3. Des aménagements du terrain à prévoir, en 2010 et 2011, pour un montant total de 70,7 millions d'euros
Les conventions signées entre l'Etat et la Ville de Paris prévoient, sur les exercices 2010 et 2011, le paiement par l'Etat de divers travaux d'aménagement .
La participation au coût des équipements de la ZAC « Clichy-Batignolles » s'élève à 65 millions d'euros payés à la Ville de Paris en 2010 ou en 2011. Ce montant se décompose en 50.309.129 euros payés sur les crédits de la mission « Justice » (soit 77,4 %) et en 14.690.871 euros payés sur les crédits de la mission « Sécurité » (soit 22,6 %).
S'agissant des reconstitutions ferroviaires nécessaires dans le cadre de l'aménagement du site, ce sont 5.695.986 euros qui devront être payés à la SNCF en 2010 et en 2011, 4.408.940,51 euros provenant de la mission « Justice » (soit 77,4 %) et 1.287.045,49 euros étant imputés sur la mission « Sécurité » (soit 22,6 %). Ces travaux de reconstitution correspondent à la participation de l'Etat pour la réalisation, d'une part, d'un mur de soutènement entre le futur « fret ferroviaire » et les terrains d'Etat, et, d'autre part, d'une couverture sur les zones de « fret ferroviaire » situées aux abords du terrain devant accueillir la future « Cité judiciaire ». Selon les informations communiquées à votre rapporteur spécial par l'APIJ, cette dépense ne présente toutefois pas encore un caractère certain , une expertise étant en cours pour évaluer la nécessité ou non de réaliser cette couverture.
La clef de répartition entre la mission « Justice » et la mission « Sécurité » pour ces travaux d'aménagement repose essentiellement sur la base de la surface hors oeuvre nette réalisée. Or, sur un total de 120.000 m², cette surface se répartit entre 90.000 m² (soit 75 %) pour le ministère de la justice et des libertés et 30.000 m² (soit 25 %) pour le ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
4. Le choix du mode de financement : la préférence pour un partenariat public - privé (PPP)
Le choix du mode de financement de la construction du nouveau TGI de Paris représente naturellement un élément essentiel dans la réussite du montage de ce projet. Dans cette perspective, deux modes de financement sont envisageables : un financement classique sur crédits budgétaires ou le recours à un partenariat public-privé (PPP).
Le financement sur crédits budgétaires présenterait certes l'avantage pour l'Etat de ne pas avoir à rétribuer un (ou des) intermédiaire(s) supplémentaire(s) via une (ou des) prime(s). Les masses financières en jeu peuvent cependant constituer un frein s'agissant du recours à un mode de financement 100 % public.
Il convient en effet de rapporter le budget estimatif du projet de TGI aux « Batignolles », soit 632,5 millions d'euros, à celui de la mission « Justice », soit 6.859,1 millions d'euros en crédits de paiement (CP) pour 2010. Ainsi, le budget total du TGI de Paris pèse à lui seul 9,3 % du budget annuel de la justice dans notre pays .
Rapporté au budget pour 2010 du programme « Justice judiciaire », ce ratio est encore plus conséquent. Une enveloppe de 632,5 millions d'euros représente en effet 22,5 % des 2.838,6 millions d'euros consacrés à la justice judiciaire cette année .
Il apparaît donc que le poids considérable du projet du nouveau TGI à Paris peut difficilement être supporté en l'état par le seul budget de la mission « Justice » sans pénaliser durement les moyens mis à disposition des autres acteurs du système judiciaire.
Ce constat milite pour le choix d'un financement via un PPP . Au cours des différents contacts et échanges que votre rapporteur spécial a pu avoir avec ses interlocuteurs dans le cadre de la présente mission de contrôle, il est d'ailleurs ressorti une préférence assez nette pour cette option .
Le recours à un PPP ne constitue pas une nouveauté radicale pour le ministère de la justice et des libertés. En effet, dans le cadre des projets immobiliers menés dans le domaine pénitentiaire , le ministère a déjà opté à plusieurs reprises pour ce type de financement. Si l'APIJ n'a encore qu'une expérience limitée de ce genre de montage, cette expérience est néanmoins bien réelle.
Auditionnés par votre rapporteur spécial 14 ( * ) , MM. Alain Pichon, président de la 4 ème chambre de la Cour des comptes, Gérard Moreau, conseiller-maître de la Cour des comptes, et Jean-François Guillot, conseiller référendaire de la Cour des comptes, ont souligné les trois principaux critères pouvant être pris en compte pour arrêter le choix du décideur public en faveur d'un PPP : l'urgence du projet, sa complexité et le bilan économique résultant du choix de ce mode de financement.
Si l'on se réfère à cette grille d'analyse, l'urgence du projet d'installation d'un nouveau TGI à Paris n'est guère contestable eu égard aux atermoiements ayant caractérisé cette réflexion depuis les années 1990. De même, la complexité de l'aménagement du futur site d'accueil ne paraît pas plus discutable.
Au regard du bilan économique de l'opération, il convient de rappeler que les expériences conduites sur les PPP dans le domaine pénitentiaire ont abouti à des économies substantielles sur ces programmes. Ainsi, selon MM. Alain Pichon, Gérard Moreau et Jean-François Guillot, le coût de ces opérations peut être estimé à environ 20 % de moins par rapport à un financement régalien en maîtrise d'ouvrage classique .
Sur ce dernier point, votre rapporteur spécial tient à insister sur le bénéfice pouvant être retiré par la collectivité publique du dialogue compétitif instauré avec le partenaire privé dans le cadre d'un PPP .
D'une part, ce dialogue permet de faire jouer le principe de maîtrise des coûts , notamment par une juste définition des clauses figurant dans les cahiers des charges. D'autre part, il conduit à une limitation du risque contentieux ultérieur grâce à l'association de toutes les parties au projet, et cela dès le départ de la discussion. Enfin, un montage en PPP présente l'intérêt non négligeable d'un gain de temps substantiel de l'ordre d'un an et demi à deux ans par rapport à un financement classique via l'emprunt.
En dépit des avantages retirés dans le PPP dans le cadre de la construction du nouveau TGI de Paris, votre rapporteur spécial ne veut néanmoins pas passer sous silence les inconvénients et/ou difficultés liés à ce mode de financement .
Tout d'abord, le recours à un PPP incluera nécessairement un volet « Services » . La maintenance du site comme l'entretien du bâtiment exigeront en effet la mise en place de certaines fonctions support, probablement intégrées dans le PPP. L'acceptation de ce « basculement » dans le privé de ces activités de services, tout comme la négociation des clauses y afférentes dans le contrat signé avec le partenaire privé, constituent un enjeu non négligeable pour l'institution judiciaire et l'administration en charge de ce montage juridique. Il conviendra de faire preuve dans le cadre de la négociation de ce contrat d'une vigilance accrue, étant donné le déficit certain de savoir-faire de l'administration française s'agissant de montages juridiques et financiers aussi complexes.
En outre, si le PPP permet à l'Etat d'éviter d'emprunter et donc d'avoir à supporter une charge de financement, le « revers de la médaille » ne doit pour autant pas être sous estimé. En effet, d'un point de vue économique et financier, le PPP constitue bien une dette de la collectivité publique , même s'il n'est pas considéré en tant que tel dans les critères comptables liant les pays membres de l'Union européenne (UE).
Du fait d'un PPP, les finances publiques sont effectivement contraintes sur le long terme via le versement d'un loyer. Dans le cas des établissements pénitentiaires financés par un tel partenariat, l'engagement de l'Etat porte en moyenne sur 27 ans. Concernant le futur Palais de justice de Paris, on peut imaginer que le délai soit encore supérieur, de l'ordre de 40 ans par exemple.
* 14 Audition du 17 juillet 2009.