Audition de MM. Jean-Pierre
Bompard, secrétaire confédéral en charge des questions
internationales,
et Pierre Bobe, secrétaire confédéral
en charge de l'énergie, de l'environnement, et du développement
durable, à la Confédération française
démocratique du Travail (CFDT),
le 22 octobre 2003.
Pour
ouvrir la discussion
, M. Serge Lepeltier, sénateur
, a fait part
de son impression selon laquelle les syndicats seraient moins présents
que les ONG dans les conférences internationales.
M. Jean-Pierre Bompard, secrétaire confédéral en charge
des questions internationales à la
CFDT
, a indiqué que
les syndicats étaient présents par l'intermédiaire de la
Confédération internationale des syndicats libres (CISL), ou de
la Confédération européenne des syndicats (CES). La CISL
intervient dans les sommets mondiaux, la CES dans les sommets européens.
Il a ensuite distingué l'action des ONG de celle des syndicats. Le
travail des ONG se situe dans une logique « de cause »,
souvent unique. Les syndicats s'inscrivent davantage dans une démarche
d'intérêt général, et sont prêts à
accepter des compromis. Leur image est de ce fait plus institutionnelle.
L'action syndicale à l'échelle internationale se manifeste par
des actions de lobbying auprès des Gouvernements, mais aussi par la
signature d'accords conclus entre les Fédérations internationales
et des firmes multinationales. 23 accords de ce type ont été
signés à ce jour.
Après ce préambule,
M. Jean-Pierre Bompard
a
développé la position de la CFDT sur la mondialisation.
La CFDT ne rejette pas la mondialisation. L'accroissement des échanges
est en effet un facteur de développement. Mais elle souhaite une
mondialisation régulée, qui ne saurait être obtenue par la
simple multiplication des accords bilatéraux. C'est pourquoi la CFDT ne
s'est pas réjouie de l'échec du sommet de Cancun.
La CISL a proposé que les normes sociales fondamentales soient au coeur
des négociations de Doha. Le mouvement syndical international
apparaît moins déterminé sur les questions
environnementales. Toutefois, les syndicats français sont plus
avancés sur les questions environnementales que leurs homologues
étrangers. Afin d'obtenir une meilleure prise en compte des questions
environnementales, la CFDT s'efforce de promouvoir la notion de
développement durable.
M. Pierre Bobe, secrétaire confédéral en charge de
l'énergie, de l'environnement, et du
développement durable
à la CFDT
a souligné que le concept de développement
durable permettait d'intégrer les trois dimensions de l'économie,
du social, et de l'environnement. En effet, le développement durable
vise à concilier efficacité économique,
équité sociale, et protection de l'environnement. Ces trois
dimensions doivent en permanence être associées : on ne peut,
par exemple, comme le suggèrent les Verts, proposer d'abandonner
l'énergie nucléaire en cinq ans, sans se préoccuper du
reclassement des 140 000 salariés de la filière
nucléaire.
M. Pierre Bobe
a insisté sur la nécessité de
convaincre les opinions publiques de l'importance du développement
durable. Aujourd'hui, on observe que des mesures telles que la hausse du prix
du carburant, ou l'instauration de péages pour les camions en Allemagne,
rencontrent des résistances dans l'opinion publique.
M. Jean-Pierre Bompard
a ensuite précisé que la CFDT
travaillait principalement sur trois dossiers au sein de la CES :
* l'agriculture et la sécurité sanitaire ;
* les risques chimiques et industriels ;
* l'énergie, le climat, les transports, et l'aménagement du
territoire.
Concrètement, la CFDT a, par exemple, pris l'initiative de rassembler et
de faire travailler ensemble les syndicats concernés par le naufrage du
« Prestige ». La CES a, par ailleurs, décidé
d'organiser une Conférence internationale sur le changement climatique
à l'approche de la Neuvième Conférence des Parties au
Protocole de Kyoto.
La CFDT est également présente au sein du TUAC (
Trade Union
Advisory Committee
, ou Commission syndicale consultative auprès de
l'OCDE). Le TUAC est régulièrement auditionné par l'OCDE
sur tous les dossiers que traite l'organisation.
M. Serge Lepeltier, sénateur,
a ensuite souhaité
être informé de la place des syndicats à l'OMC.
M. Jean-Pierre Bompard
a indiqué que des représentants
syndicaux étaient présents à tous les sommets de l'OMC. Il
a aussi souligné l'effort des autorités françaises pour
associer les syndicats à la préparation de ces conférences
internationales. Cette participation des syndicats aux travaux de l'OMC se
justifie pleinement, dans la mesure où le commerce international a un
impact direct sur la situation des salariés.
Puis
M. Serge Lepeltier, sénateur
, a souhaité
connaître la position de la CFDT sur le projet de création d'une
Organisation Mondiale de l'Environnement (OME).
M. Pierre Bobe
a répondu que la création d'une OME serait
inutile si l'OMC intégrait pleinement les préoccupations sociales
et environnementales. Il existe un risque que l'OME soit une institution dont
l'action ait peu d'effets concrets. Il n'est pas sûr, en outre, que les
conditions politiques nécessaires à la création d'une OME
soient actuellement réunies : les syndicats des pays du Sud voient
dans la promotion des normes sociales et environnementales un frein au
développement.