D. L'ACTION DES ORGANISATIONS NON GOUVERNEMENTALES
1. La dialectique urgence / reconstruction
Le raz-de-marée a occasionné une très forte mobilisation des ONG, particulièrement en Indonésie où l'on a dénombré plus de 2.000 personnes et des centaines d'organisations, dont une vingtaine françaises. Les témoignages concordants, recueillis durant les premières semaines, faisaient état du trop grand nombre d' « humanitaires » présents dans la province et des sureffectifs en matière de personnel médical.
Vos rapporteurs spéciaux ont pu constater que si ces ONG disposaient de moyens inégaux et n'avaient pas toutes une vision très précise de leur action à Aceh, la plupart aspiraient à inscrire leur action sur la durée, et partant, à obtenir à Jakarta les autorisations nécessaires pour s'établir et mener des projets de reconstruction sur plusieurs années. La probabilité du maintien de ces ONG dans la province au-delà des trois mois impartis par le gouvernement à la phase d'urgence demeure toutefois très incertaine (cf. troisième partie).
Les ONG n'ont toutefois pas toutes la même conception de la pérennité et de la nature de leur action sur le terrain . Le président de MSF a ainsi considéré début janvier qu'une fois les secours d'urgence apportés, « la reconstruction d'une région, d'un pays, cela s'appelle l'aide publique au développement. Cela appartient aux Etats ». La majorité des ONG ne portent pas la même appréciation et estiment que leur action ne ressortit pas uniquement à l'urgence de court terme, mais également à la reconstruction sur le long terme. Cette conception a par exemple été exprimée par le responsable de la solidarité et des urgences de la Fondation de France, selon lequel la focalisation sur l'urgence contribue à « méconnaître les dossiers. Tout ce qui a trait à la communauté villageoise ne peut relever que des ONG. L'Etat ne prend pas cela en charge ». Elles s'inscrivent donc, à l'image de la Croix-Rouge ou d'Action contre la faim (ACF), dans une perspective de maintien dans la province d'Aceh sur une durée de deux à cinq ans.
Vos rapporteurs spéciaux considèrent que le « coeur de métier » des ONG réside avant tout dans l'urgence humanitaire , pour laquelle elles seules disposent de la réactivité, de la disponibilité et des nombreuses compétences nécessaires (logistique, personnel médical, eau et assainissement, évaluation des besoins immédiats en nourriture...). Trop d'organisations excipent toutefois de leur caractère non gouvernemental une indépendance d'esprit et d'action qui les conduit à affirmer leur raison d'être dans le maintien durable sur site, afin de prendre une part active à la reconstruction.
Or cette seconde phase ne sollicite pas les mêmes compétences, requiert des moyens financiers et techniques très importants, et obéit à des exigences qui sont bien souvent du ressort de la souveraineté des Etats , à plus forte raison dans les régions en situation insurrectionnelle. C'est également durant la reconstruction que les Etats partenaires, et singulièrement la France, peuvent faire la preuve de leur volonté de solidarité et de soutien sur le long terme, avec l'appui des entreprises, pour contribuer à une relation de confiance solide et durable. Dès lors que la reconstruction implique des décisions gouvernementales structurantes, elle inclut une composante diplomatique, non pour s'ingérer dans les affaires intérieures d'un Etat, mais le cas échéant pour faciliter des négociations ou apaiser des options « agressives ».
Le principe structurant de souveraineté des Etats , susceptible d' « aménagements » dans des situations d'urgence qui ont pu justifier l'insertion de l' « ingérence humanitaire », ne peut être éludé en phase de reconstruction. Passée la nécessité d'intervenir immédiatement pour sauver des vies, l'Etat reprend ses droits et les divergences de conception relèvent alors de la diplomatie.
L'action des ONG au titre de la reconstruction est donc possible, mais elles suppose que ces dernières disposent de compétences techniques, d'une certaine visibilité internationale et de fonds propres suffisants, ce qui induit une certaine sélectivité par les moyens.
Liste des ONG françaises enregistrées par l'ambassade de France au 20 février 2005 |
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Nom |
Lieux d'implantation |
Types d'interventions |
Médecins du Monde |
Kruang Sabe, Panga, Rung Raya, Jantho, Lempuk, hospital de Banda Aceh |
Médicale |
Médecins sans Frontières |
Sigli, Lamno, Kureng, Meulaboh |
Médicale et tentes collectives |
Action contre la Faim |
Côte ouest |
Sécurité alimentaire, assainissement de l'eau |
Pompiers sans Frontières |
Lok Nah, Camp 85 |
Medicale, assainissement de l'eau |
Croix-Rouge française |
Sigli, Meulaboh |
Assainissement de l'eau, médicale |
Télécoms sans Frontières |
Meulaboh |
Soutien télécommunications aux Nations Unies |
Planète Urgence |
Province d'Aceh |
Support technique aux ONG |
Handicap International |
Sigli, hôpital minitaire de Banda Aceh, Meulaboh |
Handicap et soutien psychologique |
Atlas Logisitique |
Province d'Aceh |
Support logistique aux ONG |
Aide Médicale Internationale |
Meulaboh |
Médicale |
Première Urgence |
District de Nagan Raya |
Logement, reconstruction |
Secours Islamique français 15 ( * ) |
Meulaboh |
Assainissement de l'eau, hygiène |
Architectes de l'Urgence |
Côte ouest |
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Acted |
District de Nagan Raya |
Logement, pêche, agriculture |
Mouvement d'aide et de ressources solidaires |
Lok Nah |
Assainissement de l'eau |
Triangle Génération Humanitaire |
Lhang, Lok Nah |
Soutien psychologique et social, pêche |
Solidarités |
District de Nagan Raya, Aceh Barat |
Assainissement de l'eau, réhabilitation d'écoles |
Pharmaciens sans Frontières |
Province d'Aceh |
Pharmacie, assistance technique |
Source : ambassade de France en Indonésie |
2. Des ressources financières inédites dont il convient d'assurer la transparence
Ainsi que les medias l'ont largement développé, le raz-de-marée a provoqué un élan de générosité des particuliers sans précédent, qui a largement profité aux ONG. Fin janvier, les ONG françaises avaient recueilli environ 190 millions d'euros auprès du public ; la Croix-Rouge a reçu à elle seule plus de 90 millions d'euros (dont la moitié destinée à l'Indonésie), soit davantage qu'une année de collecte pour l'ensemble de ses actions. Le don moyen à la Fondation de France s'est élevé à 82 euros, soit le double de la moyenne des dons antérieurs. Le 3 janvier, soit une semaine après les événements, la structure internationale de MSF avait déjà encaissé plus de 40 millions d'euros de dons, avant d'annoncer le 6 janvier qu'elle suspendait sa collecte afin de tenir ses engagements d'affectation des dons, provoquant une polémique au sein du mouvement humanitaire.
La générosité des Français, de façon logique, a toutefois privilégié les ONG les plus médiatisées et internationalement reconnues , c'est-à-dire celles qui disposent des fonds propres nécessaires pour mener des campagnes régulières de communication et d'appel de fonds, plutôt que les petites ONG dont la notoriété relève davantage du « bouche à oreille » ou qui sont plus dépendantes des fonds publics.
Ce traitement différencié ne fait que renforcer la disparité des situations et moyens entre ONG , ainsi que vos rapporteurs spéciaux ont pu le constater en Indonésie : les plus grandes sont quasiment « surfinancées » , disposent de leurs propres moyens logistiques et aériens et peuvent mobiliser très rapidement une importante « force de frappe » comportant de nombreux salariés et volontaires internationaux (soumis au statut prévu par le décret du 30 janvier 1995 16 ( * ) ) ; de nombreuses ONG plus modestes arrivent plus tardivement et sans nécessairement disposer d'un projet précis (il s'agit dans un premier temps d'évaluer les besoins), doivent s'en remettre aux moyens de transport militaires, et font appel à davantage de volontaires et de bénévoles.
Entre les professionnels de l'humanitaire aguerris par trois décennies de missions d'urgence, et les jeunes gens dont l'altruisme et la volonté ne pallient pas toujours la relative inexpérience, l'épreuve du terrain peut conduire aux désillusions. Les grandes ONG, fortes de leur expérience dans des situations similaires, peuvent réaliser une première évaluation ex ante et se positionner dès les premiers jours en se finançant sur leurs seuls fonds propres ; les organisations de taille plus réduite arrivent en période de « seconde urgence » avec des moyens réduits, et ne peuvent qu'évaluer in situ la réalité de leur plus-value potentielle.
De façon générale, les ONG privilégient durant les premières semaines l'usage de l'argent liquide , plus adapté aux circonstances locales (rapidité de mobilisation et de paiement) et faute de correspondants bancaires suffisamment nombreux et fiables. Cette situation induit des contraintes particulières d'approvisionnement, la rotation des équipes permettant à chaque voyage de reconstituer le « stock », mais se veut provisoire. Si l'activité est amenée à durer plusieurs mois, l'ouverture d'un compte courant en Indonésie devient nécessaire, ce qui peut requérir plusieurs semaines.
Les principales ONG affirment avoir mis en place des procédures de sécurisation des fonds reçus afin de prévenir les détournements . Les responsables de la Fondation de France ont ainsi rappelé que la fondation ne remettait jamais d'argent directement aux autorités publiques ; les dons sont placés dans des comptes en euros et l'organisme traite exclusivement avec des ONG européennes, à charge pour elles de s'associer le cas échéant avec des ONG locales. La moitié du montant évaluatif de chaque programme est versée lors de l'engagement, puis au gré des différents documents de validation de l'avancement du projet. La fondation conserve 10 % de la somme, qui est versée après réception du mémoire de dépenses et une visite sur place.
Vos rapporteurs spéciaux jugent que ces principes de gestion sont sains mais ne témoignent pas d'une rigueur particulièrement prononcée ; il semble en effet logique que l'intégralité du budget d'un programme ne soit pas versée avant vérification du service fait. En outre les procédures mises en place au siège des organisations ne permettent pas de prévenir la spéculation sur place , que vos rapporteurs spéciaux ont amplement constatée s'agissant du logement des équipes 17 ( * ) , l'insertion d'intermédiaires récipiendaires des fonds et à la fiabilité non certifiée, ou la mise en place spontanée de « taxes » souterraines pour l'obtention d'un agrément administratif ou le passage d'une voie de communication. Enfin toutes les ONG, et en particulier les plus petites d'entre elles, n'ont pas nécessairement les moyens d'assurer la totale continuité du circuit d'affectation des fonds.
Le Comité de la charte de déontologie des organisations sociales et humanitaires faisant appel à la générosité du public, constitué le 20 novembre 1989, essaie de contribuer laborieusement à rationaliser la gestion des fonds. Il fixe ainsi des règles de bonnes pratiques pour la collecte et la gestion des dons, qui constituent une sorte de « label » assurant une plus grande fiabilité et transparence des organisations qu'il agrée.
3. Quelques exemples d'actions humanitaires réalisées par les ONG
a) La Croix-Rouge française
Fortes de 33 personnes en Indonésie (soit 6 spécialités professionnelles) lors de la mission de vos rapporteurs spéciaux, dont 21 à Meulaboh, les équipes de la Croix-Rouge réalisent deux types d'activités dans les zones sinistrées de la province, en étroite collaboration avec son partenaire indonésien Palangmera Indonesia (PMI) : l'approvisionnement et l'assainissement de l'eau, et l'appui médical . Les équipes se relaient toutes les trois semaines en préservant un « tuilage ».
Dans le nord de la province, et dans le cadre de la coordination 18 ( * ) exercée par la Fédération internationale de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge, la Croix-Rouge française a déployé des équipes de réponse aux urgences humanitaires (ERU) spécialisées en traitement des eaux et en assainissement. Ces ERU ont pour mission d'apporter de l'eau potable aux personnes déplacées, avec un objectif final de 25.000 personnes par jour, et d'améliorer les conditions sanitaires des camps de réfugiés par la construction de latrines.
De même, des équipes ont été installées à Meulaboh et ses environs afin d'identifier les besoins des écoles (réhabilitation, assainissement des locaux, accès à l'eau potable, promotion de l'hygiène auprès des élèves), en collaboration avec la branche locale de PMI et sous l'égide de l'UNICEF, qui assure la coordination de ce type d'activité. La Croix-Rouge française entend ainsi former 10 à 15 volontaires de PMI pour assurer la maintenance du matériel (pompes, générateurs et pulvérisateurs) des 43 écoles endommagées. Elle a également prévu, avec l'aide de techniciens des sociétés Veolia et Sade, de réhabiliter le réseau d'approvisionnement en eau et le réseau électrique de l'hôpital public de Meulaboh, et de travailler avec Oxfam pour la reconstruction d'une des trois installations de production et de distribution d'eau de la ville, qui a été détruite par le tsunami.
Dans le domaine médical , l'organisation a distribué dans les camps du nord vingt kits de santé primaire d'un poids unitaire de 60 kg, et un médecin apporte un soutien aux ERU. A Meulaboh, une équipe composée de huit personnes détachées par l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris assure la reprise des activités de l'hôpital de campagne ESCRIM, avec pour objectif d'équiper un dispensaire public qui fonctionnera avec du personnel médical indonésien.
La Croix-Rouge française a, dans un premier temps, eu recours aux moyens aériens de l'opération Beryx, mais s'attache le plus possible à mettre en oeuvre une logistique indépendante et dispose, à cet effet, de deux hélicoptères et d'un avion. Le financement des opérations au cours du mois de janvier a été assuré par des apports d'argent liquide , chaque nouvel arrivant étant muni d'un viatique, et la centralisation de la caisse à Banda Aceh (solution jugée finalement plus pratique qu'une comptabilité à Jakarta) était en cours de constitution fin janvier. Des comptes-rendus comptables, assortis des factures, sont établis en fin de mois.
b) Médecins sans Frontières (MSF) et Médecins du Monde (MDM)
MSF a envoyé plus de 150 volontaires internationaux et 1.200 tonnes de matériel d'urgence pour porter secours aux personnes sinistrées . Une équipe de huit membres de MSF, dont trois infirmières et deux médecins, est arrivée à Banda Aceh le 28 décembre, deux jours après le tsunami, par avion affrété transportant également 3,5 tonnes de matériel de secours et de matériel médical. Elle a immédiatement mis en place une clinique dans la ville et entamé les opérations d'évaluation et de secours à Banda Aceh et, par hélicoptère, dans des zones situées le long du littoral ouest et nord-est de la province d'Aceh. Près de 200 tonnes supplémentaires de matériel médical, d'eau et d'équipement sanitaire et d'urgence, ainsi que des dizaines de membres de MSF sont arrivés à Aceh au cours de la semaine qui a suivi le tsunami.
Pendant les dix premiers jours des opérations, MSF a fourni une aide médicale et sanitaire dans l'un des principaux hôpitaux de Banda Aceh, organisé des consultations mobiles, fourni des soins médicaux d'urgence et une assistance psychologique, distribué des vivres et des bâches, évacué les blessés nécessitant des soins urgents, et mis en place des réservoirs d'eau souples et des systèmes d'approvisionnement en eau dans les camps de personnes déplacées de la ville ainsi que dans le principal hôpital de Banda Aceh. Le champ géographique de ces interventions a été étendu au cours de la deuxième semaine , en particulier au principal hôpital de Meulaboh et dans celui de Sigli (soins, distribution de matériel, soutien psychologique individuel et de groupe, vaccinations contre le tétanos et la rougeole). Au total, près de 16.000 consultations auront été assurées en janvier. MSF assure également une surveillance épidémiologique et des actions d'amélioration de la qualité et de la quantité d'approvisionnement en eau dans les camps de personnes déplacées (réservoirs d'eau souples et systèmes d'approvisionnement, camions-citernes, nettoyage et remise en état des puits, amélioration de l'assainissement des ordures).
MSF a enfin organisé des distributions de tentes, bâches de plastique, jerricans, savons, moustiquaires, tapis de sols, habits, et des outils à 50.000 personnes affectées par le tsunami. La distribution des tentes intervient en particulier dans un contexte d'incertitudes sur la politique gouvernementale de relogement des réfugiés (cf. troisième partie), qui tend à privilégier le regroupement dans des centres plutôt que le retour sur les lieux originels d'habitation.
Médecins du Monde , présent depuis six ans en Indonésie (où l'association a noué un partenariat avec le ministère de la santé) et qui a bénéficié d'un montant de dons largement inférieur à celui de MSF (6 millions d'euros fin janvier), remplit des missions similaires avec une équipe d'une vingtaine de personnes établie à Banda Aceh, dont huit professionnels médicaux et quatre logisticiens. Six membres de cette équipe sont salariés de MDM, les autres sont des volontaires internationaux, rémunérés 700 à 950 euros par mois. Les interlocuteurs de vos rapporteurs spéciaux ont clairement indiqué que l'organisation souhaitait assurer une présence en Indonésie sur trois ans, et que les principales ONG se trouvaient confrontées à un problème de surfinancement , dû tant à la générosité des Français qu'à l'obligation de respecter l'affectation géographique et/ou thématique des fonds prévue par le donateur.
Vos rapporteurs spéciaux se sont également montrés très surpris que le coût unitaire des ordinateurs portables acquis par le service informatique de l'organisation soit de 3.000 euros , selon les informations recueillies sur place, alors qu'un appareil de très bonne facture n'excède guère 1.500 euros dans les magasins de grande distribution. Le détail du coût ainsi annoncé par un des logisticiens de l'équipe locale nécessiterait toutefois une vérification.
c) Handicap International
L'action de cette ONG se concentre sur les handicaps physiques et les problèmes psychologiques. Présente dans six hôpitaux (dont un hôpital de campagne danois) de Banda Aceh, Sigli et Meulaboh, une équipe d'une dizaine de personnes, dont six praticiens médicaux, travaille en collaboration avec MSF, MDM et des ONG locales, après qu'une mission exploratoire arrivée le 14 janvier a évalué les besoins. L'organisation est également propriétaire d'un navire, auparavant positionné aux Philippines et qui a rejoint Sumatra début février.
Handicap International a déployé des actions spécifiques en matière de kinésithérapie respiratoire , un « créneau » peu occupé par les autres ONG, en collaboration avec des praticiens locaux qui sont encore peu intégrés dans les équipes de soins médicaux. Cet axe doit être mis en place sur trois mois - c'est-à-dire jusqu'à la date limite de présence impartie par le gouvernement indonésien aux forces armées étrangères, et sans doute tacitement aux ONG - pour être suivi, dans la mesure du possible, par des actions de soutien psychologique. Si l'ONG parvient à obtenir un agrément à Jakarta pour pérenniser sa présence, ce qui est loin d'être garanti compte tenu de sa moindre notoriété que des associations anglo-saxonnes et de la probable complexité des procédures, elle envisage de mettre en place un volet « reconstruction » destiné à une meilleure accessibilité des handicapés.
Il convient de relever que la représentante d'Handicap International à Jakarta est bénévole , et celle de la Croix-Rouge française sous contrat court de trois mois (renouvelable). L'ONG a ouvert un compte à la BNP-Paribas ; en cas de surfinancement, elle compte restituer le surplus aux donateurs, ou plus vraisemblablement solliciter auprès d'eux une nouvelle affectation.
d) Autres ONG
Vos rapporteurs spéciaux ont rencontré les représentants d'ONG plus modestes, telles que Pompiers sans Frontières, Solidarités et Première Urgence ; qui disposent localement d'équipes de trois à sept personnes, généralement jeunes et sous contrat de volontariat. La forte proportion de bénévoles au sein de l'équipe de Pompiers sans Frontières mérite cependant d'être relevée.
Des associations telles que Solidarités et Première Urgence sont essentiellement financées par des institutions publiques 19 ( * ) , la part des dons privés et en nature étant comprise entre 10 et 20 %. L'association Première Urgence, née en 1992 à l'occasion du siège de Sarajevo, dispose d'un budget annuel d'environ 15 millions d'euros et intervenait dans treize pays en 2003. D'après les informations fournies à vos rapporteurs spéciaux, les frais de fonctionnement et de communication de cette ONG seraient de 4 % , ce qui est notoirement inférieur aux frais tarifés forfaitairement par nombre d'ONG financées par les services de coopération et d'action culturelle des ambassades (8 à 10 %). Les missions exploratoires et d'évaluation sont intégralement financées sur fonds propres , ce qui constitue un principe de saine gestion, compte tenu de leur caractère non strictement humanitaire et des motivations des donateurs.
Les programmes menés par l'association Première Urgence depuis sa création ne sont cependant pas exactement conformes à son appellation , puisqu'ils ont aussi bien trait à l'aide d'urgence (distribution de denrées alimentaires, de combustible, de médicaments et de matériel médical) qu'aux actions dites de « post urgence » (réhabilitation et construction de dispensaires, d'écoles, de logements, de réseaux d'adduction...) et de relance micro-économique (aide au redémarrage et réinsertion). Compte tenu de ce positionnement assez polyvalent, et en l'espèce de l'arrivée plus tardive de cette ONG à Aceh, vos rapporteurs spéciaux ne s'étonnent guère de l'impression de « bonne volonté encore mal utilisée » que leur ont laissé ces entretiens. Il faut espérer que cette multi-activité soit imputable au caractère récent de cette association, et constitue un préalable à une plus grande spécialisation , rendue nécessaire par les contraintes du terrain, la nécessité d'occuper pleinement les équipes sur place, et d'une certaine façon par la concurrence et la logique de crédibilisation sur un créneau qui tendent désormais à régir le secteur des ONG.
Parmi les autres ONG françaises présentes à Sumatra, citons également Action contre la faim , qui en étroite collaboration avec le PAM, évalue les besoins des populations réfugiées en eau et vivres ; et le Secours islamique français , qui en collaboration avec son partenaire indonésien, travaille auprès des populations sinistrées dans les domaines de l'eau, de l'hygiène, de la sécurité alimentaire et du micro-crédit.
* 15 Sans prosélytisme particulier signalé à vos rapporteurs spéciaux.
* 16 Décret n° 95-94 du 30 janvier 1995 relatif aux volontaires et aux associations de volontariat pour la solidarité internationale. La loi du 14 mars 2000 (loi n° 2000-242 du 14 mars 2000 relative aux volontariats civils institués par l'article L. 111-2 du code du service national et à diverses mesures relatives à la réforme du service national) avait théoriquement pour vocation d'englober toutes les formes de volontariat, y compris le volontariat accompli auprès d'associations dans les domaines de l'aide au développement et de l'action humanitaire, mais le statut du volontaire civil s'est révélé inadapté aux besoins des associations de solidarité internationale.
Un projet de loi relatif au contrat de volontariat de solidarité internationale a ainsi été déposé au Sénat le 7 janvier 2004 et a été adopté définitivement par l'Assemblée nationale le 10 février 2005 (loi n° 2005-157 du 23 février 2005).
* 17 A Banda Aceh et à Meulaboh, les prix des locations ont ainsi triplé en quelques semaines, ce qui constitue avant tout le reflet de la loi de l'offre et de la demande, compte tenu de la rareté des maisons intactes, décentes et suffisamment vastes pour accueillir une dizaine de personnes et leur matériel.
* 18 Une réunion quotidienne est à ce titre organisée à Genève. La fédération est principalement compétente pour les catastrophes naturelles, et le CICR pour les conflits. Dans la mesure où la situation à Aceh présente ces deux caractéristiques, une coordination complexe a du être exercée entre la fédération, le CICR et PMI. Le CICR est ainsi en charge de la partie nord est de la province (où sont majoritairement concentrés les combattants du GAM), et la fédération de la côte ouest.
* 19 Solidarités est en particulier financée par ECHO, l'office Europaid et la Délégation à l'action humanitaire du Quai d'Orsay.