Projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Nicaragua
DURAND-CHASTEL (Hubert)
RAPPORT 322 (98-99) - COMMISSION DES AFFAIRES ETRANGERES
Table des matières
-
INTRODUCTION
- I. LA SITUATION POLITIQUE ET ECONOMIQUE DU NICARAGUA
- II. LES RELATIONS ENTRE LA FRANCE ET LE NICARAGUA
- III. UN DISPOSITIF CLASSIQUE DE PROTECTION RÉCIPROQUE DES INVESTISSEMENTS
- CONCLUSION
- EXAMEN EN COMMISSION
- PROJET DE LOI
-
ANNEXE -
ETUDE D'IMPACT
INTRODUCTION
N°
322
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès-verbal de la séance du 28 avril 1999
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Nicaragua sur l' encouragement et la protection réciproques des investissements ,
Par M.
Hubert DURAND-CHASTEL,
Sénateur.
(1)
Cette commission est composée de :
MM. Xavier de Villepin,
président
; Serge Vinçon, Guy Penne, André Dulait,
Charles-Henri de Cossé-Brissac, André Boyer, Mme Danielle
Bidard-Reydet,
vice-présidents
; MM. Michel Caldaguès,
Daniel Goulet, Bertrand Delanoë, Pierre Biarnès,
secrétaires
; Bertrand Auban, Michel Barnier, Jean-Michel Baylet,
Jean-Luc Bécart, Daniel Bernardet, Didier Borotra, Jean-Guy
Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Robert Calmejane, Mme Monique
Cerisier-ben Guiga, MM. Marcel Debarge, Robert Del Picchia, Hubert
Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Hubert Falco, Jean
Faure, Jean-Claude Gaudin, Philippe de Gaulle, Emmanuel Hamel,
Roger Husson, Christian de La Malène, Philippe Madrelle,
René Marquès, Paul Masson, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Jean-Luc
Mélenchon, René Monory, Aymeri de Montesquiou, Paul d'Ornano,
Charles Pasqua, Michel Pelchat, Alain Peyrefitte, Xavier Pintat, Bernard
Plasait, Jean-Marie Poirier, Jean Puech, Yves Rispat, Gérard Roujas,
André Rouvière.
Voir le numéro :
Sénat : 213
(1998-1999).
Traités et conventions. |
Mesdames, Messieurs,
Le présent projet de loi a pour objet d'autoriser l'approbation de
l'accord sur l'encouragement et la protection réciproques des
investissements, signé à Managua le 13 février 1998 entre
la France et le Nicaragua.
Cet accord comporte des dispositions très voisines de celles des quelque
quatre-vingts textes analogues qui lient déjà la France à
des pays tiers. Il s'agit donc d'un dispositif extrêmement classique que
votre commission des affaires étrangères a déjà eu,
à de multiples reprises, l'occasion d'exposer.
Présenté au Parlement en même temps que deux autres accords
analogues conclus avec le Honduras et le Guatemala, l'accord signé avec
le Nicaragua illustre la volonté de notre pays de renforcer nos
relations avec l'Amérique centrale, ainsi que l'a récemment
illustré le déplacement effectué dans la région par
notre Président de la République au mois de novembre dernier.
Le Nicaragua s'est engagé depuis 1990 sur la voie de la
démocratie, qui paraît aujourd'hui consolidée. Les
années de guerre civile ont profondément affecté
l'économie d'un pays qui compte parmi les plus pauvres de
l'Amérique centrale et des Caraïbes et qui est aujourd'hui
très dépendant des financements extérieurs. Dans le cadre
des projets financés par des bailleurs de fonds internationaux, des
perspectives d'investissement pourraient se présenter pour nos
entreprises, ce qui justifie l'instauration d'un cadre juridique
bilatéral pour ces investissements. L'accord s'inscrit également
dans une politique générale de renforcement des liens entre
l'Europe, et en particulier la France, avec l'Amérique latine.
Votre rapporteur effectuera une rapide présentation du Nicaragua et de
ses relations avec la France avant de détailler le dispositif de
l'accord d'encouragement et de protection réciproques des
investissements.
I. LA SITUATION POLITIQUE ET ECONOMIQUE DU NICARAGUA
Situé sur l'isthme centraméricain au nord du Costa Rica et au sud-est du Honduras, le Nicaragua compte 121.000 km 2 et 4,6 millions d'habitants, dont plus d'1 million d'habitants dans la seule capitale, Managua.
A. L'ÉVOLUTION POLITIQUE DU NICARAGUA
1. La vie politique au Nicaragua
L'histoire politique récente du Nicaragua a bien entendu
été considérablement marquée par la guerre civile
qui aurait fait plus de 50.000 morts et qui a considérablement
affaibli l'économie du pays.
Au pouvoir depuis la révolution de 1979 qui avait mis fin au
régime de Somoza, le
Front sandiniste de Libération
nationale
, mouvement de guérilla fondé en 1961 puis
transformé en partie politique, a exercé le pouvoir jusqu'en
1990, date à laquelle
Mme Violeta CHAMORRO
,
candidate de l'opposition
,
était élue
à
la Présidence de la République
face à
Daniel ORTEGA, leader sandiniste.
La Constitution de 1987 a instauré un régime présidentiel
avec un président élu pour 5 ans et une Assemblée
nationale de 93 députés.
Les élections générales du 20 octobre 1996 ont
confirmé l'ancrage de la démocratie au Nicaragua.
Mme CHAMORRO a cédé la présidence à l'ancien
maire de Managua,
M. Arnold ALEMAN
, appartenant lui aussi à
l'Alliance libérale. Sa formation réunit
42 députés sur 93 et peut compter sur l'appui de
6 députés de petits partis conservateurs qui lui assurent la
majorité à l'Assemblée nationale, les sandinistes comptant
pour leur part 36 députés. Cet équilibre politique ne
devrait pas varier jusqu'en 2001, date de la fin de la législature.
Si le Front sandiniste demeure dans une attitude de confrontation face à
la majorité gouvernementale, plusieurs éléments ont
contribué à créer une atmosphère politique moins
tendue. Le chef de l'Etat a convoqué en juin 1997 un
" dialogue national " réunissant les représentants de
la société civile et des différents partis politiques, le
désarmement est désormais quasi-général et un
accord sur la propriété a été conclu.
Les priorités du programme gouvernemental consistent désormais
à appliquer cet accord sur la propriété, à
neutraliser les derniers foyers de guerilla qui subsistent dans le nord et le
centre du pays, à favoriser la réinsertion des ex-guerilleros,
à lutter contre la corruption et à opérer un redressement
économique indispensable pour réduire la pauvreté qui
frappe une grande majorité de la population.
2. Le Nicaragua sur la scène régionale
La fin
de la guerre civile et le changement politique intervenus en 1990 ont
profondément modifié la position du Nicaragua sur la scène
régionale. Ici également, la priorité va à la
normalisation des relations avec les pays voisins, le Nicaragua s'étant
particulièrement impliqué dans le processus d'intégration
centraméricaine, comme en témoigne sa décision de
rejoindre " triangle nord ", zone de libre échange
commune au Guatémala, au Honduras et au Salvador. Au-delà des
aspects économiques, Managua milite pour une union politique
centraméricaine.
Les relations avec la Havane n'ont pas été rompues et
malgré l'attention portée par les autorités
nicaraguayennes à la situation des droits de l'homme à Cuba,
plusieurs signes témoignent que les liens entre les deux pays demeurent,
qu'il s'agisse de l'opposition du président Aleman à la loi
Helms Burton ou de la décision des autorités cubaines,
après l'ouragan Mitch, d'annuler la dette nicaraguayenne.
Les relations politiques avec les Etats-Unis apparaissent encore
affectées par les événements de la décennie
passée. La question des propriétés confisquées aux
citoyens américains n'est pas résolue. L'assistance
américaine, particulièrement massive après 1990, a
fortement décru et se situe aujourd'hui à un niveau
inférieur à celle de l'Union européenne. Ce n'est que tout
récemment, après le passage de l'ouragan Mitch, que
Washington a relancé significativement ses relations avec
Managua.
B. LA SITUATION ÉCONOMIQUE AU NICARAGUA
Le
Nicaragua est, avec Haïti, le pays le plus pauvre de l'Amérique
Latine et des Caraïbes. La PIB par habitant n'était en 1998 que de
470 dollars par an. La dette extérieure représente trois
fois le montant du PIB, bien qu'elle ait diminué de moitié entre
1990 et 1997. Le chômage touche près de 40 % de la population
et 70 % des Nicaraguayens vivent sous le seuil de pauvreté.
C'est dans ce contexte difficile qu'ont été engagées
plusieurs
réformes économiques
, avec l'adoption du projet
de loi sur la propriété ainsi que de lois de privatisation ou de
restructuration d'entreprises publiques dans les secteurs du
téléphone, de l'eau et de l'électricité. Une
politique de redressement a permis entre 1994 et 1997 une croissance
régulière de 4 à 5 % l'an et une réduction de
l'inflation.
Les résultats encourageants obtenus par l'économie du Nicaragua
ont favorisé l'obtention d'une
aide extérieure
.
Après la signature d'une première
facilité d'ajustement
structurel
renforcé
avec le Fonds monétaire
international concernant la période 1994-1997, un second accord a
été signé le 28 mars 1998 pour la période
1998-2000. Le groupe consultatif réuni sous l'égide de la Banque
interaméricaine de développement en avril 1998 a
également annoncé un engagement des différents donateurs
portant sur un total de 1,8 milliards de dollars de crédit pour la
période 1998-2000. Enfin, le Nicaragua a obtenu à plusieurs
reprises du Club de Paris un allégement de la dette extérieure.
Cette aide extérieure s'avère plus que jamais indispensable pour
faire face à un déficit des finances publiques toujours
très élevé (5,7 % du PIB), au service de la dette
extérieure, qui absorbe 56 % des exportations et au déficit
des comptes extérieurs.
L'ouragan Mitch a fortement affecté l'économie du Nicaragua en
détruisant la plupart des infrastructures, le cinquième de la
surface cultivée et le sixième de la récolte de
café. Selon les autorités du pays, les dégâts
s'élèveraient à 1,5 milliard de dollars, soit
65 % du PIB annuel. L'année 1998 s'est cependant soldée par
une croissance de 4 % et, selon la Banque centrale, elle pourrait se
situer entre 5 et 7 % en 1999. A la suite de la catastrophe, plusieurs
pays ont annulé une partie de leurs créances bilatérales ,
la France ayant pour sa part effacé
la totalité de la
dette
du Nicaragua
.
II. LES RELATIONS ENTRE LA FRANCE ET LE NICARAGUA
Le changement politique intervenu en 1990 a favorisé une reprise des relations entre la France et le Nicaragua, marquées par une coopération relativement étroite.
A. LES RELATIONS POLITIQUES ET CULTURELLES
1. Les relations politiques
Les
relations politiques entre la France et le Nicaragua ont été
relancées avec l'arrivée au pouvoir de
Mme Violetta CHAMORRO en 1990. Sa visite officielle en France, en
1992, a entraîné un
développement de la
coopération dans tous les domaines
. Elle a été suivie
de plusieurs visites ministérielles et, lors de son dernier
déplacement en Amérique centrale, en novembre dernier, le
Président de la République s'est rendu à Managua.
Le soutien de la France au Nicaragua s'est traduit par une importante
aide
financière
. La France a consenti des allégements de dettes,
non seulement dans le cadre du Club de Paris mais également à la
suite d'initiatives unilatérales. Après l'ouragan Mitch, elle a
annulé la totalité des créances d'aide publique au
développement du Nicaragua, soit un montant de 449 millions de
francs. La France a également conclu plusieurs protocoles financiers et
accordé au Nicaragua une aide humanitaire (projets dans le domaine du
déminage, de l'appareillage des handicapés de guerre et du
soutien aux enfants des rues) et une aide alimentaire régulière
(3000 tonnes de céréales et la contre-valeur de
1 million de francs de produits diversifiés).
2. La coopération culturelle, scientifique et technique
Le
Nicaragua constitue, pour la coopération culturelle, scientifique et
technique, le
premier partenaire de la France en Amérique
centrale
, bien que les moyens lui étant consacrés aient
été fortement réduits au cours des dernières
années.
La part principale de cette coopération porte sur la défense et
la
promotion du français
, qui n'est étudié que par
7.000 élèves et enseigné par une cinquantaine de
professeurs, dans une quinzaine d'établissements. La coopération
linguistique et éducative s'attache à développer avec
l'Université autonome du Nicaragua la formation de professeurs de
français.
Deux Alliances françaises, à Managua et Leon, accueillent
près de 1.200 élèves, alors que le
collège Victor Hugo de Managua, créé en 1971,
scolarise 200 élèves (dont 22 Français).
Les principaux axes de la coopération scientifique et technique
concernent la coopération universitaire dans différentes
disciplines, la coopération en matière de santé (soutien
à la faculté de médecine, projet de formation à la
médecine d'urgence), la formation des responsables de l'eau et de
l'assainissement, l'appui à la police et la formation de diplomates au
sein de l'Académie diplomatique.
B. LES RELATIONS ÉCONOMIQUES
1. Une faible présence commerciale
Les
échanges commerciaux du Nicaragua sont actuellement orientés vers
les Etats-Unis (32 % des parts de marché) et le Mexique et
l'Amérique centrale (33 % des parts de marché). La part de
marché de la France ne s'élève qu'à 0,5 %,
niveau très inférieur à celle de l'Allemagne (7 %) ou
de l'Espagne (6 %).
Par ailleurs, on ne constate aucune implantation industrielle directe
française au Nicaragua bien qu'au cours de la période 1990-1997
le flux d'investissements directs étrangers se soit élevé
à 340 millions de dollars.
2. Les perspectives d'investissement
Le programme de cession d'actifs publics au Nicaragua vient à peine de démarrer, avec la privatisation de l'entreprise nationale de télécommunications, les prochains secteurs concernés devant être ceux de l'énergie et de la distribution des eaux. Les projets qui pourraient intéresser nos entreprises s'avèrent assez limités et concernent principalement les équipements hospitaliers, la construction d'une centrale électrique, les équipements de sécurité aérienne et de surveillance côtière, le cadastre rural et l'extension du réseau téléphonique.
III. UN DISPOSITIF CLASSIQUE DE PROTECTION RÉCIPROQUE DES INVESTISSEMENTS
L' accord signé le 13 février 1998 entre la France et le Nicaragua est proche, pour l'essentiel, des diverses conventions de protection des investissements signées par la France avec près de 80 pays.
A. LE CHAMP D'APPLICATION DE L'ACCORD
1. Champ d'application géographique
Il comprend le territoire, y compris les zones maritimes, de chacune des parties (article 2). Les zones maritimes sont définies comme celles sur lesquelles les parties exercent, en conformité avec le droit international, une souveraineté, des droits souverains ou une juridiction aux fins de prospection, d'exploitation et de préservation des ressources naturelles.
2. Investissements concernés
Les
investissements recouvrent
l'ensemble des avoirs
dont l'article 1.1 de
l'accord donne une liste qui comprend notamment
les biens meubles et
immeubles
ainsi que les autres droits réels (hypothèque,
privilège, usufruit, cautionnement...),
les actions, les obligations,
les droits de propriété intellectuelle, commerciale et
industrielle, les concessions
accordés par la loi ou en vertu d'un
contrat.
Par ailleurs, la protection jouera pour les investissements conformes à
la législation de la partie contractante sur le territoire de laquelle
ils sont réalisés,
quelle que soit la date de leur
réalisation,
antérieure ou postérieure à
l'entrée en vigueur de l'accord (article 1.1). Toutefois, l'accord ne
s'applique à aucun différend soumis aux tribunaux avant son
entrée en vigueur.
3. Les investisseurs intéressés
Il convient de distinguer (article 1.2), d'une part, les personnes physiques qui doivent posséder la nationalité de l'une des parties contractantes (article 1.2) et, d'autre part, les sociétés constituées conformément à la législation de l'Etat contractant et y possédant leur siège social ou contrôlées directement ou indirectement par des nationaux de l'une des parties ou par des personnes morales possédant leur siège sur leur territoire.
4. Les revenus visés
Les revenus recouvrent "toutes les sommes produites par un investissement, telles que bénéfices, redevances ou intérêts" (article 1.4).
B. DES STIPULATIONS CLASSIQUES TENDANT À ENCOURAGER ET PROTÉGER LES INVESTISSEMENTS RÉCIPROQUES
1. L'encouragement des investissements
L'encouragement des investissements, dont le principe est
posé par l'article 3, revêt deux formes :
- l'octroi d'un
traitement "juste et équitable"
pour ces
investissements conformément aux principes du droit international
(article 4), ce qui couvre notamment le traitement juste et équitable de
l'achat et du transport de biens liés à un investissement.
- l'application par chaque partie d'un
traitement au moins aussi favorable
aux investisseurs de l'autre partie que celui accordé à ses
propres investisseurs, ou l'octroi de la clause de la nation la plus
favorisée,
si celle-ci se révèle plus avantageuse
(article 5).
Ce régime d'encouragement ne s'étend pas cependant aux avantages
consentis dans le cadre d'accords particuliers à l'image d'une zone de
libre-échange, d'une union douanière, d'un marché commun
ou d'une autre forme d'organisation économique régionale.
Par ailleurs, il convient également de souligner que le principe d'un
traitement aussi favorable pour les investissements nationaux que pour les
investissements de l'autre partie, ne s'applique pas dans le domaine fiscal.
Compte tenu de l'importance des allégements fiscaux accordés
à certains investisseurs nationaux, ces derniers
bénéficient ainsi d'un net avantage.
Enfin, il est précisé (article 4) que dans le cadre de leur
législation interne, les parties contractantes examineront "avec
bienveillance" les demandes d'entrée et d'autorisation de séjour,
de travail et de circulation introduites par des nationaux au titre d'un
investissement.
2. La protection des investissements : trois principes traditionnels
Les
investisseurs de l'autre partie doivent d'abord bénéficier, en
cas de dépossession pour cause d'utilité publique
(nationalisations, expropriations...), d'une
"indemnité prompte et
adéquate ",
dont le montant est évalué par rapport
à une situation économique antérieure à toute
menace de dépossession (article 6.2).
En second lieu, en cas de dommages et pertes provoqués par des
circonstances exceptionnelles telles qu'un conflit armé, une
révolution, l'état d'urgence, les investisseurs étrangers
ont droit à un
traitement aussi favorable que celui des investisseurs
nationaux
ou de la nation la plus favorisée (article 6.3).
Le principe de la liberté des transferts,
essentiel pour les
investisseurs, se trouve garanti à l'article 7 de l'accord. Il
s'applique sans réserve notamment aux revenus et aux produits de la
cession ou de la liquidation de l'investissement (y compris les plus-values).
Son application apparaît, en revanche, plus restreinte pour les
transferts des revenus des ressortissants de l'une des parties travaillant sur
le territoire de l'autre partie puisque ceux-ci ne sont garantis que dans la
limite d'une "quotité appropriée de leur
rémunération".
C. UN MODE TRADITIONNEL DE RÈGLEMENT DES CONFLITS
L'accord prévoit deux dispositifs différents de règlement des conflits.
1. Différends entre l'une des parties et un investisseur de l'autre Etat
Pour le
règlement des différends, l'accord du 13 février 1998
(article 11) prévoit qu'à défaut de règlement
amiable dans les six mois, le différend est soumis à la demande
de l'une ou l'autre des parties à l'arbitrage international du Centre
international pour le règlement des différends relatifs aux
investissements (CIRDI).
L'article 9 stipule que lorsque l'une des parties effectue au profit de l'un de
ses investisseurs un versement en vertu de la garantie donnée pour un
investissement sur le territoire de l'autre partie, elle se trouve
"subrogée dans les droits et actions" de celui-ci.
2. Différends relatifs à l'interprétation et à l'application du présent accord
A défaut de règlement amiable par la voie diplomatique dans un délai de six mois, ces différends sont soumis à un tribunal d'arbitrage ad hoc dont les décisions sont définitives et exécutoires de plein droit (article 11).
o
o o
Quant
aux dispositions finales de l'accord, elles prévoient que les
règles plus favorables issues de la législation interne ou
d'accords bilatéraux prévaudront sur celles de l'accord (article
10).
L'accord est conclu pour une durée initiale de dix ans et sera reconduit
tacitement après ce terme, sauf dénonciation par l'une des
parties avec préavis d'un an. Enfin, il prévoit de prolonger
pendant vingt ans la protection des investissements effectués
pendant la période de validité de l'accord (article 12).
L'Assemblée nationale du Nicaragua a autorisé la ratification de
cet accord le 10 juin 1998.
CONCLUSION
Alors
que les conséquences de l'ouragan Mitch paraissent pouvoir être
absorbées par l'économie nicaraguayenne, dont la croissance
devrait être soutenue en 1999, le pays reste dépendant, pour
amorcer son développement, du flux de financement extérieur.
L'attente d'investissements étrangers justifie l'adoption d'un cadre
juridique encourageant et protégeant ces derniers. Bien que modestes
aujourd'hui, les investissements d'entreprises françaises pourraient
s'accroître à l'avenir dans le cadre en particulier de projets de
développement financés par l'aide extérieure ou de
privatisations d'entreprises du secteur public.
Pour cette raison, votre commission des affaires étrangères, de
la défense et des forces armées vous demande d'approuver cet
accord conclu avec le Nicaragua, premier partenaire de la France pour la
coopération en Amérique centrale, et d'adopter le présent
projet de loi.
EXAMEN EN COMMISSION
La
Commission a examiné le présent rapport au cours de sa
séance du mercredi 28 avril 1999.
A la suite de l'exposé du rapporteur,
M. Xavier de Villepin,
président
, a évoqué les conditions dans lesquelles se
présentait le sommet Union européenne-Amérique latine du
mois de juin prochain. Il a notamment signalé les difficultés
liées aux discussions relatives à l'accès du marché
européen pour les produits agricoles latino-américains. Il a
interrogé le rapporteur sur la récente évolution du
contentieux de la banane, opposant l'Union européenne aux Etats-Unis,
ainsi qu'aux pays latino-américains.
M. Christian de La Malène
s'est interrogé sur les risques
de résurgence des conflits internes dans les pays d'Amérique
centrale.
A la suite de ces interventions,
M. Hubert Durand-Chastel
,
rapporteur
, a précisé que la récente
décision de l'organisation mondiale du commerce (OMC) relative au
contentieux de la banane avait renforcé les demandes américaines
et contraindrait l'Union européenne à ouvrir son
marché ; en revanche, l'OMC avait très nettement
réduit l'évaluation du préjudice subi par les producteurs
américains par rapport aux estimations que ceux-ci avaient
avancées .
La commission a alors approuvé le projet de loi qui lui était
soumis.
PROJET DE LOI
(Texte
proposé par le Gouvernement)
Article unique
Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Nicaragua sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements, signé à Managua le 13 février 1998, et dont le texte est annexé à la présente loi 1( * ) .
ANNEXE -
ETUDE D'IMPACT
- Etat
de droit et situation de fait existants et leurs insuffisance : sans objet
- Bénéfices escomptés en terme :
* d'emploi
: impossible à quantifier ;
* d'intérêt général
: enrichissement de
nos relations diplomatiques ; cet accord encouragera nos investisseurs
à venir s'implanter dans ce pays, dans la mesure où ils
bénéficieront de garanties juridiques appropriées
(liberté de transfert, protection contre les expropriations et droit
inconditionnel à l'arbitrage international).
* financière
: l'accord permettra au Gouvernement d'accorder
la garantie de la Coface pour les investisseurs français,
conformément à la loi de finances rectificative pour 1971 ;
l'accord ouvre par ailleurs la possibilité à la Coface d'exercer
un recours subrogatoire contre l'Etat d'accueil en cas d'indemnisation.
* de simplification des formalités administratives
:
aucune ;
* de complexité de l'ordonnancement juridique
: sans
objet.
1 Voir le texte annexé au document Sénat n° 213 (1998-1999).