(2) La création d'un « nouvel espace de compétitivité »
Il s'agit de permettre à des vins -et notamment aux vins de cépage- dont le principal argument de vente n'est pas le rattachement à un terroir d'atteindre une qualité acceptable grâce à l'utilisation des méthodes auxquelles recourent nos principaux concurrents.
La proposition du comité stratégique de créer une nouvelle catégorie de vins, bénéficiant d'une réglementation assouplie et susceptible de permettre à des entreprises de l'aval, en particulier au négoce, de produire un vin standard et compétitif, de qualité régulière avait déjà été formulée dans une étude 17 ( * ) réalisée en 1994 à la demande de l'ONIVINS.
Ainsi, les pratiques d'assemblage qui permettent d'obtenir une qualité régulière des produits seraient autorisées.
Conformément au dernier règlement européen sur l'étiquetage 18 ( * ) des produits vitivinicoles, il est possible d'adopter, au niveau national, une réglementation autorisant l'indication d'un cépage ou d'un millésime dès que le vin est produit au moins à hauteur de 85 % à partir de raisins issus de ce cépage ou de ce millésime, alors que la règle des 100 % prévaut jusqu'à présent dans la réglementation française.
Votre rapporteur estime que cette règle des 100 % doit être maintenue pour les VQPRD, dont elle contribue à assurer la tradition d'excellence. En revanche, dans la mesure où elle est largement appliquée par nos principaux concurrents, la règle des 85 % doit pouvoir lui être substituée pour l'ensemble des vins de table, y compris pour la catégorie des « vins des régions de France », dont la création est ici proposée.
De la même manière, pourrait être reconsidérée, pour cette future catégorie, la question de l'utilisation des copeaux de chêne dans la fabrication du vin . Ces copeaux servent à donner un goût boisé du vin, très apprécié par les nouveaux consommateurs.
Votre rapporteur est bien conscient que le recours à ces copeaux est largement une question de mode .
En outre, si l'utilisation des copeaux était, à l'origine, inspirée par la volonté d'imiter les caractéristiques des grands crus de Bordeaux, en particulier le goût boisé que leur donne l'élevage en fût de chêne, force est de constater que les barriques ne sont elles-mêmes plus utilisées aujourd'hui comme contenant mais bien pour les effets organoleptiques qu'elles apportent.
Les deux méthodes visent donc, pour un coût très différent, à atteindre le même objectif .
Il est d'ailleurs aujourd'hui bien difficile de différencier, sur le plan analytique comme sur le plan organoleptique, un vin boisé avec des copeaux d'un vin boisé par vieillissement en fût de chêne puisque la structure des composés issus du bois reste la même.
Quant à la mode, elle pourrait bien passer. Certains producteurs australiens prendraient ainsi soin de préciser désormais que leur vin est fabriqué sans utilisation de copeaux.
L'OIV a néanmoins admis, lors de son assemblée générale à Adélaïde (Australie) à l'automne 2001, l'utilisation de « morceaux de bois de chêne » pour l'élaboration du vin.
Cette prise de position conduira vraisemblablement l'Union européenne et la France à s'interroger sur l'opportunité d'autoriser cette pratique. Il convient de souligner que si elle reste interdite en Europe, les États membres ne pourront toutefois pas s'opposer à l'entrée sur leur territoire de vins élaborés selon cette méthode .
Dans ce contexte, il semble raisonnable, pour la nouvelle catégorie de vins « compétitifs » dont la création est proposée de laisser, à terme, le choix à chaque producteur d'utiliser ou non les copeaux.
Votre rapporteur souhaite toutefois que cette autorisation soit assortie :
- d'une définition précise des copeaux et du stade de fabrication auquel ils sont incorporés ;
- d'un étiquetage permettant l'information des consommateurs.
* 17 Étude sur la restructuration de la filière vins, cabinet Booz, Allen et Hamilton, 1994.
* 18 Règlement (CE) n°753/2002 de la Commission du 29 avril 2002 fixant certaines modalités d'application du règlement(CE) n°1493/1999 du Conseil en ce qui concerne la désignation, la dénomination, la présentation et la protection de certains produits vit-vinicoles