E. PROMOUVOIR L'INTÉGRATION ÉCONOMIQUE DE LA ZONE FRANC
Les performances économiques des pays africains de la Zone franc, en moyenne autrefois plutôt meilleures que celles des autres pays africains, ne le sont plus.
Notre analyse nous conduit à penser qu'au moment où l'Afrique subsaharienne semble avoir trouvé le chemin d'une croissance rapide, l'avantage que donne l'intégration régionale aux pays des deux Unions de la Zone doit être mieux exploité.
Aujourd'hui, le ralentissement de l'activité économique dans les pays développés, notamment en Europe, souligne l'urgence du développement des échanges interafricains et le besoin de solidarité entre Etats africains. La croissance démographique sans précédent rend crucial le développement de la production agricole en Zone franc, ainsi que la création d'emplois ruraux et urbains pour les jeunes.
Un renforcement de l'intégration régionale peut être un moyen essentiel de répondre à ces défis.
Dans ce contexte, les pays africains de la Zone franc disposent de l'atout considérable que constitue une longue expérience de coopération régionale mise en oeuvre au travers d'unions dont l'originalité historique est d'avoir été des unions monétaires avant d'être des unions économiques.
Dans le domaine monétaire et financier, de nombreux instruments de l'intégration sont déjà en place, mais des progrès semblent souhaitables en matière d'intégration financière et de supervision macroéconomiques. Mais l'intégration commerciale en Afrique de l'Ouest et en Afrique Centrale repose pour l'essentiel sur le bon fonctionnement des unions douanières existantes et sur l'harmonisation fiscale qui lui est associée, autant de domaines dans lesquels les Etats comme les organisations régionales manquent de compétences comme de soutien politique.
Comme l'a souligné M. Patrick Guillaumont, président de la Fondation pour les études et recherches sur le développement international (FERDI), responsable d'un récent rapport d'évaluation des gains attendus de l'intégration économique régionale dans les pays africains de la Zone franc : l'approfondissement du marché commun et les politiques sectorielles sont enfin des domaines où des progrès importants pourraient être réalisés. Il s'agit, d'une part, de mettre en place des instruments régionaux dans les domaines où les économies d'échelle sont les plus fortes (politiques agricoles, sécurité alimentaire, connexions des réseaux électriques, corridors routiers, câblage fibre optique, centres d'excellence régionaux d'enseignement et de recherche, collaboration pour les approvisionnements en médicaments) et, d'autre part, d'appliquer les décisions existantes (libre circulation des personnes, droit d'établissement, non-utilisation des interdictions d'exportations intracommunautaires sur les produits agricoles).
La France a, à l'égard de cette zone, une responsabilité particulière et des intérêts nombreux.
Or les évaluations de la coopération française dans ces différents domaines et, notamment, l'évaluation pilotée conjointement par la DG Trésor et la DGM (ministère des affaires étrangères) en 2012, sur les appuis français à l'intégration régionale au sein de l'Union Économique et Monétaire Ouest Africaine ( UEMOA ) sur la période 2002-2009, soulignent la faiblesse des moyens de financement pour soutenir les politiques et les programmes de l'UEMOA compte tenu des besoins considérables du Programme Économique Régional (PER).
Il faut aujourd'hui renforcer les appuis français aux objectifs d'intégration régionale et assurer une meilleure articulation de l'aide française au niveau régional avec celle déployée au niveau des pays membres. La France ne peut pas tout mais, notamment en matière d'expertise technique, elle doit renforcer son soutien.
En matière de financement, il convient de rechercher un effet de levier plus élevé en mobilisant davantage la Banque Ouest Africaine de Développement et une meilleure coordination avec les autres bailleurs intervenant au niveau régional, notamment l'Union européenne, dans le cadre des négociations sur les APE et la Banque africaine de développement.
L'Union européenne de par son expérience en matière d'intégration économique et monétaire doit consacrer un effort supplémentaire à la question de l'intégration de la Zone Franc en veillant à renforcer les administrations en charge de ces questions et à promouvoir la levée de ressources propres aux organisations régionales.
Il est enfin paradoxal que les négociations actuelles sur les APE conduisent à mettre en péril certains accords douaniers. En effet, comme il a été souligné au chapitre 3, des pays comme la Côte d'Ivoire, le Ghana ou encore le Cameroun pourraient avoir à choisir entre ratifier leur accord de partenariat économique, conclu en 2007, et le mettre en oeuvre de façon bilatérale (mettant ainsi en danger les unions douanières négociées ou en négociation dans leurs régions), ou, de façon alternative, renoncer, au nom de l'intégration régionale, à un APE et donc à certaines préférences de I'UE.
La France doit pousser la Commission européenne à faire preuve de plus de souplesse pour avancer dans des négociations où les demandes africaines sont peu prises en compte.
22) Renforcer notre coopération en faveur du renforcement de capacité au profit des programmes de l'UEMOA et notamment du Programme Économique Régional (PER). 23) Veiller à ce que la conclusion des Accord de partenariat économique (APE) ne nuise pas à l'intégration régionale, inviter la Commission européenne à faire preuve de plus de souplesse dans les négociations d'APE régionaux afin de déboucher sur un aboutissement positif et un renforcement de la coopération européenne en faveur de l'intégration. |