B. UN RÉSEAU CULTUREL À L'ÉTRANGER PARTICULIÈREMENT DENSE

La France dispose, comme pour les ambassades, d'un réseau culturel universel, particulièrement dense. Il n'est pratiquement aucun pays où la France ne dispose d'une représentation culturelle.

1. 3,9 centres culturels ou alliances française par pays où la France est représentée

Aucun pays au monde ne dispose d'un réseau culturel équivalent à celui de la France , si l'on tient compte non seulement des centres culturels, mais aussi des alliances françaises et des lycées français à l'étranger. La particularité française ne tient pas dans le maillage de ses centres culturels (144, sans compter les centres de recherche), qui reste comparable à celui du Royaume-Uni (117 British Council) ou de l'Allemagne (129 Goethe Institut), et supérieur à celui de l'Espagne (67 instituts Cervantès) ou de l'Italie (90 instituts culturels), mais d'une part, à l'existence d'un double réseau, centres culturels et alliances françaises, et, d'autre part, à une densité de lycées français à l'étranger exceptionnelle.

a) La présence culturelle française à l'étranger se matérialise le plus souvent par des lieux dédiés

Comme celle des autres pays précités, la présence culturelle française passe par des « lieux » : ainsi que l'a indiqué le ministère des affaires étrangères et européennes dans les observations formulées à votre rapporteur spécial au cours de sa mission, « les établissements, par leurs murs, incarnent notre présence dans les grandes capitales. Les habitants de Tokyo ou de New-York connaissent l'Institut français ou l'Alliance française même s'ils n'en ont jamais franchi le seuil ».

La gestion de ces murs a un coût parfois significatif : la maison de France , à Rio de Janeiro 13 ( * ) , est ainsi connue pour supporter des dépenses de maintenance et d'entretien très supérieures aux normes immobilières « standard ». Beaucoup de centres culturels ou d'alliances françaises éprouvent des difficultés budgétaires pour financer des travaux de rénovation nécessaires, souvent parce que les lieux occupés apparaissent surdimensionnés . A Rosario, en Argentine, l'Alliance française dispose ainsi d'une grande « salle de bal » dont les travaux pour la transformer en salle de spectacle ne peuvent être autofinancés. S'ajoutent parfois des implantations immobilières de prestige dont il conviendrait d'évaluer l'efficacité en termes de rayonnement culturel.

Les coûts immobiliers exercent, en effet, mécaniquement un effet d'éviction sur les dépenses culturelles « utiles » : elles doivent donc être maîtrisées. Cet élément est l'un de ceux qui conduisent votre rapporteur spécial dans le présent rapport d'information à proposer des programmations culturelles « hors les murs ».

Par ailleurs, la présence française est le plus souvent duale : existence d'un centre culturel ou d'une alliance française et d'un service de coopération et d'action culturelle (SCAC) , au sein de l'ambassade, piloté par un conseiller culturel, qui entretient parfois des relations délicates avec le directeur du centre culturel. Pour éviter que se reproduisent certaines difficultés enregistrées dans le passé, les postes à l'étranger se sont adaptés : à Hambourg, le consul général est directeur du centre culturel, à Varsovie, le conseiller culturel est en même temps directeur du centre culturel, comme au Caire, par exemple. A Buenos Aires, l'Alliance française est l'opérateur culturel du service de coopération et d'action culturelle.

L'Allemagne, mais aussi l'Espagne, ont adopté la même organisation duale : un conseiller culturel auprès de l'ambassadeur cohabite dans son pays d'affectation avec le centre culturel.

Le ministère des affaires étrangères et européennes a prévu, à la suite de la révision générale des politiques publiques, de fusionner les centres culturels avec les services de coopération et d'action culturelle (SCAC) dans des « EspaceFrance ». En première analyse, cette décision doit permettre d'apporter plus de cohérence dans la politique culturelle à l'étranger, puisque les « EspaceFrance » se trouveront sous l'autorité hiérarchique du seul conseiller culturel 14 ( * ) . Elle devrait conduire ceux-ci à s'autofinancer davantage.

La fusion risque néanmoins d'absorber les conseillers culturels dans la gestion de leurs centres culturels, au sein desquels les enjeux de gestion des ressources humaines et les problèmes immobiliers sont prégnants , au détriment de la politique dynamique de rayonnement culturel « hors les murs » que votre rapporteur spécial appelle de ses voeux. Contraints d'animer leurs centres culturels, les nouveaux responsables des « EspaceFrance » pourraient bien enfermer encore davantage leur programmation culturelle au sein des murs des centres et instituts français, alors que l'enjeu est, tout au contraire, de faire exister la culture française au sein des salles de concerts, des galeries, des théâtres, des universités des pays étrangers.

b) Un réseau d'une densité exceptionnelle

La France disposait en 2007 de 60 centres culturels dans les pays dits du programme 185 (pays de l'OCDE), et de 85 dans les pays dits du programme 209 (pays en voie de développement qui comprennent aussi de grands pays émergents comme l'Afrique du Sud, l'Argentine, le Brésil, la Chine...) auxquels il faut ajouter des instituts. 220 alliances françaises sont dirigées par un agent de l'Etat expatrié. 255 autres alliances françaises bénéficient de financements plus modestes de la part de nos postes à l'étranger.

Notre réseau est donc particulièrement dense. A titre de comparaison, on compte aujourd'hui dans le monde 350 villes de plus d'un million d'habitants, ce qui signifie que le réseau culturel français n'est pas seulement déployé dans les très grandes métropoles, mais aussi dans des villes de taille moyenne.

Au total, si l'on considère que 158 pays accueillent une ambassade française à l'étranger, on parvient à 3,9 centres culturels ou alliances françaises par pays où la France a une présence diplomatique .

Ce calcul ne tient pas compte des écoles françaises à l'étranger, qui accueillent pourtant 53 % d'enfants étrangers et participent ainsi directement au rayonnement culturel. S'agissant des établissements financés sur fonds publics, on recense 452 établissements d'enseignement à l'étranger homologués par le ministère de l'éducation nationale, scolarisant 240.000 élèves, dont 73 établissements en gestion directe et 180 conventionnés placés dans ces deux derniers cas sous l'autorité de l'agence de l'enseignement français à l'étranger (AEFE). Seules ces deux dernières catégories d'établissement sont financées par l'Etat. Il existe donc 253 lycées français financés par l'Etat à l'étranger, soit 1,6 établissement par pays où la France est représentée.

* 13 Ancien bâtiment de l'ambassade de France avant que la capitale du Brésil ne soit transférée à Brasilia, l'immeuble est surdimensionné par rapport à la présence française actuelle à Rio de Janeiro. Le projet actuel d'héberger dans ces locaux le consulat général d'Allemagne se ferait selon les dernières informations obtenues par votre rapporteur spécial à un tarif privilégié. Il ne compenserait pas le niveau des charges de l'immeuble, qui est de surcroît très important par rapport à ce que pourraient proposer d'autres immeubles.

* 14 Les directeurs de centres culturels se trouvaient déjà sous l'autorité du conseiller culturel sans parfois pour celui-ci suffisamment de leviers pour l'exercer.

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