B. UN ÉVÉNEMENT DRAMATIQUE
1. Une crue exceptionnelle
Les inondations sont récurrentes dans la vallée de la Somme. Pour autant, rien ne laissait prévoir l'ampleur ni la durée de celles qui ont touché le département au début de l'année 2001.
a) Un phénomène récurrent
La Somme n'est pas considérée comme un fleuve sujet à des crues catastrophiques. Le schéma départemental d'analyse et de couverture des risques (SDACR) ne consacre d'ailleurs qu'une page aux inondations. De nombreux débordements ont néanmoins été recensés qui, pour la plupart, ne semblent jamais avoir dépassé deux semaines.
(1) Les leçons du passé
Dans sa compilation très exhaustive achevée en 1865 25 ( * ) , M. Maurice Champion indique qu'antérieurement au XVII e siècle, aucun document ne fait mention de crues extraordinaires de la Somme. Mais, à cette époque, on en voit se produire trois en l'espace de moins de cinquante ans, aux cours des mois de février 1615, 1635 et 1658.
Après une forte crue de débâcle de la Somme en 1716, la ville d'Amiens fut affligée, en 1718, d'une telle inondation « que les habitants des paroisses de Saint-Sulpice et de Saint-Leu restèrent huit jours sans pouvoir quitter le haut de leurs maisons 26 ( * ) » . En 1784, les inondations se firent sentir avec intensité en Picardie, comme dans la plus grande partie de la France, occasionnant de nombreux dégâts, en particulier à Amiens. Au mois de janvier 1799, il y eut un débordement de la Somme qui causa des dommages considérables aux environs d'Abbeville.
De fortes crues furent enregistrées en 1820 et 1823, puis en janvier 1840, provoquant l'inondation des hortillonnages. En 1841, l'eau de la Somme canalisée s'éleva jusqu'au-dessus des digues et se répandit en plusieurs points de la vallée qu'elle submergea, causant d'importants dégâts. Enfin, M. Maurice Champion recense une crue sur la Haute-Somme en août 1850.
Aussi fortes fussent-elles, ces crues se caractérisaient par leur relative brièveté, comme l'a souligné devant la commission d'enquête M. Jean-Pierre Besson, président-directeur général de Météo France. Nombre d'entre elles furent des crues de débâcle, selon les propos de M. Paul Vialle, président de la section eau du Conseil général du génie rural des eaux et forêts.
(2) Les inondations récentes
Le schéma départemental d'analyse et de couverture des risques de la Somme constate que « sans être un département sensible aux inondations comme ceux du Vaucluse ou du Gard, il est rare qu'une année ne soit pas touchée par de violents orages provoquant l'inondation de locaux d'habitation ou industriels, la coupure partielle ou totale de certains axes routiers, le débordement de mares... » 27 ( * ) .
Il arrive dans certains secteurs que des inondations atteignent 1,50 à 2 mètres d'eau dans les habitations et les locaux en contre-bas. Le long de la côte, des débordements ou des ruptures de la digue des Bas-Champs surviennent parfois à l'occasion des grandes marées.
Les principales périodes d'inondations survenues au cours des dix dernières années sont retracées dans le schéma : août 1987 (221 interventions dans le secteur du Vimeu), février 1988 (montée des eaux sur le secteur de Fontaine-sur-Somme et Warloy-Baillon), 26 février-2 mars 1990 (rupture partielle de la digue des Bas-Champs et dégâts importants dans le secteur de Cayeux), mai-juin-août 1992 (300 interventions des services d'incendie et de secours), décembre 1993 (353 interventions à la suite de crues de la Somme et de débordements de mares), mai 1994 (127 interventions à la suite de violents orages), mars 1995 (150 interventions sur le secteur côtier), décembre 1999 (évacuation de plus de 800 personnes à Doullens et Martainneville).
* 25 Les inondations en France du VI e siècle à nos jours, ouvrage de M. Maurice Champion réédité en 2001 par le Centre national du machinisme agricole du génie rural, des eaux et des forêts (CEMAGREF).
* 26 Op. cit. page 167.
* 27 Schéma départemental d'analyse et de couverture des risques de la Somme, 1 er février 2000, tome 1, page 52.