N° 216

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 décembre 2022

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des affaires sociales (1)
relatif à l'
accès aux soins en Suède,

Par Mmes Catherine DEROCHE, Élisabeth DOINEAU, Corinne IMBERT,
Michelle MEUNIER, M. Martin LÉVRIER et Mme Véronique GUILLOTIN,

Sénatrices et Sénateur

(1) Cette commission est composée de : Mme Catherine Deroche, présidente ; Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale ; M. Philippe Mouiller, Mme Chantal Deseyne, MM. Alain Milon, Bernard Jomier, Mme Monique Lubin, MM. Olivier Henno, Martin Lévrier, Mmes Laurence Cohen, Véronique Guillotin, M. Daniel Chasseing, Mme Raymonde Poncet Monge, vice-présidents ; Mmes Florence Lassarade, Frédérique Puissat, M. Jean Sol, Mmes Corinne Féret, Jocelyne Guidez, secrétaires ; Mme Cathy Apourceau-Poly, M. Stéphane Artano, Mme Christine Bonfanti-Dossat, MM. Bernard Bonne, Laurent Burgoa, Jean-Noël Cardoux, Mmes Catherine Conconne, Annie Delmont-Koropoulis, Brigitte Devésa, MM. Alain Duffourg, Jean-Luc Fichet, Mmes Frédérique Gerbaud, Pascale Gruny, MM. Abdallah Hassani, Xavier Iacovelli, Mmes Corinne Imbert, Annick Jacquemet, M. Jean-Marie Janssens, Mmes Victoire Jasmin, Annie Le Houerou, Viviane Malet, Colette Mélot, Michelle Meunier, Brigitte Micouleau, Annick Petrus, Émilienne Poumirol, Catherine Procaccia, Marie-Pierre Richer, Laurence Rossignol, M. René-Paul Savary, Mme Nadia Sollogoub, M. Jean-Marie Vanlerenberghe, Mme Mélanie Vogel.

RAPPORT

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Une délégation de la commission des affaires sociales s'est rendue en Suède, à Stockholm et Umeå, du 19 au 23 septembre 2022, sur le thème de l'accès aux soins.

Le système de santé suédois, organisé de manière très décentralisée et peu comparable à la France, est confronté aujourd'hui aux mêmes défis de continuité des soins et de prise en charge dans des délais raisonnables.

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I. UNE OFFRE DE SOINS ESSENTIELLEMENT PUBLIQUE ET GÉRÉE LOCALEMENT PAR LES RÉGIONS

A. UN SYSTÈME DE SANTÉ À LA GESTION DÉCENTRALISÉE

1. Une gestion assurée par les collectivités locales, principalement les régions

Le système de santé suédois est principalement géré par les 21 régions du pays qui financent et organisent les soins primaires, spécialisés et psychiatriques ; elles sont également compétentes sur les soins ambulatoires ou la mise en oeuvre de plans nationaux. Pour une meilleure coordination, les régions sont regroupées autour de six régions sanitaires (Sjukvårdsregioner).

En outre, l'association des collectivités locales (Sveriges Kommuner och Regioner) permet de mettre en commun certaines réflexions ou négociations salariales avec les professionnels notamment.

Les municipalités ont la charge des soins aux personnes âgées et handicapées, mais aussi des soins à domicile ou encore de la médecine scolaire.

2. Un rôle de régulateur laissé à l'État

L'État conserve dans ce schéma une compétence de régulateur et superviseur du système de santé, appuyé notamment par ses agences de surveillance et d'inspection.

Le conseil national de la santé et du bien-être, rattaché au ministère de la santé, Socialstyrelsen, est l'un des principaux opérateurs, responsable de la coordination et du développement de standards de qualité et pratiques. Il est également responsable des autorisations d'exercer pour vingt-et-une professions de santé et de la tenue des registres correspondants.

· Socialstyrelsen comme l'association des régions et municipalités ou la région de Stockholm ont tous insisté sur la nécessité de données de qualité pour appuyer le pilotage du système de santé.

À son arrivée au pouvoir, la coalition issue des élections de 2022 a dit sa volonté de recentraliser une partie des compétences de santé, en raison d'inégalités territoriales jugées trop importantes.

3. Une approche différente du pilotage des dépenses

Les dépenses de santé représentaient en 2019 10,9 % du produit intérieur brut et une dépense par habitant de 5 042 euros. En 2021, année exceptionnelle du fait de la crise, les dépenses publiques dans le domaine de la santé ont atteint 138 milliards de couronnes (soit environ 12 milliards d'euros). Les dépenses de santé ne relèvent pas en Suède d'une assurance sociale comme l'est l'assurance maladie en France et ne sont pas liées à une contribution spécifique. En conséquence, il n'est pas établi de solde ou de notion d'équilibre budgétaire.

Le budget affecté à la santé, qui pèse pour une part importante des dépenses des régions, est appréhendé dans leur cadre budgétaire global. Alors que les possibilités d'endettement des collectivités sont très limitées, les régions doivent, en cas d'augmentation significative de leurs dépenses de santé, soit revoir les priorités de leurs politiques soit augmenter les impôts.

La région de Stockholm expliquait ainsi qu'alors que par principe les dépenses ne doivent pas être plus dynamiques que les ressources, cette logique était particulièrement difficile à tenir dans le champ de la santé du fait de l'augmentation rapide du coût du médicament, des dépenses de personnels, et de l'évolution des techniques de soins. Pour la région de Stockholm, le budget consacré à la santé représentait 68 milliards de couronnes en 2021 (environ 5,9 milliards d'euros).