3. La dissimulation du visage dans l'espace public3 ( * )
Au cours de sa réunion du 2 juin 2010, la commission des lois a saisi la délégation sur le projet de loi interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public.
Ce texte, qui tendait à apporter une réponse législative au problème de société posé par le port du voile intégral ne pouvait être abordé seulement sous l'angle des libertés et de l'ordre public, mais devait aussi prendre en compte les atteintes au statut de la femme que constitue une tenue qui la retranche de la société.
Dans un rapport d'information, adopté à l'unanimité le 7 septembre 2010 par la délégation, la rapporteure, Mme Christiane Hummel, a rappelé que le port du voile ne pouvait être considéré sous l'angle réducteur de la liberté de se vêtir « comme bon vous semble », car cette tenue se traduisait par un retranchement objectif et manifeste de la société, et qu'elle constituait la traduction d'une attitude de soumission de la femme, contraire aux valeurs fondamentales de la République et au principe d'égalité des droits entre les hommes et les femmes, garanti par la Constitution.
Elle a ensuite expliqué les raisons juridiques pour lesquelles le projet de loi, tout en étant inspiré par l'objectif de la défense des femmes et de l'égalité, avait pris le parti de privilégier une démarche fondée sur la notion de sauvegarde de l'ordre public .
Dans ses recommandations, la délégation a insisté sur la nécessité, pour le projet de loi, de présenter les meilleures garanties de sécurité juridique au regard de la Constitution et des conventions internationales auxquelles la France est partie.
Elle a d'ailleurs souhaité que la loi et les textes pris pour son application s'appliquent à une claire définition des espaces concernés par l'interdiction du voile intégral .
La décision n° 2010-613 DC rendue par le Conseil constitutionnel le 7 octobre 2010 est d'ailleurs allée en ce sens, en précisant que l'interdiction de dissimuler son visage dans l'espace public ne saurait s'appliquer dans les lieux de culte ouverts au public, sous peine de porter une atteinte excessive à la liberté religieuse.
La délégation a, en outre, approuvé les modalités de mise en oeuvre dont est assortie cette interdiction, qu'il s'agisse des délais ménagés pour son entrée en vigueur, ou de la possibilité pour le juge d'imposer aux femmes concernées l'obligation d'accomplir un stage de citoyenneté. Elle a souhaité que les structures associatives prennent le relai du législateur pour expliquer les intentions et les prescriptions de la loi.
Elle a également jugé positif le dispositif de répression de la dissimulation forcée du visage qui facilitera la sanction des pressions exercées sur les femmes afin de les soumettre à l'obligation de porter le voile intégral.
* 3 « La dissimulation du visage dans l'espace public, les femmes, la République » , rapport d'information ( n° 698, 2009-2010 ) fait, au nom de la délégation aux droits des femmes, par Mme Christiane Hummel, sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public (n° 675, 2009-2010), la proposition de loi présentée par M. Charles Revet et plusieurs de ses collègues, visant à permettre la reconnaissance et l'identification des personnes (n° 593, 2008-2009) et la proposition de loi présentée par M. Jean-Louis Masson, tendant à interdire le port de tenues dissimulant le visage de personnes se trouvant dans des lieux publics (n° 275, 2009-2010)