B. L'IMPORTANCE ÉCONOMIQUE, SOCIALE ET ENVIRONNEMENTALE DE LA FILIÈRE ÉQUINE POUR NOS TERRITOIRES
1. Une place autrefois fondamentale qui a laissé des traces dans nos structures administratives et notre mémoire collective
Historiquement , le cheval a été un vecteur économique fondamental et un instrument de puissance des armées : d'ailleurs, en 732, le Pape avait déconseillé d'en manger pour le réserver à un usage militaire, face aux Sarrasins, et on trouve peut-être encore quelques traces de cet interdit dans notre mémoire collective. Le cheval a également façonné nos structures administratives puisque les premiers départements français ont été délimités en 1790 de sorte que chaque citoyen puisse atteindre sa préfecture à cheval en une journée.
Dans la période récente, le cheval a été essentiellement centré sur les loisirs, l'équitation et les courses hippiques. Aujourd'hui, et sans doute plus encore à l'avenir, on constate un regain de l'usage du cheval pour le travail, à des fins thérapeutiques ou encore de réinsertion, ce qui correspond à des objectifs de cohésion sociale, de santé et de développement durable.
2. Le gisement d'activités et d'emplois induit par notre cheptel de plus d'un million d'équidés
Quelques chiffres illustrent l' impact économique de ce secteur très diversifié.
On recense 1,1 million d'équidés en France (fin 2014 1 ( * ) ), dont deux tiers de chevaux de selle et de poneys, un cinquième de chevaux de races de courses, les ânes et les chevaux de trait représentant respectivement 8 % et 6 % de la population. Au total, notre cheptel est à peine inférieur à celui de l'Allemagne ou du Royaume-Uni, ces trois pays totalisant plus de la moitié du cheptel équin européen.
Comme l'indique le rapport du groupe de travail Prospective équine, publié en octobre 2012 2 ( * ) , une grande variété d'entreprises interviennent dans la filière équine, ce qui correspond à la diversité des segments de cette dernière : courses, sports et loisirs, travail et production de viande. Parmi les 53 300 entreprises se rattachant à ce secteur, 64 % se consacrent à l'élevage : pour bon nombre d'entre elles le cheval est une opportunité de diversification. Ces structures génèrent un chiffre d'affaires d'environ 14 milliards d'euros, dont environ 12 % proviennent des activités agricoles. La prise de paris hippiques représente 80 % de ce chiffre d'affaires global dont un peu plus des trois quarts sont redistribués sous forme de gains aux parieurs.
L'élevage regroupe environ 12 % du total des emplois de la filière : 80 % des élevages ne détiennent qu'une à deux juments et 85 % des éleveurs ne sont pas spécialisés dans cette activité. La production en races étrangères ne représente que 9 % de l'effectif mais est en constante augmentation, ce qui témoigne d'un engouement pour ces races dont certaines sont plus spécifiquement orientées vers le loisir.
La plupart des emplois sont ainsi concentrés dans les écuries de courses et les établissements équestres, qui sont de plus grosses entités. Au total, environ 39 000 salariés agricoles et 32 800 équivalents temps plein (ETP) non agricoles sont employés dans la filière. Les salariés agricoles sont plutôt jeunes, 30 ans en moyenne, et connaissent un fort « turn-over ». Les femmes sont surreprésentées dans les établissements équestres, mais sous-représentées chez les cavaliers professionnels ou les entraîneurs. Enfin, la part du bénévolat, bien que difficile à quantifier, est très importante et nombre de manifestations hippiques ou équestres ne pourraient avoir lieu sans la mobilisation de bénévoles.
Les données disponibles ne permettent pas d'évaluer précisément la balance commerciale équine . Selon les statistiques douanières, la France est le quatrième exportateur mondial de chevaux vivants (4 963 chevaux en 2011). Néanmoins, la base SIRE comptabilise environ 7 000 chevaux de selle importés en 2011, chiffre supérieur à celui des douanes et en nette hausse depuis quelques années. Au total, les acteurs de la filière estiment que notre solde commercial pourrait être négatif.
Concernant la viande chevaline , la France importe de la viande rouge d'équidés adultes et exporte la viande rosée de poulains, en particulier vers l'Italie et la Belgique, avec un solde qui s'améliore mais reste négatif.
Capables d'occuper des milieux très variés, y compris délaissés par l'agriculture, les chevaux contribuent à l' entretien des espaces et à la préservation des paysages. Les activités et le tourisme équestres - ce dernier représentant 1,1 million de pratiquants - participent également au dynamisme des territoires .
Omniprésent à la fin du XIX e siècle, à la fois pour les travaux agricoles et en ville, le cheval de trait retrouve progressivement un usage quotidien, en zone urbaine, rurale ou périurbaine : dans les milieux fragiles ou isolés, la traction animale s'avère très performante et beaucoup moins agressive pour les sols que la seule utilisation des engins motorisés. Leur utilisation a également un intérêt pour le développement de l'agriculture biologique, avec la recherche de nouvelles pratiques moins intrusives ou de développement d'une image spécifique. En milieu urbain, le cheval retrouve également une place en contribuant au tourisme ou à des missions de service public.
En matière sociale , selon la Fédération française d'équitation, sur les 500 000 personnes souffrant de handicaps physiques ou de troubles mentaux en France, 100 000 pratiquent déjà l'équitation de rééducation et l'équithérapie. 2 465 centres équestres en France accueillent des personnes handicapées, soit pour le loisir, soit en association avec des professionnels de santé, et la « médiation équine » est utilisée depuis plus de 20 ans pour des jeunes enfants souffrant d'autisme et de troubles du comportement.
La filière cheval est donc un important gisement d'emploi, de loisirs, d'innovations et de santé pour nos concitoyens et nos territoires.
* 1 Tableau économique, statistique et graphique du cheval en France, publié en novembre 2015 par l'IFCE.
* 2 La filière équine française à l'horizon 2030 Rapport du groupe de travail Prospective équine
Octobre 2012 - Christine Jez (Coordination), Bernard Coudurier, Marion Cressent, Florence Méa,
Philippe Perrier-Cornet, Emmanuel Rossier. Publié sous l'égide de l'Institut National de la Recherche Agronomique (INRA) et de l'Institut Français du Cheval et de l'Équitation (IFCE).