B. L'IMPLICATION DES ARMÉES DANS LA DÉFENSE DU TERRITOIRE NATIONAL (HOMELAND DEFENSE)
La démonstration, le 11 septembre 2001, de la vulnérabilité du territoire américain a remis au premier rang des préoccupations la dimension nationale en matière de défense.
Centrée sur la protection du territoire national, de la population et des infrastructures essentielles, la Homeland Defense est érigée en priorité, avec un double volet, civil et militaire.
Sur le plan civil , un bureau de la sécurité intérieure (Office for Homeland Security) a été créé au sein de la Maison Blanche, avec à sa tête, le Gouverneur Tom Ridge, afin de remédier aux conséquences fâcheuses de l'extrême dispersion des tâches entre de multiples agences intervenant dans les questions de sécurité intérieure. Le manque de moyens propres de cette structure, et sa difficulté à s'imposer face à ses différents interlocuteurs, qu'il s'agisse des services de renseignement, des structures chargées des contrôles aux frontières et de la sûreté dans les aéroports, ou encore des administrations en charge de la sécurité civile et de la santé, ont poussé le Président Bush à aller plus loin et à proposer, le 6 juin dernier, la création d'un nouveau ministère de la sécurité intérieure.
Ce ministère de la sécurité intérieure devrait avoir pour mission première la sécurité du territoire, notamment :
- pour sécuriser les frontières, les transports, les ports et les infrastructures,
- pour synthétiser et analyser les renseignements relatifs à la sécurité intérieure provenant de sources multiples,
- pour coordonner les liaisons avec les Etats et les administrations locales, avec les entreprises et avec le public en vue de la mise en place de dispositifs d'alerte et de plans de secours,
- pour les efforts de protection contre le bioterrorisme et les autres armes de destruction massive,
- pour coordonner la formation des secours et leur mise en oeuvre.
Ce ministère comporterait une division chargée de la sécurité aux frontières et dans les transports, une division chargée de la préparation et de la mise en oeuvre des plans d'urgence, une division spécialisée dans les contre mesures chimiques, biologiques, radiologiques et nucléaires et une division en charge de l'analyse de renseignement et de la protection des infrastructures.
S'agissant du volet militaire , l'implication du Pentagone dans la Homeland Defense devrait se traduire à plusieurs niveaux.
Tout d'abord, un nouveau grand commandement interarmées , le Northern Command , a été créé au sein afin d'assurer la protection du territoire américain et la coordination avec les responsables civils qui en ont également la charge. Constituant l'un des cinq commandements en chef géographiques, le Northern Command reprendra la responsabilité du commandement de la défense aérospatiale de l'Amérique du Nord ( NORAD ). Son aire de responsabilité couvrira les 48 Etats contigus des Etats-Unis, l'Alaska, mais également le Canada et le Mexique, ainsi que les eaux environnantes jusqu'à 500 miles, ce qui englobe notamment Cuba et l'ensemble du golfe du Mexique.
Ce nouveau commandement coordonnera l'assistance militaire fournie aux autorités civiles nationales en cas de catastrophe naturelle ou technologique et en cas d'attaques par des armes de destruction massive. Il aura donc en charge des actions militaires (protection des infrastructures critiques, de l'espace aérien et des approches maritimes), tout autant que civilo-militaires (participation aux plans d'évacuation et aux secours aux populations, protection nucléaire, biologique, chimique ou radiologique).
Il est appelé à constituer l'interlocuteur unique du bureau de la sécurité intérieure, puis du ministère de la sécurité intérieure.
Deuxièmement, cette réorganisation ouvre la voie à une implication des forces armées dans les missions intérieures , qu'il s'agisse des forces d'active ou de réserve ou de la garde nationale, cette dernière étant placée sous la tutelle de chaque gouverneur d'Etat, ce qui nécessitera également une plus forte coordination entre ces différentes composantes.
Enfin, le Pentagone se voit doté de moyens financiers accrus (600 millions de dollars en 2003) dans le domaine de la lutte contre le bioterrorisme , qui constitue l'une des priorités fortes de la Homeland Defense, en particulier pour développer ses capacités de détection, d'identification et de surveillance des agents infectieux. Ce budget s'ajoute à celui déjà affecté au Département de la défense pour la défense nucléaire, radiologique, biologique et chimique des troupes en opération. Les scientifiques du Pentagone assisteront les responsbles civils en vue d'apporter leurs connaissances de la militarisation, du transport et de la dissémination des agents pathogènes.