C. UN MOUVEMENT ENGAGÉ DANS D'AUTRES ETATS DE L'UNION EUROPÉENNE
1. L'exemple allemand
a) Deux réformes en une : professionnalisation et réorganisation
L'Allemagne s'est lancée depuis 2010 dans une très vaste réforme de son armée, le plus ambitieux projet de refonte de l'armée allemande depuis sa création après la Seconde Guerre mondiale. Initiée notamment pour des raisons budgétaires, cette réforme de la Bundeswehr s'accompagne d'une professionnalisation de l'armée et d'une forte réduction des effectifs. Le nombre de soldats sera réduit de 220.000 actuellement à un maximum de 185.000, dont 170.000 soldats de métier, réservistes compris. Les économies attendues ont un temps été évaluées à 8 milliards d'euros d'ici à 2015 sur un total de 31 milliards pansions incluses (chiffre revu à la baisse par la suite). Cet effort représente sur 4 ans un effort supérieur à celui engagé par les armées françaises.
Les motivations de cette décision sont essentiellement liées à un objectif d'assainissement des finances publiques, et ne reposent pas sur la rédaction préalable d'un document stratégique du type du livre blanc. Sur le plan opérationnel, l'ambition est de disposer d'un outil plus polyvalent, davantage capable de se projeter.
Cette réforme, qui sera mise en oeuvre jusqu'en 2015, comprend plusieurs volets :
- professionnalisation ;
- réforme du soutien avec la création d'un soutien intégré interarmées ;
- nouvelle organisation du ministère de la défense et réforme de l'État major : renforcement et rapprochement des états-majorscentraux du centre décisionnel de Berlin ;
- baisses d'effectif et réforme de la carte militaire.
En termes de soutien , l'armée allemande est organisée différemment de l'armée française : l'Allemagne a mutualisé dans 53 centres de services les prestations de soutien correspondant à l'infrastructure, aux compétences des groupements de soutien de bases de défense, des plates-formes achats-finances et des centres ministériels de gestion. Au niveau central, la direction administrative de la défense, composée de personnels civils, dirige les services civils d'administration et de soutien (alimentation, habillement, gestion administrative des personnels, soutien logistique aux opérations extérieures...).
En termes de contrat opérationnel , l'armée allemande devra pouvoir déployer 10.000 hommes simultanément (pour 7000 actuellement), sur deux théâtres d'opération majeurs (dont un en qualité de « nation cadre »).
Pour la seule réforme des structures centrales du ministère, le resserrement est notable puisque l'administration du ministère est fixée à 9 directions, 26 sous-directions et 160 bureaux, soit une réduction d'environ un tiers . Les chefs d'état major d'armées sont désormais clairement subordonnés au chef d'état major, qui reste sous la direction politique d'un secrétaire d'État. Conseiller militaire du gouvernement, ses fonctions semblent être élargies sur les questions de stratégie militaire. Les chefs d'état major de l'armée de l'Air, Terre et de la Marine quitteront Bonn pour se rapprocher de Berlin.
L'épineuse question du regroupement à Berlin du siège du ministère de la Défense sera abordée ultérieurement. À ce jour, conformément à la loi Bonn- Berlin mise en place après la réunification allemande, 70% des services du siège du ministère de la Défense se trouvent à Bonn.
Structure de l'armée allemande après la réforme |
|
Chef d'état major / Generalinspekteur |
Conseiller militaire du gouvernement. Subordonné à un secrétaire d'État et subordination des chefs d'État major. |
Armée de terre / Heer |
3 divisions (pour 5 actuellement) 8 brigades (pour 11 actuellement) |
Armée de l'air/ Luftwaffe |
Dissolution des divisions aériennes Structure s'appuyant sur 3 grands commandements : opérations aériennes, « unités opérationnelles » et « unités de soutien » |
Marine |
Deux flottilles opérationnelles et un commandement aéronaval. |
Service de soutien interarmées/ Streitkräftebasis (SKB) |
Création de trois nouveaux commandements dédiés à des capacités spécifiques (logistique - aide au commandement - tâches territoriales) remplaçant les commandants de région militaire actuels. |
Service de santé interarmées/ Sanitätsdienst |
Commandement unique regroupant les forces opérationnelles et les formations sanitaires régionales. |
Source : Ambassade de France en Allemagne
b) Un fort impact territorial, sans compensation pour les collectivités territoriales
S'agissant du format, la réduction est particulièrement drastique puisque l'armée allemande passera de 252 000 à 185 000 hommes (- 27%). Rien que pour les structures centrales du ministère, les effectifs devraient passer de 3 500 à 2 000 personnes (-43%).
Format de l'armée allemande |
|
Effectif total - dont militaires de carrière et sous contrats (dont postes de réserve) - engagés volontaires (service militaire volontaire) |
Maximum 185.000 hommes (pour 252.000 actuellement) -27% - 170.000 hommes - 5. à 15.000 hommes |
Civils |
55.000 personnes (actuellement 76.000) -28% |
Personnel du BMVg (État major des armées + Ministère) |
2.000 personnes (actuellement 3.500) -43% |
Source : Ambassade de France en Allemagne
Toutes les armées sont touchées par la réforme. L'armée de terre de la Bundeswehr disposera à l'avenir de trois grandes unités à l'échelon de la division, contre cinq actuellement. Le nombre des brigades passera de onze à huit. Dans l'armée de l'air , les commandements à l'échelon de la division seront supprimés au profit d'un commandement « unités opérationnelles » et d'un commandement « unités de soutien » qui disposeront chacun de deux « secteurs capacitaires ». Le service de soutien interarmées restera le « prestataire de services » central des forces armées en Allemagne et en opérations extérieures. Le service de soutien interarmées dissoudra les quatre Commandements de région militaire existants et créera trois commandements capacitaires - un pour la logistique, un autre pour l'aide au commandement et le dernier pour des missions territoriales telle que l'aide en cas de sinistres majeurs en Allemagne.
La réduction des implantations sur le territoire est très importante : le futur plan de stationnement comportera 264 sites « majeurs » (de plus de 15 personnes) contre 328 actuellement. Sur les 328 sites actuels 31 seront définitivement fermés, dont 6 abritant plus de 1000 personnels ; 90 perdront au moins 50% de leurs effectifs dont 33 seront ramenés à moins de 15 personnes et ne seront alors plus considérés comme des points de stationnement.
Les régions qui comptent le plus de personnel du ministère de la défense par habitant sont les plus touchées. C'est le cas du Schleswig Holstein à la frontière danoise (de 9,2 à 5,4 postes pour 1000 habitants) et du Mecklenburg-Vorpommern à la frontière polonaise (de 8,6 à 6,4 postes pour 1000 habitants.).
Les restructurations de la carte militaire allemande 31 garnisons seront fermées sur la base du concept de stationnement présenté. Les fermetures concernent par ordre de grandeur :
En outre, les effectifs de 90 garnisons seront réduits de façon significative, cela entraîne une réduction de plus de 50 pour cent des effectifs ou de plus de 500 postes. De ces garnisons, 33 verront leurs effectifs diminuer de 15 postes et ne seront donc plus désignées comme garnison. À l'avenir, la Bundeswehr sera ainsi stationnée au total dans 264 garnisons. |
Source : ambassade d'Allemagne en France
Cartographie des lieux de stationnement supprimés
Source : Spiegel-online cité par l'ambassade de France en Allemagne
Dans cette réforme de très grande ampleur, la difficulté est accentuée par la conduite simultanée de plusieurs chantiers, en particulier celui de la professionnalisation, de la restructuration de la carte militaire et de la déflation des effectifs.
Il faut noter enfin qu'aucune mesure compensatoire (revitalisation du tissu économique local, réhabilitation des infrastructures....) n'a été jusqu'à présent annoncée pour les collectivités locales concernées, le ministre de la Défense précisant que le budget du ministère de la Défense ne permettait aucune mesure de ce genre.
Un montant annuel de 200 millions d'euros est prévu pour l'accompagnement du personnel dans la réforme. Mais cette somme concerne également l'aide au recrutement et l'amélioration des parcours de carrière.
2. L'exemple britannique
La défense britannique est une source de comparaison habituelle pour la défense française : disposant de moyens et d'ambitions relativement proches, elle s'est lancée avant la France dans des réformes comme celle de la professionnalisation. Pour la transformation des armées initiée en France en 2008, notre pays semble toutefois en avance de phase par rapport aux britanniques. On retrouve pourtant des éléments communs dans les deux trajectoires, en particulier celle de vouloir faire porter les économies sur le soutien.
a) Une réforme lancée par le Gouvernement en 2010
Le programme de coalition du gouvernement britannique de David Cameron, élu en mai 2010, prévoyait une nouvelle Revue stratégique de défense et de sécurité (l'équivalent du Livre blanc français), confiée à une entité nouvellement créée, le Conseil de sécurité nationale (NSC). Dans un contexte budgétaire tendu, puisque le gouvernement estimait à 38Md£ le « déficit défense » laissé par son prédécesseur, la nouvelle administration entendait également remettre à plat l'organisation et le fonctionnement du ministère de la défense. A cette fin, un audit 15 ( * ) a été conduit en août 2010 qui a conduit à l'adoption de nombreuses mesures d'économies.
Ce sont ces deux initiatives qui ont conjointement conduit à la plus grande transformation jamais connue par le ministère de la défense britannique, qui devrait perdre en dix ans près du quart de ses effectifs.
Tous les domaines de la Défense sont touchés par ces réformes qui affectent aussi bien les structures de commandement, le personnel et les équipements que l'industrie de défense. Elles reposent plus précisément sur 3 piliers :
•
la Strategic Defence and Security Review
(SDSR)
d'octobre 2010, qui prévoit des mesures de restructuration
ainsi que des mesures de rééquilibrage du budget de la
défense, complétées par des annonces de juillet 2011
portant en particulier sur les réductions d'effectifs ;
•
la Defence Reform Review
(publiée
le 27 juin 2011) visant à la réorganisation de la gouvernance du
ministère de la Défense ;
•
la Defence Materiel Strategy
, en cours de
définition, qui doit définir un nouveau modèle pour le
système d'acquisition et de soutien.
Au total, le gouvernement britannique a annoncé un objectif d'économies de 4,3 milliards de livres sterling (4,9 milliards d'euros) sur la période 2011-2015, sur un budget total de 36,9 milliards de livres (42,4 milliards d'euros).
Contrairement à la France, il n'était pas prévu d'utiliser les économies dégagées au profit de l'appareil de défense : elles devaient purement et simplement contribuer à l'assainissement des finances publiques.
b) Une importante réduction du format, annoncée en plusieurs salves
La revue stratégique a dans un premier temps conduit à des réductions d'effectifs programmés de -7% dans l'armée de terre ( Army ), -14% (-5000 postes) dans la marine ( Royal Navy ), -13% (-5000) dans l'armée de l'air ( Royal Air Force, RAF ), -30% pour les personnels civils (soit -25 000). Toutefois, ces mesures ont été complétées par l'annonce d'un deuxième train de réductions (appelées « tranches »), en particulier dans les effectifs de l'Army et parmi le personnel civil.
Au mois de juillet 2011, le ministre de la Défense a annoncé une série de mesures s'additionnant à celles prises dans le cadre de la revue stratégique. Celles-ci font suite à la « Three Month Review », étude réalisée sur 3 mois, dont les mesures concernent principalement les effectifs.
Le ministère de la Défense avait ainsi, dans un premier temps, annoncé que le nombre de soldats d'active entraînés dans l'Army passerait de 101 000 à 82 000 environ d'ici 2020, ce qui représente une baisse de 19 000 hommes (un cinquième du total). D'ici 2015, il est finalement prévu de ramener le nombre de soldats à 90 000 - et non plus à 95 000 comme annoncé dans un premier temps - soit une baisse de 11 000 hommes environ sur une période de 4 ans.
La réduction du personnel de l'Army est compensée par un accroissement du rôle des forces de réserve, en particulier de la Territorial Army (force de réserve de l'armée de terre). L'objectif est de doter le pays d'une armée de terre comprenant 120 000 hommes au total, avec un ratio entre armée d'active et réserve de 70-30 au lieu de 85-15. Cette « revitalisation » des forces de réserve nécessiterait un investissement de 1,5 milliards de livres sur 10 ans et devrait permettre des économies sur les coûts de personnels, infrastructures et équipements.
De même, le ministère de la défense a annoncé fin juillet 2011 la suppression de 7 000 emplois civils supplémentaires, qui s'ajoute à la réduction totale de 25 000 emplois civils déjà annoncée, soit un total de 32 000. Le personnel civil du ministère passera ainsi de 85 000 à 54 000.
Réductions d'emplois programmées pour le ministère de la défense britannique
Effectifs en 2010 |
Effectifs en 2015 |
Effectifs en 2020 |
|
Personnel civil (équivalent temps plein) |
86 000 |
57 000 |
54 000 |
Total du personnel entraîné |
177 000 |
152 000 |
143 000 |
Armée de terre |
101 000 |
89 000 |
82 000 |
Armée de l'air |
40 000 |
33 000 |
32 000 |
Marine |
35 000 |
30 000 |
29 000 |
Effectif total |
263 000 |
209 000 |
197 000 |
Source : Rapport du National Audit Office du 9 février 2012 : Managing change in the Defence workforce
A noter toutefois que ces chiffres officiels ne permettent pas de comparaison avec le format français, dans la mesure où ils ne mentionnent que les effectifs entraînés 16 ( * ) . En prenant en compte le personnel en cours de formation en 2015 et en 2020, afin de permettre la comparaison avec les forces françaises, les données peuvent être estimées de la façon suivante :
Estimation des réductions d'effectifs
totales
dans l'armée britannique
(chiffres non officiels
- sous toutes réserves)
2010 |
2015
|
2020
|
Pourcentage de réduction d'effectifs entre 2010 et 2020 |
|
Army |
112 600 |
98 000 |
90 000 |
20% |
Royal Navy |
38 730 |
32 000 |
31 000 |
20 % |
Royal Air Force |
44 100 |
36 000 |
34 000 |
23 % |
Personnel civil |
85 800 |
60 000 |
53 000 |
38% |
Total |
281 230 |
226 000 |
208 000 |
26% |
Au total, le personnel militaire devrait être réduit d'environ 20%, le personnel civil de 38 %.
Les objectifs d'économies cherchent à faire porter l'effort sur l'administration, le soutien et les implantations, pour préserver le plus possible les capacités de projection extérieure. Toutefois des réductions capacitaires sont aussi annoncées, comportant y compris des désarmements de bâtiments ou des reports de programmes.
Sur le plan des implantations , il faut d'emblée noter que l'organisation territoriale de la défense britannique est très différente de la carte militaire française. Pour des raisons historiques mais aussi du fait de la moindre mobilisation autour de la défense conventionnelle du territoire, les forces britanniques sont déjà très concentrées autour de grands camps de manoeuvre, bases ou ports. Cette organisation très concentrée, y compris pour l'armée de terre, permet déjà de fortes mutualisations, sans qu'il soit besoin de s'appuyer sur le concept de « base de défense ».
La carte militaire devrait néanmoins encore se contracter : l'armée de l'air devrait perdre un certain nombre de bases aériennes et voir ses moyens regroupés dans le cadre de la création de pôles de spécialisation. Le nombre actuel de bases aériennes est amené à diminuer à l'horizon 2020 : il devrait passer de 37 bases aériennes au 31 juillet 2011 à 24 bases aériennes majeures en 2020.
S'agissant de la Royal Navy , le regroupement en pôles de spécialisation ne devrait pas affecter le nombre de bases navales (Falsane en Ecosse, Portsmouth au sud de l'Angleterre et enfin, Plymouth à l'est de l'Angleterre).
L'armée de terre n'a pas encore redu publique la carte de ses futures implantations, qui devrait l'être dans le cadre de son programme « Army 2020 », à l'été 2012. Si les dissolutions d'unité ne sont pas encore connues, elles pourraient toucher jusqu'à un cinquième des bataillons d'infanterie.
D'après les informations recueillies par vos rapporteurs, aucune compensation n'est envisagée par le gouvernement pour les communes ou les régions qui perdront une ou plusieurs unités.
c) Les principes : économies sur le soutien, sanctuarisation des équipements et poursuite des externalisations
Dès 1998, la Strategic defence review a posé, pour la transformation de la défense, des principes, encore valables aujourd'hui, qui affectent significativement le soutien. Il s'agit en effet principalement d'opérer :
- l'interarmisation du soutien technique et logistique ;
- la réduction des effectifs militaires dans le domaine du soutien ;
- la maîtrise des coûts.
Dans l'équation budgétaire actuelle, le même principe est toujours à l'oeuvre : faire des économies sur le soutien pour maintenir l'effort d'investissement en équipement. Un budget de 160Mds£ est ainsi planifié pour le développement, l'acquisition et la maintenance des équipements de défense britannique sur les 10 prochaines années. Sur la période post 2015, l'hypothèse de ressources considérée est celle d'une augmentation de 1% en volume promise par le Premier ministre en Juillet dernier.
Dans ce contexte, l'armée britannique a traditionnellement recours à l'externalisation de nombreuses fonctions de soutien.
Certains estiment que c'est à la suite de l'expérience britannique de la faible disponibilité opérationnelle des matériels constatée lors de la première guerre du Golfe que les Britanniques se sont de plus en plus orientés vers des contrats intégrés d'achat de capacités et de disponibilité de matériels. Ce recours à l'externalisation s'est peu à peu étendu à d'autres secteurs, en particulier à la logistique et au soutien des forces armées, avec des contrats « clés en mains » pour l'approvisionnement logistique en opérations ou pour les infrastructures.
Les modalités du soutien en Afghanistan, par exemple, sont assez radicalement différentes entre les contingents britannique (avec un recours plus important au privé) et français.
On estime aujourd'hui à 10 Md£ par an 17 ( * ) le niveau de l'externalisation au Royaume Uni, le plaçant au premier rang européen et au deuxième rang mondial après les Etats-Unis. Plus de 45% du soutien de défense serait ainsi réalisé par des prestataires externes, contre une moyenne de 19% en Europe : principalement dans la gestion des infrastructures (à 97%), la maintenance (à 38%, en croissance), la formation (10% et en croissance forte) ou l'informatique (à 90%).
Un exemple d'externalisation du soutien dans l'armée britannique : l'alimentation . Les forces armées britanniques ont adapté le concept Pay As You Dine qui n'est qu'une partie de l'externalisation des services d'une garnison, d'un régiment ou d'un état major connue sous le nom de Catering Retail & Leisure . Il englobe l'alimentation, le foyer, les boutiques mais aussi les contrats de service comme le nettoyage des vitres, la tonte des pelouses etc. Le contrat global est souscrit par une entreprise qui va gérer le volet alimentation et qui peut sous-traiter les autres aspects. Ces contrats s'appliquent par région et sont signés par le commandement territorial. Chaque région est libre de choisir le fournisseur de son choix après appel d'offres. Pay As You Dine permet au ministère de se décharger de la gestion des effectifs alimentaires et des stocks sur un fournisseur qui doit par ailleurs appliquer les directives du ministère en matière tarifaire. Le fournisseur doit respecter l'équilibre nutritionnel en proposant des menus qui sont étudiés pour répondre aux normes alimentaires en vigueur. En marge de ces menus, il peut proposer à son initiative d'autres choix sur lesquels il est libre d'appliquer sa tarification. Dans ce système, le personnel ne paie bien sûr que s'il prend son repas. Pay As You Dine n'est appliqué que dans les garnisons. Le concept ne concerne pas les camps de manoeuvre ou les OPEX où l'alimentation est gratuite pour les participants. Il convient de souligner que les contrats prévoient que les chefs cuisiniers militaires des unités projetables soient employés lorsqu'ils sont présents dans la garnison, au sein des équipes des fournisseurs. |
Source : mission Défense de l'ambassade de France au Royaume-Uni
d) Un regard très critique de la Cour des Comptes et du Parlement
La Cour des comptes et le Parlement ont récemment évalué la réforme de l'armée britannique et ont porté des critiques très sévères sur sa mise en oeuvre, respectivement en février 2012 18 ( * ) et mai 2012 19 ( * ) .
En particulier, la commission des Finances de la chambre des Communes met en garde le ministère de la Défense contre la perte de compétences résultant des réductions non contrôlées de personnels qualifiés. Elle souligne que la conséquence première de ce manque de personnels qualifiés est le recours, très coûteux, à des conseillers privés . Dans ce cadre, du fait de son incapacité à contrôler les départs volontaires, le ministère pourrait, d'après la Commission des Finances, être contraint à réembaucher sous statut privé des milliers d'employés (militaires et civils) licenciés dans le cadre de la tranche 1 et 2 de la Strategic defence and security review (SDSR) . D'après les conclusions de ce rapport, « la mise en oeuvre rapide des tranches de réductions dans le cadre de la SDSR avant que la future structure des forces armées ne soit finalisée a été une erreur ».
La commission des Finances déplore que les réductions d'effectifs programmés n'aient avant tout répondu à une logique de coûts, au lieu de reposer sur une analyse des futurs besoins des forces armées.
Ce rapport insiste en particulier sur l'altération du moral des soldats britanniques ainsi que des personnels civils : seuls 22% des militaires et 12% des civils estiment que le ministère a une bonne conduite du changement. La commission des Finances juge urgente la mise en place d'une vaste politique de communication interne.
* 15 Au mois d'août 2010, une Defence Reform Unit a été créée afin d'améliorer l'efficacité du ministère de la défense. Un Steering Group, composé d'experts ayant une expérience à la fois des pratiques du secteur public et de celles du secteur privé, en a assuré la supervision ; il à été présidé par Lord Levene.
* 16 Les Britanniques, lorsqu'ils parlent d'effectifs, ne prennent en compte que les effectifs entraînés : il faut ajouter à ces chiffres environ 8 600 hommes en cours de formation.
* 17 D'après le rapport de la Cour des comptes sur les externalisations au ministère de la Défense, ce montant serait de 9 Md£ soit 25% du budget de la défense en 2009
* 18 National audit office, report by the comptroller and auditor general hc 1791 session 2010-2012 9 february 2012,
* 19 House of Commons: Committee of Public Accounts Ministry of Defence: Managing Change in the Defence Workforce, Eighty-eighth Report of Session, 2010-12,