C. LES RESSOURCES DES ÉTABLISSEMENTS PUBLICS FONCIERS (EPF)
1. Un financement des EPF satisfaisant grâce à une taxe affectée
Pour mettre en oeuvre leur politique foncière, les EPF bénéficient de la taxe spéciale d'équipement (TSE) : ils déterminent un produit attendu de cette taxe, dont le taux est alors calculé par l'administration.
Principes et fonctionnement de la taxe spéciale d'équipement Selon l'article 1607 bis du code général des impôts, une taxe spéciale d'équipement (TSE) est perçue au profit des établissements publics fonciers locaux ; elle est « destinée à permettre à ces établissements de financer les acquisitions foncières et immobilières correspondant à leur vocation ». L'article 1607 ter du code général des impôts prévoit que les établissements publics fonciers d'État se voient également attribuer le produit d'une taxe spéciale d'équipement, destinée au financement de leurs interventions foncières. La TSE est due par toutes les personnes physiques ou morales assujetties aux taxes foncières sur les propriétés bâties et non bâties (TFPB et TFPNB), à la taxe d'habitation (TH) ou à la cotisation foncière des entreprises (CFE) dans les communes situées dans le ressort géographique de l'EPF concerné. Les contribuables exonérés de l'une de ces taxes le sont également de la TSE. Le taux applicable n'est pas arrêté par les EPF, mais par l'administration à partir du produit attendu global de la taxe, déterminé par l'EPF. Néanmoins, le produit arrêté chaque année ne peut dépasser 20 euros par habitant . Selon l'association des EPFL, ce montant est parfois très inférieur (par exemple, il est de 5 euros par habitant pour l'EPF Puy-de-Dôme), mais le plus souvent compris entre 10 et 15 euros. Le produit est réparti entre les taxes foncières, la TH et la CFE, proportionnellement aux recettes que chacune des taxes a procurées l'année précédente à l'ensemble des communes et EPCI situés dans le ressort de l'EPF. Le taux ainsi obtenu pour chacune des impositions est ensuite appliqué aux bases dans chaque collectivité. Certains EPF sont soumis à des dispositions particulières, notamment s'agissant du plafonnement du produit de la taxe : il s'agit des EPF de Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA), de Normandie, de Lorraine et de Guyane, et de l'agence pour la mise en valeur des espaces urbains de la zone dite des « 50 pas géométriques » en Guadeloupe et en Martinique. En effet, le produit global de la TSE attribué à ces trois EPF est fixé par la loi.
Plafonds du produit de la taxe spéciale
d'équipement pour certains EPF
Ainsi, notre collègue Pierre-Yves Collombat, adressant une question 74 ( * ) au ministère de l'économie et des finances, a indiqué que pour l'établissement public foncier de PACA, le plafond fixé par la loi « est largement inférieur - environ de moitié - à celui dont il bénéficierait dans le régime de droit commun ». À ce jour, la question de l'unification de la TSE n'est donc pas réglée. |
L'association des EPF locaux, rencontrée par vos rapporteurs, est très attachée à la TSE : les EPFL déterminent leur besoin de financement en toute liberté - sous réserve du plafonnement à hauteur de 20 euros par habitant - pour mener les opérations souhaitées, et celui-ci peut évoluer en fonction des projets menés.
La TSE permet aux EPFL d'accumuler lentement du capital ; et, selon l'association des EPFL, l'effet de levier est important puisqu'à un euro de TSE versé correspondent 3 euros d'investissement - grâce à la capacité d'emprunt des EPFL. Les EPF bénéficient par ailleurs de recettes issues de la revente de terrains.
Au total, la TSE permet aux EPF de mener des opérations d'aménagement d'envergure malgré son plafonnement. En effet, les ressources des EPF sont importantes : en 2012, l'ensemble des EPF a bénéficié d'un produit total de 621 millions d'euros, en augmentation de 5 % par rapport à 2011.
Répartition des ressources des établissements publics fonciers
(en euros)
Source : DGFiP - Bureau CL2A - Fichier de recensement des éléments d'imposition issu des émissions de rôles généraux de l'année 2012
2. Une question en suspens : l'assujettissement à la TVA
Actuellement, les opérations d'achat et de revente de terrains réalisées par les EPFL sont assujetties à la TVA.
Or, selon l'association des EPFL, ces établissements ne sont pas des opérateurs comme les autres : ils sont financés par une taxe spéciale et dépendent des décisions prises par les collectivités. Ils ont, de ce fait, peu de marge de manoeuvre, par exemple pour participer aux appels d'offre. Le ministère de l'économie et des finances, dans une réponse à une question de notre collègue Claude Jeannerot 75 ( * ) , reconnaît qu' « alors même que les EPFL pourraient être regardés comme agissant en tant qu'autorité publique à raison des procédures mises en oeuvre dans le cadre de leurs opérations d'achat revente de biens immeubles, il n'en demeure pas moins que de telles opérations sont susceptibles d'être réalisées par des opérateurs privés et doivent, par conséquent, être regardées comme emportant potentiellement des distorsions de concurrence au sens des critères dégagés par la jurisprudence communautaire. Il en résulte que les opérations immobilières réalisées par les EPFL entrent nécessairement dans le champ d'application de la TVA ».
C'est donc parce qu'une opération est susceptible d'être réalisées par un opérateur privé qu'elle est assujettie à la TVA. Mais dans les cas où les frais de dépollution sont particulièrement importants, les EPF peuvent être les seuls susceptibles de mettre le bien sur le marché - les coûts étant trop importants pour qu'un opérateur privé investisse. Vos rapporteurs souhaitent donc que soit réexaminée la position de l'administration fiscale sur cette question : il pourrait être envisagé de définir des opérations « hors marché » lorsque les EPF interviennent pour qu'un bien puisse entrer sur le marché.
Proposition n° 23 Réexaminer la position de l'administration fiscale et, le cas échéant, permettre de définir des opérations « hors marché » lorsqu'il s'agit pour les EPF de faire entrer un bien sur le marché. |
* 74 Question orale sans débat n° 0357S, publiée dans le JO Sénat du 21 février 2013, page 544.
* 75 Question écrite n° 777 de Claude Jeannerot (Doubs - SOC), publiée dans le JO Sénat du 19 juillet 2012.