Projet de loi autorisant la ratification des amendements à la constitution de l'Organisation internationale pour les migrations
MASSON (Paul)
RAPPORT 280 (1999-2000) - COMMISSION DES AFFAIRES ETRANGERES
Rapport au format Acrobat ( 45 Ko )Table des matières
- INTRODUCTION
- CONCLUSION
- EXAMEN EN COMMISSION
- PROJET DE LOI
-
ANNEXE -
ETUDE D'IMPACT33 Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des parlementaires.
N°
280
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000
Annexe au procès-verbal de la séance du 22 mars 2000
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant la ratification des amendements à la constitution de l' Organisation internationale pour les migrations ,
Par M.
Paul MASSON,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Xavier de Villepin, président ; Serge Vinçon, Guy Penne, André Dulait, Charles-Henri de Cossé-Brissac, André Boyer, Mme Danielle Bidard-Reydet, vice-présidents ; MM. Michel Caldaguès, Daniel Goulet, Bertrand Delanoë, Pierre Biarnès, secrétaires ; Bertrand Auban, Jean-Michel Baylet, Jean-Luc Bécart, Jean Bernard, Daniel Bernardet, Didier Borotra, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Marcel Debarge, Robert Del Picchia, Xavier Dugoin, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Hubert Falco, Jean Faure, Jean-Claude Gaudin, Philippe de Gaulle, Emmanuel Hamel, Roger Husson, Christian de La Malène, Philippe Madrelle, René Marquès, Paul Masson, Serge Mathieu, Pierre Mauroy, Jean-Luc Mélenchon, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. René Monory, Aymeri de Montesquiou, Paul d'Ornano, Michel Pelchat, Xavier Pintat, Bernard Plasait, Jean-Marie Poirier, Jean Puech, Yves Rispat, Gérard Roujas, André Rouvière.
Voir le
numéro
:
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Traités et conventions. |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
L'Organisation internationale pour les migrations (OIM) demeure une institution
encore largement méconnue. Son action au service des
réfugiés, moins visible sans doute que celle du Haut commissariat
pour les réfugiés, s'est pourtant révélée
très précieuse lors des crises dont la Bosnie, le Kosovo, ou
encore le Timor oriental ont été le théâtre dans la
période récente.
Quel est le rôle de l'OIM et quel bilan peut-on dresser de son
activité, au terme de près d'un demi-siècle
d'existence ?
Quelle est la portée des amendements au texte constitutif de l'OIM sur
lesquels notre Haute Assemblée est appelée à se
prononcer ?
Quelle doit être, enfin, la position de notre pays vis-à-vis de
l'OIM ?
Telles sont les trois interrogations que le présent rapport abordera
successivement.
*
* *
I. L'ORGANISATION INTERNATIONALE POUR LES MIGRATIONS : UN CONCOURS UTILE POUR FAVORISER DES MIGRATIONS ORDONNÉES
A. UN RÔLE FAÇONNÉ PAR L'HISTOIRE
1. Rappel historique
L'Organisation internationale pour les migrations a pour
vocation
première de mettre en oeuvre les moyens matériels
nécessaires aux mouvements migratoires liés en particulier aux
situations d'urgence.
Le rôle essentiellement " pratique " qui lui a ainsi
été assigné -et qui la distingue beaucoup d'institutions
internationales- trouve son origine dans les conditions mêmes de la
naissance de cette organisation, au lendemain de la deuxième guerre
mondiale.
En effet, les combats puis, la paix revenue, les redécoupages
territoriaux et les bouleversements politiques ont suscité en Europe un
afflux de réfugiés évalués à quelque 12
millions de personnes. Pour répondre aux besoins de ces populations, les
Alliés s'accordent en décembre 1946 pour créer
l'
Organisation
internationale pour les réfugiés
(OIR), agence spécialisée des Nations unies. Cette institution
n'allait toutefois pas échapper aux fractures de la guerre
froide : les occidentaux récusèrent le principe,
défendu par le bloc socialiste, d'un retour contraint des personnes
déplacées dans leur pays d'origine. Menacée de paralysie
par les dissensions politiques, l'OIR fut dissoute en 1951 et ses
compétences réparties entre le
Haut Commissariat des Nations
unies pour les réfugiés
(HCR), organisation
spécialisée des Nations unies, et le
Comité
intergouvernemental provisoire pour les mouvements migratoires d'Europe
(CIPME) chargé du transport des migrants. Cette organisation fut
délibérément placée hors du système des
Nations unies afin de la préserver de l'antagonisme Est-Ouest et de
garantir ainsi son efficacité.
Depuis lors,
l'Organisation internationale pour les migrations
, qui a
succédé au Comité intergouvernemental pour les migrations
en 1989, est restée une organisation intergouvernementale
indépendante des Nations unies où elle dispose cependant du
statut d'observateur.
Initialement limitées dans la durée et l'espace -l'Europe-, les
responsabilités dont ce comité a été investi, se
sont pérennisées et progressivement étendues
au-delà de l'Europe.
Elles se sont pérennisées car les problèmes migratoires
ont conservé leur acuité dans une Europe divisée. Ainsi,
le Comité provisoire, devenu
Comité intergouvernental pour les
migrations européennes
(CIME), a assumé, dans les
années 1956-1957, la responsabilité de la réinstallation
de 180 000 réfugiés hongrois depuis l'Autriche et la
Yougoslavie. En 1968, le CIME a également organisé
l'émigration de 40 000 réfugiés
tchécoslovaques au départ de l'Autriche.
Dans un deuxième temps, l'expérience acquise par le CIME dans
l'organisation des transferts de population a été utilisée
dans d'autres parties du monde en proie aux conflits et aux guerres civiles.
Ainsi, en 1975, le CIME met en oeuvre des programmes de réinstallation
de personnes déplacées et de réfugiés indochinois.
Parallèlement, un nombre croissant d'Etats non européens
adhèrent à cette organisation. L'organisation réunit ainsi
71 Etats membres et 47 pays observateurs.
Les amendements adoptés le 20 mai 1987 au texte constitutif de
l'organisation ont permis de consacrer cette évolution. Ils se
traduisent notamment par la reconnaissance de la vocation mondiale de
l'institution qui prend désormais le nom d' "
Organisation
internationale pour les migrations
".
2. Les missions actuelles
Aux
termes de la Constitution du 19 octobre 1953, modifiée par les
amendements de 1987 (entrés en vigueur le 14 novembre 1989),
l'organisation s'est vue confier quatre grandes missions :
- assurer le transfert organisé des réfugiés, des
personnes déplacées et d'autres personnes ayant besoin de
services internationaux de migration ;
- fournir, à la demande des Etats, des services de préparation
à la migration (cours de langue, examens médicaux,
activités facilitant l'accueil et l'intégration...) ;
- mettre en place des services similaires pour le retour volontaire des
migrants ;
- offrir aux Etats et aux organisations internationales des forums pour des
échanges de vues et pour la promotion de la coopération sur les
questions de migration internationale.
L'organisation observe vis-à-vis de la migration une
démarche
neutre
: elle ne souhaite ni l'encourager, ni la dissuader. Elle
cherche simplement à promouvoir une
gestion ordonnée de la
migration
.
Au terme d'un demi-siècle d'existence, il est possible de dresser un
bilan positif
de l'action de cette institution. En effet, les
interventions dans les situations d'urgence lui ont donné un
véritable savoir-faire pour l'organisation du
transfert
des
personnes déplacées. En la matière, il faut toutefois
souligner que les compétences de l'OIM
se limitent à la mise
en place de la
logistique
nécessaire. Elles ne touchent en
revanche ni aux secours, ni, de manière plus générale,
à l'appui donné sur place aux populations dont la
responsabilité incombe au Haut Commissariat des Nations unies pour les
réfugiés.
Parmi les opérations les plus remarquables conduites par l'OIM au cours
de la dernière décennie, il convient de citer, en 1990, le
rapatriement en moins de quatre mois et demi, à la demande de l'ONU, de
quelque 165 000 migrants bloqués dans le Golfe persique à la
suite de l'invasion du Koweit par l'Irak ; en 1996, après la
signature des accords de paix de Dayton, la coordination de l'ensemble des
aspects opérationnels du retour volontaire des réfugiés
bosniaques vivant en dehors de l'ex-Yougoslavie.
En 1999, l'OIM aura permis le transport de plus de 430 000 personnes
(417 000 au titre des migrations humanitaires, 13 000 au titre du
transfert des ressources humaines qualifiées). Au cours de la
période récente, l'OIM aura notamment permis le retour de
67 000 Timorais de l'Est et le rapatriement de quelque 85 000
Kosovars, dont 66 450 depuis des pays non-voisins, 5 700 depuis la
Macédoine et 9 000 depuis l'Albanie et le Kosovo.
Au-delà de l'organisation matérielle des déplacements
liés le plus souvent à des circonstances dramatiques, l'expertise
reconnue à l'OIM en matière d'immigration s'est également
exercée dans des
actions de plus long terme
et, en particulier,
dans le retour volontaire des migrants dont les qualifications peuvent se
révéler utiles pour le développement de leur pays
d'origine : programme de retour de main-d'oeuvre qualifiée pour les
professionnels latino-américains ayant acquis une formation et/ou une
expérience professionnelle en Europe (1974), programme de retour de
main-d'oeuvre qualifiée pour les nationaux africains vivant en Europe et
en Amérique du nord (1983). Dans ce cadre, l'OIM sélectionne les
candidats, recherche les possibilités d'emploi et apporte une aide
à la réintégration.
L'OIM constitue également une
enceinte propice au dialogue entre pays
d'origine, pays de transit et pays de destination.
Elle a ainsi
encouragé l'ouverture d'un dialogue régional entre les pays
d'Amérique du nord et ceux d'Amérique centrale dans le cadre du
processus dit " de Puebla " (mars 1996), et soutenu aussi des
initiatives comparables en Asie du sud-est (à la suite de la
déclaration de Bangkok - avril 1999) et en Afrique australe.
Qu'il s'agisse d'opérations de déplacement ou d'actions de plus
long terme, l'OIM agit toujours comme prestataire de services, à la
demande des Etats ou d'organisations internationales. Elle ne développe
pas, en revanche, de son propre chef, de programmes indépendamment de
toute initiative extérieure.
Par ailleurs, si l'OIM peut agir seule, elle coopère également de
plus en plus avec d'autres organisations internationales. Elle a ainsi
signé des accords de coopération avec le HCR ainsi qu'avec le
Programme des Nations unies pour le développement.
B. UNE ORGANISATION AUX MOYENS MODESTES
1. La structure institutionnelle
L'organisation réunit trois structures.
- Le
Conseil
; composé des représentants de tous les
Etats membres (titulaires chacun d'une voix), il constitue l'organe de
décision de l'OIM. Il se réunit en session ordinaire une fois par
an.
- Le
Comité exécutif
1(
*
)
,
organe plus restreint, comprend les représentants de
onze Etats
membres
élus pour deux ans par le Conseil. Il prépare les
travaux du Conseil et peut, en cas d'urgence, prendre les décisions
relevant du Conseil et nécessaires au bon fonctionnement de
l'organisation. Deux sous-comités ont par ailleurs été
créés : le sous-comité du budget et des finances et
le sous-comité pour la coordination des transports.
- L'administration de l'OIM est dirigée par un directeur
général, assisté d'un directeur général
adjoint. Les effectifs de l'OIM comprennent, en 1999, 1 111 personnes
réparties entre le siège de l'organisation situé à
Genève (56 personnes dont 35 personnels d'encadrement) et le
réseau extérieur -13 bureaux régionaux et 65 missions
(soit 1 055 personnes dont 102 personnels d'encadrement). Les effectifs
devraient baisser en 2000 (1 048 personnes dont 60 au siège).
2. Le budget
Le
budget
de l'OIM comprend deux parties :
- la
partie administrative
dont le financement repose sur les
contributions obligatoires
versées par tous les Etats membres.
Ces derniers se sont accordés pour plafonner, pour une durée de 5
ans, au niveau atteint en 1996, le montant des dépenses -soit 34
millions de francs suisses (29,7 millions de francs suisses en 1994) :
- la
partie opérationnelle
, principalement financée par
des
contributions volontaires
(prévisions 2000 : 200
millions de dollars -210 millions de dollars en 1997, 221 millions de dollars
en 1998, 202 millions de dollars en 1999). Deux Etats seulement apportent
d'importantes contributions à l'OIM : les Etats-Unis
(prévisions 2000 : 53 millions de dollars), l'Allemagne
(prévisions 2000 : 32 millions de dollars).
Ces contributions correspondent, pour une large part, aux services
apportés par l'OIM aux Etats membres. Les variations du budget de la
partie opérationnelle, parfois importantes d'une année sur
l'autre, s'expliquent naturellement par le caractère même des
opérations conduites par cette organisation, soumise aux aléas de
l'actualité. Le recrutement de vacataires permet, le cas
échéant, à l'OIM d'ajuster l'offre des services aux
besoins manifestés par les Etats membres.
De l'avis des responsables de l'OIM, les ressources dont dispose cette
organisation au titre de la partie administrative du budget demeurent
insuffisantes. Ainsi certains responsables permanents de l'OIM doivent
être rémunérés sur le budget opérationnel
dont ce n'est pourtant pas la vocation. Le directeur général de
l'OIM demandera d'ailleurs en 2000 que les Etats membres acceptent de revenir
sur le gel du budget administratif décidé en 1996.
II. LES AMENDEMENTS PROPOSÉS : UN EFFORT DE RATIONALISATION DE L'OIM
Bien que
d'une porté plus limitée que les amendements adoptés le
20 mai 1987, qui avaient principalement consacré la reconnaissance
de la vocation mondiale de l'organisation, la nouvelle série
d'amendements à la constitution de l'OIM, proposés dans le cadre
du projet de loi soumis à l'examen du Sénat, ne peut être
tenue pour négligeable.
Ces amendements, adoptés par consensus par le Conseil de l'OIM, le 24
novembre 1998, poursuivent en effet un objectif général de
rationalisation
qui ne peut que conforter une institution dont
l'efficacité constitue sans doute le trait distinctif par rapport
à de nombreuses autres organisations internationales. Les modifications
à la constitution de l'OIM s'articulent autour de trois grands
volets : une simplification des procédures de décision, un
mécanisme plus opérationnel de sanction en cas de retards de
paiement et, enfin, la limitation de la durée des mandats des
responsables de l'administration.
A. UNE SIMPLIFICATION DES PROCÉDURES DE DÉCISION
Cette
simplification se traduit par deux modifications au fonctionnement de l'OIM.
D'une part, le
Comité exécutif est supprimé
. En
effet, dans la pratique, l'utilité de cette instance n'a pas
été démontrée. Ses fonctions redoublent, en
particulier celles dévolues au sous-comité du budget et des
finances. Le nombre de réunions pourra donc être désormais
réduit et le processus de décision allégé.
La deuxième modification porte sur le
mode d'adoption des
amendements
à la constitution de l'OIM. Dans le dispositif actuel,
les amendements ne peuvent entrer en vigueur que s'ils ont été
adoptés par les deux tiers des membres du Conseil et acceptés par
les deux tiers des Etats membres, conformément à leurs
règles constitutionnelles respectives. En outre, aucune nouvelle
obligation ne peut être imposée à un Etat sans son accord
(art. 30).
La nécessité d'une double majorité des deux tiers du
Conseil et des deux tiers des Etats
entraîne pour toute modification,
même limitée, des délais peu compatibles avec l'adaptation
de l'Organisation à l'évolution de ses missions
. Aux termes
de l'amendement proposé, l'application de cette procédure
d'adoption des amendements se trouve désormais subordonnée
à une double condition :
- elle sera limitée aux changements fondamentaux dans la constitution de
l'OIM ou à l'introduction de nouvelles obligations pour les Etats
membres ; les autres modifications pourront entrer en vigueur à la
suite d'une décision du Conseil adoptée à la
majorité des deux tiers ;
- en outre, elle devra être décidée par le Conseil
appelé à se prononcer à la majorité des deux tiers.
Le nouveau dispositif, il convient de le relever, ne reconnaît plus la
possibilité dont disposait chacun des Etats membres de refuser que lui
soit appliquées de nouvelles obligations.
B. UN MÉCANISME DE SANCTION PLUS EFFECTIF EN CAS DE RETARD DE PAIEMENT DES CONTRIBUTIONS OBLIGATOIRES.
Dans le
dispositif actuel (art. 4), le Conseil statuant à la majorité des
deux tiers peut suspendre le droit de vote et les services dont
bénéficie un Etat membre lorsque celui-ci n'a pas versé sa
contribution obligatoire pendant
deux exercices financiers
consécutifs
. Il peut cependant revenir sur sa décision
à la majorité simple.
Ce mécanisme ne s'est toutefois pas révélé
très efficace. Au sein du Conseil, composé désormais d'une
majorité de pays en développement, il se trouvera en effet
difficilement deux tiers d'Etats qui accepteraient de sanctionner un Etat dont
les manquements aux obligations financières peuvent s'expliquer par des
difficultés économiques.
C'est pourquoi le nouvel amendement propose un système
intermédiaire, plus souple mais toutefois dissuasif :
- plus
souple
parce qu'un
délai d'un an
s'écoule
entre le moment où le retard de paiement est constaté et la
suspension effective du droit de vote ;
-
dissuasif
, car la suspension intervient alors de manière
automatique sans que le Conseil ait à se prononcer (celui-ci peut
toutefois, à la majorité simple, maintenir ou restaurer le droit
de vote s'il apparaît que le manquement est dû à des
circonstances indépendantes de la volonté de l'Etat
sanctionné). En outre, la notion de manquement est entendue de
manière plus extensive car elle ne vise pas le non-paiement des
contributions obligatoires sur les deux dernières années
consécutives mais le non-paiement de la
somme correspondant aux
contributions
dues pour les deux exercices financiers consécutifs.
Dès lors, des retards cumulés de manière aléatoire
sur plusieurs années pourront être également
sanctionnés.
Ce nouveau système devrait donc présenter une plus grande
efficacité. Parallèlement, les principaux bailleurs de fonds de
l'Organisation ont accepté que la contribution minimale -à
laquelle est assujettie la quasi-totalité des pays en
développement- soit réduite de moitié. En contrepartie,
l'ensemble des Etats membres a été appelé à
respecter ses obligations financières.
Au début de cette année, 18 Etats-membres sur les 71 que compte
l'OIM enregistraient des retards de paiement pour une période
égale ou supérieure à deux ans (les arriérés
portent généralement sur des montants réduits, de l'ordre
de 18 000 francs suisses, et n'affectent pas véritablement le
fonctionnement de l'OIM).
C. L'ENCADREMENT DE LA DURÉE DES MANDATS
Aujourd'hui, le directeur général et le directeur général adjoint sont élus par le Conseil à la majorité des deux tiers pour une durée de cinq ans. Ils peuvent être réélus (art. 18). L'amendement proposé prévoit de limiter à deux mandats l'exercice de ces fonctions.
CONCLUSION
L'opportunité de renforcer les liens entre la France et l'OIM
Membre
fondateur du Comité intergouvernemental pour les migrations
européennes en 1951,
la France s'en est retirée en
décembre 1966
. Notre pays estimait en effet, d'une part, que le
mandat initial de ce comité destiné à faciliter les
mouvements de population d'après-guerre se trouvait épuisé
et, d'autre part, que l'influence exercée par les Etats-Unis au sein de
l'OIM apparaissait excessive.
Confronté à la fin des années 70 au problème des
réfugiés fuyant la péninsule indochinoise sur des bateaux
de fortune (les " boat-people "), notre pays a été
conduit à réviser sa position sur l'OIM dont la capacité
en matière de transport des personnes déplacées
était démontrée. Ainsi
notre pays a
réintégré l'OIM en plusieurs étapes
: en
1981, il rejoint l'organisation en qualité de simple observateur ;
en mai 1982 sa demande d'adhésion est acceptée par le Conseil de
l'OIM ; enfin, en mai 1994, la procédure interne de ratification du
texte constitutif de l'OIM est conduite à son terme.
La position de la France vis-à-vis de l'OIM appelle trois observations.
.
Première observation
: l'OIM présente
pour la France un intérêt indéniable.
La position française à l'égard de l'OIM a longtemps
été inspirée par une certaine réserve : la
politique migratoire, prérogative de la Nation souveraine ne pouvait
être abordée dans une enceinte multinationale. Qu'il s'agisse,
dans les années soixante, de favoriser l'entrée de travailleurs
immigrés en France ou, dans la décennie suivante, d'inverser
cette orientation, notre pays a toujours compté sur ses propres moyens.
Les pouvoirs publics ont ainsi créé l'Office des migrations
internationales (OMI) dont l'activité a d'abord été
centrée sur la gestion des flux migratoires, l'accueil des
étrangers et de leur famille avant de se tourner, au milieu des
années soixante-dix, vers l'accompagnement du retour des
étrangers au pays d'origine.
Dès lors, la France a eu recours à l'OIM dans les seules
situations d'urgence -elle a d'ailleurs pu se féliciter dans ces
circonstances, souvent difficiles, de l'efficacité du concours
apporté par cette organisation. La contribution française au
budget opérationnel de l'OIM apparaît par ailleurs plutôt
modeste : 7,71 millions de francs en 1999 (pour les transferts des
Albanais du Kosovo accueillis dans notre pays).
La position plutôt restrictive de notre pays pourrait toutefois
évoluer dans les prochaines années sous l'effet de plusieurs
facteurs.
En premier lieu,
l'approche multilatérale des questions liées
à l'immigration tend à se généraliser
. Elle
s'impose même à l'échelle de l'Union européenne. En
effet, la mise en place d'un espace de libre circulation des personnes entre
les pays signataires de la convention d'application des accords de Schengen
(1990) et, surtout, l'extension des compétences communautaires à
l'immigration dont le principe a été arrêté par le
traité d'Amsterdam (1997), conduisent progressivement les Quinze
à renforcer leur coopération dans ce domaine.
De plus en plus, les Etats membres de l'Union européenne seront ainsi
appelés à définir de concert leur position
vis-à-vis des pays originaires de l'immigration. Dans cette
perspective, ils auront intérêt à nouer le dialogue non pas
pays par pays, mais plutôt avec des ensembles régionaux. L'OIM
qui, rappelons-le, réunit pays d'origine, de transit et de destination,
peut, de ce point de vue, constituer un forum propice aux échanges.
L'OIM peut, en second lieu, fournir des services utiles à notre pays
dans le cadre de sa politique migratoire, en particulier pour la mise en oeuvre
-aujourd'hui embryonnaire- de l'objectif de codéveloppement. En effet,
dans les pays africains où l'Office des migrations internationales ne
possède pas de représentation, l'OIM pourrait apporter son
concours pour favoriser la réinstallation d'immigrés sur place et
s'assurer, sur une période de quelques années, de la
pérennité de leur réintégration. A la demande de
l'Office des migrations internationales, des négociations avaient du
reste été engagées à ce sujet avec l'OIM, sans
connaître toutefois d'aboutissement. Il y a là un domaine
où la coopération avec l'OIM pourrait également se
révéler efficace.
.
Deuxième observation : une organisation plus ouverte
sur la France et la francophonie.
Un renforcement des liens entre la France et l'OIM apparaîtrait d'autant
plus opportun que cette organisation elle-même a donné des
manifestations récentes d'ouverture sur le monde de la francophonie.
Si le poste de directeur général échoit traditionnellement
à un Américain -M. Brunson McKinly depuis le 1
er
octobre 1998-,
les fonctions de directeur général adjoint ont
été confiées pour la première fois à une
personnalité francophone
, Mme Ndioro Ndiaye, de nationalité
sénégalaise. L'élection de Mme Ndiaye à ce mandat
représente un indéniable succès pour la France et la
francophonie. Elle s'inscrit également dans un mouvement de
rééquilibrage vers les pays du sud d'une organisation longtemps
dominée par l'influence anglo-saxonne.
Il faut également relever la présence de cinq de nos
ressortissants au siège genevois dans des postes d'encadrement (trois
chefs de bureau -relations publiques, publications, statistiques- et deux
chargés de mission -service d'audit et division des nouvelles
technologies) et de cinq autres en poste dans des bureaux régionaux ou
des missions locales. Par ailleurs, votre rapporteur a pu constater que
l'essentiel de la documentation de l'OIM, en particulier le budget et les
programmes d'action, étaient disponibles en français.
.
Troisième observation
: la
nécessité d'aboutir sur la négociation à un accord
de siège pour la représentation de l'OIM à Paris.
L'OIM dispose d'une représentation en France. Celle-ci ne dispose
toutefois pas d'un statut officiel en l'absence d'un accord de siège
entre l'OIM et la France. Les négociations engagées de longue
date ont rencontré du côté français quelques
difficultés, liées à des raisons techniques plutôt
qu'à des considérations de fond. L'OIM pourrait se voir accorder
un statut comparable à celui reconnu aux institutions
spécialisées des Nations unies. La récente ratification
par la France de la convention sur les privilèges et immunités
des institutions spécialisées, signée en 1947,
favoriserait une telle solution. La signature d'un accord de siège
pourrait accompagner la ratification des présents amendements et
permettrait de marquer aussi, de la manière la plus explicite, la
reconnaissance par la France de l'indéniable intérêt de
cette organisation.
*
* *
Au bénéfice de ces observations, votre commission vous invite à donner un avis favorable au présent projet de loi.
EXAMEN EN COMMISSION
Au cours
de sa réunion du 22 mars 2000, la commission des affaires
étrangères, de la défense et des forces armées a
examiné le présent rapport.
A la suite de l'exposé du rapporteur, M. Xavier de Villepin,
président, a demandé des précisions sur la
définition des migrations humanitaires. Il s'est demandé, en
particulier, dans quelle mesure les statistiques pouvaient séparer les
départs forcés de ceux liés à des raisons
économiques, alors qu'il existait des "zones grises " où de
telles distinctions n'apparaissaient pas clairement. Il a cité, à
cet égard, les mouvements de population entre le Burkina Faso et la
Côte d'Ivoire.
M. Paul Masson, rapporteur, après avoir rappelé que les
mouvements migratoires avaient toujours constitué " la respiration
du monde ", est revenu sur l'immigration des Burkinabés en
Côte d'Ivoire, en observant qu'elle répondait aux besoins des
populations des deux pays, même si elle avait introduit, dans certaines
régions, une modification sociologique parfois source de tensions. Il a
souligné qu'il importait de distinguer entre l'immigration individuelle,
les mouvements migratoires collectifs traditionnels et, enfin, les
déplacements de personnes provoqués par les conflits. L'action
des organisations internationales telles que l'OIM porte principalement sur
cette dernière catégorie de migration. Le rapporteur a
ajouté que la prise en compte des phénomènes migratoires
constituerait, à l'avenir, une dimension essentielle de la politique de
l'Union européenne.
M. Xavier de Villepin, président, a rappelé que le gouvernement
allemand avait décidé d'encourager l'immigration de personnes
compétentes dans le domaine des nouvelles technologies. Il a
souligné en outre qu'une récente étude de l'ONU avait
estimé que la France aurait besoin, d'ici 2050, de l'apport de 1,47
million d'émigrés pour maintenir sa population à son
niveau actuel. S'il a reconnu, avec M. Michel Caldaguès, que ces
chiffres appelaient beaucoup de circonspection, il a néanmoins
estimé que la baisse de la natalité, conjuguée dans notre
pays avec le vieillissement de la population, ne pourrait pas rester sans
conséquences sur l'immigration.
M. Paul Masson, rapporteur, a observé, à cet égard, que
dans la situation française de déflation démographique, le
maintien du dynamisme de notre économie passait nécessairement
par l'apport d'une main-d'oeuvre spécialisée. Il a ajouté
que les mouvements migratoires devaient s'organiser dans cette perspective, sur
la base d'accords avec les pays d'immigration et dans le cadre de quotas. Une
telle politique apparaît naturellement, a-t-il estimé,
incompatible avec l'immigration clandestine.
M. Christian de La Malène et M. Xavier de Villepin, président,
ont alors souligné la nécessité, pour la commission, de
mener une réflexion sur les enjeux internationaux de la question
migratoire dont l'importance apparaissait cruciale pour notre pays.
La commission a alors adopté le projet de loi.
PROJET DE LOI
(Texte proposé par le Gouvernement)
Est autorisée la ratification des amendements à la Constitution de l'Organisation internationale pour les migrations, adoptés à Genève le 24 novembre 1998, et dont le texte est annexé à la présente loi. 2( * )
ANNEXE -
ETUDE D'IMPACT3(
*
)
I.
Etat de droit et situation de faits existants
:
Les amendements à la Constitution de l'Organisation internationale pour
les migrations n'entraînent aucune incidence directe sur notre droit
interne. Toutefois le nouveau libellé de l'article 30, paragraphe 2,
apporte une modification importante car il ne prévoit plus la
possibilité pour des Etats membres de refuser de se voir appliquer des
amendements. En effet, il a pour conséquence de permettre
l'entrée en vigueur d'un amendement " entraînant des
changements fondamentaux dans la Constitution de l'Organisation ou de nouvelles
obligations pour les Etats membres " dès lors que ledit amendement
aura été adopté par les deux tiers des membres du Conseil
et accepté par les deux tiers des Etats membres, conformément
à leurs règles constitutionnelles respectives. Il convient de
souligner que la tradition de négociation qui a cours au sein de
l'Organisation et la double exigence d'une prise de position positive aux deux
tiers constituent une garantie que les intérêts des Etats seront
préservés.
II. Bénéfices escomptés :
Les bénéfices escomptés sont en matière :
* d'emploi :
sans objet
* d'intérêt général
:
sans
objet
* financière
:
la suppression du Conseil
exécutif et l'allégement du processus de prise de décision
devraient avoir pour conséquence une réduction des coûts de
fonctionnement de l'organisation. Sauf à décider, dans le cadre
de l'adoption du budget, le financement de nouvelles opérations, le
montant des contributions obligatoires devrait donc diminuer.
*
de simplification des formalités administratives
:
sans objet
*
de complexité de l'ordonnancement juridique
:
sans
objet
1
Le Comité exécutif est
composé des 16 Etats membres suivants pour les deux années
à venir : Bangladesh, Belgique, Canada, Colombie, Costa Rica,
Danemark, Equateur, Etats-Unis d'Amérique, Allemagne, Honduras, Italie,
Japon, Kenya, Paraguay, Pologne et Yémen.
2
Voir le texte annexé au document Sénat n° 171.
3
Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des
parlementaires.