b) La poussée de l'Islam politique et de la contestation du pouvoir
La coalition au pouvoir, le Barisan Nasional, avec ses trois composants ethniques UMNO (Malais), MCA (Chinois) et MIC (Indien), qui gère le pays depuis 1957, a remporté les dernières élections. Elle est majoritaire tant en nombre de sièges à la chambre des représentants du Parlement fédéral (148 sièges contre 45 à l'opposition), qu'en nombre d'Etats remportés (tous sauf deux) et en nombre de voix obtenues (56,5 % aux législatives, 56,2 % aux régionales).
Toutefois, on peut observer, surtout depuis la crise qui a fragilisé le consensus social et politique, la montée d'une certaine contestation du pouvoir , liée à l'usure de l'équipe actuelle, (le Dr Mahatir est Premier ministre depuis 1981), et alimentée par l'affaire Anwar Ibrahim (ex vice-premier ministre, condamné à 15 ans de prison à la suite de deux procès successifs). On observe également une montée du fondamentalisme islamique .
Ainsi, au dernier scrutin, l'opposition a-t-elle progressé, gagnant 20 sièges et 10 % des voix aux élections législatives et remportant deux Etats (contre un précédemment) aux élections régionales. Le parti islamiste PAS est le principal parti d'opposition : il a gagné 20 sièges au Parlement fédéral et 83 au sein des Parlements fédérés et c'est lui qui assume, depuis 1999, la direction des deux Etats fédérés remportés par l'opposition.
Le PAS est soutenu par le vote des Malais et alimente le débat sur la place de l'Islam dans la société. Les islamistes du PAS réclament en effet l'instauration d'un régime islamiste .
A cet égard, on peut penser que la montée de l'islamisme entraînera forcément une certaine radicalisation du débat politique. Les propos du Dr Rajmahj Hussain, ambassadeur de Malaisie en France, dans l'entretien précité à " La lettre diplomatique " se veulent pourtant rassurants : " un parti islamique, le PAS, est au pouvoir dans le Kelantan, un Etat du nord de la Malaisie. D'après certains développements récents, certains observateurs ont pu faire une analyse selon laquelle l'influence du PAS s'affirmerait de plus en plus. Je tiens à vous assurer qu'il n'y as pas lieu d'être inquiet à ce que la politique nationale soit un jour dominée par un radicalisme islamique ou de toute autre religion. En effet, la nature multiraciale de la société malaisienne est une garantie contre l'obtention par ces groupes radicaux du soutien de la majorité d'un peuple qui valorise et chérit sa liberté de culte et la diversité culturelle de son mode de vie. A cet égard, le Gouvernement actuel comprenant des membres des principaux groupes ethniques de Malaisie, ne permettra pas aux extrémistes religieux de répandre leurs enseignements en Malaisie, enseignements qui pourraient pousser le peuple à commettre des actes extrémistes au nom de la religion ".
Plusieurs observateurs constatent une radicalisation du régime. La presse française 30 ( * ) a, par exemple, récemment relaté l'emprisonnement d'un dirigeant de la branche jeunesse du parti d'opposition créé par l'épouse de l'ancien vice-premier ministre, emprisonné depuis 2 ans, Anwar Ibrahim, le " Parti de la justice ", ainsi que la " suspension " de la distribution des hebdomadaires Asiaweek et Far Eastern Economic Review.
* 30 Voir l'article de La Tribune du 14 mars 2001 : " Mahatir resserre son étreinte sur la Malaisie ".