II. MALGRÉ LA MISE EN oeUVRE DE POLITIQUES AMBITIEUSES, DES DIFFICULTÉS SUBSISTENT

Suivant les préconisations des différents rapports d'évaluation de la loi et des principaux acteurs de la lutte contre les exclusions, le plan national d'action pour l'inclusion sociale (PNAI) et le document de politique transversale (DPT) ont fixé plusieurs priorités qui ont été progressivement mises en oeuvre dans le cadre des grandes politiques de lutte contre les exclusions et la pauvreté.

Il s'agit de l'accès et du retour à l'emploi, de l'insertion professionnelle des jeunes, de la lutte contre l'illettrisme, du développement de l'offre de logements et de l'amélioration de l'accès à la santé et aux soins.

A. LES LIMITES DE LA COUVERTURE MALADIE UNIVERSELLE

La loi du 27 juillet 1999 portant création de la couverture maladie universelle 89 ( * ) a représenté une avancée, dans la mesure où elle visait à permettre aux personnes les plus démunies d'accéder à la prise en charge des soins dans les mêmes conditions de ressources partout sur l'ensemble du territoire.

A la fin de 2007, 4,8 millions de personnes bénéficiaient de la CMU-c et près de 240 000 personnes avaient fait valoir leurs droits à l'aide à l'acquisition d'une couverture complémentaire (ACS).

Cette loi a permis la mise en place, dès le 1 er janvier 2000, de :

- la couverture maladie universelle (CMU) qui, accordée pour un an, permet l'accès à l'ensemble des prestations en nature de l'assurance maladie. Ses bénéficiaires doivent résider en France de manière stable et régulière et ne pas disposer d'un autre droit à l'assurance maladie. Sans assurance complémentaire, le bénéficiaire est redevable du ticket modérateur et du forfait hospitalier, non pris en charge par l'assurance maladie ;

- la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-c) , protection complémentaire publique, complète et gratuite, attribuée sous conditions de résidence et de ressources. Grâce à la couverture intégrale des soins pris en charge et à la dispense d'avance de frais, elle vise à assurer un haut niveau de protection complémentaire aux personnes disposant de faibles revenus.

Afin de limiter les effets de seuil, elle a été complétée depuis par une aide à l'acquisition d'une complémentaire santé 90 ( * ) (ACS), que les ménages disposant de revenus inférieurs au plafond ouvrant droit à la CMU-c, majoré de 20 %, peuvent désormais obtenir sous la forme d'un « chèque-santé » qui finance directement une partie du coût de leur couverture complémentaire ;

- l'aide médicale d'Etat (AME) qui offre, sous condition de ressources, à environ 190 000 bénéficiaires , pour une durée d'un an renouvelable, une couverture médicale gratuite aux personnes étrangères résidant en France depuis plus de trois mois qui ne peuvent pas bénéficier de la CMU.

En outre, la réforme de la procédure de domiciliation 91 ( * ) a facilité l'accès à l'ensemble des droits, aides et prestations légales des personnes sans domicile stable, notion plus large qui englobe un public plus vaste que les seules personnes sans domicile fixe. La nouvelle procédure prévoit en effet que les personnes dépourvues de logement stable peuvent désormais élire domicile, soit auprès d'un organisme agréé à cet effet par le préfet, soit auprès d'un centre communal d'action sociale (CCAS) ou d'un centre intercommunal d'action sociale (CIAS). La demande de prestation, quelle qu'elle soit, peut alors se faire auprès de l'organisme ou association ayant accueilli la domiciliation.

Mais si ces réformes ont favorisé l'accès aux services de santé d'une très large majorité de la population, certaines personnes ne sont pas encore en mesure d'assumer dans des conditions pleinement satisfaisantes la prise en charge des soins nécessaires à l'amélioration de leur état de santé.

Ainsi, à la fin de 2007, 6 millions de Français ne disposaient pas d'une complémentaire santé, soit 7 % de la population. Hors le reste à charge pour ces personnes, après l'intervention de l'assurance maladie obligatoire, est en moyenne de 500 euros. Les complémentaires santé jouent alors le rôle de « premier bouclier sanitaire », permettant de réduire le reste à charge des personnes couvertes.

L'absence de complémentaire, qui concerne principalement les personnes en situation de précarité (22 % déclarent ne pas en avoir), est alors particulièrement préjudiciable pour leur état de santé et leur insertion sociale et professionnelle.

Cette situation s'explique à la fois par le bas niveau des plafonds d'accès et par les effets de seuil qui excluent de la couverture maladie universelle complémentaire de nombreuses personnes en situation de précarité, mais aussi par le non-recours à la CMU-c ou à l'ACS de nombreux bénéficiaires pourtant éligibles.

Enfin, lorsqu'ils sont couverts, il peut arriver que certains patients subissent des refus de soins de la part des praticiens.

1. Les publics exclus du fait des effets de seuil

Au 1 er juin 2008, les plafonds mensuels d'accès à la CMU, la CMU-c et à l'ACS étaient, pour une personne seule, respectivement de 720,33 euros 92 ( * ) , 606 euros et 727,25 euros, soit un niveau nettement inférieur au seuil européen de pauvreté de 817 euros.

Comparaison du seuil de pauvreté et des barèmes d'attribution de la CMU-c

(en euros)

Personne seule

Couple sans enfants

Seuil de pauvreté à 50 % du revenu médian

681

1 022

Seuil de pauvreté à 60 % du revenu médian

817

1 226

Barème d'attribution de l'aide à la complémentaire santé (ACS)

727

1 091

Barème d'attribution de la CMU-complémentaire

606

909

Barème d'attribution de la CMU

720

1 080

Lecture : pour une personne seule, le seuil de pauvreté est situé à 817 euros, le barème de la CMU-c à 606 euros et le barème de l'ACS à 727 euros.

La comparaison de ces valeurs doit être faite avec prudence car les revenus pris en compte pour l'attribution de l'ACS et de la CMU-c ne correspondent pas exactement à ceux pris en compte pour le calcul du seuil de pauvreté.

Source : Fonds de financement de la protection complémentaire de la couverture universelle du risque maladie

Ainsi, les allocataires de minima sociaux d'un niveau supérieur à ces montants se trouvent exclus du système de couverture maladie universelle. Tel est le cas par exemple des bénéficiaires de l'AAH, de l'ASV, de l'ASS majorée ou de l'AER, qui n'ont pas accès à la CMU-c.

L'ACS a corrigé en partie cet effet de seuil en permettant aux allocataires de ces minima (à l'exception de l'AER) d'en bénéficier. Toutefois, on peut légitimement s'interroger sur la revalorisation de ces plafonds, notamment celui de la CMU-c, qui demeure inférieur au seuil de pauvreté fixé à 50 % du revenu médian, soit 681 euros.

La détermination des plafonds d'accès devra également tenir compte des conséquences d'une éventuelle généralisation du revenu de solidarité active (RSA) et de la revalorisation de 25% de l'AAH, confirmée le 10 juin dernier par le Président de la République.

* 89 Loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 portant création d'une couverture maladie universelle.

* 90 Article 56 de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie.

* 91 Loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable.

* 92 A compter du 1 er octobre 2008, le plafond mensuel d'accès à la CMU sera de 731,16 euros suite à sa revalorisation annuelle, conformément à l'évolution des prix à la consommation hors tabac.

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