E. INTÉGRATION DES MIGRANTS ET DES RÉFUGIÉS : DES AVANTAGES POUR TOUTES LES PARTIES - L'INCLUSION SOCIALE DES MIGRANTS, DES RÉFUGIÉS ET DES PERSONNES DÉPLACÉES INTERNES PAR LE BIAIS DU SPORT - PROTECTION SANITAIRE ET SOCIALE DES TRAVAILLEUSES ET DES TRAVAILLEURS SANS-PAPIERS OU EN SITUATION IRRÉGULIÈRE

1. L'intervention de Mme Marietta Karamanli, au nom du groupe socialiste

Merci, Monsieur le Président.

Mesdames et Messieurs les rapporteurs,

Chers collègues,

Au nom du Groupe des socialistes, démocrates et verts, je souhaite tout d'abord remercier les rapporteurs de leur travail, de leurs rapports et projets de résolution qui sont très importants car les migrations sont à la fois l'illustration d'un monde en mouvement et la conséquence de changements politiques économiques, sociaux, militaires, environnementaux profonds.

En 2020 déjà, l'Europe avait accueilli environ 87 millions de migrants internationaux.

Sur l'intégration en général, je voulais rappeler aussi qu'en 2014, un précédent rapport que j'avais eu l'honneur de présenter devant notre Assemblée ici énonçait déjà que le niveau global d'intégration demeurait insatisfaisant et que la situation des immigrés réguliers, et, plus inquiétant encore, de leurs descendants, soulevaient des préoccupations justifiées dans de nombreux États membres du Conseil de l'Europe.

Alors, je ne peux ici à titre personnel mais aussi au nom de mon Groupe que féliciter les rapporteurs et soutenir leurs rapports pour leur réalisme, leur pragmatisme et le sens de la justice et de l'efficacité qu'ils portent.

Je voudrais aussi à ce point du débat revenir sur le contexte dans lequel ce sujet est discuté aujourd'hui.

Il est une part stable de la population des différents États qui s'inquiète de l'immigration vers les pays européens. Cette inquiétude ne peut malheureusement être combattue par des arguments scientifiques, par des faits établis par les sciences économiques et sociales. Elle n'est pas de cet ordre mais se situe sur le terrain de la peur du changement, de l'angoisse de ne pas y arriver dans un monde où les inégalités se sont creusées au sein même de pays développés.

Selon de nombreux collègues ici présents sur tous les rangs et dans nos parlements nationaux, il nous faut renouer avec des politiques globales que vous rappelez et qui assurent une meilleure redistribution de la richesse en direction des populations ayant de faibles ressources économiques, culturelles et politiques ; et « embarquent » avec elles l'ensemble des populations immigrées, récentes ou moins récentes, et dont les effets positifs pour tous seront à même de jouer favorablement pour ceux ayant le plus de difficultés, sans effet stigmatisant pour elles et sans un sentiment d'exclusion à rebours pour les autres.

Cela renvoie aussi à l'idée que les politiques d'intégration se jouent au niveau de chaque État et doivent articuler des politiques publiques transversales : travail, logement, éducation mais aussi culture.

Enfin, à titre personnel, je formulerai ici une suggestion : celle que les bonnes pratiques, les réussites, comme celles dont le rapport se nourrit au travers de trois États, puissent servir à un site et une plateforme de bonnes pratiques dont l'ensemble des acteurs pourraient se servir mais qu'ils pourraient aussi alimenter.

Notre Groupe soutiendra donc le vote des rapports et des résolutions.

Je vous remercie pour votre attention.

2. L'intervention de M. Emmanuel Fernandes, au nom du groupe GUE

Merci, Monsieur le Président.

D'abord, mon groupe tient à relever la qualité des rapports que nous examinons aujourd'hui, qui sont utiles, qui sont justes et très documentés. Nous saluons le travail des rapporteurs mettant en évidence des bonnes pratiques, des préconisations favorables qui, si elles sont suivies par nos États membres, contribueront à contrer la vision mortifère selon laquelle les migrations seraient une menace ou un danger, vision qui prend de l'ampleur jusqu'au coeur de cette institution.

Oui, mieux intégrer les migrants et les réfugiés bénéficie à toutes et tous, et le fait de prendre des mesures pour garantir cette intégration permet à nos sociétés de mieux vivre.

Oui, le sport, comme la culture, les services publics, les collectivités, sont de formidables leviers d'intégration.

Oui, protéger les migrants et les réfugiés par l'accès au droit à la santé, au logement et au travail dans les conditions du droit qui s'appliquent à toutes et tous : cet accès au droit est essentiel dans nos démocraties. Car c'est bien de cela dont il s'agit : respecter les droits fondamentaux reconnus par la Convention européenne des droits de l'homme et dont notre institution est la garante.

Oui, cela requiert une meilleure coopération internationale, des moyens, de la logistique, mais les droits à la vie, à la liberté, à la sûreté, à la non-discrimination ne sont pas négociables. Il s'agit de vies humaines qui s'arrachent à leur terre d'origine pour survivre ou tenter d'améliorer leurs conditions.

À cet instant, je pense aux victimes du naufrage qui a eu lieu au large de la Grèce : des centaines de personnes ont disparu dans ce drame absolu qui s'ajoute à la terrible liste mortuaire de plusieurs dizaines de milliers de victimes depuis les dernières décennies. Il s'agit de femmes, d'hommes, d'enfants qui avaient initié cette traversée dont il connaissait les immenses risques en quête d'un avenir meilleur. La Mare nostrum est devenue leur cimetière.

Il est plus que temps de nous remettre collectivement en cause. Depuis nos salons feutrés et nos hémicycles, agissons pour stopper ces tragédies quotidiennes.

Alors, ces trois rapports sont bienvenus en ces temps plus que troublés où la menace d'extrême droite grandit jusqu'en notre sein.

Un nombre croissant de nos gouvernements remet en question les droits des migrants et des réfugiés.

Hier soir, au coeur même de Paris, la police d'Emmanuel Macron a violemment attaqué un campement de mineurs non accompagnés pour les disperser, au mépris de toutes les conventions, au mépris de la liberté, de l'égalité et de la fraternité.

Pourtant, nos sociétés ont prouvé leur capacité à accueillir les réfugiés ukrainiens dans des conditions qui doivent nous servir de modèle, dès le déclenchement de la guerre d'agression russe. C'était notre devoir et nous le remplissons mais, chers collègues, comment justifier que ces bonnes pratiques ne soient pas suivies pour l'ensemble des personnes migrantes réfugiées, déplacées, avec une attention particulière pour les groupes vulnérables tels que les femmes, les enfants non accompagnés, les personnes âgées, handicapées, les membres de la communauté LGBTQI+ ?

Chers collègues,

L'honneur de la démocratie que nous défendons ici réside dans l'accueil digne de toutes les personnes, toutes les personnes qui en ont besoin. Soyons à la hauteur des principes universels et humanistes qui doivent urgemment redevenir notre boussole commune.

3. L'intervention de M. Thibault François

Je vous remercie, Madame la Présidente.

Chers collègues,

L'Europe voit arriver de plus en plus de migrants sur ses côtes, faisant face à une vague de migrations maintenant devenue sans précédent.

En parallèle de cela, les peuples européens subissent un coût de la vie qui ne cesse d'augmenter : inflation massive, hausse des impôts, prix de l'énergie et du carburant qui explosent.

Les Français n'accepteront pas cette nouvelle inégalité que vous souhaitez promouvoir dans nos sociétés. Quelle légitimité ont les clandestins à exiger et obtenir une couverture médicale financée par les contribuables européens ? Ils n'ont jamais contribué dans nos pays.

Pour rappel, en France, dans mon pays, l'aide médicale d'État réservée aux clandestins est estimé à plus de 1,2 milliard d'euros ; la procédure pour les étrangers malades, 250 millions d'euros ; la prise en charge d'une partie des mineurs non accompagnés, 225 millions d'euros. L'ensemble très complexe de nos procédures visant les clandestins déboutés, interpellations, hébergements, reconduite, retour d'aides, frais de justice, nous arrivons à un total de dépenses estimé à 3,9 milliards d'euros. Oui, oui, 3,9 milliards d'euros par an, juste tout simplement seulement huit fois le budget annuel de notre Assemblée.

Il n'est pas un tabou de dire que oui, l'immigration massive a un coût trop élevé pour nos sociétés. C'est un fait. D'ailleurs, la situation est consternante lorsque l'on sait que 50 % des étrangers extra-européens qui sont présents en France ne travaillent pas : ils ne paient donc pas d'impôts et ne financent donc pas notre système de protection sociale. Ce sont toujours les mêmes qui paient et ça suffit.

Chers collègues,

Vous souhaitez, je cite, « lutter contre la traite d'êtres humains, l'économie souterraine et empêcher les réductions de recettes des États ». Le mieux serait de lutter activement contre les mafias de passeurs qui s'enrichissent sur la misère des gens, ainsi que de favoriser le retour des clandestins dans leurs pays d'origine, qui ne sont pas en guerre, et cela sans délai ; sans quoi nos systèmes de protection sociale respectifs ne tiendront pas sous ces pressions.

Je vous remercie.

4. L'intervention de M. Jacques le Nay

Merci, Madame la Présidente.

Je remercie nos collègues pour leurs rapports qui soulignent les enjeux liés à l'inclusion sociale des migrants, alors que l'Europe est confrontée à une augmentation significative de leur nombre depuis plusieurs décennies.

Si je partage l'analyse de notre collègue M. Domagoj Hajdukovic selon laquelle l'intégration des migrants représente un investissement à long terme dans le capital humain, on ne doit pas minorer la sensibilité des populations et, par ricochet, des gouvernements, face aux vagues migratoires. Le faire, c'est prendre le risque d'aller vers des déconvenues électorales et des tensions au sein de nos États.

Les discussions sur le pacte « asile et migration » de l'Union européenne, et en particulier sur la question de la relocalisation des migrants, nous ont montré combien le sujet est difficile. Face à cette situation, réussir l'intégration des migrants est à la fois un défi et une nécessité ; à la fois dans une approche humaniste que nous défendons au Conseil de l'Europe, mais aussi pour assurer la cohésion de nos sociétés.

Le rapport de notre collègue présente ainsi un large éventail d'approches que les États membres du Conseil de l'Europe peuvent appliquer, de manière à encourager « un sentiment d'appartenance commune » et à réduire au minimum la peur et le ressentiment envers les personnes arrivant d'autres pays, en invitant notamment les migrants et les réfugiés à accepter un « nouveau contrat social » qui énonce leurs droits et responsabilités. Cette notion de droits et de responsabilités, de même que la maîtrise de la langue du pays d'accueil, le partage de ses valeurs et la compréhension de sa culture, me paraissent être des éléments absolument fondamentaux pour une intégration réussie.

Cela ne s'invente pas ou ne se décrète pas : il faut l'accompagner par des politiques publiques spécifiques, notamment en matière d'apprentissage de la langue et de la citoyenneté. Le rapport met notamment en avant les démarches intéressantes mises en place en ce domaine en Norvège, en Suède et en Finlande.

Il souligne également à juste titre l'enjeu de la répartition des migrants sur le territoire, afin d'éviter de créer des ghettos qui s'apparentent à des zones de désintégration sociale, mais aussi l'enjeu de l'accès au logement, aux soins de santé, à la scolarisation et à l'emploi. Ce ne sont pas des questions faciles, ni au plan européen, ni au plan national, ni au plan local ; et nous l'avons vécu très concrètement en France, dans la commune de Saint-Brévin, dont le maire a été agressé et a finalement démissionné, sur fond de tensions liées à l'implantation d'un centre d'accueil de demandeurs d'asile. Je veux souligner ici le rôle des élus locaux, qui sont les premiers au contact de nos populations et ont la capacité à fédérer localement.

Pour cela, les États devront véritablement les accompagner et assumer l'entière responsabilité de leurs décisions. L'intégration est un tout et l'acceptation migratoire, on le voit dans tous les États européens, repose toujours sur un équilibre entre les droits et les devoirs, mais aussi sur la capacité des États à faire respecter les règles qu'il impose.

Le Parlement français doit débattre d'un nouveau projet de loi pour contrôler l'immigration et améliorer l'intégration. Je forme le voeu que nos échanges de ce jour puissent être source d'inspiration dans cette perspective.

5. L'intervention de M. Claude Kern

(Discours non prononcé mais annexé au compte rendu officiel)

Monsieur le Président,

Mes chers collèges,

L'Europe est confrontée à une augmentation significative du nombre de migrants depuis plusieurs décennies en raison de conflits, de la recherche de meilleures opportunités économiques et de facteurs environnementaux. Ceci est une réalité avec laquelle nous devons composer même si cela ne nous empêche pas de réfléchir dans nos États respectifs à éventuellement limiter les flux migratoires.

L'inclusion sociale des migrants passe par l'accès au logement, à l'emploi, à l'éducation et à la santé. Les programmes d'apprentissage de la langue du pays d'accueil sont essentiels pour aider les migrants à communiquer et à s'intégrer dans la société.

En ce qui me concerne, je considère que le sport est essentiel pour permettre une meilleure intégration. Ces effets bénéfiques sur le bien-être mental et physique permettent d'atténuer les comportements antisociaux, d'améliorer la cohésion au sein des communautés et de contribuer à développer l'estime de soi. Ce sont là autant de facteurs qui facilitent l'intégration.

Pour renforcer encore l'impact du sport, il est nécessaire d'inclure les personnes les plus vulnérables, notamment les femmes, les personnes handicapées et les membres de la communauté LGBTQ+. Il s'agit de promouvoir ici l'égalité de genre et la lutte contre les discriminations, ce qui implique la mise en oeuvre de politiques publiques dédiées et un dialogue entre les pouvoirs publics et les fédérations sportives.

Le Conseil de l'Europe est en pointe sur cette question. Les résolutions de notre Assemblée et les recommandations du Comité des ministres soulignent l'impact que peut avoir le sport comme moyen d'inclusion. La charte européenne du sport et l'accord partiel élargi sur le sport permettront d'améliorer l'accès au sport.

Un fonds spécial, créé dans le cadre des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, permet de financer des associations qui ont pour objectif d'utiliser le sport pour créer du lien social. Parmi les associations retenues, l'une d'entre elles promeut l'intégration des migrants par la pratique de sports comme la boxe, le football ou le basket. Cette initiative permet notamment aux migrants qui pratiquaient un sport dans leur pays d'origine de pouvoir continuer à le faire en France. Cette initiative leur permet de reprendre confiance en eux et de côtoyer des personnes qu'elles n'auraient pas rencontrées autrement.

Ce genre d'initiatives me paraît ainsi avoir un impact positif pour l'intégration des migrants dans les sociétés qui les accueillent.

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