IV. LA CONVENTION SUR LE TRANSFÈREMENT DES PERSONNES CONDAMNÉES
La
convention sur le transfèrement des personnes condamnées entre la
France et le Paraguay,
signée à Assomption le 16 mars 1997,
reprend pour l'essentiel les dispositions de la
convention du Conseil de
l'Europe,
relative au transfèrement des personnes condamnées
signée à Strasbourg le 21 mars 1983.
Ce type de convention, moins fréquent que les conventions d'entraide
judiciaire en matière pénale ou en matière d'extradition,
a pour but de "
faciliter la réinsertion sociale des
condamnés en leur permettant de purger leur peine dans les pays dont ils
sont ressortissants
".
La convention du Conseil de l'Europe
va jusqu'à considérer que l'objectif de réinsertion exige
"
que les étrangers qui sont privés de leur
liberté à la suite d'une infraction pénale aient la
possibilité de subir leur condamnation dans leur milieu social
d'origine
".Cette convention vient, par ailleurs, compléter le
dispositif de coopération judiciaire en matière pénale
entre les deux pays.
A. LE CHAMP D'APPLICATION DU TRANSFÈREMENT DES PERSONNES CONDAMNÉES
La convention fixe les conditions requises pour le transfèrement des personnes et les motifs possibles de refus. Elle sera applicable à l'exécution de toutes condamnations prononcées quelles que soient leurs dates, avant ou après son entrée en vigueur (article 17).
1. Les conditions requises
La
France et le Paraguay, par
l'article premier
de la présente
convention, "
s'engagent à s'accorder mutuellement
[...]
la coopération la plus large possible en matière de
transfèrement de personnes condamnées
" afin qu'elles
puissent purger les peines
privatives de liberté
qui leur ont
été infligées, en raison d'
une infraction
pénale,
dans le territoire de l'Etat dont elles sont ressortissantes.
La demande de transfèrement
peut être exprimée :
-
soit par la personne condamnée
auprès de l'
" Etat de condamnation ", c'est-à-dire de l'Etat où a
été condamnée la personne qui peut être
transférée, ou auprès de l' " Etat
d'exécution ", c'est-à-dire l'Etat vers lequel le
condamné peut être transféré.
- soit par les
Etats concernés
: Etat d'exécution ou
Etat de condamnation.
Six conditions
sont posées
par l'article 3
pour que le
transfèrement soit accordé :
- la
personne condamnée doit être ressortissante de l'Etat
d'exécution
;
- le
jugement
doit être
définitif
et il ne doit pas
exister d'autres procédures en cours ;
- la
durée restante
de condamnation requise est de
six mois
minimum
à la date de réception de la demande, sauf raison
exceptionnelle ;
- le
condamné doit y consentir.
Le consentement de la personne
condamnée n'est pas entouré dans la présente convention
des mêmes précautions que dans la convention du Conseil de
l'Europe du 21 mars 1983, où il est précisé que le
consentement doit se faire volontairement et en étant pleinement
conscient des conséquences qui en découlent. L'Etat
d'exécution doit, en outre, avoir la possibilité de
vérifier la qualité du consentement par l'intermédiaire
d'un consul (article 7 de la convention du 21 mars 1983)
;
- les actes donnant lieu à la condamnation constituent
une infraction
pénale au sens du droit de l'Etat d'exécution
, en application
du principe de la double incrimination
;
-
l'Etat de condamnation et l'Etat d'exécution
doivent exprimer
un
accord explicite.
2. Les motifs de refus de transfèrement
Il est
possible de refuser le transfèrement dans
deux cas
(article 3-2).
Le premier peut être soulevé par
l'Etat de condamnation
qui estimerait que le transfèrement porte
atteinte à sa
souveraineté, à sa sécurité ou à son ordre
public.
Le second est " objectif ", il vise le cas où
le
condamné ne s'est pas acquitté des sommes de toute nature qui lui
sont imposées par le juge.
B. LA PROCÉDURE DE TRANSFÈREMENT DES PERSONNES CONDAMNÉES
La
procédure de transfèrement s'effectue par l'intermédiaire
des autorités centrales désignées par les parties
contractantes. Il s'agit, pour la France, du ministère de la justice et
pour le Paraguay, du ministère de la justice et du travail (article 4).
C'est une procédure écrite (article 6).
Dans le cadre de la procédure de transfèrement, la convention
édicte tout d'abord toute une série d'
obligations
d'information
(article 5) au profit, d'une part, de la personne
condamnée et, d'autre part, des Etats eux-mêmes.
Ainsi,
tout condamné a le droit d'être informé
de
l'existence de la convention, des conditions et conséquences du
transfèrement. Il doit être également informé de
l'état de la procédure et de la décision éventuelle
d'un Etat le concernant.
Une obligation d'information existe aussi
entre les deux Etats.
En cas
de demande de transfèrement du condamné, soit auprès de
l'Etat d'exécution, soit auprès de l'Etat de condamnation, l'Etat
concerné devra transmettre à l'autre toutes les informations
utiles relativement à la personne du condamné, les faits ayant
entraîné la condamnation, la condamnation elle-même et les
dispositions pénales en vigueur (article 5-3).
En outre, la convention, dans son
article 7
, fixe
les pièces
qui devront être fournies
par l'Etat d'exécution sur la
demande de l'Etat de condamnation ou par l'Etat de condamnation à l'Etat
d'exécution. Ces pièces peuvent également être
demandées pour préparer une demande ou prendre une
décision de refus ou d'acceptation.
L'Etat d'exécution devra, ainsi, confirmer par un document ou une
déclaration que le condamné est bien un de ses ressortissants,
que les actes commis sont constitutifs d'une infraction pénale dans cet
Etat, fournir toutes les informations nécessaires concernant sa
détention et si la peine devra être adaptée au droit de cet
Etat selon l'article 10-3 de la présente convention.
De plus, si un transfèrement est demandé et si aucun Etat ne s'y
est opposé, l'Etat de condamnation doit transmettre à l'Etat
d'exécution une copie du jugement définitif et des dispositions
légales appliquées, la durée de la condamnation
déjà accomplie et toutes les informations relatives à
l'exécution de la peine, le consentement du condamné et toutes
les informations utiles relatives à la personne condamnée
(rapport médical, information ou recommandation sur son traitement).
Toutes ces informations et pièces sont donc communiquées dans
l'intérêt de la personne détenue et afin d'assurer une
bonne administration de la justice. Elles sont transmises en français et
en espagnol (article 16).
Selon
l'article 8, les frais sont à la charge de l'Etat
d'exécution
, à l'exception de ceux engagés
exclusivement sur le territoire de l'Etat de condamnation. L'Etat
d'exécution peut demander le paiement, en tout ou partie, des frais de
transfèrement à la personne condamnée.
Enfin, selon
l'article 9, la remise du condamné
s'effectue
à l'endroit convenu par les parties.
C. LES MODALITÉS D'EXÉCUTION DE LA PEINE
L'exécution de la peine se poursuit dans l'Etat
d'exécution
conformément à son ordre juridique.
Cet
Etat reste néanmoins lié par la nature juridique
, par exemple
une peine d'emprisonnement,
et par la durée de la condamnation
décidée dans l'Etat de condamnation
(article 10).
La
règle " non bins in idem "
, rappelée par
l'
article 12
de la convention, s'applique. Un condamné ne peut
être poursuivi une deuxième fois pour les mêmes faits dans
l'Etat d'exécution. De même, il devra être mis fin à
l'exécution dès que l'Etat qui en est chargé aura
été informé par l'Etat de condamnation d'une
décision qui aurait pour effet d'enlever son caractère
exécutoire à la condamnation (article 13).
Dans
l'article 10-3
, la convention prévoit le cas où
la
nature ou la durée de cette sanction serait incompatible avec la
législation de l'Etat d'exécution. Dans cette hypothèse,
la peine peut-être adaptée
par cet Etat à celle
prévue par sa loi pour des infractions de même nature. Afin que la
peine ne soit pas dénaturée dans l'Etat d'exécution, la
convention précise qu'elle "
correspond autant que possible,
quant à sa nature, à celle infliger par la condamnation à
exécuter
".
La convention fixe également
deux limites
:
la sanction
ne peut être aggravée et ne peut excéder le maximum
prévu par la loi de l'Etat d'exécution.
Par ailleurs,
chacune des parties peut accorder la grâce, l'amnistie
ou la commutation de la peine
. En revanche, seul l'Etat de condamnation
peut connaître du recours en révision (article 11).
Selon l'
article 14, l'Etat d'exécution doit informer l'Etat de
condamnation
lorsqu'il estime achevée l'exécution de la
condamnation, lorsque le condamné s'évade ou lorsque l'Etat de
condamnation lui demande un rapport spécial.
Enfin, la Convention prévoit que la France et le Paraguay faciliteront
les opérations de transit
de personnes condamnées dans le
cadre de conventions de transfèrement conclues avec des tiers (article
15). Ils se gardent toutefois la possibilité de le refuser s'il s'agit
d'un de leurs ressortissants ou si les faits qui ont donné lieu à
condamnation ne sont pas constitutifs d'une infraction au regard de leur
législation.