détenus ne peut être considéré comme un critère satisfaisant d'appréciation de la réponse judiciaire à la délinquance car l'incarcération n'est, précisément, qu'une solution parmi plusieurs autres, au demeurant exceptionnelle. Au surplus, l'emprisonnement est beaucoup moins souvent prononcé que l'emprisonnement avec sursis total.

Mais surtout, l'appréciation de la réponse sociale en fonction du seul nombre de condamnations ne peut donner qu'un aperçu parcellaire de la réalité et ce pour deux raisons essentielles :

- d'une part, ce nombre de condamnations doit lui-même être rapporté au nombre d'infractions imputées à des mineurs ;

- d'autre part, la condamnation, quelle que soit sa forme (mesure éducative ou sanction pénale), n'est pas la seule réponse à la délinquance qui peut notamment prendre la forme d'un classement sous conditions.

Cela étant, force est de constater, sur le long terme, un phénomène de ciseaux caractérisé par une augmentation du nombre de mineurs mis en cause -ci-dessus évoquées- et par une diminution certaine du nombre de condamnations pour délit que révèle le tableau ci-dessous, tiré du Casier judiciaire national (s'agissant des crimes, le nombre annuel de condamnations est de l'ordre de 200).

Mineurs condamnés pour délits

1984

56017

1985

58 114

1986

54 758

1987

41 997

1988

16 776

1989

28 838

1990

36 099

1991

37 930

1992

38 436

1993

30 714

Ainsi, depuis 1986, le nombre de mineurs condamnés pour crimes ou délits a connu une chute de 44 % alors même que le nombre de mineurs mis en cause a augmenté de 40 % .

Dans ces conditions et même s'il est difficile de la mesurer avec précision, il n'est pas erroné de parler d'une augmentation de l'impunité des mineurs délinquants.

b) Les facteurs d'impunité

Sans prétendre à l'exhaustivité, on peut évoquer deux séries de facteurs expliquant le développement de l'impunité judiciaire des mineurs délinquants.

1.- La « loi du silence »

Le premier facteur tient à ce que le rapport précité du SCHFPN appelle une « loi du silence » . S'agissant plus particulièrement de la violence à l'école, les commissaires avancent trois explications à ce phénomène :

- le silence du collégien victime qui ne souffle mot du délit ni à ses parents ni aux enseignants ;

- la crainte de représailles éprouvée par la victime et ses parents (facteur que votre rapporteur considère comme étroitement lié au précédent). Ce facteur a notamment été évoqué dans un rapport de novembre 1993 du groupe de réflexion justice-ville (alors composé de cinq parlementaires : Mme de Veyrinas et MM. Cardo, Delalande, Devedjian et Raoult) qui a mis l'accent sur l'existence de « zones de non droit (...) soumises à la loi de la bande qui s'impose par la violence et la crainte qu'elle inspire » ;

- le silence du corps enseignant qui « rejette sur la responsabilité de la police ce qui s'est passé à l'extérieur » tandis que les chefs d'établissement craindraient une dramatisation inutile et une atteinte à la réputation du lycée ou du collège s'ils prévenaient la police ou leur hiérarchie.

2.- Une réponse judiciaire trop tardive

Ce second facteur tient vraisemblablement à une insuffisante adéquation des moyens de la justice à l'ampleur du défi à relever. Votre rapporteur, actuellement parlementaire en mission auprès du garde des Sceaux sur la protection judiciaire de la jeunesse, a pu notamment constater une pénurie de juges des enfants, souvent surchargés de travail. Cette situation tient avant tout à de nombreuses saisines des juges des enfants par les services sociaux du département dans le domaine de l'enfance en danger.

Cette pénurie de moyens de l'institution judiciaire a été évoquée par plusieurs personnes entendues par votre Commission le 25 avril 1996.

Elle a pour conséquence une sensible augmentation du délai de réponse judiciaire (calculé par la différence entre la date du jugement et la date des faits) comme le retrace le tableau figurant ci-après :

Délai de réponse devant le tribunal pour enfants

(en mois)

1989

1990

1991

1992

8,8

11,3

13,0

14,3

Dans ces conditions, le mineur a le plus souvent « oublié » les faits qui lui sont reprochés et la sanction est alors vidée de sa substance en tant que mesure pédagogique.

III. L'OBJECTIF DU PROJET DE LOI : LA RECHERCHE D'UNE RÉPONSE JUDICIAIRE PLUS RAPIDE DANS LE RESPECT DE L'ESPRIT OU L'ORDONNANCE DE 1945

Le projet de loi soumis à notre examen vise à répondre à l'un des facteurs essentiels du sentiment d'impunité chez les mineurs délinquants ci-dessus évoqué : un excessif décalage dans le temps entre la commission de l'infraction et la réponse judiciaire.

Deux nouvelles procédures sont donc proposées dans le but d'accélérer le cours de la justice des mineurs. Elles constituent autant de dérogations au principe, jusqu'à présent absolu, selon lequel en matière de délinquance juvénile la juridiction de jugement ne peut se prononcer qu'après une information préalable. Elles sont cependant soumises à de strictes conditions destinées à respecter l'esprit de l'ordonnance du 2 février 1945, qui édicté des règles de procédure destinées à avoir la meilleure connaissance de la personnalité du mineur et de son environnement.

A. LA CONVOCATION PAR OFFICIER DE POLICE JUDICIAIRE AUX FINS DE JUGEMENT

La loi du 8 février 1995 a consacré le dispositif dit de « convocation par officier de police judiciaire » (terminologie d'ailleurs impropre car la convocation peut aussi être le fait d'un agent de police judiciaire) : décidée sur instruction du procureur de la République, elle permet un rendez-vous rapide devant le juge des enfants pour la mise en examen du mineur.

Le projet de loi propose de généraliser son champ d'application : la convocation par officier de police judiciaire pourrait intervenir non seulement pour la mise en examen mais aussi pour le jugement du mineur.

1. Les conditions du recours à la convocation par officier de police judiciaire aux fins de jugement

Le recours à la convocation par officier de police judiciaire aux fins de jugement ne pourrait être décidé qu'en matière délictuelle et pour les affaires simples.

Elle supposerait en effet tout d'abord qu'il existe contre le mineur des charges suffisantes d'avoir commis un délit. À défaut, le procureur de la République ne pourrait y recourir.

Cette nouvelle procédure supposerait en outre que les faits ne nécessitent aucune investigation supplémentaire. C'est au juge des enfants qu'il appartiendrait d'apprécier cette condition.

Le projet de loi tire d'ailleurs la conséquence logique du fait que la convocation par officier de police judiciaire ne pourrait être utilisée que pour les affaires simples en précisant que le juge des enfants ainsi saisi procède selon la procédure traditionnelle si la complexité de l'affaire nécessite des investigations approfondies.

2. Les modalités du jugement rendu sur convocation par officier de police judiciaire

a) Une décision rapide sur la prévention et sur l'action civile

Le principal intérêt de la convocation par officier de police judiciaire aux fins de jugement serait de permettre une décision rapide sur la culpabilité du mineur. Celui-ci prendrait donc plus aisément conscience d'avoir violé la loi. Son attention serait rapidement appelée sur l'existence d'interdits qu'il convient de ne pas transgresser.

En effet, le juge des enfants -après avoir constaté l'identité du mineur et s'être assuré qu'il est assisté d'un avocat- statuerait sur la prévention et, le cas échéant, sur l'action civile.

b) La décision sur la mesure à prendre

La décision sur la sanction -qui, prise par hypothèse par le juge des enfants, ne pourrait que consister en une mesure éducative- pourrait intervenr soit lors de la décision sur la prévention, soit ultérieurement. Dans cette dernière situation, il y aurait donc ce qu'il est désormais convenu d'appeler une « censure pénale » .

1.- Le prononcé d'une mesure lors de la décision sur la culpabilité

Saisi selon le mécanisme de la convocation par officier de police judiciaire, le juge des enfants pourrait prononcer une mesure à l'égard du mineur dès la décision sur la culpabilité sous la double condition :

- de disposer de renseignements suffisants sur la personnalité du mineur ;

- de ne prononcer qu'un simple rappel à la loi, à savoir une dispense de peine, une admonestation, une remise aux parents ou au tuteur, ou une mesure de réparation à l'égard de la victime, avec l'accord de celle-ci, ou dans l'intérêt de la collectivité.

2.- La « césure » pénale

Elle interviendrait :

- soit lorsque le juge des enfants entendrait prononcer une mesure autre qu'un rappel à la loi ou une réparation (c'est-à-dire lorsqu'il envisagerait de prononcer la mise sous protection judiciaire ou le placement du mineur) ;

- soit lorsque le juge des enfants estimerait ne pas disposer d'informations suffisantes sur la personnalité du mineur.

Il y aurait alors « césure » du procès pénal à savoir un décalage dans le temps entre, d'une part, la déclaration de culpabilité et, d'autre part, le prononcé de la sanction, qui devrait intervenir néanmoins dans les six mois. Durant cette période, le juge des enfants pourrait ordonner trois séries de mesures provisoires à l'égard du mineur : son placement dans un établissement, une mesure de liberté surveillée préjudicielle et une activité d'aide ou de réparation à l'égard de la victime, avec son accord, ou dans l'intérêt de la collectivité.

Comme l'a fait observer le Président Dreyfus-Schmidt lors des auditions publiques auxquelles a procédé votre commission, ce nouveau dispositif n'est pas sans rappeler celui de l'ajournement du prononcé de la peine, prévu par les articles 132-58 et suivants du code pénal. Il s'en distingue cependant par sa souplesse, l'ajournement -auquel ne peut d'ailleurs pas recourir le juge des enfants, l'ajournement ne figurant pas parmi les mesures énumérées à l'article 8 de l'ordonnance- supposant de strictes conditions (reclassement du délinquant en voie d'être acquis, dommage causé en voie d'être réparé...).

B. LA COMPARUTION À DÉLAI RAPPROCHÉ

Cette procédure à vocation à s'appliquer aux mineurs dont la personnalité est connue en raison de procédures antérieures et lorsque l'affaire, sans être complexe, peut aussi bien donner lieu à une mesure éducative qu'à une sanction pénale.

En effet, il ne pourrait tout d'abord y être recouru, sur requête du procureur de la République, que si trois conditions étaient réunies :

- que l'affaire soit de nature délictuelle ;

- que des investigations sur les faits ne soient pas nécessaires ;

- que les diligences et investigations prévues par l'article 8 de l'ordonnance de 1945 (à savoir celles permettant de connaître le mineur et son environnement ainsi que les moyens appropriés à sa rééducation) aient été effectuées, le cas échéant à l'occasion d'une procédure antérieure, et qu'elles soient suffisantes. La procédure antérieure pourrait aussi bien être de nature judiciaire qu'administrative.

Si ces conditions étaient réunies, le procureur de la République pourrait requérir du juge des enfants la comparution à délai rapproché devant la juridiction de jugement (tribunal pour enfants ou chambre du conseil) dans un délai compris entre un et trois mois.

Le mineur serait alors immédiatement présenté au juge des enfants qui déciderait s'il fait ou ne fait pas droit aux réquisitions :

- si le juge des enfants fait droit aux réquisitions du procureur de la République, il lui notifie le lieu, la date et l'heure de l'audience, en avise les représentants légaux du mineur et peut, jusqu'à cette date, ordonner des mesures telles que notamment la réalisation d'une enquête de personnalité ou d'une enquête sociale, le contrôle judiciaire, la détention provisoire ou la liberté surveillée ;

- si le juge des enfants ne fait pas droit aux réquisitions du procureur de la République, il rend une ordonnance motivée. Celle-ci peut être frappée d'appel, à la seule initiative du procureur de la République, au plus tard le jour suivant sa notification. L'appel est alors porté devant le président de la chambre spéciale des mineurs de la cour d'appel qui doit statuer dans le quinze jours. Ce magistrat peut alors soit confirmer l'ordonnance du juge des enfants, soit ordonner la comparution du mineur devant la juridiction de jugement dans un délai qu'il lui appartient de fixer.

Le recours à la comparution à délai rapproché serait donc toujours soumis à l'accord d'un magistrat du siège spécialisé, qu'il s'agisse du juge des enfants ou du président de la chambre spéciale des mineurs.

Par ailleurs, la comparution à délai rapproché pourrait être demandée en cours de procédure par le procureur de la République. Dans ce cas, le juge des enfants aurait cinq jours d'appel dans les mêmes conditions que précédemment. À défaut de décision du juge des enfants dans le délai, le procureur de la République pourrait saisir directement le président de la chambre spéciale des mineurs.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES LOIS

A. L'APPROBATION DE PRINCIPE D'UN PROJET DE LOI RESPECTANT L'ESPRIT DE L'ORDONNANCE DE 1945

Votre commission des Lois considère que le projet de loi soumis à notre examen apporte une réponse utile au problème de la délinquance juvénile sans porter atteinte, en aucune manière, aux principes de l'ordonnance du 2 février 1945.

1. Une réponse utile au problème de la délinquance juvénile

L'accélération du cours de la procédure relative aux mineurs délinquants constitue, aux yeux de votre commission, une réponse utile au problème de la délinquance juvénile. En effet, un intervalle trop long entre la commission d'une infraction et la réponse judiciaire -lorsqu'elle intervient- ne peut que nuire à l'efficacité de la mesure prononcée -quelle qu'elle soit- dans sa dimension éducative :

- intervenant pour des faits dont le mineur n'a en général plus la souvenance, elle perd son utilité pédagogique consistant à faire prendre conscience au délinquant qu'il a méconnu une règle sociale consacrée par la loi ;

- elle peut se révéler inadaptée à la personnalité du délinquant, laquelle aura évolué depuis la commission de l'infraction ;

- tant qu'aucune mesure n'a été prononcée, le primo-délinquant acquiert un sentiment d'impunité et risque fort de devenir un délinquant « multiréitérant ».

À toutes ces considérations concernant le mineur lui-même s'ajoutent le sentiment de la victime -qui se croit oubliée de la justice-, le risque de « démotivation » des policiers et l'exaspération de la collectivité face à ce qu'elle peut parfois considérer comme une « démission de la justice ».

Bien entendu, l'accélération du cours de la justice ne représente qu'une réponse possible parmi de nombreuses autres mesures envisageables. Sur ce point, le projet de loi ne constitue d'ailleurs qu'un élément de l'ensemble dénommé « pacte de relance pour la ville », et qui prévoit notamment la création d'une cinquantaine d'« Unités à Encadrement Éducatif Renforcé » (UEER). Ces structures sont destinées à accueillir quatre ou cinq mineurs en situation particulièrement difficile. Chacune comprendra également quatre ou cinq éducateurs. Les UEER devront, pour reprendre l'expression utilisée par M. le Garde des Sceaux lors de son audition par votre Commission, mettre le jeune dans une « dynamique d'activité » . Il lui sera ainsi appris les règles élémentaires de la vie en société (arriver à l'heure, respecter autrui...) notamment par un accompagnement éducatif, par un suivi psychologique et par la recherche de l'insertion sociale et professionnelle de l'intéressé.

Mais surtout, quelle que soit son utilité, cette accélération des procédures ne saurait être considérée comme une fin en soi. Elle doit en effet permettre la meilleure réalisation possible des objectifs de l'ordonnance de 1945 mais non devenir elle-même un objectif. Aussi, convient-il de s'assurer que le dispositif proposé par le projet de loi ne porte aucunement atteinte aux principes fondamentaux de ce texte, auxquels votre commission des Lois est particulièrement attachée.

2. Le respect des principes de l'ordonnance de 1945

a) Le rôle du juge des enfants

Votre commission considère que le projet de loi ne remet aucunement en cause le rôle de pivot tenu par le juge des enfants dans le dispositif de l'ordonnance de 1945. Il confère certes au parquet un pouvoir de réquisition aux fins de jugement mais, qu'il s'agisse de la convocation par officier de police judiciaire ou de la comparution à délai rapproché (sous réserve, dans ce dernier cas, de la faculté d'appel porté devant le président de la chambre spéciale des mineurs, contrôleur naturel du juge des enfants) la décision de recourir à la procédure accélérée relève en dernier ressort du juge des enfants.

b) La connaissance de la personnalité du mineur

Deux séries de dispositions prévues par le projet de loi garantissent que le juge des enfants statuant selon une procédure accélérée aurait néanmoins une bonne connaissance du mineur :

- d'une part, qu'il s'agisse de la convocation par officier de police judiciaire ou de la comparution à délai rapproché, la consultation préalable du SEAT serait obligatoire ;

- d'autre part, le juge devrait s'assurer que des investigations suffisantes sur la personnalité du mineur auront déjà été effectuées. S'agissant notamment de la comparution à délai rapproché, il lui appartiendra notamment de vérifier que les informations dont il dispose ne sont pas obsolètes compte tenu de la possible évolution de la personnalité du mineur. Cette vérification ne devrait d'ailleurs pas poser de difficultés car cette nouvelle procédure, qui a vocation à s'appliquer aux mineurs multiréitérants, concernera le plus souvent des jeunes faisant l'objet de plusieurs procédures concomitantes et pour lesquels le juge des enfants disposera donc d'informations récentes.

c) Le respect de la priorité donnée à l'éducatif

Le projet de loi se veut un texte de procédure. En aucune manière il ne modifie les mesures susceptibles d'être prononcées à l'égard du mineur.

La convocation par officier de police judiciaire devrait même contribuer à relancer le prononcé des mesures éducatives puisqu'elle ne sera possible que devant le juge des enfants, lequel, rappelons-le, ne peut prononcer de sanctions pénales.

B. LES MODIFICATIONS PROPOSÉES PAR VOTRE COMMISSION

Lors de l'examen du présent projet de loi, votre commission a procédé à un large échange de vues sur la proposition de loi n° 262, tendant à lutter contre la violence dans les établissements scolaires, dont le premier signataire est notre excellent collègue M. Jean-Jacques Hyest. Elle a pris note de l'intention du Gouvernement de publier un décret sanctionnant l'intrusion dans un établissement scolaire par l'amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe. Néanmoins, plusieurs de nos collègues ont estimé qu'un tel comportement ne pouvait être répréhensible pénalement que si le contrevenant avait été animé d'une intention coupable. Aussi ont-ils fait part de leur préférence pour l'institution d'une infraction de nature délictuelle. M. le Président Jacques Larché a suggéré à M. Jean-Jacques Hyest de reprendre sa proposition de loi sous la forme d'un amendement sur lequel votre rapporteur se prononcerait au vu des explications du Gouvernement.

Pour l'heure, votre commission vous soumet vingt-trois amendements poursuivant principalement trois objectifs.

1. L'élargissement du recours à l'ajournement du prononcé de la peine devant le tribunal pour enfants

Même si certaines interrogations ont pu être formulées sur ses modalités d'application (auxquelles s'efforcent de répondre les amendements de votre commission), la plupart des personnes entendues par votre Commission lors de sa journée d'auditions et par votre rapporteur ont approuvé le principe de la césure pénale.

Plusieurs d'entre elles, dont M. Alain Bruel, président du tribunal pour enfants de Paris, ont même appelé de leurs voeux l'extension de cette nouvelle procédure devant le tribunal pour enfants.

Lors de son audition par votre commission des Lois, M. le Garde des Sceaux a déclaré n'avoir aucune objection de principe à une telle extension.

Votre Commission considère elle-même souhaitable d'obtenir une rapide déclaration de culpabilité devant le tribunal pour enfants.

Elle ne vous propose cependant pas d'étendre à cette juridiction le dispositif relatif à la césure pénale, estimant que la superposition de deux procédures forts proches (la césure pénale et l'ajournement) pourrait se révéler source de difficultés.

Afin d'assurer une décision sur la culpabilité tout en offrant au tribunal pour enfants un « délai de réflexion » sur la mesure à prendre, votre commission vous propose d'assouplir les conditions du recours à l'ajournement devant cette juridiction. En effet, s'il est effectivement possible de procéder à l'ajournement du prononcé de la peine devant cette juridiction, le recours à ce procédé est soumis à de strictes conditions qui en limitent la portée (nécessaire présence du prévenu à l'audience, reclassement du coupable en voie d'être acquis, dommage causé en voie d'être réparé...).

Aussi, votre Commission vous propose-t-elle une solution permettant en pratique de donner suite à la suggestion, formulée devant elle à plusieurs reprises, consistant à permettre le recours à la césure pénale devant le tribunal pour enfant. Cette solution consiste à autoriser le recours à l'ajournement dès lors que la personnalité du mineur permettra sa rapide réinsertion.

2. Assurer que le juge des enfants disposera d'autant d'informations sur le mineur dans le cadre des nouvelles procédures que dans le cadre des procédures traditionnelles

Votre commission approuve l'objectif du projet de loi de déroger au principe selon lequel il ne peut y avoir de décision de la juridiction de jugement sans information préalable dans les seules hypothèses où cette information serait en fait inutile.

En revanche, il ne saurait être question d'éviter une instruction si le juge ne dispose pas de toutes les informations utiles concernant notamment les moyens appropriés à la réinsertion du mineur. Tout comme dans le cadre d'une procédure traditionnelle, le juge ne doit pouvoir statuer sur le fondement de la convocation par officier de police judiciaire ou de la comparution à délai rapproché que s'il constate que toutes les diligences ont été effectuées permettant de disposer de ces informations.

C'est la raison pour laquelle votre commission vous propose de préciser expressément que le recours à une procédure de jugement accéléré supposera non seulement, comme le prévoit le projet de loi, la connaissance de la personnalité du mineur, mais également des moyens appropriés à sa rééducation.

Cette formule, reprise de l'article 8 de l'ordonnance de 1945, est de nature à garantir que le juge disposera d'autant d'informations quand il statuera sur le fondement d'une nouvelle procédure que lorsqu'il statuera à l'issue d'une procédure traditionnelle.

3. Renforcer les droits du mineur poursuivi

Sur ce point, votre commission vous propose plusieurs amendements concernant plus particulièrement le dispositif relatif à la comparution à délai rapproché.

Ils visent tout d'abord à permettre à l'avocat de disposer d'un maximum d'informations, dès le début de la procédure. C'est ainsi qu'il pourrait prendre connaissance, dès la première présentation du mineur au juge des enfants, des renseignements dont celui-ci dispose sur la personnalité du jeune délinquant (ce que ne prévoit pas le projet de loi en sa rédaction actuelle).

De même, il appartiendrait au juge des enfants de verser au dossier de la procédure toutes les informations sur la personnalité du mineur dont il dispose et non seulement, comme le prévoit le projet de loi, celles obtenues lors de procédures antérieures. Cet amendement présenterait une particulière utilité dans l'hypothèse où la comparution à délai rapproché serait décidée plusieurs semaines après l'ouverture de la procédure et où, depuis cette date, d'autres procédures auraient été ouvertes à l'égard du mineur.

Enfin, votre Commission vous propose que les formalités prévues pour assurer le respect des droits du mineur soient mentionnées au procès-verbal à peine de nullité.

* *

*

Sous le bénéfice de ces observations et des amendements qu'elle vous soumet, votre commission vous propose d'adopter le présent projet de loi.

EXAMEN DES ARTICLES

Article premier - Convocation par officier de police judiciaire

Cet article a pour objet de modifier l'article 5 de l'ordonnance du 2 février 1945, relatif à l'exercice des poursuites pénales contre un mineur. Il constitue ce que l'on pourrait appeler une disposition d'introduction, annonçant que le procureur de la République pourrait désormais requérir lors de l'ouverture de la procédure la comparution à délai rapproché (dont les modalités sont fixées par l'article 5 du projet de loi), ainsi que la convocation par officier de police judiciaire (dont les modalités font l'objet de l'article 2).

La loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l'organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative a consacré au sein de cet article 5 la pratique dite de la convocation par officier de police judiciaire (OPJ). Il s'agit de la faculté, ouverte au procureur de la République, de donner instruction à un officier (ou à un agent) de police judiciaire de notifier à un mineur contre lequel il existe des indices laissant présumer qu'il a commis un délit, une convocation à comparaître devant le juge des enfants en vue de sa mise en examen.

Cette procédure visait à assurer une réponse judiciaire plus rapide à la délinquance juvénile.

L'article premier du présent projet de loi vise essentiellement à élargir le champ d'application de la convocation par OPJ en prévoyant qu'elle pourra avoir pour objet non seulement, comme aujourd'hui, la mise en examen du mineur, mais également son jugement.

Cette convocation par OPJ aux fins de jugement ne pourra intervenir que dans les hypothèses où il existera contre le mineur des charges suffisantes d'avoir commis un délit. Cette solution devrait donc être choisie par le procureur de la République pour les affaires simples, destinées à être jugées par le juge des enfants sans que des interrogations supplémentaires soient nécessaires à la recherche de la vérité.

Le fait qu'il s'agisse d'une convocation à comparaître devant le juge des enfants est fondamental car il signifie que la convocation par officier de police judiciaire ne pourra en aucun cas déboucher sur le prononcé d'une sanction pénale.

En effet, ainsi qu'il sera indiqué lors de l'examen de l'article 2, le juge des enfants ne pourra alors prononcer immédiatement qu'un simple rappel à la loi (dispense de peine, remise aux parents ou admonestation) ou une mesure de médiation-réparation. Encore convient-il de souligner que, comme nous le verrons, le prononcé d'une telle sanction est subordonné à une bonne connaissance de la personnalité du mineur.

Enfin, la convocation par officier de police judiciaire ne saurait en aucune manière être considérée comme une forme de comparution immédiate. En particulier la convocation, qui vaudra citation à comparaître, entraînera l'application des délais prévus à l'article 552 du code de procédure pénale lequel exige le respect d'un délai minimum de dix jours (et parfois de un mois, voire de trois mois) entre le jour où la citation est délivrée et celui fixé pour la comparution devant le tribunal. Par ailleurs, comme le précise l'article 3 du présent projet de loi, le juge des enfants ainsi saisi ne saurait prendre de décision sans avoir préalablement consulté le service éducatif auprès du tribunal (SEAT).

Dans de telles conditions (affaire simple, connaissance du mineur et impossibilité de prononcer une sanction pénale), la convocation par officier de police judiciaire aux fins de jugement paraît de nature à accélérer la réponse judiciaire à la délinquance juvénile sans pour autant remettre en cause les principes de l'ordonnance de 1945.

Lors de sa journée d'auditions publiques du 25 avril 1996, l'attention de votre commission a cependant été attirée sur deux points susceptibles de poser des difficultés d'application :

- la suppression de la requête obligatoire du procureur de la République pour saisir le juge des enfants peut être à l'origine de demandes en nullité qui pourraient en définitive se révéler préjudiciables à l'objectif recherché d'une accélération du cours de la justice

En effet, en cas d'instruction orale donnée à l'OPJ, rien ne permettra de prouver que le ministère public aura eu effectivement l'intention de saisir le juge des enfants.

Pour éviter toute difficulté de cet ordre, votre commission vous propose donc d'exiger que l'instruction donnée à l'OPJ par le procureur de la République soit délivrée par écrit. Cette exigence ne doit cependant pas conduire à un formalisme excessif. Aussi votre commission estime-t-elle que l'instruction pourra être délivrée notamment par télécopie ;

- l'objectif de la référence à l'article 552 du code de procédure pénale est en soit bien compréhensible : il s'agit d'ériger un délai minimum (de dix jours en principe) entre la convocation par l'OPJ et l'audience.

Il pourra néanmoins poser des difficultés pratiques dans les départements frontaliers puisque le délai minimum est porté à 2,5 mois si la partie citée réside à l'étranger. Cette exigence n'est-elle pas contraire à l'objectif d'une justice plus rapide dans les affaires les plus simples ?

Pour éviter toute rigidité excessive, tout en prévoyant un délai minimum entre la convocation par l'OPJ et l'audience, votre commission vous propose donc de supprimer la référence à l'article 552 du code de procédure pénale et de préciser que ce délai ne saurait être inférieur à dix jours.

Au demeurant, la fixation d'un délai précis dans l'ordonnance de 1945 en lieu et place d'un renvoi au code de procédure pénale renforce le caractère expressif de la loi : il souligne la spécificité de l'ordonnance et le souci du législateur d'exclure la comparution immédiate pour les mineurs.

Votre commission vous propose d'adopter le présent article premier ainsi modifié.

Article 2 - Jugement après convocation par officier de police judiciaire

Cet article a pour objet d'insérer au sein de l'ordonnance du 2 février 1945 un article 8-1 précisant les modalités du jugement lorsque le juge des enfants est saisi selon le procédé de la convocation par officier de police judiciaire.

Après avoir précisé qu'il appartiendrait à ce magistrat de constater l'identité du mineur et de s'assurer qu'il est assisté d'un avocat, le texte proposé envisage deux séries d'hypothèses faisant l'objet de deux paragraphes distincts : les affaires que l'on peut qualifier de simples et les affaires complexes.

1) Les affaires simples (paragraphe I)

Il s'agit des faits pour lesquels aucune investigation supplémentaire n'est nécessaire pour parvenir à la recherche de la vérité.

Le projet de loi prévoit alors que le juge des enfants statuera sur la prévention en chambre du conseil et, s'il y a lieu, sur l'action civile.

S'il estime que l'infraction est établie, le juge des enfants pourra retenir l'une des solutions suivantes : prononcer immédiatement une mesure qui ne saurait aller au-delà du rappel à la loi ou de la médiation-réparation ou bien recourir à la « césure » du procès.

a) Le rappel à la loi dès la première comparution

Si le juge estime que des investigations sont suffisantes sur la personnalité du mineur et entend prononcer un simple rappel à la loi, il peut alors prononcer immédiatement cette mesure, laquelle peut consister :

- en une dispense de peine (article 8-2° de l'ordonnance) ;

- en l'admonestation (article 8-3° de l'ordonnance) ;

- en la remise aux parents, au tuteur ou à une personne digne de confiance (article 8-4° de l'ordonnance) ;

- en une mesure ou une activité d'aide ou de réparation à l'égard de la victime, avec son accord, ou dans l'intérêt de la collectivité.

b) La césure pénale

Elle peut intervenir dans deux hypothèses :


Première hypothèse : le juge constate que des investigations suffisantes sur la personnalité du mineur ont déjà été effectuées mais envisage de prononcer une mesure plus contraignante.

Dans cette hypothèse, qui suppose que le juge des enfants entend prononcer soit la mise sous protection judiciaire (article 8-5° de l'ordonnance) soit le placement (article 8-6°) du mineur, il doit renvoyer l'affaire à une prochaine audience de la chambre du conseil qui devra avoir lieu dans les six mois (délai fixé par l'Assemblée nationale, avec l'accord du Gouvernement, alors que le projet de loi initial le fixait à quatre mois).

Nous sommes alors en présence d'une « césure » du procès pénal, caractérisée par un décalage dans le temps entre la déclaration de culpabilité et la mesure prononcée.


• Deuxième hypothèse : le juge estime que les investigations sur la personnalité du mineur ne sont pas suffisantes

Dans ce cas, il renvoie l'affaire à une prochaine audience de la chambre du conseil qui doit intervenir dans les six mois. Il appartient alors au juge de recueillir des renseignements sur la personnalité du mineur et sur la situation matérielle et morale de sa famille par une enquête sociale (article 8, quatrième alinéa de l'ordonnance) et un examen médical (article 8, cinquième alinéa).

C'est la seconde hypothèse de césure pénale prévue par le projet de loi.

Il convient de souligner que, dans l'une ou l'autre de ces hypothèses, le juge des enfants pourra ordonner à l'égard du mineur, à titre provisoire, une mesure de placement, de liberté surveillée ou d'aide ou de réparation à l'égard de la victime ou de la collectivité.

2) Les affaires complexes (paragraphe II)

Si le juge des enfants estime que la complexité de l'affaire nécessite des investigations approfondies, il procède selon les modalités traditionnelles : instruction, puis (sauf non-lieu) jugement.

* *

*

Le tableau figurant ci-après résume les différentes solutions offertes au juge par ce nouveau dispositif de jugement accéléré.

Investigations déjà

effectuées sur la

personnalité du mineur

Décision du juge

Affaires simples

Suffisantes

- rappel à la loi (dispense, admonestation, remise ou réparation) dès la première comparution ;

- césure (déclaration de culpabilité puis nouvelle audience dans les 6 mois) si mesure de placement ou de mise sous protection judiciaire envisagée

Insuffisantes

Césure : déclaration de culpabilité puis nouvelle audience dans les 6 mois (avec entretemps enquête de personnalité)

Affaires complexes

Retour à la procédure traditionnelle

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Pour les raisons déjà indiquées, votre commission approuve le principe de la convocation par officier de police judiciaire qui devrait permettre d'accélérer les procédures concernant des jeunes délinquants dans les affaires simples sans pour autant remettre en question les principes fondamentaux de l'ordonnance de 1945.

Elle vous propose néanmoins huit amendements au dispositif du présent article 2. L'un de ceux-ci est d'ordre rédactionnel ; un autre opère une meilleure présentation des deux paragraphes de l'article 8-1. Les autres amendements peuvent être regroupés en quatre catégories tendant respectivement à :


S'assurer que le juge des enfants ne pourra statuer que s'il dispose de toutes les informations utiles sur le mineur.

En l'état actuel du projet de loi, le juge des enfants saisi sur le fondement de la convocation par officier de police judiciaire pourra prononcer une mesure à l'égard du mineur dès la première comparution s'il dispose d'informations suffisantes « sur la personnalité » de celui-ci.

Mais les informations dont on peut disposer sur un mineur ne se limitent pas à sa personnalité. Elles peuvent notamment concerner sa famille, sa fréquentation scolaire...

Dans le cadre des procédures traditionnelles, l'article 8 de l'ordonnance prend en compte ces différentes considérations en exigeant que le juge ait connaissance non seulement de « la personnalité du mineur » , mais également « des moyens appropriés à sa rééducation » .

Il ne faudrait pas que le juge dispose de moins d'informations dans le cadre de la convocation par OPJ que dans le cadre d'une procédure traditionnelle.

C'est pourquoi votre commission vous propose de reprendre au sein du nouvel article 8-1 les termes mêmes de l'article 8 en exigeant que le juge ne statue que s'il dispose d'informations suffisantes non seulement sur la personnalité du mineur, mais également sur les moyens appropriés à sa rééducation.


Mieux encadrer la faculté pour le juge de prononcer une mesure de réparation

En l'état actuel du droit, le prononcé d'une mesure de réparation est soumis à de strictes conditions et notamment à l'accord de la victime et, lorsqu'il est envisagé par la juridiction de jugement, à la consultation préalable du mineur et des titulaires de l'exercice de l'autorité parentale (article 12-1 de l'ordonnance).

S'agissant du prononcé de cette mesure, à l'issue d'une convocation par OPJ, le projet de loi se limite à prévoir l'accord de la victime, condition certes essentielle mais insuffisante. Il convient en effet de recueillir également l'avis du mineur et des titulaires de l'exercice de l'autorité parentale, tout comme dans le cadre de l'article 12-1. C'est pourquoi votre commission vous propose un amendement à cette fin.


S'assurer que le juge des enfants ne pourra prononcer qu'une mesure éducative

D'après le projet de loi, si le juge « envisage de prononcer une autre mesure que celles prévues aux 2°, 3° et 6° de l'article 8 » (c'est-à-dire une mesure autre qu'un simple rappel à la loi), il peut le faire mais lors d'une prochaine audience. La formule retenue parait doublement ambiguë :

- d'abord, en permettant au juge des enfants de prononcer « une autre mesure » qu'un rappel à la loi, ne lui permet-on pas implicitement de prononcer « toute autre mesure », y compris une sanction pénale ? Votre commission ne le pense pas car ceci serait contraire à la fois à l'esprit de l'ordonnance de 1945 et, n'en doutons pas, à l'objectif des rédacteurs du projet de loi. Il conviendrait néanmoins de lever toute ambiguïté sur ce point ;

- en second lieu, la formule précitée pose un problème de rédaction : si le juge ne peut prononcer une mesure autre que celles prévues aux 2° à 4° de l'article 8 que lors d'une prochaine audience, cela signifie qu'il ne peut prononcer immédiatement une médiation-réparation (qui n'est pas prévue par les 2° à 4° précités). Il y a dès lors une contradiction qu'il convient de lever entre deux alinéas du projet de loi puisque, précisément, celui-ci prévoit plus haut que le juge pourra ordonner immédiatement une mesure de réparation.

Telles sont les deux raisons pour lesquelles votre commission vous propose de retenir une formule plus précise que celle précitée en exigeant que le juge des enfants renvoie l'affaire à une prochaine audience du conseil, non pas s'il envisage de prononcer « une mesure autre que celles prévues aux 2°, 3° et 4° de l'article 8 » , mais, plus simplement, s'il envisage de prononcer « l'une des mesures prévues aux 5° et 6° » dudit article (à savoir la mise sous protection judiciaire du mineur ou son placement).


S'assurer que le juge ne pourra statuer selon la procédure de la convocation par OPJ que dans les affaires simples

Le paragraphe II du texte proposé pour l'article 8-1 de l'ordonnance de 1945 prévoit le retour à la procédure traditionnelle « si la complexité de l'affaire nécessite des investigations approfondies » .

Cette rédaction n'est pas pleinement satisfaisante pour deux raisons :

- la référence expresse à la complexité est malheureuse car elle sous-entend que la convocation par OPJ peut concerner des affaires complexes (dès lors que celles-ci ne nécessitent pas d'investigations approfondies). Or, en aucune manière la convocation par OPJ ne saurait concerner une affaire complexe, quelle qu'elle fut : elle devra se limiter aux affaires simples ;

- ensuite, l'expression « investigations approfondies » laisse penser que le jugement après convocation par OPJ est possible, même si des investigations supplémentaires restent à effectuer, dès lors que ces investigations ne sont pas approfondies. Il va de soi qu'il ne saurait en être ainsi et que la dérogation au principe selon lequel le juge des enfants ne peut statuer qu'après une information préalable n'est admissible que si une telle information est inutile, autrement dit, que si aucune investigation supplémentaire sur les faits n'est nécessaire.

C'est pourquoi, votre commission vous propose de préciser que la procédure traditionnelle s'appliquera dès lors que les faits nécessiteront des investigations supplémentaires (et non seulement quand la complexité de l'affaire nécessitera des investigations approfondies).

Au demeurant, cette rédaction présente l'avantage d'être complémentaire de celle retenue par le paragraphe I qui limite la convocation par OPJ aux faits ne nécessitant « aucune investigation supplémentaire » .

Votre commission vous propose d'adopter le présent article 2 ainsi modifié.

Article 2 bis - Convocation des parents devant le juge d'instruction ou le juge des enfants

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale à l'initiative de Mme Véronique Neiertz, avec l'accord de la commission des Lois et du Gouvernement, a pour objet de compléter l'article 10 de l'ordonnance du 2 février 1945 afin de prévoir que, quelle que soit la procédure de comparution, le mineur et ses représentants légaux seront simultanément convoqués pour être entendus par le juge.

Ce faisant, il vise, pour reprendre les propos de Mme Neiertz, « à responsabiliser le plus possible les parents » , à éviter une « démission parentale » .

Votre commission partage cette analyse et vous propose même de compléter le dispositif prévu par cet article 2 bis en prévoyant, par amendement, que l'avocat du mineur sera également informé de l'évolution de la procédure.

Elle vous soumet également un amendement purement rédactionnel ainsi qu'un amendement de précision.

Elle vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 3- Consultation du service éducatif auprès du tribunal pour enfants

Cet article a pour objet de modifier l'article 12 de l'ordonnance du 2 février 1945, relatif à la consultation du service éducatif auprès du tribunal pour enfants (SEAT).

En sa rédaction actuelle, cet article prévoit deux cas de consultation du SEAT :

- la rédaction, à la demande du procureur de la République, du juge des enfants ou de la juridiction, d'un rapport écrit, joint à la procédure, contenant tous renseignements utiles sur la situation du mineur ainsi qu'une proposition éducative ;

- une consultation obligatoire, avant toute réquisition ou décision de placement en détention provisoire du mineur ou de prolongation de la détention provisoire.

Les modifications proposées par l'article 3 du présent projet de loi procèdent à une mise à jour terminologique (consistant à remplacer la référence à l'éducation surveillée par la référence à la protection judiciaire de la jeunesse) et imposent également la consultation du SEAT préalablement :

- à toute décision du juge des enfants saisi selon la procédure de la convocation par officier de police judiciaire ;

- à toute réquisition du procureur de la République présentée aux fins de mise en oeuvre de la comparution à délai rapproché (article 8-2 de l'ordonnance prévu par l'article 4 du projet).

Compte tenu du fait que la comparution à délai rapproché pourra également être demandée en cours de procédure, en vertu de l'article 8-3 que le projet de loi propose d'insérer dans l'ordonnance de 1945 (article 4), il paraît souhaitable d'exiger également la consultation du SEAT dans cette hypothèse. Aussi votre commission vous soumet-elle un amendement à cette fin.

Elle vous soumet également un amendement ayant pour simple objet de consacrer un alinéa à la modification prévue par le présent article 3.

Elle vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 4 - Comparution à délai rapproché

Cet article a pour objet d'insérer au sein de l'ordonnance du 2 février 1945 deux articles, portant les références 8-2 et 8-3, prévoyant la comparution à délai rapproché du mineur devant la juridiction de jugement.

1) La comparution à délai rapproché ab initio (article 8-2)

C'est au procureur de la République qu'il appartiendrait de requérir la comparution à délai rapproché d'un mineur, laquelle pourrait alors intervenir dans un délai (fixé par le juge des enfants) compris entre un et trois mois. L'ouverture de cette faculté est cependant soumise à trois conditions :

- être en matière correctionnelle ;

- que les diligences et investigations utiles pour connaître la personnalité du mineur et les moyens appropriés à sa rééducation aient été accomplies. Tel pourra notamment être le cas si le mineur a fait l'objet d'une procédure antérieure (qu'elle soit judiciaire ou administrative) ;

- que des investigations sur les faits ne soient pas nécessaires.

Si le procureur de la République demandait la comparution à délai rapproché du mineur, celui-ci serait immédiatement présenté au juge des enfants. On rappellera que, selon l'article 3 du projet de loi, la réquisition du procureur de la République devrait être précédée d'une consultation du SEAT.

Dès sa présentation devant le juge des enfants, le mineur serait assisté d'un avocat de son choix ou commis d'office qui pourrait consulter le dossier et communiquer librement avec le mineur. Dès cette présentation, le juge des enfants notifierait à ce dernier les faits retenus à son encontre ainsi que leur qualification juridique ; il recueillerait, après avoir entendu l'avocat, les déclarations du mineur par procès-verbal.

Cette présentation du mineur pourrait donner lieu à deux hypothèses :


première hypothèse : le juge des enfants fait droit aux réquisitions du procureur de la République. Il notifie alors au mineur le lieu, la date et l'heure de l'audience (dont les représentants légaux seront avisés par tout moyen).

Jusqu'à la comparution devant la juridiction de jugement, le juge des enfants peut alors ordonner les mesures prévues par les articles 8, 10 et 11 de l'ordonnance (enquête de personnalité, enquête sociale, contrôle judiciaire, détention provisoire, liberté surveillée...).


deuxième hypothèse : le juge d'instruction ne fait pas droit aux réquisitions du procureur de la République

Dans ce cas, il doit rendre une ordonnance motivée qui est susceptible d'appel par le procureur de la République, et lui seul, au plus tard le jour suivant la notification de ladite ordonnance. Cet appel est porté devant le président de la chambre spéciale des mineurs (ou son remplaçant), lequel doit statuer dans les quinze jours. Ce dernier peut soit confirmer l'ordonnance du juge des enfants, soit ordonner la comparution du mineur devant le tribunal pour enfant ou devant la chambre du Conseil. En cas de renvoi devant la juridiction de jugement, le président de la chambre spéciale des mineurs fixe le délai au cours duquel le procureur de la République devra citer le mineur à comparaître. Jusqu'à la comparution, le juge des enfants peut alors ordonner les mesures prévues aux articles 8, 10 et 11 de l'ordonnance.

2) La comparution à délai rapproché en cours de procédure
(article 8-3)

L'article 8-3 que le projet de loi propose d'insérer au sein de l'ordonnance de 1945 permettrait au procureur de la République de demander la comparution à délai rapproché à tout moment de la procédure, sous réserve que les conditions prévues par l'article 8-2 soient remplies (matière correctionnelle, accomplissement des diligences et investigations prévues par l'article 8, investigations sur les faits non nécessaires).

Dans ce cas, le juge des enfants devra statuer dans les cinq jours de la réception des réquisitions, par une ordonnance susceptible d'appel dans les mêmes conditions que celles prévues pour la comparution à délai rapproché ab initio.

À défaut de décision du juge des enfants dans ce délai de cinq jours, le procureur de la République pourrait saisir le président de la chambre spéciale des mineurs.

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Si les auditions auxquelles tant votre commission que votre rapporteur a procédé ont permis de mettre en avant un certain consensus sur le dispositif de la convocation par officier de police judiciaire (et notamment sur la césure pénale), la procédure de comparution à délai rapproché a donné lieu à davantage d'objections, dont la principale consistait à dénoncer une rupture de l'égalité des parties. Cette situation résulterait de la faculté reconnue au parquet de faire appel de l'ordonnance du juge refusant la comparution à délai rapproché alors que le mineur ne pourra contester la décision de recourir à cette procédure.

Force est néanmoins de constater que, d'une manière générale, la faculté des parties d'interjeter appel d'une mesure de procédure n'est pas absolue, alors que le parquet peut toujours faire appel d'une telle décision.

Il serait d'ailleurs contraire à l'objectif recherché d'une décision judiciaire plus proche des faits chaque fois que la personnalité du mineur est connue de prévoir l'appel d'une décision qui révélerait le plein accord du parquet et du juge des enfants.

Inversement, si le procureur est certain que le juge détient toutes les informations utiles sur le mineur, le bon fonctionnement de la justice suppose que, en cas de refus du juge de prendre une mesure à bref délai, un tiers puisse fixer la date de l'audience, après avoir constaté le bien-fondé des réquisitions du procureur.

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Votre commission vous soumet, outre un amendement rédactionnel et deux amendements de précision, des amendements tendant à :


Assurer la pleine information de l'avocat dès la présentation du mineur au juge des enfants

Selon le projet de loi, l'avocat pourra consulter le dossier dès la première présentation du mineur au juge des enfants.

Cette précision, pour nécessaire qu'elle soit, n'en est pas moins insuffisante puisque, à ce moment précis, le dossier ne comprendra pas encore les mesures d'investigations relatives à la connaissance du mineur diligentées au cours d'une procédure antérieure. Celles-ci ne seront en effet versées au dossier qu'une fois la décision prise de recourir à la comparution à délai rapproché.

C'est pourquoi votre commission vous propose de permettre à l'avocat du mineur de consulter, dès la présentation de celui-ci au juge des enfants, les renseignements dont dispose le magistrat sur la personnalité du mineur et sur les moyens appropriés à sa rééducation.


Préciser que les formalités relatives à la protection des droits de la défense lors de la présentation du mineur devront, à peine de nullité, être mentionnées au procès-verbal

Bien entendu, en vertu du principe posé par l'article 802 du code de procédure pénale, la nullité ne peut être prononcée que si l'irrégularité a porté atteinte aux intérêts de la partie concernée.


Élargir le champ des mesures d'investigations versées au dossier

Selon le projet de loi, une fois la décision de recourir à la comparution à délai rapproché prise, le juge doit verser au dossier les mesures d'investigations sur la personnalité du mineur diligentées « avant l'engagement des poursuites » .

Or, en pratique, il pourra arriver que le juge dispose d'investigations diligentées, dans le cadre d'une autre procédure, après l'engagement des poursuites. Cette hypothèse devrait concerner le cas où la comparution à délai rapproché serait décidé non pas ab initio mais en cours de procédure, sur le fondement du nouvel article 8-3 de l'ordonnance.

Afin de tenir compte de cette hypothèse, et de prévoir que le dossier comprendra également les éventuelles investigations diligentées après l'engagement des poursuites, votre commission vous propose d'exiger que soient versés au dossier tous les résultats dés mesures d'investigations sur la personnalité du mineur dont il dispose.

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Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 4 - Ajournement devant le tribunal pour enfants

Après l'article 4, votre commission vous propose un amendement tendant à insérer un article additionnel afin de permettre l'ajournement devant le tribunal pour enfants dans des conditions plus souples que devant les juridictions pour adultes.

Actuellement, le recours à l'ajournement est subordonné à trois conditions de fond :

- que le reclassement du coupable soit en voie d'être acquis ;

- que le dommage causé soit en voie d'être réparé ;

- que le trouble résultant de l'infraction soit sur le point de cesser.

L'ajournement étant particulièrement propice à la réinsertion -car il permet le prononcé rapide sur la culpabilité tout en s'accordant un délai de réflexion sur la peine-, il vous est proposé de le rendre plus aisé pour les mineurs : dans les cas où ces trois conditions ne seraient pas remplies, il suffirait que la personnalité du mineur permette d'espérer sa rapide réinsertion.

Ce faisant, il serait répondu à ce qui fut une demande de plusieurs intervenants lors de la journée d'auditions à laquelle a procédé votre commission (avocats, juges des enfants, éducateurs) à savoir étendre la césure pénale devant le tribunal pour enfants. On arriverait en effet à un résultat identique sans pour autant créer une nouvelle procédure devant cette juridiction.

Le dispositif que vous propose votre commission, qui ferait l'objet d'un article 27-1 de l'ordonnance, excluerait cependant l'ajournement avec mise à l'épreuve, la mise à l'épreuve ne présentant en effet pas d'utilité dès lors que, dans l'attente du prononcé de la peine, le tribunal peut, comme vous le suggère votre commission, soumettre le délinquant à une activité de réparation ou le placer sous le régime de la liberté surveillée.

Article 5 - Application de la loi outre-mer

Cet article a pour objet de rendre applicable dans les territoires d'outre-mer et la collectivité territoriale de Mayotte la loi soumise à notre examen.

Votre commission vous demande de l'adopter sans modification.

ANNEXES

ANNEXE 1 : ORDONNANCE N° 45-174 DU 2 FÉVRIER 1945 RELATIVE À L'ENFANCE DÉLINQUANTE

CHAPITRE I er . - Dispositions générales.

Art 1 er . Les mineurs auxquels est imputée une infraction qualifiée crime ou délit ne seront pas déférés aux juridictions pénales de droit commun et ne seront justiciables que des tribunaux pour enfants (L. 24 mai 1951) « ou des cours d'assises des mineurs ».

( Ord. n° 58-1300 du 23 déc. 1958) « Ceux auxquels est imputée une contravention de police de 5 e classe sont déférés aux juridictions pour enfants dans les conditions prévues à l'article 20-1. » - Pour les autres contraventions de police, V. art. 21.

2. ( L. n° 51-687 du 24 mai 1951) Le tribunal pour enfants et la cour d'assises des mineurs prononceront, suivant les cas, les mesures de protection, d'assistance, de surveillance et d'éducation qui sembleront appropriées.

Ils pourront cependant, lorsque les circonstances et la personnalité du délinquant leur paraîtront l'exiger, prononcer à l'égard du mineur âge de plus de treize ans une condamnation pénale (L. n° 92-1336 du 16 déc. 1992) « conformément aux dispositions des articles 20-2 à 20-5.

« Le tribunal pour enfants ne peut prononcer une peine d'emprisonnement, avec ou sans sursis, qu'après avoir spécialement motivé le choix de cette peine. »

3. ( L. n° 51-687 du 24 mai 1951) Sont compétents le tribunal pour enfants ou la cour d'assises des mineurs du lieu de l'infraction, de la résidence du mineur ou de ses parents ou tuteur, du lieu où le mineur aura été trouvé ou du lieu où il a été placé soit à titre provisoire, soit à titre définitif.

4. ( L. n° 94-89 du 1 er févr. 1994) « I. - Le mineur de treize ans ne peut être placé en garde à vue. Toutefois, à titre exceptionnel, le mineur de dix à treize ans contre lequel il existe des indices graves et concordants laissant présumer qu'il a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d'au moins sept ans d'emprisonnement peut, pour les nécessités de l'enquête, être retenu à la disposition d'un officier de police judiciaire avec l'accord préalable et sous le contrôle d'un magistrat du ministère public ou d'un juge d'instruction spécialisés dans la protection de T'enfance ou d'un juge des enfants, pour une durée que ce magistrat détermine et qui ne saurait excéder dix heures. Cette retenue peut toutefois être prolongée à titre exceptionnel par décision motivée de ce magistrat pour une durée qui ne saurait non plus excéder dix heures, après présentation devant lui du mineur, sauf si les circonstances rendent cette présentation impossible. Elle doit être strictement limitée au temps nécessaire à la déposition du mineur et à sa présentation devant le magistrat compétent ou à sa remise à l'une des personnes visées au II du présent article.

« Les dispositions des II, III et IV du présent article sont applicables. Lorsque le mineur ou ses représentants légaux n'ont pas désigné d'avocat, le procureur de la République, le juge chargé de l'instruction ou l'officier de police judiciaire doit, dès le début de la retenue, informer par tout moyen et sans délai le bâtonnier afin qu'il commette un avocat d'office. »

( L. n° 93-1013 du 24 août 1993) II. - Lorsqu'un mineur est placé en garde à vue, l'officier de police judiciaire doit informer de cette mesure les parents, le tuteur, la personne ou le service auquel est confié le mineur.

Il ne peut être dérogé aux dispositions de l'alinéa précédent que sur décision du procureur de la République ou du juge chargé de l'information et pour la durée que le magistrat détermine et qui ne peut excéder vingt-quatre heures ou, lorsque la garde à vue ne peut faire l'objet d'une prolongation, douze heures.

III. - Dès le début de la garde à vue d'un mineur de seize ans , le procureur de la République ou le juge chargé de l'information doit désigner un médecin qui examine le mineur dans les conditions prévues par le quatrième alinéa de l'article 63-3 du Code de procédure pénale.

IV. - Dès le début de la garde à vue, le mineur de seize ans peut demander à s'entretenir avec un avocat. Il doit être immédiatement informé de ce droit Lorsque le mineur n'a pas sollicité l'assistance d'un avocat, cette demande peut également être faite par ses représentants légaux. qui sont alors avises de ce droit lorsqu ils sont informés de la garde à vue en application du II du présent article.

[ Dispositions déclarées non conformes à la Constitution par décision du Conseil constitutionnel n° 93-326 DC du 11 août 1993.]

V - ( L n° 94-89 du 1 er févr. 1994) « En cas de délit puni d une peine inférieure à cinq ans d'emprisonnement, la garde à vue » d'un mineur âgé de treize à seize ans ne peut être prolongée.

Aucune mesure de garde à vue ne peut être prolongée sans présentation préalable du mineur {Abrogé par L. n° 94-89 du 1 er févr. 1994) « de plus de treize ans » au procureur de la République ou au juge charge de l'instruction. En cas d'urgence, il peut être fait application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 7.

4-1 . ( L. n° 93-2 du 4 janv. 1993) Le mineur poursuivi doit être assisté d'un avocat À défaut de choix d'un avocat par le mineur ou ses représentants légaux, le procureur de la République, le juge des enfants ou le juge d'instruction fait désigner par le bâtonnier un avocat d'office. - Entrée en vigueur le 1 er mars 1993.

5. Aucune poursuite ne pourra être exercée en matière de crime contre les mineurs sans information préalable.

( L . 67-555 du 12 juill. 1967) « En cas de délit, le procureur de la République en saisira, soit le juge d'instruction, soit par voie de requête le juge des enfants et à Paris, le président du tribunal -pour enfants. »

( L. n° 95-125 du 8 févr. 1995) « Sur instructions du procureur de la République, l'officier ou l'agent de police judiciaire notifiera au mineur contre lequel il existe des indices laissant présumer qu il a commis un délit une convocation à comparaître, en vue de sa mise en examen, devant le juge des enfants saisi des faits, qui en sera immédiatement avisé.

« La convocation énoncera les faits reprochés, visera le texte de loi qui les réprime et indiquera le nom du juge saisi ainsi que la date et le lieu de l'interrogatoire de première comparution. Elle mentionnera, en outre, les dispositions de l'article 4-1.

« La convocation sera également notifiée dans les meilleurs délais aux parents, au tuteur, à la personne ou au service auquel le mineur est confié.

« Elle sera constatée par procès-verbal signé par le mineur et la personne visée à l'alinéa précédent, qui en recevront copie. »

En aucun cas, il ne pourra être suivi contre le mineur ( L. n° 93-2 du 4 janv. 1993) « par les procédures prévues aux articles 393 à 396 du Code de procédure pénale » ou par voie de citation directe.

6. ( L. n° 51-687 du 24 mai 1951) L'action civile pourra être portée devant le juge des enfants, devant le juge d'instruction, devant le tribunal pour enfants et devant la cour d'assises des mineurs.

Lorsqu'un ou plusieurs mineurs sont impliqués dans la même cause qu'un ou plusieurs majeurs, l'action civile contre tous les responsables peut être portée devant le tribunal correctionnel ou devant la cour d'assises compétente à l'égard des majeurs. En ce cas, les mineurs ne comparaissent pas à l'audience, mais seulement leurs représentants légaux. À défaut de choix d'un défenseur par le mineur ou par son représentant légal, il en sera désigné un d'office.

( Ord. n° 58-1300 du 23 déc. 1958) « Dans le cas prévu à l'alinéa qui précède s'il n'a pas encore été statue sur la culpabilité des mineurs, le tribunal correctionnel ou la cour d assises peut surseoir à statuer sur l'action civile. »

CHAPITRE II. - Procédure.

7. ( L. n° 51-687 du 24 mai 1951) Le procureur de la République près le tribunal dans le ressort duquel le tribunal pour enfants a son siège est chargé de la poursuite des crimes et délits commis par des mineurs.

( Ord. n° 58-1300 du 23 déc. 1958) « Toutefois, le procureur de la République, compétent en vertu des articles 43 et 696 du Code de procédure pénale, et le juge d'instruction par lui requis ou agissant d'office conformément aux dispositions de l'article 72 du même code, procéderont à tous actes urgents de poursuite et d'information, à charge par eux d'en donner immédiatement avis au procureur de la République près le tribunal dans le ressort duquel le tribunal poux enfants a son siège et de se dessaisir de la poursuite dans le plus bref délai. »

Lorsque le mineur est impliqué dans la même cause qu'un ou plusieurs majeurs, il sera procède conformément aux dispositions de l'alinéa qui précède aux actes urgents de Poursuite et d information. Si le procureur de la République poursuit des majeurs ( L. 93-2 du 4 janv. 1993) « selon les procédures prévues aux articles 393 à 396 au code de procédure pénale » ou par voie de citation directe, il constituera un dossier spécial concernant le mineur et le transmettra au procureur de la République près le tribunal dans le ressort duquel le tribunal pour enfants a son siège. Si une information a été ouverte, le juge d instruction se dessaisira dans le plus bref délai i l'égard tant du mineur que des ( L 93-2 du 4 janv. 1993) « majeur » au profit du juge d'instruction du siège du tribunal pour enfants.

Dernier al. abrogé par L. n° 93-1013 du 24 août 1993.

8. ( L. n° 51-687 du 24 mai 1951) Le juge des enfants effectuera toutes diligences et investigations utiles pour parvenir à la manifestation de la vérité et à la connaissance de la personnalité du mineur ainsi que des moyens appropriés à sa rééducation.

( Ord. n° 58-1300 du 23 déc. 1958) « À cet effet, il procédera à une enquête, soit par voie officieuse, soit dans les formes prévues par le chapitre 1 er du titre III du livre 1 er du Code de procédure pénale. » ( L. n° 93-2 du 4 janv. 1993) « Dans ce dernier cas, et si l'urgence l'exige, le juge des enfants pourra entendre le mineur sur sa situation familiale ou personnelle sans être tenu d'observer les dispositions du deuxième alinéa de l'article 114 du Code de procédure pénale. »

( L. n° 70-643 du 17 juill. 1970, art. 19) « Il pourra décerner tous mandats utiles ou prescrire le contrôle judiciaire en se conformant aux règles du droit commun, sous réserve des dispositions de l'article 11. »

Il recueillera, par une enquête sociale, des renseignements sur la situation matérielle et morale de là famille, sur le caractère et les antécédents du mineur, sur sa fréquentation scolaire, son attitude à l'école, sur les conditions dans lesquelles il a vécu ou a été élevé. - Sur l'enquête sociale, V. Arr. 25 août 1992 ( JO 3 sept.).

Le juge des enfants ordonnera un examen médical et, s'il y a lieu, un examen médico-psychologique. Il décidera, le cas échéant, le placement du mineur dans un centre d'accueil ou dans un centre d'observation.

Toutefois, il pourra, dans l'intérêt du mineur, n'ordonner aucune de ces mesures ou ne prescrire que l'une d'entre elles. Dans ce cas, il rendra une ordonnance motivée.

Ces diligences faites, le juge des enfants pourra soit d'office, soit à la requête du ministère public, communiquer le dossier à ce dernier.

( L. n° 95-125 du 8 févr. 1995) « Il pourra, avant de se prononcer au fond, ordonner à l'égard du mineur mis en examen une mesure de liberté surveillée à titre provisoire en vue de statuer après une ou plusieurs périodes d'épreuve dont il fixera la durée.

« Il pourra ensuite, par ordonnance, soit déclarer n'y avoir lieu à suivre et procéder comme il est dit à l'article 177 du Code de procédure pénale, soit renvoyer le mineur devant le tribunal pour enfants ou, s'il y a lieu, devant le juge d'instruction.

« Il pourra également, par jugement rendu en chambre du conseil :

« 1° Soit relaxer le mineur s'il estime que l'infraction n'est pas établie ;

« 2° Soit, après avoir déclaré le mineur coupable, le dispenser de toute autre mesure s'il apparaît que son reclassement est acquis, que le dommage causé est réparé et que le trouble résultant de l'infraction a cessé, et en prescrivant, le cas échéant, que cette décision ne sera pas mentionnée au casier judiciaire ;

« 3° Soit l'admonester ;

« 4° Soit le remettre à ses parents, à son tuteur, à la personne, qui en avait la garde ou à une personne digne de confiance :

« 5° Soit prononcer, à titre principal, sa mise sous protection judiciaire pour une durée n'excédant pas cinq années dans les conditions définies à l'article 16 bis ;

« 6° Soit le placer dans l'un des établissements visés aux articles 15 et 16, et selon la distinction établie par ces articles.

« Dans tous les cas, il pourra, le cas échéant, prescrire que le mineur sera placé jusqu'à un âge qui n'excédera pas celui de sa majorité sous le régime de la liberté surveillée. »

9. ( L. n° 51-687 du 24 mai 1951) Le juge d'instruction procédera à l'égard du mineur ( Ord. n° 58-1300 du 23 déc. 1958) « dans les formes du chapitre I" du titre III du livre 1 er du Code de procédure pénale » et ordonnera les mesures prévues aux alinéas 4, 5 et 6 de l'article 8 de la présente ordonnance.

( Ord. n° 58-1300 du 23 déc. 1958) « Lorsque l'instruction sera achevée, le juge d'instruction, sur réquisitions du procureur de la République, rendra l'une des ordonnances de règlement suivantes :

« 1° Soit une ordonnance de non-lieu ;

« 2° Soit, s'il estime que le fait constitue une contravention, une ordonnance de renvoi devant le tribunal de police, ou, s'il s'agit d'une contravention de 5 e classe, devant le juge des enfants ou devant le tribunal pour enfants ;

« 3° Soit, s'il estime que les faits constituent un délit, une ordonnance de renvoi devant le juge des enfants ou devant le tribunal pour enfants ;

« 4° En cas de crime, soit une ordonnance de renvoi devant le tribunal pour enfants s'il s'agit d'un mineur de seize ans. soit, dans le cas visé à l'article 20, l'ordonnance de transmission de pièces au procureur général, prévue par l'article 181 du Code de procédure pénale.

« Si le mineur a des coauteurs ou complices ( L. n° 74-631 du 5 juill. 1974) « majeurs ». ces derniers seront, en cas de poursuites correctionnelles, renvoyés devant la juridiction compétente suivant le droit commun ; la cause concernant le mineur sera disjointe pour être jugée conformément aux dispositions de la présente ordonnance. En cas de poursuites pour infraction qualifiée crime, il sera procédé à l'égard de ( L. n° 93-2 du 4 janv. 1993) « toutes les personnes mises en examen » conformément aux dispositions de l'article 181 du Code de procédure pénale ; la chambre d'accusation pourra, soit renvoyer tous les accusés âgés de seize ans au moins devant la cour d assises des mineurs, soit disjoindre les poursuites concernant les majeurs et renvoyer ceux-ci devant la cour d'assises de droit commun ; les mineurs âgés de moins de seize ans seront renvoyés devant le tribunal pour enfants.

« L'arrêt sera rédigé dans les formes du droit commun.

« Au cas de renvoi devant la cour d'assises des mineurs, la chambre d'accusation pourra décerner une ordonnance de prise de corps contre les accusés mineurs. »

10. ( L. if 93-1013 du 24 août 1993) « Le juge d'instruction ou le juge des enfants avise les parents du mineur, son tuteur, ou la personne ou le service auquel il est confié des poursuites dont le mineur fait l'objet. Cet avis est fait verbalement avec émargement au dossier ou par lettre recommandée. Il mentionne les faits reprochés au mineur et leur qualification juridique. Il précise également qu'à défaut de choix d'un défenseur par le mineur ou ses représentants légaux le juge d'instruction ou le juge des enfants fera désigner par le bâtonnier un avocat d office. »

( L. n° 93-2 du 4 janv. 1993) « Lors de la première comparution, lorsque le mineur ou ses représentants légaux n'ont pas fait le choix d'un avocat ni demandé qu'il en soit désigné un d'office, le juge des enfants ou le juge d'instruction saisi fait designer sur-le-champ par le bâtonnier un avocat d'office.

« Le juge des enfants et le juge d'instruction pourront charger » ( L. n° 51-687 du 24 mai 1951) de l'enquête sociale les services sociaux ou les personnes titulaires d'un diplôme de service social, habilités à cet effet.

( L. n° 93-2 du 4 janv. 1993) « Ils pourront confier provisoirement le mineur mis en examen » : - Les dispositions ci-dessus de la loi n° 93-2 du 4 janv. 1993 sont entrées en vigueur le 1 er mars 1993.

1° À ses parents, à son tuteur ou à la personne qui en avait la garde, ainsi qu a une personne digne de confiance ;

2° À un centre d'accueil ;

3° À une section d'accueil d'une institution publique ou privée habilitée à cet effet ;

4° Au service de l'assistance à l'enfance ou à un établissement hospitalier ;

5° À un établissement ou à une institution d'éducation, de formation professionnelle ou de soins, de l'État ou d'une administration publique habilité.

S'ils estiment que l'état physique ou psychique du mineur justifie une observation approfondie, ils pourront ordonner son placement provisoire dans un centre d'observation institué ou agréé par le ministre de la justice.

La garde provisoire pourra, le cas échéant, être exercée sous le régime de la liberté surveillée.

( L . 95-125 du 8 fèvr. 1995) « Le juge des enfants saisi de la procédure est compétent pour modifier ou révoquer la mesure de garde jusqu'à la comparution du mineur devant le tribunal pour enfants. »

11. ( L. n° 70-643 du 17 juill. 1970) « Le mineur âgé de plus de treize ans ne pourra être placé provisoirement dans une maison d'arrêt, ( L. n° 93-1013 du 24 août 1993) « soit par le juge d'instruction, soit par le juge des enfants. » que si cette mesure parait indispensable ou encore s'il est impossible de prendre toute autre disposition. ( L. n° 87-1062 du 30 déc. 1987) « Toutefois le mineur âgé de moins de seize ans ne pourra être détenu provisoirement, en matière correctionnelle. » Dans tous les cas le mineur sera retenu dans un quartier spécial » ( L. n° 51-687 du 24 mai 1951) « ou, à défaut, dans un local spécial ; il sera, autant que possible, soumis à l'isolement de nuit ».

Al. 2 et 3 abrogés par L. n° 93-1013 du 24 août 1993.

( L . 89-461 du 6 juill. 1989) « En matière correctionnelle, lorsque la peine encourue n'est pas supérieure à sept ans d'emprisonnement, la détention provisoire des mineurs âgés d'au moins seize ans ne peut excéder un mois. Toutefois, à l'expiration de ce délai, la détention peut être prolongée, à titre exceptionnel, par une ordonnance motivée comme il est dit au ( L. n° 93-1013 du 24 août 1993) « premier alinéa de l'article 145 » du Code de procédure pénale, et rendue conformément aux dispositions du (L. 93-1013 du 24 août 1993) « quatrième alinéa de cet article » du même code, pour une durée n'excédant pas un mois ; la prolongation ne peut être ordonnée qu'une seule fois.

« Dans les autres cas, les dispositions du premier alinéa de l'article 145-1 du Code de procédure pénale sont applicables, en matière correctionnelle, aux mineurs âgés d'au moins seize ans ; ( L. n° 93-1013 du 24 août 1993) « toutefois, la prolongation doit être ordonnée conformément aux dispositions du quatrième alinéa de l'article 145 du Code de procédure pénale, et elle » ne peut être prolongée au-delà d'un an.

« En matière criminelle, la détention provisoire des mineurs âgés de plus de treize ans et de moins de seize ans ne peut excéder six mois. Toutefois, à l'expiration de ce délai, la détention peut être prolongée, à titre exceptionnel, pour une durée n'excédant pas six mois, par une ordonnance rendue conformément aux dispositions du quatrième alinéa de I article 145-1 du Code de procédure pénale et comportant, par référence aux 1° et 2° de l'article 144 du même code, l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ; la prolongation ne peut être ordonnée qu'une seule fois.

« Les dispositions de l'article 145-2 du Code de procédure pénale sont applicables aux mineurs âgés d'au moins seize ans ; toutefois, la détention provisoire ne peut être prolongée au-delà de deux ans.

« Les dispositions des quatrième et cinquième alinéas du présent article sont applicables jusqu'à l'ordonnance de règlement »

Les dispositions ci-dessus de la loi n° 89-461 du 6 juill. 1989 entrent en vigueur le 1 er déc. 1989. - Les actes, formalités et décisions intervenus antérieurement demeurent valables ( art. 25. al. 1 er et 2. de la loi ) .

Dons les cas prévus par le troisième alinéa de l'art. 11 ci -dessus, les détentions provisoires en cours au 1 er déc. 1989 ne pourront excéder un an jusqu'à l'ordonnance de règlement. -Dans les cas prévus par les deuxième, quatrième et cinquième alinéas du mime art., les détentions provisoires en cours au 1 er déc. 1989 ne pourront excéder, respectivement, deux mois, un an et deux ans jusqu'à l'ordonnance de règlement. Les délais d'un mois, six mois et un an à l'expiration desquels la détention doit être prolongée commenceront à courir à compter du placement en détention ; il n'y aura pas lieu d'ordonner la prolongation de la détention si la durée de détention déjà subie excède, selon le cas, un mois, six mois ou un an ( L. n° 89-461 du 6 juill. 1989, art. 25. al. 3 et 6) .

12. ( L. n° 85-1407 du 30 déc. 1985) Le service de l'éducation surveillée compétent établit, à la demande du procureur de la République, du juge des enfants ou de la juridiction d'instruction, un rapport écrit contenant tous renseignements utiles sur la situation du mineur ainsi qu'une proposition éducative.

Lorsqu'il est fait application de l'article 5, ce service est obligatoirement consulté avant toute réquisition ou décision de placement en détention provisoire du mineur ( L. n° 93-1013 du 24 août 1993) « ou de prolongation de la détention provisoire ».

Le rapport prévu au premier alinéa est joint à la procédure.

12-1. ( L. n° 93-2 du 4 janv. 1993) Le procureur de la République, la juridiction chargée de l'instruction de l'affaire ou la juridiction de jugement ont la faculté de proposer au mineur une mesure ou une activité d'aide ou de réparation à l'égard de la victime ou dans l'intérêt de la collectivité. Toute mesure ou activité d'aide ou de réparation à l'égard de la victime ne peut être ordonnée qu'avec l'accord de celle-ci.

Lorsque cette mesure ou cette activité est proposée avant l'engagement des poursuites, le procureur de la République recueille l'accord préalable du mineur et des titulaires de l'exercice de l'autorité parentale. Le procès-verbal constatant cet accord est joint à la procédure.

La juridiction chargée de l'instruction procède selon les mêmes modalités.

Lorsque la mesure ou l'activité d'aide ou de réparation est prononcée par jugement, la juridiction recueille les observations préalables du mineur et des titulaires de l'exercice de l'autorité parentale.

La mise en oeuvre de la mesure ou de l'activité peut être confiée au secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse ou à une personne physique, à un établissement ou service dépendant d'une personne morale habilités à cet effet dans des conditions fixées par décret. À l'issue du délai fixé par la décision, le service ou la personne chargé de cette mise en oeuvre adresse un rapport au magistrat qui a ordonné la mesure ou l'activité d'aide ou de réparation.

CHAPITRE III. - Le tribunal pour enfants.

13. ( L. n° 51-687 du 24 mai 1951) Le tribunal pour enfants statuera après avoir entendu l'enfant, les témoins, les parents, le tuteur ou le gardien, le ministère public et le défenseur. Il pourra entendre, à titre de simple renseignement, les coauteurs ou complices majeurs.

( Ord. n° 58-1300 du 23 déc. 1958) « Le président du tribunal pour enfants pourra », si l'intérêt du mineur l'exige, dispenser ce dernier de comparaître à l'audience. Dans ce cas. le mineur sera représenté par un avocat ou par son père, sa mère ou son tuteur. La décision sera réputée contradictoire.

Le tribunal pour enfants restera saisi à l'égard du mineur âgé de moins de seize ans lorsqu'il décidera d'appliquer une qualification criminelle aux faits dont il avait été saisi sous une qualification correctionnelle. Il ordonnera, en ce cas, un supplément d'information et déléguera le juge d'instruction à cette fin, si l'ordonnance de renvoi émane du juge des enfants.

14. ( L. n° 51-687 du 24 mai 1951) Chaque affaire sera jugée séparément en l'absence de tous autres prévenus.

Seuls seront admis à assister aux débats les témoins de l'affaire, les proches parents, le tuteur ou le représentant légal du mineur, les membres du barreau, les représentants des sociétés de patronage et des services ou institutions s'occupant des enfants, les délégués à la liberté surveillée.

Le président pourra, à tout moment, ordonner que le mineur se retire pendant tout ou partie de la suite des débats. ( Ord. n° 58-1300 du 23 déc. 1958) « Il pourra de même ordonner aux témoins de se retirer après leur audition ».

La publication du compte rendu des débats des tribunaux pour enfants dans le livre, la presse, la radiophonie, le cinématographe ou de quelque manière que ce soit est interdite. La publication, par les mêmes procédés, de tout texte ou de toute illustration concernant l'identité et la personnalité des mineurs délinquants est également interdite. Les infractions à ces dispositions seront punies d'une amende de 40 000 F ; en cas de récidive, un emprisonnement de deux ans pourra être prononcé.

Le jugement sera rendu en audience publique, en la présence du mineur. Il pourra être publié, mais sans que le nom du mineur puisse être indiqué, même par une initiale, à peine d'une amende de 25 000 F.

14-1 ( L. n° 65-511 du 1 er juill. 1965) Quand les infractions aux dispositions des alinéas 4 et 5 de l'article précédent seront mises par la voie de la presse, les directeurs des publications ou éditeurs seront, pour le fait seul de la publication, passibles comme auteurs principaux des peines prévues à ces alinéas.

À leur défaut, l'auteur et, à défaut de l'auteur, les imprimeurs, distributeurs et afficheurs seront poursuivis comme auteur principaux.

Lorsque l'auteur n'est pas poursuivi comme auteur principal, il sera poursuivi comme complice.

Pourront être poursuivies comme complices, et dans tous les cas, toutes personnes auxquelles ( L. n° 92-1336 du 16 déc. 1992) « les articles 121-6 et 121-7 » du Code pénal pourrait [ pourraient ] s'appliquer.

15 ( L n° 51-687 du 24 mai 1951) Si la prévention est établie à l'égard du mineur de treize ans le tribunal pour enfants prononcera, par décision motivée, lune des mesures suivantes :

1° Remise à ses parents, à son tuteur, à la personne qui en avait la garde ou à une personne digne de confiance :

2° Placement dans une institution ou un établissement public ou privé, d'éducation ou de formation professionnelle, habilité ;

3° Placement dans un établissement médical ou médico-pédagogique habilité ;

4° Remise au service de l'assistance à l'enfance ;

5° Placement dans un internat approprié aux mineurs délinquants d'âge scolaire. - V. note ss. art. 10. supra.

16. ( L. n° 51-687 du 24 mai 1951) Si la prévention est établie à l'égard d'un mineur âgé de plus de treize ans. le tribunal pour enfants prononcera par décision motivée l'une des mesures suivantes :

1° Remise à ses parents, à son tuteur, à la personne qui en avait la garde ou à une personne digne de confiance ;

2° Placement dans une institution ou un établissement, public ou privé, d'éducation ou de formation professionnelle habilité ;

3° Placement dans un établissement médical ou médico-pédagogique habilité ;

4° Placement dans une institution publique d'éducation surveillée ou d'éducation corrective.

16 bis. ( L. n° 75-624 du 11 juill. 1975) Si la prévention est établie à l'égard d'un mineur âge de seize ans, le tribunal pour enfants et la cour d'assises des mineurs pourront aussi prononcer, à titre principal et par décision motivée, la mise sous protection judiciaire pour une durée n'excédant pas cinq années.

Les diverses mesures de protection, d'assistance, de surveillance et d'éducation auxquelles le mineur sera soumis seront déterminées par un décret en Conseil d'État - V. infra, Décr. n° 76-1073 du 22 nov. 1976 relatif à la mise sous protection judiciaire.

Le juge des enfants pourra, à tout moment jusqu'à l'expiration du délai de mise sous protection judiciaire, prescrire une ou plusieurs mesures mentionnées à l'alinéa précédent. Il pourra en outre, dans les mêmes conditions, soit supprimer une ou plusieurs des mesures auxquelles le mineur aura été soumis, soit mettre fin à la mise sous protection judiciaire.

Lorsque, pour l'accomplissement de la mise sous protection judiciaire, le placement d'un mineur de plus de seize ans dans un des établissements désignés à l'article précédent aura été décidé, ce placement ne se poursuivra après la majorité de l'intéressé que si celui-ci en fait la demande.

La loi n° 75-624 du 11 juill. 1975 est entrée en vigueur le 1 er janv. 1976.

17. Dans tous les cas prévus par les articles 15 et 16 ci-dessus, les mesures seront prononcées pour le nombre d'années que la décision déterminera et qui ne pourra excéder l'époque ou le mineur aura atteint ( L . 74-631 du 5 juill. 1974) « sa majorité ».

( L. n° 51-687 du 24 mai 1951 ) La remise d'un mineur à l'Assistance ne sera possible, si l'enfant est âge de plus de treize ans, qu'en vue d'un traitement médical ou encore dans le cas d'un orphelin ou d'un enfant dont les parents ont été déchus de l'autorité parentale. - V. note ss. art. 10, supra.

18. Si la prévention est établie à l'égard d'un mineur âgé de plus de treize ans. celui-ci pourra faire l'objet d'une condamnation pénale conformément à l'article 2.

19. ( L n° 51-687 du 24 mai 1951) Lorsqu'une des mesures prévues aux articles 15 16 et 28 ou une condamnation pénale sera décidée, le mineur pourra, en outre, être placé jusqu'à un âge qui ne pourra « céder ( L. n° 74-631 du 5 juill. 1974) « celui de la majorité », sous Te régime de la liberté surveillée.

Le tribunal pour enfants pourra, avant de prononcer au fond, ordonner la mise en liberté surveillée à titre provisoire en vue de statuer après une ou plusieurs périodes d'épreuve dont il fixera la durée.

20. ( L. n° 51-687 du 24 mai 1951) Le mineur âgé de seize ans au moins, accusé de crime, sera jugé par la cour d'assises des mineurs, composée d'un président, de deux assesseurs, et complétée par le jury criminel.

( Ord. n° 58-1300 du 23 déc. 1958) « La cour d'assises des mineurs se réunira au siège de la cour d'assises et au cours de la session de celle-ci. Son président sera désigné et remplacé, s'il y a lieu, dans les conditions prévues pour le président de la cour d'assises par les articles 244 à 247 du Code de procédure pénale. Les deux assesseurs seront pris, sauf impossibilité, parmi les juges des enfants du ressort de la cour d'appel et désignés dans les formes des articles 248 à 252 du Code de procédure pénale. »

Les fonctions du ministère public auprès de la cour d'assises des mineurs seront remplies par le procureur général ou un magistrat du ministère public spécialement chargé des affaires de mineurs.

Le greffier de la cour d'assises exercera les fonctions de greffier à la cour d'assises des mineurs.

Dans le cas où tous les accusés de la session auront été renvoyés devant la cour d'assises des mineurs, il sera procédé par cette juridiction, conformément aux dispositions des ( Ord. n° 58-1300 du 23 déc. 1958) « articles 288 à 292 du Code de procédure pénale ».

Dans le cas contraire, le jury de la cour d'assises des mineurs sera formé de jurés pris sur la liste arrêtée par la cour d'assises.

Sous réserve des dispositions de l'alinéa qui précède, le président de la cour d'assises des mineurs et la cour d'assises des mineurs exerceront respectivement les attributions dévolues par les dispositions du ( Ord. n° 58-1300 du 23 déc. 1958) « Code de procédure pénale » au président de la cour d'assises et à la cour.

Les dispositions des alinéas 1 er , 2. 4 et 5 de l'article 14 s'appliqueront à la cour d'assises des mineurs.

Après l'interrogatoire des accusés, le président de la cour d'assises des mineurs pourra, à tout moment, ordonner que l'accusé mineur se retire pendant tout ou partie de la suite des débats.

Sous réserve des dispositions de la présente ordonnance, il sera procédé, en ce qui concerne les mineurs âgés de seize ans au moins, accusés de crime, conformément aux dispositions des ( Ord. n° 58-1300 du 23 déc. 1958) « articles 191 à 218 et 231 à 380 du Code de procédure pénale ».

( Ord. n° 58-1300 du 23 déc. 1958) « Si l'accusé a moins de dix-huit ans, le président posera, à peine de nullité, les deux questions suivantes :

« 1° Y a-t-il lieu d'appliquer à l'accusé une condamnation pénale ?

« 2° Y a-t-il lieu d'exclure l'accusé du bénéfice » ( L. n° 92-1336 du 16 déc. 1992) « de la diminution de peine prévue à l'article 20-2 ? »

S'il est décidé que l'accusé mineur déclaré coupable ne doit pas faire l'objet d'une condamnation pénale, les mesures relatives à son placement ou à sa garde, sur lesquelles la cour et le jury sont appelés à statuer, seront celles des articles 16 et 19 (alinéa 1 er ).

20-1 . ( L. n° 92-1336 du 16 déc. 1992) « Les contraventions de la 5 e classe » ( Ord. n° 58-1300 du 23 déc. 1958) commises par des mineurs, sont instruites et jugées dans les conditions prévues aux articles 8 à 19 de la présente ordonnance.

20-2 . ( L. n° 92-1336 du 16 déc. 1992) Le tribunal peur enfants et la cour d'assises des mineurs ne peuvent prononcer à rencontre des mineurs âgés de plus de treize ans une peine privative de liberté supérieure à la moitié de la peine encourue. Si la peine encourue est la réclusion criminelle à perpétuité, ils ne peuvent prononcer une peine supérieure à vingt ans de réclusion criminelle.

Toutefois, si le mineur est âgé de plus de seize ans, le tribunal pour enfants et la cour d'assises des mineurs peuvent, à titre exceptionnel, et compte tenu des circonstances de l'espèce et de la personnalité du mineur, décider qu'il n'y a pas lieu de faire application des dispositions du premier alinéa. Cette décision ne peut être prise par le tribunal pour enfants que par une disposition spécialement motivée.

Les dispositions de l'article 132-23 du Code pénal relatives à la période de sûreté ne sont pas applicables aux mineurs.

L'emprisonnement est subi par les mineurs dans les conditions définies par décret en Conseil d'État.

20-3. ( L n° 92-1336 du 16 déc. 1992) Sous réserve de l'application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 20-2. le tribunal pour enfants et la cour d'assises des mineurs ne peuvent prononcer à rencontre d'un mineur âgé de plus de treize ans une peine d amende d'un montant supérieur à la moitié de l'amende encourue ou excédant 50 000 F.

20-4. ( L n° 92-1336 du 16 déc. 1992) La peine d'interdiction du territoire français et les peines prévues aux articles 131-25 à 131-35 du Code pénal ne peuvent être prononcées â rencontre d'un mineur.

20-5. ( L n° 92-1336 du 16 déc. 1992) Les dispositions des articles 131-8 et 131-22 à 131-24 du Code pénal relatives au travail d'intérêt général sont applicables aux mineurs de seize à dix-huit ans. De même, leur sont applicables les dispositions des articles 132-54 à 132-57 du Code pénal relatives au sursis assorti de 1 obligation d'accomplir un travail d'intérêt général.

Les attributions du juge de l'application des peines prévues par les articles 131-22 et 132-57 du Code pénal sont dévolues au juge des enfants. Pour l'application des articles 131-8 et 132-54 du Code pénal, les travaux d'intérêt général doivent être adaptés aux mineurs et présenter un caractère formateur ou de nature à favoriser l'insertion sociale des jeunes condamnés.

20-6. ( L. n° 92-1336 du 16 déc. 1992) Aucune interdiction, déchéance ou incapacité ne peut résulter de plein droit d'une condamnation pénale prononcée à rencontre d'un mineur.

21 . ( L. n° 72-5 du 3 janv. 1972) « Sous réserve de l'application des articles 524 à 530-1 du Code de procédure pénale, ( L. n° 92-1336 du 16 déc. 1992) « les contraventions de police des quatre premières classes », commises par les mineurs, sont déférées au tribunal de police siégeant dans les conditions de publicité prescrites à l'article 14 pour le tribunal pour enfants. »

( L. n° 48-1310 du 25 août 1948 ; Ord. n° 58-1300 du 23 déc. 1958) Si la contravention est établie, le tribunal pourra soit simplement admonester le mineur, soit prononcer la peine d'amende prévue par la loi. Toutefois, les mineurs de treize ans ne pourront faire l'objet que d'une admonestation.

En outre, si le tribunal de police estime utile, dans l'intérêt du mineur, l'adoption d'une mesure de surveillance, il pourra, après le prononcé du jugement, transmettre le dossier au juge des enfants, qui aura la faculté de placer le mineur sous le régime de la liberté surveillée.

L'appel des décisions des tribunaux de police est porté devant la cour d'appel dans les conditions prévues à l'article 7 de l'ordonnance n° 58-1274 du 22 décembre 1958 relative à l'organisation des juridictions pour enfants [ C . org. jud., art. L. 223-1].

22. Le juge des enfants et le tribunal pour enfants pourront, dans tous les cas, ordonner l'exécution provisoire de leur décision, nonobstant opposition ou appel.

Les décisions prévues à l'article 15 ci-dessus et prononcées par défaut à l'égard d'un mineur de treize ans, lorsque l'exécution provisoire en aura été ordonnée, seront ramenées à exécution à la diligence du procureur de la République, conformément aux dispositions de ( Ord. n° 58-1300 du 23 déc. 1958) « l'article 707 du Code de procédure pénale ». ( L. n° 51-687 du 24 mai 1951) « Le mineur sera conduit et retenu dans un centre d'accueil ou dans une section d'accueil d'une institution visée à l'article 10 ou dans un dépôt de l'assistance ou dans un centre d'observation. »

23. ( Ord. n° 58-1274 du 22 déc. 1958, art. 8 ; Ord. n° 58-1300 du 23 déc. 1958) Le délégué à la protection de l'enfance exercera à la chambre spéciale de la cour d'appel les fonctions visées à l'article 6 de l'ordonnance susvisée n° 58-1274 du 22 décembre 1958 [ C . org. Jud., art. L. 223-21. Il siégera comme membre de la chambre d'accusation lorsque celle-ci connaîtra d une affaire dans laquelle un mineur sera impliqué, soit seul, soit avec des coauteurs ou complices majeurs. D disposera en cause d'appel des pouvoirs attribués au juge des enfants par l'article 29 (alinéa 1 er ).

24. ( L. n° 51-687 du 24 mai 1951 ; Ord. n° 58-1300 du 23 déc. 1958) Les règles sur le défaut et l'opposition résultant des articles 487 et suivants du Code de procédure pénale seront applicables aux jugements du juge des enfants et du tribunal pour enfants.

Les dispositions des articles 185 à 187 du Code de procédure pénale seront applicables aux ordonnances du juge des enfants et du juge (l'instruction spécialement chargé des affaires de mineurs. Toutefois, par dérogation à l'article 186 dudit code les ordonnances du juge des enfants et du juge d'instruction concernant les mesures provisoires prévues à l'article 10 seront susceptibles d'appel. Cet appel sera formé dans les délais de l'article 498 du Code de procédure pénale et porté devant la chambre spéciale de la cour d'appel.

Les règles édictées par les articles 496 et suivants du Code de procédure pénale seront applicables à l'appel des jugements du juge des enfants et du tribunal pour enfants.

Al. 4 et 5 abrogés par Ord. n° 58-1274 du 22 déc. 1958, art. 8.

Le droit d'opposition, d'appel ou de recours en cassation pourra être exercé soit par le mineur, soit par son représentant légal

Le recours en cassation n'a pas d'effet suspensif, sauf si une condamnation pénale est intervenue.

Les jugements du juge des enfants seront exempts des formalités de timbre et d enregistrement - Cet alinéa a été codifié dans l'art. 1366 C. gén. imp. qui a été abrogé par la loi n° 63-254 du 15 mars 1963 art. 7.

CHAPITRE IV. - La liberté surveillée.

25. ( Ord. n° 58-1300 du 23 déc. 1958) « La rééducation des mineurs en liberté surveillée est assurée, sous l'autorité du juge des enfants, par des délégués permanents et par des délégués bénévoles à la liberté surveillée.

« Les délègues permanents, agents de l'État nommés par le ministre de la justice, ont pour mission de diriger et de coordonner l'action des délégués ; ils assument en outre la rééducation des mineurs que je juge leur a confiée personnellement.

« Les délégués bénévoles sont choisis parmi les personnes de l'un ou de l'autre sexe, majeures : ils sont nommés par le juge des enfants. »

( L. n° 51-687 du 24 mai 1951) Dans chaque affaire, le délégué est désigné soit immédiatement par le jugement, soit ultérieurement par ordonnance du juge des enfants, notamment dans le cas de délégation de compétence prévu à l'article 31.

( Ord. n° 58-889 du 24 sept. 1958) « Les frais de transports exposés par les délégués permanents et les délégués à la liberté surveillée pour la surveillance des mineurs ainsi que les frais de déplacements engagés par les délégués permanents dans le cadre de leur mission de direction et coordination de l'action des délégués sont remboursés dans les conditions prévues par la réglementation générale concernant le remboursement des frais engagés par les personnels civils de l'État à l'occasion de leurs déplacements.

« Un arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre des finances et des affaires économiques déterminera les modalités selon lesquelles il sera dérogé à cette réglementation pour tenir compte des conditions particulières dans lesquelles des délégués permanents et les délègues à la liberté surveillée sont appelés à réaliser certains de leurs déplacements. »

26. Dans tous les cas où le régime de la liberté surveillée sera décidé, le mineur, ses parents, son tuteur, la personne oui en a la garde, seront avertis du caractère et de l'objet de cette mesure et des obligations qu'elle comporte.

( Ord. n° 58-1300 du 23 déc. 1958) « Le délègue à la liberté surveillée fera rapport au juge des enfants en cas de mauvaise conduite, de péril moral du mineur, d'entraves systématiques à l'exercice de la surveillance, ainsi que dans le cas où une modification de placement ou de garde lui paraîtra utile. »

En cas de décès, de. maladie grave, de changement de résidence ou d'absence non autorisée du mineur, les parents, tuteur, gardien ou patron devront sans retard en informer le délégué.

( L. n° 51-687 du 24 mai 1951) Si un incident à la liberté surveillée révèle un défaut de surveillance caractérisé de la part des parents ou du tuteur ou gardien, ou des entraves systématiques à l'exercice de la mission du délégué, le juge des enfants ou le tribunal pour enfants, quelle que soit la décision prise à l'égard du mineur, pourra condamner les parents ou le tuteur ou gardien à une amende civile de 10 F à 500 F.

27. Les mesures de protection, d'assistance, de surveillance, d'éducation ou de réforme ordonnées à l'égard d'un mineur peuvent être révisées à tout moment, sous réserve des dispositions ci-après :

Lorsqu'une année au moins se sera écoulée, depuis l'exécution d une décision plaçant le mineur hors de sa famille, les parents ou le tuteur ou le mineur lui-même, pourront former une demande de remise ou de restitution de garde en justifiant de leur aptitude à élever l'enfant et d'un amendement suffisant de ce dernier. En cas de rejet, la même demande ne pourra être renouvelée qu'après l'expiration du délai d'un an.

28. ( L n° 51-687 du 24 mai 1951 : Ord. n° 58-1300 du 23 dix. 1958) « Le juge des enfants pourra, soit d'office, soit à la requête du ministère public, du mineur, de ses parents, de son tuteur ou de la personne qui en a la garde, soit sur le rapport du délégué à la liberté surveillée, statuer sur tous les incidents, instances en modification de placement ou de garde, demandes de remise de garde. Il pourra ordonner toutes mesures de protection ou de surveillance utiles, rapporter ou modifier les mesures prises. Le tribunal pour enfants est. le cas échéant, investi du même droit. »

( L n° 51-687 du 24 mai 1951 ) Toutefois, le tribunal pour enfants sera seul compétent lorsqu'il y aura lieu de prendre à l'égard d'un mineur qui avait été laissé à la garde de ses parents. de son tuteur ou laissé ou remis à une personne digne de confiance, une des autres mesures prévues aux articles 15 et 16.

Al. 3 abrogé par L. n° 89-461 du 6 juill. 1989. art. 18.

29 et 30. Abroges par L. n° 89-61 du 6 juill. 1989, art. 18.

31. Sont compétents pour statuer sur tous incidents, instances modificatives de placement ou de garde, demandes de remise de garde :

1° Le juge des enfants ou le tribunal pour enfants ayant primitivement statué. Dans le cas ou il s'agit d'une juridiction n'ayant pas un caractère permanent ou lorsque la décision initiale émane d'une cour d'appel, la compétence appartiendra au juge des enfants ou au tribunal pour enfants du domicile des parents ou de la résidence actuelle du mineur :

2° Sur délégation de compétence accordée par le juge des enfants ou par le tribunal pour enfants ayant primitivement statué, le juge des enfants ou le tribunal pour enfants du domicile des parents, de la personne, de l'oeuvre, de l'établissement ou de l'institution à qui le mineur a été confié par décision de justice ainsi que le juge des enfants ou le tribunal pour enfants ( L. n° 51-687 du 24 mai 1951) « du lieu où le mineur se trouvera, en fait, placé ou arrêté ».

Si l'affaire requiert célérité, toutes mesures provisoires pourront être ordonnées par le juge des enfants ( L. n° 51-687 du 24 mai 1951) « du lieu où le mineur se trouvera, en fait, placé ou arrêté ».

32. Les dispositions des articles 22. 23 et 24 sont applicables aux décisions rendues sur incident à la liberté surveillée, instances modificatives de placement ou de garde, demandes de remise de garde.

CHAPITRE V. - Dispositions diverses.

33. V. infra. [ anc. ] C. pén.. art. 66 et 67 modifiés.

34 à 36 . Abrogés par Ord. n° 58-1296 du 23 déc. 1958. art. 9.

37. Dans le cas d'infractions dont la poursuite est réservée d'après les lois en vigueur aux administrations publiques, le procureur de la République aura seul qualité pour exercer la poursuite sur la plainte préalable de l'administration intéressée.

38. Dans chaque tribunal, le greffier tiendra un registre spécial, non public, dont le modèle sera fixé par arrêté ministériel et sur lequel seront mentionnées toutes les décisions concernant les mineurs, y compris celles intervenues sur incident à la liberté surveillée, instances modificatives de placement ou de garde et remises de garde.

39. Toute personne, toute oeuvre ou toute institution, même reconnues d'utilité publique, s'offrant à recueillir d'une façon habituelle des mineurs en application de la présente ordonnance, devra obtenir du préfet une habilitation spéciale dans des conditions qui seront fixées par décret. Cette disposition est également applicable aux personnes, aux oeuvres et aux institutions exerçant actuellement leur activité au titre de la loi du 22 juillet 1912. - V. infra, Décr. n° 46-734 du 16 avr. 1946.

40. Dans tous les cas où le mineur est remis à titre provisoire ou à titre définitif à une personne autre que son père, mère, tuteur ou à une personne autre que celle qui en avait la garde, la décision devra déterminer la part des frais d'entretien et de placement qui est mise à la charge de la famille. Ces frais sont recouvrés comme frais de justice criminelle au profit du Trésor public. Les allocations familiales, majorations et allocations d'assistance auxquelles le mineur ouvre droit seront, en tout état de cause, versées directement par l'organisme débiteur à la personne ou à l'institution qui a la charge du mineur pendant la durée du placement. ( L. n° 51-687 du 24 mai 1951 ) Lorsque le mineur est remis à l'assistance a l'enfance, la part des frais d'entretien et de placement qui n'incombe pas à la famille est mise à la charge du Trésor.

41. ( L. n° 51-687 du 24 mai 1951) Des décrets détermineront les mesures d'application de la présente ordonnance, et notamment les conditions de remboursement des frais d'entretien, de rééducation et de surveillance des mineurs confiés à des personnes, institutions ou services, par application de la présente ordonnance. - V. infra, Décr. n° 46-734 du 16 avr. 1946 et Décr. n° 88-949 du 6 art. 1988.

42. ( L. n° 51-687 du 24 mai 1951) Sont abrogés la loi du 22 juillet 1912 et les textes qui l'ont complétée et modifiée ainsi que la loi du 5 août 1850 sur l'éducation et le patronage des jeunes détenus.

La présente ordonnance sera applicable aux départements d'outre-mer. - L'ordonnance modifiée du 2 févr. 1945 est étendue au département la collectivité territoriale ) de Saint-Pierre-et-Miquelon à compter du 1 er oct. 1978 ( Ord. n° 77-1100 du 26 sept. 1977, art. 26 et 27 ; JO 30 sept.). - Pour son application à la collectivité territoriale de Mayotte. V. Ord. n° 81-295 du 1 er avr. 1981, art. 25 à 27 et 31 ( JO 3 avr.) ; Ord. n° 91-245 du 25 févr. 1991, art. 23 ( JO 6 mars), ratifiée par L. n° 91-1379 du 28 déc. 1991 ( JO 1 er janv. 1992). - Pour son application dans les territoires d'outre-mer, V. L. n° 83-520 du 27 juin 1983, art. 69 et 80 ( JO 28 juin).

43. ( Dispositions transitoires ) .

L'ordonnance n° 58-1300 du 23 déc. 1958 est applicable aux départements de la Guadeloupe de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion ( art. 3).

ANNEXE 2 : RÉSUMÉ DE LA JOURNÉE D'AUDITIONS PUBLIQUES DU JEUDI 25 AVRIL 1996

Réunie le jeudi 25 avril sous la présidence de M. Jacques Larché, la commission des Lois a procédé à une journée d'auditions publiques sur la délinquance juvénile, dans la perspective de l'examen du projet de loi portant modification de l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante.

M. Jacques Larché ainsi que le rapporteur de la commission, M. Michel Rufin, avaient souhaité que cette journée permette d'aborder le problème de la délinquance juvénile dans son ensemble et non le seul point soulevé par le projet de loi, à savoir l'accélération des procédures pénales. La commission a ainsi entendu, outre le Garde des Sceaux, des praticiens de l'ordonnance de 1945 (avocats, magistrats, du siège et du parquet, et éducateurs) et des personnes quotidiennement confrontées à ce difficile problème (fonctionnaires de police, membres du corps préfectoral et du corps enseignant).

Me Marie-France Ponelle, responsable de l'antenne des mineurs de Paris, a fait part de ses inquiétudes, en ce que le projet de loi lui a paru remettre en cause le rôle essentiel du juge des enfants en conférant au parquet, sous réserve de l'appel devant un magistrat de la Cour d'appel, la faculté de lui imposer la date de l'audience. En revanche, le dispositif de « césure » pénale, c'est-à-dire la déclaration immédiate de culpabilité et le renvoi de la décision sur la mesure à une audience ultérieure, lui a paru susceptible de faire prendre conscience au jeune délinquant de l'existence d'interdits tout en continuant à subordonner le prononcé d'une mesure à des investigations approfondies sur sa personnalité.

Me Marie-Elisabeth Breton, avocat à Arras, a vu dans la délinquance juvénile le symptôme de l'incapacité de la société à répondre aux besoins des adolescents. Insistant sur la carence éducative des parents et sur celle des institutions, elle a considéré le projet de loi comme un texte conjoncturel et sécuritaire. À ses yeux, le remède au problème réside avant tout dans l'accroissement des moyens consacrés à « l'éducatif », que la responsabilité en revienne aux juridictions pour enfants ou aux départements.

M. Alain Bruel, président du tribunal pour enfants de Paris, a mis en avant la nécessité d'une réponse judiciaire plus rapide à la délinquance juvénile. Il s'est déclaré favorable au principe de la césure pénale, estimant même souhaitable de la permettre devant le tribunal pour enfants et non seulement, comme le prévoit le projet de loi, devant le juge des enfants. Il a en revanche contesté le dispositif de comparution à délai rapproché, notamment en ce qu'il permettrait au parquet de faire appel d'une décision du juge ne faisant pas droit à ses réquisitions. Cette faculté lui a paru contenir en germe un risque de conflit entre le procureur et le juge des enfants.

Mme Martine Bagot, juge des enfants à Versailles, s'est inquiétée des conséquences pratiques du projet de loi qui lui a paru de nature à accroître sensiblement la charge de travail des juridictions et des services éducatifs auprès des tribunaux.

M. Christian Kulyk, juge d'instruction à Montbéliard, qui fut durant neuf ans juge des enfants à Belfort, a insisté sur la vocation éducative de l'ordonnance de 1945 et sur la nécessité de prendre en compte la personnalité du mineur avant de prononcer une mesure à son égard. Il a estimé inutile de modifier cette ordonnance -dont les dispositions lui ont paru permettre l'intervention rapide d'une décision judiciaire- et a suggéré l'institution d'un « contrat de procédure » en vertu duquel la juridiction accorderait au mineur un délai lui permettant de faire ses preuves.

M. Schmit, procureur de la République de Rouen, a apporté son soutien au projet de loi. Après avoir évoqué l'évolution récente de la délinquance juvénile, caractérisée notamment par son augmentation et son caractère de plus en plus violent, il a estimé nécessaire d'apporter dans les meilleurs délais une réponse judiciaire à chaque fait délictuel. Il a jugé indispensable de toujours préférer, dans la mesure du possible, la solution éducative à l'incarcération.

M. Jean-Pierre Valensi, procureur de la République à Saint-Omer, s'est également déclaré favorable au projet de loi. Estimant que le temps pénal devait s'adapter au temps vécu par le mineur, il a considéré comme trop tardive une mesure prononcée plus de six mois après les faits, le délinquant ayant en général « oublié » ce qui lui est reproché.

M. Roland Maucourant, commissaire divisionnaire du XVIII e arrondissement de Paris, a précisé que le véritable problème venait des mineurs « multiréitérants », à savoir ceux régulièrement appréhendés par la police, parfois plus de vingt fois par an. Favorable au dispositif de la césure pénale, il a estimé que l'important n'était pas de prononcer une sanction mais de faire savoir au délinquant que l'autorité judiciaire avait pris acte de son comportement anti-social.

M. Lutz, commissaire principal au Blanc-Mesnil, a résumé l'évolution récente de la délinquance juvénile, marquée notamment par l'augmentation des « incivilités », à savoir des faits peu répréhensibles pénalement mais particulièrement mal ressentis, par leur répétition, par les citoyens (dégradations des boîtes aux lettres, injures...).

M. Claude Lanvers, sous-préfet à la ville du Rhône, a avancé plusieurs facteurs explicatifs de la délinquance juvénile : crise de l'emploi, insuffisance des moyens de la protection judiciaire de la jeunesse, recours limité à l'ilôtage policier. Il a présenté certaines solutions retenues dans le département du Rhône consistant notamment à élaborer des « parcours de resocialisation » du jeune (d'une durée de six mois au cours de laquelle celui-ci doit participer à des travaux d'utilité sociale, à des stages...) et à prévenir les problèmes sanitaires par des conventions avec les secteurs intervenant dans le domaine psychiatrique et dans le traitement de la toxicomanie. Il a également mis en avant le rôle essentiel des mesures de réparation à l'égard des victimes.

Mme Marie-Danielle Pierrelée, principal du collègue Garcia-Lorca à Saint-Denis, a évalué à une cinquantaine -sur 650 élèves- le nombre de jeunes délinquants ou prédélinquants dans son établissement. Elle a cependant distingué d'une part les meneurs, pratiquement jamais appréhendés par la police, et d'autre part les jeunes choisis par ceux-ci pour commettre des délits. Parmi ces mesures, elle a insisté sur le sort des plus fragiles, souvent humiliés par leurs camarades et fréquemment appréhendés par les autorités.

M. Garden, proviseur à Vaulx-en-Velin, a indiqué n'avoir jamais eu d'incident dans son établissement, inauguré en septembre 1995 et accueillant 165 élèves. Selon lui, la sanction à l'égard du mineur délinquant doit toujours être dictée par le souci de l'amendement du fautif.

M. Jacques Toubon a présenté l'évolution de la délinquance juvénile au cours des dernières années précisant qu'elle s'était accrue notablement alors même que la délinquance en général s'était stabilisée, qu'elle était le fait de mineurs de plus en plus jeunes et qu'elle s'accompagnait d'un sentiment d'impunité propice à la réitération des actes délictueux. Présentant son projet de loi, il a rappelé que celui-ci s'inscrivait dans le cadre plus général du pacte de relance pour la ville, lequel prévoyait notamment la création de cinquante « Unités à Encadrement Educatif Renforcé » (UEER) chargées de suivre les mineurs en situation particulièrement difficile. Il a indiqué que le projet de loi avait pour objet d'accélérer la procédure relative aux jeunes délinquants en prévoyant notamment, pour les infractions les moins graves et les plus simples, la faculté pour le juge des enfants de se prononcer sans instruction préalable. Pour les délits plus graves commis par des mineurs plus fortement ancrés dans la délinquance, le Garde des Sceaux a présenté la procédure de comparution à délai rapproché qui permettrait au parquet de demander le jugement du mineur dans un délai n'excédant pas trois mois. Il a conclu son propos en précisant que la réforme ne remettrait aucunement en cause les principes de l'ordonnance de 1945, et notamment le primat de l'éducatif.

M. Bernard Cassagnabère, éducateur au Havre, a approuvé le dispositif du projet de loi relatif à la césure pénale. Il a relativisé les propos tenus sur l'impunité des mineurs délinquants en évoquant l'augmentation du nombre de jeunes incarcérés. Il a regretté l'allongement de la durée de la détention provisoire pour les mineurs.

Mme Dauphant, éducatrice à Grenoble, a également approuvé la césure pénale, regrettant même que celle-ci ne concerne pas le tribunal pour enfants. Elle a cependant estimé que la réponse à la délinquance juvénile devait être avant tout recherchée par une augmentation des moyens de la Protection Judiciaire de la Jeunesse.

Enfin, M. Max Longeron, directeur régional de la protection judiciaire de la jeunesse de la région Île-de-France, a vu dans la carence des adultes le principal facteur du passage à la délinquance. Il a fait observer qu'une large partie des mineurs, tels les trafiquants de stupéfiants, n'étaient pas traduits devant la justice. Il a également mis l'accent sur le problème des moyens de la protection judiciaire de la jeunesse et notamment des services éducatifs auprès des tribunaux.

ANNEXE 3 : PROPOSITION DE LOI TENDANT À LUTTER CONTRE LA VIOLENCE DANS LES ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES

Article unique

Le chapitre premier du titre III du livre IV du nouveau code pénal est complété par une section 4 ainsi rédigée :

« Section 4

« De la protection des établissements scolaires.

« Art. 431-22. - Le fait de s'introduire à l'aide de manoeuvres, menaces, voies de fait ou contrainte dans un établissement scolaire ou de s'y maintenir irrégulièrement et volontairement après avoir été informé par l'autorité responsable ou son représentant du caractère irrégulier de sa présence est puni d'un an d'emprisonnement et de 100.000 F d'amende.

« Les peines prévues à l'alinéa précédent seront portées au double lorsque le délit aura été commis en groupe. »

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