CHAPITRE I :
LES
PATHOLOGIES DU CERVEAU : ENJEU DE SANTÉ PUBLIQUE
Qu'elles relèvent de la neurologie ou de la psychiatrie - distinction qu'opère la France, mais qui est moins nette ailleurs ; les pathologies neuropsychiatriques constituent, dans la plupart des pays du monde, un enjeu de santé publique. Les progrès dans la connaissance de leur mécanisme n'ont pas encore abouti à la découverte de traitement pharmacologique efficace.
Or, pour une grande partie d'entre elles, et malgré leur diversité, ces pathologies sont souvent invalidantes tant pour le patient lui-même, que pour ses proches qui doivent assumer leur caractère chronique, et les difficultés d'insertion sociale qu'elles entraînent.
I- LA FORTE PRÉVALENCE DES PATHOLOGIES NEUROPSYCHIATRIQUES
Les données statistiques concernant les pathologies neuropsychiatriques sont inquiétantes : une personne sur quatre serait concernée, le poids économique et social de ces pathologies est considérable dans le monde entier. La publication d'atlas statistiques comme celui de l'OMS, ou les données statistiques au niveau européen, l'attestent.
A- LES STATISTIQUES DE L'ORGANISATION MONDIALE DE LA SANTÉ (OMS) 7 ( * )
L'OMS estime à 400 millions le nombre de personnes aujourd'hui atteintes de troubles mentaux ou neurologiques, voire souffrant de problèmes psychosociaux, associés notamment à l'alcoolisme ou à la toxicomanie. Les études épidémiologiques dont on dispose chez l'adulte témoignent de la forte prévalence des affections psychiatriques. Selon une étude de l'École de santé publique réalisée par l'Université d'Harvard, à l'initiative de l'OMS, les pathologies mentales représentent aujourd'hui cinq des dix principales causes médicales de handicap dans le monde, et un cinquième des DALYs (Disabilities Adjusted Life Years) 8 ( * ) , toutes maladies confondues. D'après ces statistiques, la schizophrénie affecte 7%o (sept pour mille) de la population adulte, pour un total de 45 millions de personnes atteintes dans le monde. Des traitements existent et peuvent être efficaces aux premiers stades de la maladie, cependant plus de 50 % des malades dans le monde ne reçoivent pas de soins appropriés.
D'après le département de santé mentale de l'OMS, la dépression touche 130 millions de personnes dans le monde et serait actuellement la cinquième cause de mortalité et de handicap ; elle devrait atteindre la deuxième place d'ici 2020. On compte chaque année 10 millions de tentatives de suicides, dont 10 % s'avèrent fatales.
Sources OMS : Atlas 2011
Entre 40 et 50 millions de personnes dans le monde, dont 85 % vivent dans les pays développés, sont atteintes d'épilepsie. On estime que deux millions de nouveaux cas apparaissent chaque année dans le monde, mais 70 à 80 % des épileptiques peuvent retrouver une vie tout à fait normale s'ils reçoivent un traitement adapté. 24 millions de personnes sont frappés par la maladie d'Alzheimer et autres démences.
Pour sensibiliser les États et les donateurs potentiels, l'OMS mène des actions ciblées comme le programme d'action « combler les lacunes en santé mentale », programme phare de l'OMS lancé en 2008. Ce programme s'est concrétisé par un guide d'intervention à destination de tous les personnels de santé des pays affiliés à l'OMS en 2010, dont l'objectif est d'améliorer le service et les soins primaires.
Lors de l'entretien de la mission avec le Dr Shekkar Saxena 9 ( * ) , ce programme a fait l'objet de longs développements. Le deuxième point abordé lors de cette réunion a concerné la révision de la liste des maladies mentales requérant la révision du processus de classification. La mission a tenu à se faire l'écho de critiques concernant cette nomenclature, tout en comprenant l'utilité d'un cadre international pour décrire des pathologies complexes.
* 7 Données statistiques ci-après.
* 8 L'OMS se sert d'une mesure appelée « années de vie corrigées du facteur invalidité » pour représenter le coût pour la santé et l'économie. Cela correspond à la somme du nombre d'années de vie perdues, et du nombre d'années de vie vécues, avec un handicap.
* 9 Directeur du département de la santé mentale et des abus de drogues à l'OMS (Mission des Rapporteurs à Genève le 21 septembre 2011).