2. Négociation nationale et institutionnalisation du dialogue social
La loi n° 2007-130 du 31 janvier 2007 de modernisation du dialogue social tend à systématiser le dialogue social, en initiant une espèce de « décentralisation » sociale.
Elle dispose que toute réforme dans les domaines des relations du travail, de l'emploi ou de la formation professionnelle doit être précédée d'une concertation avec les organisations patronales et syndicales, les partenaires sociaux pouvant alors faire connaître au Gouvernement leur intention d'ouvrir une négociation sur le thème considéré.
En réalité, comme l'a montré l'étude de M. Dominique-Jean Chertier 168 ( * ) , les partenaires sociaux étaient déjà, avant 2007, largement consultés en amont de la loi, par le biais d'instances consultatives diverses ou en conséquence des interactions entre loi et négociation collective, par exemple la reprise par la loi du contenu d'un accord national interprofessionnel qui est devenue, au fil des années, une pratique courante. La réforme a visé à donner un caractère systématique à la concertation pour l'ensemble des réformes du droit social, selon des modalités harmonisées. Cette réforme s'inspire de la notion d' « agenda partagé » , avancée par le rapport Chertier, qui préconisait l'inscription de l'action des pouvoirs publics dans un cadre clair, connu à l'avance et prévoyant un partage des tâches et des calendriers entre Gouvernement, Parlement, partenaires sociaux et acteurs de la société civile.
Selon les termes du président de la République, il s'est agi de « placer les partenaires sociaux au coeur de l'élaboration des normes et des réformes sociales » 169 ( * ) .
La loi de modernisation du dialogue social n'a toutefois pas retenu la proposition du rapport Chertier tendant à insérer dans la Constitution un renvoi vers une loi organique dédiée à la procédure d'élaboration des textes sociaux. Le rapport Chertier proposait qu'en cas d'échec des négociations, le Gouvernement puisse reprendre l'initiative. En cas d'accord en revanche, le Gouvernement et le Parlement n'auraient eu qu'une alternative : approuver l'accord en totalité ou le rejeter, sans aucune possibilité d'amendement.
Accroître le rôle des partenaires sociaux dans l'élaboration des normes rendait nécessaire de consolider leur légitimité, ce qu'a fait la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail (cf. chapitre III de la troisième partie).
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Quoi qu'associés à la marche de l'entreprise au moyen de mécanismes de représentation et de négociation, les salariés peuvent toutefois être considérés comme « oubliés » de la gouvernance.
* 168 « Pour une modernisation du dialogue social », rapport de M. Dominique-Jean Chertier (mars 2006).
* 169 Discours de M. Jacques Chirac, président de la République, devant le Conseil économique et social le 10 octobre 2006.