3. Une préférence pour la médiation bien qu'elle ne permette pas d'apporter une réponse à tous les litiges
Face aux craintes suscitées par l'action de groupe, nombreux sont les professionnels qui plaident en faveur du développement de la médiation en matière de petits litiges de consommation. La médiation pourrait, à terme, rendre inutile l'action de groupe.
Mode alternatif, non judiciaire, de règlement des litiges, la médiation est souvent avancée comme une solution à la résolution des petits litiges de consommation entre professionnels et consommateurs, tout en évitant d'encombrer les tribunaux. On constate d'ailleurs ces dernières années un développement important - et assez disparate - des instances et organes professionnels de médiation, avec des statuts très variés, et nombreux sont les secteurs professionnels voire les grandes entreprises privées et publiques qui instituent un médiateur et rendent public chaque année le bilan de son activité.
De nombreux secteurs professionnels ont mis en place des dispositifs de médiation à leur initiative, par exemple le médiateur des communications électroniques, le médiateur de l'eau... Il existe un médiateur de la Fédération française des sociétés d'assurances (FFSA) de même qu'un médiateur des mutuelles d'assurances du Groupement des entreprises mutuelles d'assurances (GEMA), sans oublier les médiateurs institués dans certaines compagnies ou mutuelles d'assurances.
Dans le domaine bancaire, le code monétaire et financier impose à tout établissement de crédit depuis 2002 la désignation d'un ou plusieurs médiateurs chargés de recommander des solutions aux litiges l'opposant à sa clientèle et prévoit une procédure de médiation. Les établissements peuvent désigner un médiateur interne ou encore le médiateur de la Fédération bancaire française (FBF) ou de l'Association des sociétés financières (ASF).
Il existe également de nombreux médiateurs dans le secteur public, regroupés dans la charte des médiateurs du service public, qui peuvent avoir à connaître de litiges de consommation, par exemple les médiateurs de la Poste, de la RATP, de la SNCF, d'EDF...
Outre le modèle du Médiateur de la République, d'autres médiateurs ont un statut public garantissant leur complète indépendance à l'égard des professionnels du secteur concerné, par exemple le médiateur national de l'énergie, chargé des litiges entre les consommateurs et leurs fournisseurs d'électricité ou de gaz naturel, sans préjudice au demeurant de l'existence de médiateurs d'entreprise.
Certes, une très grande majorité des petits litiges peut être traité grâce à une systématisation des outils de médiation dans tous les secteurs. Il est à l'évidence plus simple, plus rapide et moins coûteux pour un consommateur d'obtenir gain de cause en s'adressant à un médiateur, s'il n'a pas été satisfait par les réponses du service clients du professionnel concerné. La médiation, si elle fonctionne et donne des résultats, est à préférer à l'action judiciaire, même collective. À ce titre, elle doit être encouragée et généralisée, de même que son statut, ses procédures et ses garanties d'impartialité, sans oublier la prise en charge de son coût, mériteraient aujourd'hui d'être encadrés.
Lors des assises de la consommation, le 26 octobre 2009, M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation, a ainsi annoncé une série de mesures de nature à étendre les dispositifs de médiation : définir dans la loi la notion de médiation de façon à imposer aux médiateurs des compétences et des obligations claires, instaurer une certification des services de médiation en matière de consommation de manière à assurer aux consommateurs la qualité du processus de médiation qui leur est proposé, assurer un suivi permanent de la médiation dans le cadre de l'Institut national de la consommation (INC), développer la médiation dans les secteurs qui en sont actuellement dépourvus, notamment dans les petites entreprises, et mieux informer les consommateurs sur l'existence des services de médiation.
À cet égard, il faut noter qu'il appartient à la France de transposer 34 ( * ) la directive 2008/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008, sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale. Faisant suite à un livre vert présenté en 2002 sur les modes alternatifs de règlement des conflits, cette directive vise à encourager le recours à la médiation comme moyen de règlement des litiges transfrontaliers en matière civile et commerciale et, plus généralement, le règlement amiable des litiges. Dans l'esprit de ce texte, la médiation n'est pas un substitut de la résolution judiciaire des conflits, mais un utile complément. Ce texte vise également à rendre obligatoire la faculté pour l'une des parties de demander à une autorité publique ou juridictionnelle la confirmation de l'accord obtenu au terme de la médiation.
Toutefois, lorsque la médiation sera généralisée, il pourra demeurer quelques litiges individuels qui n'auront pas obtenu de solution. Ces litiges ne peuvent rester sans possibilité effective de demander réparation, sous prétexte que les montants en cause sont trop faibles et que, par conséquent, l'action civile individuelle n'est pas pertinente économiquement au regard des coûts qu'elle engendre pour le consommateur. Pour ces litiges, peu nombreux bien sûr, l'action de groupe, utilisée avec discernement, demeurerait utile.
Au surplus, l'existence d'une voie contentieuse collective pourrait constituer une incitation à emprunter de façon plus volontaire et efficace la voie extrajudiciaire de la médiation, en vue d'aboutir à un accord et d'éviter le recours au juge et à la publicité que cela ne manque pas de susciter. Vos rapporteurs notent que l'action de groupe donnerait ainsi une crédibilité plus grande à la médiation, avec de meilleures chances pour les consommateurs d'obtenir une juste indemnisation.
* 34 Le délai de transposition de la directive est fixé au 21 mai 2011.