Projet de loi relatif à la création de l'Université franco-allemande

BIARNES (Pierre)

RAPPORT 188 (98-99) - COMMISSION DES AFFAIRES ETRANGERES

Table des matières




N° 188

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999

Annexe au procès-verbal de la séance du 3 février 1999

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées sur le projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne relatif à la création de l' Université franco-allemande ,

Par M. Pierre BIARNÈS,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Xavier de Villepin, président ; Serge Vinçon, Guy Penne, André Dulait, Charles-Henri de Cossé-Brissac, André Boyer, Mme Danielle Bidard-Reydet, vice-présidents ; MM. Michel Caldaguès, Daniel Goulet, Bertrand Delanoë, Pierre Biarnès, secrétaires ; Bertrand Auban, Michel Barnier, Jean-Michel Baylet, Jean-Luc Bécart, Daniel Bernardet, Didier Borotra, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Marcel Debarge, Robert Del Picchia, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Jean-Claude Gaudin, Philippe de Gaulle, Emmanuel Hamel, Roger Husson, Christian de La Malène, Philippe Madrelle, René Marquès, Paul Masson, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Jean-Luc Mélenchon, René Monory, Aymeri de Montesquiou, Paul d'Ornano, Charles Pasqua, Michel Pelchat, Alain Peyrefitte, Xavier Pintat, Bernard Plasait, Jean-Marie Poirier, Jean Puech, Yves Rispat, Gérard Roujas, André Rouvière.

Voir le numéro :

Sénat : 148 (1998-1999).

Traités et conventions.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi a pour objet d'autoriser l'approbation d'un accord relatif à la création de l'université franco-allemande, signé le 19 septembre 1997 à Weimar par les gouvernements allemand et français.

Le projet d'université franco-allemande, lancé en 1996, a pour objectif une relance et une amplification de la coopération franco-allemande dans le domaine de l'enseignement supérieur et de la recherche, en multipliant les formations communes qualifiantes débouchant sur la délivrance de diplômes reconnus dans les deux pays.

Ce projet s'appuie sur un acquis important, constitué par le collège franco-allemand pour l'enseignement supérieur, créé en 1988, qui permet déjà à un millier d'étudiants de suivre des formations communes et d'obtenir un double diplôme français et allemand.

L'université franco-allemande, structure de pilotage et de coordination d'un réseau d'établissements d'enseignement supérieur, devrait prendre le relais du collège franco-allemand pour l'enseignement supérieur dès la rentrée universitaire 1999 en apportant deux innovations : une augmentation des formations offertes, en particulier par une extension aux premier et troisième cycles universitaires, et, à terme, la délivrance de ses propres diplômes, qui seront reconnus dans chacun des deux pays.

Votre rapporteur rappellera les bases de la coopération franco-allemande dans le domaine éducatif et universitaire avant de présenter l'accord signé à Weimar le 19 septembre 1997 et les caractéristiques de l'université franco-allemande.

I. L'ÉVOLUTION DE LA COOPÉRATION FRANCO-ALLEMANDE DANS LE DOMAINE EDUCATIF ET UNIVERSITAIRE

L'étroite coopération culturelle établie entre la France et l'Allemagne depuis le traité de l'Elysée de 1963 comporte de multiples aspects dans les secteurs éducatif et universitaire. Les priorités en ont été redéfinies lors du sommet franco-allemand de Weimar en 1997. Votre rapporteur évoquera trois points principaux : l'encouragement des échanges, par le biais de l'office franco-allemand pour la jeunesse, l'enseignement scolaire et l'enseignement supérieur et la recherche.

A. L'ENCOURAGEMENT DES ÉCHANGES : LE RÔLE DE L'OFFICE FRANCO-ALLEMAND POUR LA JEUNESSE

L'office franco-allemand pour la jeunesse (OFAJ), créé par un accord du 5 juillet 1963, constitue une pièce fondamentale de la coopération culturelle franco-allemande.

1. Les activités de l'OFAJ

L'OFAJ soutient les échanges de jeunes réalisés par des établissements scolaires et universitaires, des associations de jeunesse et d'éducation populaire, des clubs sportifs, des centres linguistiques, des centres de formation, des comités de jumelage ou des organisations professionnelles et syndicales. Il leur apporte son soutien financier, pédagogique et linguistique.

Dans le domaine des échanges professionnels, l'OFAJ soutient des échanges entre établissements d'enseignement professionnel, des séjours professionnels pour jeunes artisans et jeunes agriculteurs, des stages pratiques pour les jeunes chômeurs ou les jeunes en insertion sociale ou professionnelle.

Les échanges scolaires couvrent à la fois les échanges de classes et des échanges individuels d'élèves mais aussi des stages pédagogiques pour maîtres du premier degré allant enseigner dans l'autre pays.

L'OFAJ soutient également la formation pédagogique et linguistique des responsables de programmes franco-allemands.

Il intervient en soutien d'échanges universitaires (séminaires binationaux, bourses individuelles de stages pratiques pour étudiants et futurs enseignants, séjours d'études et de recherche).

Au total, le nombre de programmes subventionnés par l'OFAJ chaque année s'élève à 7 000 (près de 200 000 depuis 1963), touchant environ 142 000 jeunes (près de 5,5 millions depuis 1963).

2. L'évolution de l'OFAJ

Après 35 années d'existence, l'OFAJ peut afficher un bilan très satisfaisant, par l'ampleur et la variété des actions qu'il a contribué à développer.

Au cours des dernières années, l'OFAJ s'est efforcé de s'adapter à l'évolution des besoins et de renouveler ses orientations . C'est ainsi qu'il a étendu ses programmes aux jeunes en difficulté, en matière d'insertion et de formation professionnelle. Il s'est également ouvert aux échanges avec les pays tiers, dans le cadre de programmes trilatéraux comprenant un nombre équilibré de participants français, allemands et d'autres nationalités, qu'il s'agisse de pays de l'Union européenne, d'Europe centrale et orientale ou enfin d'Afrique. Enfin, la réunification allemande a entraîné l'émergence de besoins nouveaux émanant des länder de l'ex-RDA.

Cette évolution s'est effectuée dans un contexte budgétaire défavorable. L'OFAJ est principalement financé par un fonds commun alimenté à parts égales par une contribution française et une contribution allemande. La contribution française a enregistré une diminution régulière et s'est établie, en 1998, à 64 millions de F, niveau difficilement compatible avec les programmes ambitieux dans lesquels l'OFAJ s'est engagé. Toutefois, le budget 1999 s'est traduit par une stabilisation de la contribution française.

Parallèlement, est en cours d'étude la réunion, dans un siège administratif unique , des activités de l'OFAJ actuellement réparties entre Paris et Bad Honnef en Allemagne. Ce projet, qui pourrait permettre des économies de fonctionnement, est fermement soutenu par le gouvernement français qui propose une localisation à Strasbourg.

B. L'ENSEIGNEMENT SCOLAIRE

En matière d'enseignement scolaire, il convient de mentionner les efforts entrepris en faveur de l'enseignement de la langue du partenaire et le rôle particulier des lycées franco-allemands. Des actions ont également été engagées en matière d'enseignement technologique.

1. L'enseignement de la langue du partenaire

L' enseignement de l'allemand en France concerne :

- 22 % des élèves du primaire qui suivent un enseignement de langue vivante,

-1 350 000 élèves du secondaire, 11% des élèves choisissant l'allemand comme 1 ère langue vivante, 30 % en 2 ème langue vivante et 13 % comme 3 ème langue vivante. Le choix de l'allemand est proposé dans 90 % des collèges et la totalité des lycées.

En Allemagne, le nombre global d' élèves apprenant le français atteint 1,6 million :

- 86.000 élèves dans le primaire, soit 2,3 % des élèves du primaire mais 26 % de ceux qui apprennent une langue vivante

- 1.450.000 élèves du secondaire, soit 25,4 % de l'ensemble des élèves du secondaire et 48 % des élèves des Gymnasien (filière secondaire longue),

- 82.000 élèves de l'enseignement professionnel, soit 3,4 %.

On compte par ailleurs 80 établissements allemands accueillant une filière bilingue franco-allemande . Ces filières proposent une phase d'apprentissage soutenu du français dès l'entrée dans le secondaire qui débouche, deux ans plus tard sur l'enseignement en français d'une matière au moins. Elles concernaient 12.000 élèves allemands en 1996.

Enfin, sur la base d'un accord gouvernemental franco-allemand, huit établissements de chaque pays permettent l' obtention simultanée du baccalauréat et de l'Abitur.

2. Les lycées franco-allemands

Le réseau d'enseignement français en Allemagne compte 14 établissements (écoles, collèges et lycées) répartis sur 10 villes (Berlin, Bonn, Düsseldorf, Francfort, Fribourg en Brisgau, Hambourg, Heidelberg, Münich, Sarrebrück et Stuttgart).

En vue de rapprocher les deux systèmes éducatifs, une convention franco-allemande du 10 février 1972 à créé trois lycées franco-allemands , dont 2 sont situés en Allemagne (Fribourg en Brisgau et Sarrebrück) et un en France (Buc).

Ces établissements intègrent dans une même communauté scolaire des élèves des deux pays et les préparent, à travers un cursus scolaire commun et des programmes harmonisés, au baccalauréat franco-allemand , examen bilingue valable de plein droit dans les deux pays.

Les 3 lycées franco-allemands scolarisent environ 3 000 élèves.

3. L'enseignement technologique

Dans le domaine de l'enseignement technologique, la coopération s'est manifestée par des échanges d'apprentis et de stagiaires, par la mise en équivalence de près d'une trentaine de diplômes français sanctionnant une formation professionnelle avec les diplômes allemands correspondants et par un développement de l'enseignement de la langue du partenaire dans le second cycle professionnel.

C. L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET LA RECHERCHE

Une coopération très diverse s'exerce dans les domaines de l'enseignement supérieur et de la recherche.

1. L'enseignement supérieur : le collège franco-allemand pour l'enseignement supérieur

Les relations universitaires franco-allemandes s'appuient sur plusieurs centaines d'accords interuniversitaires, dont certains ont débouché sur des échanges très intenses.

Elles ont franchi un pas important en 1988 avec la création du collège franco-allemand pour l'enseignement supérieur (CFAES). Ce comité franco-allemand d'experts, constitué à parité de 18 personnalités allemandes et françaises, est chargé de susciter, évaluer et soutenir financièrement des " cursus intégrés " entre établissements d'enseignement supérieur des deux pays, conduisant à des doubles diplômes.

Le Collège est dirigé par un Président et un Vice-président (un Allemand et un Français) élus pour 4 ans, permutant à mi-mandat, et disposant chacun d'un secrétariat (français à Strasbourg, allemand à Mayence).

Les "cursus intégrés " sont en règle générale créés à partir de cursus français et allemands préexistants, mis en relation par un système d'équivalences qui permet l'acquisition de deux diplômes nationaux en respectant la durée prévue des études dans la discipline concernée. Tous les étudiants d'un cursus font les mêmes études, définies en commun par les établissements partenaires et comportant au minimum trois semestres dans le pays partenaire, stages non compris. Les commissions d'admission et les jurys d'examen sont conjoints aux deux établissements. L'ensemble des modalités ainsi définies fait l'objet d'une convention entre établissements partenaires.

Les moyens financiers sont mis à disposition côté allemand par le Ministère fédéral des Affaires Etrangères et le Ministère fédéral chargé de la Formation, côté français par le ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur, de la recherche et de la technologie et le ministère des affaires étrangères.

Le budget 1998 s'établit à 22,6 millions de francs au total, l'essentiel des dépenses (80 %) portant sur les aides à la mobilité fournies aux étudiants.

Le CFAES a depuis sa création en 1988 suscité et accompagné 72 cursus intégrés , impliquant 140 établissements. Près de 1 000 étudiants , en nombre sensiblement égal de part et d'autre, suivent actuellement l'un de ses cursus. Les " double diplômés " du CFAES ont en général bénéficié d'une insertion professionnelle rapide.

C'est en vue de développer et diversifier ces formations communes, pour faire face notamment aux besoins identifiés par les milieux franco-allemands, qu'a été décidée la création de l' université franco-allemande , qui devrait prendre le relais, à partir de 1999, du CFAES, en étendant ses activités aux 1 er et 3 ème cycles universitaires.

2. La recherche

En matière de recherche, les échanges franco-allemands se sont multipliés, l'Allemagne étant le premier partenaire scientifique de la France en Europe.

On peut mentionner à ce titre le programme d'actions intégrées Procope du ministère des affaires étrangères, mené en coopération avec le ministère de l'éducation nationale, qui couvre le volet recherche de la coopération interuniversitaire et a financé 170 projets franco-allemands pour plus de 8 millions de francs.

En matière de copublications scientifiques, l'Allemagne est le 2 ème partenaire de la France après les Etats-Unis.

Plus de 150 chercheurs allemands travaillent comme fonctionnaires dans les organismes français de recherche qui, pour la plupart (CNRS, INSERM, IFREMER notamment) ont conclu des accords avec leurs homologues allemands.

II. LA CRÉATION DE L'UNIVERSITÉ FRANCO-ALLEMANDE

L'accord gouvernemental signé à Weimar le 1 er septembre 1997 jette les bases de l'université franco-allemande qui, à compter de l'automne 1999, devrait prendre le relais du collège franco-allemand pour l'enseignement supérieur.

A. LES OBJECTIFS DE L'UNIVERSITÉ FRANCO-ALLEMANDE

Le projet d'université franco-allemande, initié en 1996, a été préparé par un groupe de travail associant, côté français, le ministère des affaires étrangères et le ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche (dont un représentant de la conférence des présidents d'université et un représentant de la conférence des directeurs d'écoles et des formations d'ingénieurs) et côté allemand, le ministère des affaires étrangères, le ministère chargé de la formation supérieure et un représentant des Länder.

Ce groupe de travail a rapidement présenté ses conclusions, le projet ayant pu faire l'objet d'un accord gouvernemental quelques mois plus tard, au sommet de Weimar, le 19 septembre 1997.

Ce projet part de l'acquis constitué par le collège franco-allemand pour l'enseignement supérieur et vise à en amplifier l'impact sur les plans quantitatif et qualitatif, en augmentant le type de formations proposées et en permettant à l'université de délivrer ses propres diplômes.

1. Une augmentation des formations communes qualifiantes

Alors que le collège franco-allemand pour l'enseignement supérieur a développé quelques 70 filières de formations communes de 2 e cycle, conduisant à une maîtrise ou à un diplôme d'ingénieur, l'université franco-allemande se voit pour sa part assigner la mission de couvrir l'ensemble des cycles universitaires :

- par un développement des échanges entre universités françaises et allemandes au niveau du 1 er cycle , en vue en particulier de renforcer les formations linguistiques et de délivrer un enseignement préparatoire aux cursus intégrés,

- par l'ouverture de formations doctorales communes (écoles doctorales franco-allemandes),

- par la définition de projets de recherche communs et l'amplification des échanges d'enseignants chercheurs.

Par ailleurs, l'université franco-allemande aura également pour vocation la mise en place de formations communes en matière de formation professionnelle continue.

L'extension du champ d'intervention devrait permettre de doubler le nombre d'étudiants concernés par des formations communes qui pourraient atteindre 2 000 lors de l'année universitaire 2000/2001. Il répondra à la demande des milieux franco-allemands qui font actuellement appel aux diplômés du CFAES et qui recherchent des formations plus diversifiées et plus longues.

2. La délivrance des diplômes franco-allemands

Les formations communes actuellement mises en oeuvre par le CFAES débouchent sur l'acquisition de deux diplômes nationaux.

L'université franco-allemande devrait pour sa part pouvoir délivrer ses propres diplômes , avec le concours des établissements français et allemands. Ces diplômes seront décernés par des jurys binationaux et jouiront d'une reconnaissance de plein droit dans les deux pays, de manière à garantir, dans chacun d'entre eux, la double compétence des jeunes diplômés et à faciliter leur insertion professionnelle.

Ainsi, dans un premier temps, l'université franco-allemande devrait-elle continuer, comme le fait actuellement le CFAES, à appuyer l'acquisition, à l'issue de programmes communs, de deux diplômes nationaux de niveau comparable ou de diplômes binationaux.

Dans un second temps, l'université franco-allemande délivrera ses propres diplômes. Constituant un établissement supranational, elle ne sera pas soumise à la procédure nationale d'habilitation, qui prévoit notamment, après expertise, un examen par le conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER). Toutefois certaines conditions seront requises pour que ces diplômes soient reconnus de plein droit en France comme en Allemagne. Dans chacun des pays devrait être établie une équivalence explicite entre le diplôme de l'université franco-allemande et le diplôme national équivalent , en habilitant selon les procédures nationales la formation commune conduisant au diplôme de l'université franco-allemande. L'étudiant obtiendra ainsi le diplôme de cette dernière et deux diplômes nationaux reconnus équivalents.

B. L'ORGANISATION ET LE FONCTIONNEMENT DE L'UNIVERSITÉ FRANCO-ALLEMANDE

L'accord du 19 septembre 1997 définit le cadre juridique, les missions et le fonctionnement de l'université.

1. Le cadre juridique et financier

L'article premier de l'accord précise que l'université franco-allemande est " constituée par un réseau d'établissements d'enseignement supérieur français et allemands ".

Il lui confère la personnalité morale .

Elle constituera une organisation internationale bénéficiant de certains privilèges et immunités analogues à ceux des institutions spécialisées des Nations-Unies (immunités de juridiction, libre détention et transfert de fonds, exonération des impôts directs et des droits de douane), ceux-ci étant accordés à l'université elle-même et non à son personnel.

L'université franco-allemande bénéficiera d'un siège administratif propre. Il avait été convenu que celui-ci serait établi en Allemagne, en contrepartie notamment de l'installation en France du siège de l'Office franco-allemand pour la jeunesse. L'Allemagne a attendu les suites des élections législatives pour faire connaître le choix arrêté par la conférence des ministres présidents des Länder, qui s'est porté sur Sarrebrück .

L'article 8 précise que l'université franco-allemande disposera de son propre budget , constitué de contributions d'un montant sensiblement équivalent des deux pays. Le statut juridique propre de l'université lui permettra d'obtenir des financements tiers , en particulier d'origine privée, et de gérer ses fonds selon des règles plus souples que celles du CFAES.

D'après les informations fournies à votre rapporteur, le budget de l'université franco-allemande devrait rapidement être porté très au-delà de celui du CFAES (22 millions de francs), les estimations tablant sur un budget de 52 millions de francs en 2000 et environ 60 millions de francs en régime de croisière, après 2001. La contribution française passerait ainsi de 11 à 30 millions de francs.

2. Les missions

L'article 3 énumère les missions de l'université franco-allemande en vue de renforcer la coopération entre les deux pays en matière d'enseignement supérieur et de recherche. Elles consistent à :

- promouvoir les relations et les échanges entre établissements d'enseignement supérieur français et allemands,

- mettre en oeuvre des activités et des projets d'intérêt commun en matière d'enseignement, de formation initiale et continue, de recherche et de formation de jeunes chercheurs.

Les actions envisagées sont les suivantes :

- programmes d'études franco-allemands dans différentes disciplines et différents cycles d'études, y compris périodes de stage professionnels,

- périodes d'études de durée significative dans les établissements de pays partenaires , à condition que les études et examens correspondant soient validés,

- acquisition, à l'issue du programme d'études communs, de deux diplômes de niveau comparable ou de diplômes binationaux des établissements partenaires,

- délivrance, par l'université franco-allemande, de ses propres diplômes avec le concours des établissements , dès lors que ceux-ci sont habilités à délivrer des diplômes de niveau comparable dans le cadre national, que l'intégration des cursus d'études justifie l'attribution d'un diplôme unique et que ce dernier soit reconnu de plein droit dans les deux pays,

- coopération dans le domaine des formations doctorales ,

- projets communs de recherche et de développement ,

- actions communes de formation continue ,

- développement d'un réseau de communications entre établissements,

- développement, de manière générale, des rencontres et des coopérations dans le domaine de l'enseignement supérieur et de la recherche, y compris avec des pays tiers.

Pourront devenir membres de l'Université franco-allemande les établissements d'enseignement supérieur français et allemands mettant en oeuvre un programme de coopération dans les domaines de l'enseignement, de la formation des jeunes chercheurs et de la recherche.

3. Les organes de l'université franco-allemande

L'accord définit trois organes.

L' assemblée des établissements membres comportera un représentant de chaque établissement membre.

Le conseil d'université sera composé à part égale de Français et d'Allemands. Il comportera 22 membres désignés pour quatre ans :

- le président et le vice-président de l'université,

- 4 représentants des administrations publiques (ministères des affaires étrangères et de l'enseignement supérieur pour la France, représentants du gouvernement fédéral et des Länder pour l'Allemagne),

- 8 enseignants et enseignants chercheurs (dont 4 désignés par l'assemblée des établissements membres, 2 désignés par la conférence des recteurs d'université allemands, un désigné par la conférence des présidents d'université et un par la conférence des directeurs d'écoles et de formations d'ingénieurs),

- 4 membres désignés en raison de leurs compétences par les ministres des affaires étrangères et de l'enseignement supérieur pour la France, par l'office allemand d'échanges universitaires et par l'Association allemande pour la recherche,

- et 4 personnalités du monde économique cooptées par le conseil d'université.

Enfin, le président et le vice-président , l'un français, l'autre allemand, seront élus par l'assemblée des établissements membres sur proposition du conseil d'université pour une durée de 4 ans ; leurs fonctions alterneront à mi-mandat.

Le conseil d'université se voit reconnaître un pouvoir d'orientation, par la définition des programmes de coopération, l'admission des établissements membres et l'octroi des subventions à ces derniers.

CONCLUSION

L'accord du 19 septembre 1997 relatif à la création de l'université franco-allemande participe d'un double mouvement :

- la volonté de construire une " Europe de la connaissance ", ainsi que l'ont présenté plusieurs ministres européens à la Sorbonne le 25 mai 1998, qui se traduit par la multiplication des projets de cursus intégrés, de double diplômes, de filières bilingues, d'écoles doctorales européennes, en vue de renforcer la mobilité des étudiants, des jeunes chercheurs et des étudiants,

- la volonté de relancer la coopération éducative franco-allemande, en donnant une impulsion nouvelle aux échanges universitaires.

Au titre du premier mouvement, on observera que la politique française de coopération s'engage dans des directions variées, comme en témoigne l'accord franco-italien du 6 octobre 1998, signé lors du sommet de Florence, portant création d'une université franco-italienne.

L'Université franco-allemande peut pour sa part se prévaloir de l'expérience et de l'acquis accumulés, depuis plus de 10 ans, par le collège franco-allemand pour l'enseignement supérieur. Elle se distinguera par son autonomie juridique propre, qui lui donnera des moyens d'action accrus et par la possibilité de délivrer ses propres diplômes reconnus dans chaque pays. Elle se caractérise également par son ambition de couvrir tous les cycles universitaires, la recherche et la formation professionnelle.

On peut attendre de ces nouveaux cursus et de ces nouveaux diplômes des débouchés accrus pour nos étudiants et des formations plus adaptées aux besoins actuels.

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées vous propose donc d'adopter le présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du 3 février 1999.

A la suite de l'exposé du rapporteur, M. Xavier de Villepin, président, a déploré la trop faible proportion d'élèves français étudiant l'allemand dans l'enseignement secondaire, particulièrement en " première langue ".

M. Pierre Biarnès a approuvé cette remarque en soulignant que cette situation avait pour contrepartie fâcheuse la faiblesse de l'apprentissage du français dans l'enseignement secondaire des autres pays européens.

La commission a alors approuvé le projet de loi qui lui était soumis.

PROJET DE LOI

(Texte proposé par le Gouvernement)

Article unique

Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne relatif à la création de l'Université franco-allemande, signé à Weimar le 19 septembre 1997, et dont le texte est annexé à la présente loi. 1( * )

ANNEXE -
ETUDE D'IMPACT2( * )

Etat de droit et situation de faits existants et leurs insuffisances :

Les cursus universitaires intégrés franco-allemands étaient auparavant gérés par le Collège Franco-Allemand pour l'Enseignement Supérieur (CFAES), créé en 1988. Cette institution, dépourvue de la personnalité juridique et dotée d'un double siège, ne fonctionne qu'avec les moyens publics mis à sa disposition. Il couvre une soixantaine de cursus touchant environ 800 étudiants français et allemands, essentiellement dans les domaines juridique, économique et technologique. Les cursus intégrés se situent au niveau de la maîtrise et aboutissent à la délivrance d'un double diplôme.

Cette formule a rencontré un vif succès. Elle est cependant incomplète (ne couvrant pas tous les cycles universitaires) et requiert des moyens complémentaires (la demande étant bien supérieure à l'offre).

Bénéfices escomptés :

La création de l'Université franco-allemande permet de poursuivre une opération bien lancée et ayant fait ses preuves, tout en l'améliorant dans tous les domaines.

1. Le programme de formation universitaire franco-allemand est complété ; seront couverts dorénavant les premier, deuxième et troisième cycles universitaires. La capacité d'accueil des programmes passe ainsi de 800 à 2 000 étudiants par an. Cet accroissement répond à la demande du monde de l'emploi ; les milieux économiques franco-allemands font en effet régulièrement appel aux diplômés actuels du CFAES et demandent des formations plus diversifiées et plus longues. L'Université franco-allemande aura, par ailleurs, vocation à développer des programmes de formation à la recherche par le soutien qu'elle apportera à des écoles doctorales franco-allemandes.

2. Le choix d'un siège administratif juridique pour l'Université (qui reste encore à déterminer) constitue une économie d'échelle par rapport à la situation actuelle (environ 1,5 MF par an). Ces moyens peuvent être consacrés entièrement à des mesures de formation.

La transformation de statut réalisée à l'occasion de la transformation du Collège Franco-Allemand pour l'Enseignement Supérieur en Université franco-allemande entraîne de nombreux avantages : l'Université est dotée d'une personnalité juridique propre, qui l'autorise à recevoir des fonds d'origine privée, à assurer une gestion budgétaire pluriannuelle plus souple et, en fin de compte, plus économique.

L'Université franco-allemande est enfin habilitée, une fois en place, à délivrer un diplôme franco-allemand spécifique, garantissant dans les deux pays la double compétence des titulaires de cette formation diplômante.



1 Voir le texte annexé au document Sénat n° 148 (1998-1999).

2 Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des parlementaires.



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