III. UN SCÉNARIO TROP PARFAIT ?
Votre rapporteur considère que l'usage des modèles économétriques est indispensable en ce qu'ils permettent d'explorer le possible, au sens fort de ce terme, c'est-à-dire au sens de ce qui peut se réaliser.
Toutefois, ils ne permettent pas, en soi, de conférer à un scénario un degré de probabilité rigoureusement défini. Pour apprécier la probabilité de leurs résultats, il faut en effet porter des appréciations, hors-modèle, sur la probabilité des hypothèses qui les conditionnent.
Des variables importantes du scénario ici présentées appellent un tel exercice. Il s'agit d'abord des comportements financiers des entreprises, qui, tels que décrits par la projection, sont doublement favorables : ils nourrissent le revenu des ménages et comportent une certaine indifférence à l'égard des contraintes de financement de l'investissement. Il s'agit aussi des conditions de formation des salaires et des prix, puisque la dynamique des créations d'emplois n'enclenche pas de hausse des coûts salariaux.
C'est pour mesurer les incertitudes qui s'attachent à de telles évolutions que votre délégation a souhaité que soit réalisé un jeu de variantes. Deux premières variantes débouchent sur une croissance moins rapide de la demande intérieure. Une dernière variante illustre les tensions sur le système productif qui résulteraient du maintien de la rigidité des salaires.
A. L'IMPACT D'UNE CROISSANCE PLUS MODÉRÉE DE LA DEMANDE INTÉRIEURE
La progression soutenue de la demande intérieure dans le scénario est liée à des comportements financiers des entreprises, qui peuvent apparaître très favorables. Ils dopent le revenu des ménages car les entreprises leur distribuent d'importants dividendes. Ils dénotent une certaine indifférence par rapport à la dégradation des conditions d'autofinancement de leur investissement. Deux variantes explorent les conséquences d'une augmentation moins ferme de ces deux composantes de la demande intérieure, qui pourrait être associée à des comportements différents des entreprises.
1. L'impact d'un maintien de la part du revenu des ménages dans le PIB à son niveau de 2001
Dans une première variante, le revenu des ménages s'accroît comme le PIB. Autrement dit, sa part dans le PIB est maintenue inchangée, à son niveau de 2001.
Variante avec maintien de la part du revenu des
ménages
|
|||||
2002 |
2003 |
2004 |
2005 |
2006 |
|
PIB total en volume |
0,0 |
- 0,1 |
- 0,2 |
- 0,3 |
- 0,7 |
Importations |
0,0 |
- 0,1 |
- 0,3 |
- 0,4 |
- 1,1 |
Consommation des ménages |
0,0 |
- 0,1 |
- 0,3 |
- 0,6 |
- 1,5 |
Consommation des administrations |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
Investissement : |
|||||
Investissement productif |
0,0 |
- 0,1 |
- 0,3 |
- 0,5 |
- 1,2 |
Investissement logement |
0,0 |
- 0,2 |
- 0,4 |
- 0,8 |
- 1,8 |
Variations de stocks (contribution) |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
Exportations |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,1 |
Effectifs totaux (en milliers) |
0 |
- 10 |
- 23 |
- 38 |
- 91 |
Effectifs totaux (en %) |
0,0 |
0,0 |
- 0,1 |
- 0,1 |
- 0,4 |
Taux de chômage (en point) |
0,0 |
0,0 |
0,1 |
0,1 |
0,3 |
Prix du PIB |
0,0 |
0,0 |
- 0,1 |
- 0,2 |
- 0,4 |
Prix de la consommation des ménages |
0,0 |
0,0 |
- 0,1 |
- 0,2 |
- 0,4 |
Productivité du travail (par tête) |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
- 0,2 |
Taux de marge |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
- 0,1 |
Taux d'épargne |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
Salaire horaire (en valeur) |
0,0 |
- 0,1 |
- 0,1 |
- 0,2 |
- 0,6 |
Salaire horaire réel |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
- 0,1 |
- 0,2 |
Revenu disponible brut des ménages (en valeur) |
0,0 |
- 0,2 |
- 0,4 |
- 0,8 |
- 1,9 |
Capacités de financement (en point de PIB) |
|||||
Etat |
0,0 |
0,0 |
- 0,1 |
- 0,2 |
- 0,4 |
Entreprises |
0,0 |
0,1 |
0,2 |
0,3 |
0,8 |
Ménages |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
ISBLSM |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
0,0 |
Nation |
0,0 |
0,0 |
0,1 |
0,2 |
0,4 |
• La consommation des ménages est infléchie par rapport au scénario central et la croissance en est affectée. Le PIB est moins élevé de 0,7 point en 2006. Le freinage de l'activité est en effet limité par une contribution du commerce extérieur à la croissance qui devient très positive. La capacité de financement de l'Etat subit les conséquences du ralentissement économique, à hauteur de 0,4 point de PIB en 2006. Le chômage est plus élevé de 0,3 point à cette date. Le taux de chômage atteint donc 7,1 %.
• Votre rapporteur insiste sur les précautions avec lesquelles il convient d'aborder ces résultats. La variante cumule en effet les facteurs négatifs de sensibilité de la croissance à un ralentissement du revenu des ménages. En effet, dans la variante, ce ralentissement ne provient que très peu d'une réduction des gains salariaux. Celle-ci, qui traduirait une diminution relative du coût du travail, serait favorable à l'emploi. Dans la variante, une part prépondérante du ralentissement du revenu des ménages provient d'un moindre niveau des dividendes versés par les entreprises. Or, curieusement, l'amélioration de la capacité de financement des entreprises qui en résulte ne rétroagit pas sur le niveau de leur investissement. Celui-ci est plus faible que dans le scénario central. Votre rapporteur relève en outre que la variante ne retient aucun effet de richesse. La capacité de financement des entreprises s'améliorant, une valorisation des actifs détenus par les ménages devrait s'ensuivre. Elle pourrait, en retour, provoquer une réduction du taux d'épargne des ménages qui serait favorable à leur consommation et, donc, à la croissance.
Ainsi, sans négliger l'apport du dynamisme du revenu des ménages à la croissance, votre rapporteur considère que les résultats d'une configuration où la part du revenu des ménages dans le PIB resterait stable pourraient être dans les faits beaucoup moins défavorables que la variante ici présentée ne le montre.