CONCLUSION
L'actualité très récente fournit plusieurs exemples des enjeux de la maîtrise du milieu maritime, dans des zones identifiées par le rapport comme particulièrement sensibles :
- Les incidents avec la marine turque en Méditerranée : ces incidents se sont récemment multipliés. Celui du 10 juin 2020 témoigne d'une aggravation des tensions alors même que la Turquie est un pays allié, membre de l'OTAN.
Des bâtiments turcs ont, en effet, directement menacé un bâtiment français (qu'un navire turc a « illuminé à trois reprises avec son radar de conduite de tir » a déclaré la Ministre des armées, Mme Florence Parly). Le déploiement de l'opération de l'Union européenne Irini , destinée à faire respecter l'embargo sur les armées imposé à la Libye, de même que l'opération de renforcement de la sûreté maritime Sea Guardian , pourtant conduite par l'OTAN, créent des tensions avec la Turquie, qui viennent s'ajouter à celles existantes entre ce pays et Chypre pour le contrôle des ressources naturelles en Méditerranée orientale, qui ont déjà donné lieu à plusieurs incidents. L'implication croissante de la Turquie - et de la Russie - dans les crises régionales doit inciter à la plus grande vigilance.
- Les craintes exprimées par le ministère américain de la Justice concernant la pose d'un câble sous-marin transpacifique passant par Hong Kong , à cause de risques potentiels pour la sécurité nationale vis-à-vis de la Chine. D'après ce ministère, ce tracé exposerait en effet les États-Unis à des interceptions des communications. Le projet ( Pacific Light Cable Network ), initié par Google et Facebook, montre la puissance croissante des « GAFA », qui tendent à devenir des acteurs diplomatiques à part entière. Il met en évidence la problématique peu connue de la sécurité des câbles sous-marins. Il illustre, enfin, la rivalité entre la Chine et les États-Unis, qui s'exprime notamment dans l'océan Pacifique, ainsi que l'ambition chinoise de renforcer son influence, voire sa domination, dans son milieu régional.
Mondialisation, rivalités accrues entre puissances dans le milieu maritime, poids croissant d'acteurs économiques privés gigantesques... : ces tendances risquent de se renforcer à l'avenir. Elles plaident pour ne pas désarmer en mer. La construction d'un - ou de plusieurs - nouveaux porte-avions ne constitue qu' une partie de la réponse à ces enjeux . Mais c'est probablement la première réponse, la plus significative, celle autour de laquelle doivent s'organiser toutes les autres .
C'est pourquoi la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat poursuivra très prochainement ces travaux sur ce sujet essentiel , notamment dans la perspective de l'actualisation de la loi de programmation militaire prévue en 2021.