C. LES AGRICULTEURS DU MONDE CONNAISSENT DES SITUATIONS TRÈS DIFFÉRENCIÉES QUI POURRAIENT S'ACCENTUER
Les écarts de « productivité agricole » sont considérables et ont augmenté avec l'adoption par certains pays de la « Révolution verte ».
Un paysan du tiers monde produit entre dix et vingt quintaux de céréales par hectare quand les paysans européens en produisent environ quatre vingt. Les productivités céréalières varient dans une fourchette de 1 à 8 avec des écarts qui peuvent être beaucoup plus élevés81(*).
Les coûts de production varient eux aussi mais moins fortement. Ils s'étagent entre 18 et 36 dollars par quintal dans le tiers monde, atteignant 8 $ en Argentine et en Australie et de l'ordre de 15 $ en Europe contre 12 $ au Canada.
Ces écarts peuvent être beaucoup plus importants encore pour d'autres productions agricoles, comme le lait par exemple.
Il existe des centaines de milliers d'agriculteurs dans les pays en développement qui produisent moins d'une tonne de céréales par an. Avec un prix de cent euros la tonne, leur revenu est misérable et doit aussi supporter les charges d'exploitation.
Quant aux salariés agricoles, ils sont innombrables à ne percevoir que moins de deux euros par jour.
En outre, les producteurs agricoles peuvent bénéficier de soutiens qui desserrent leur contrainte de revenu. Ces soutiens sont nombreux et très disparates. Mais ils favorisent généralement une politique de prix concurrentielle en déliant en partie le revenu des agriculteurs des prix de vente de leur production.
Globalement, les soutiens publics sont plus développés dans les pays où l'agriculture est déjà le plus efficace.
Dans un tel environnement, le marché fonctionne au détriment des producteurs des pays les moins développés dont la solidité est pourtant cruciale pour répondre au défi alimentaire.
L'hypothèse d'une amplification de ces écarts est la plus tendancielle. Elle provoquait une précarisation plus forte des paysans les plus en retard.
* 81 Quelques millions de céréaliculteurs peuvent produire l'équivalent de 1 000 tonnes par actif et par an avec des rendements de 10 tonnes par hectare et un agriculteur pour 100 hectares.