C. LES AUDITIONS ET ÉCHANGES DE L'ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE AVEC PLUSIEURS PERSONNALITÉS

1. La séance de questions à Mme Marija Pejèinoviæ Buriæ, Secrétaire générale du Conseil de l'Europe

La Secrétaire générale du Conseil de l'Europe, Mme Marija Pejèinoviæ Buriæ, a répondu aux questions des parlementaires le lundi 19 juin 2023. Au cours de cette séance de questions-réponses, elle a mis en lumière les résultats du quatrième sommet des chefs d'État et de Gouvernement, en mettant l'accent sur la voie ambitieuse qu'il convient de suivre pour renforcer la sécurité démocratique, mettre un terme au recul démocratique et relever les défis nouveaux auxquels l'Organisation est confrontée.

Elle a en particulier souligné l'importance que revêt la création d'un registre des dommages à La Haye (avec un bureau à Kiev) pour consigner et documenter les preuves et les demandes de dommage, de perte ou de préjudice causés par l'agression russe contre l'Ukraine.

« Le registre constitue la première composante d'un futur mécanisme international d'indemnisation, qui sera établi par un instrument international distinct, en coopération avec l'Ukraine », a souligné la Secrétaire générale.

Au-delà des échanges portant sur l'Ukraine, des questions lui ont été posées concernant la situation dans les pays du Caucase du Sud, le système d'exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme, ainsi que le projet visant à renforcer la visibilité du Conseil de l'Europe dans ses États membres.

2. Le discours de M. Péter Szijjártó, ministre des affaires étrangères et du commerce de la Hongrie

Au cours de la séance du lundi 19 juin 2023, M. Péter Szijjártó, ministre des affaires étrangères et du commerce de la Hongrie, s'est adressé à l'Assemblée pour évoquer la politique étrangère de son pays dans le contexte de la guerre d'agression contre l'Ukraine. Il a ainsi déclaré qu'« il n'existe aucune différence entre nous sur notre position à l'égard de la guerre, car cette guerre doit être condamnée, comme nous l'avons fait dès le début, et comme nous continuons à le faire. Mais il s'agit de savoir à quelle vitesse cette guerre peut ou doit prendre fin et de quelle manière nous pourrons sauver la vie du plus grand nombre possible de personnes ».

Au nom du groupe CE/AD, M. Thibault François a demandé à M. Péter Szijjártó de préciser la position de la Hongrie sur le pacte européen sur la migration et l'asile. Il lui a été répondu que la Hongrie distinguait les migrants des réfugiés notamment les réfugiés ukrainiens dont un million sont accueillis en Hongrie. Le ministre a rappelé que si le droit international permet à une personne fuyant une zone de guerre de rester temporairement sur le territoire du premier pays sûr qu'elle atteint, il ne prévoit pas que quiconque soit autorisé à choisir un pays dans lequel il souhaite vivre et à s'y rendre en violant les frontières d'une série de pays, appelant ainsi à respecter le principe de « premier pays sûr ». Enfin, il a expliqué qu'il continuerait de défendre le droit de la Hongrie à choisir souverainement qui elle souhaite accueillir sur son territoire.

M. Bernard Fournier a ensuite interrogé M. Péter Szijjártó sur les mesures que la Hongrie compte mettre en oeuvre pour répondre aux observations du Groupe d'États contre la corruption du Conseil de l'Europe (GRECO), qui a appelé à adopter de nouvelles mesures pour lutter contre la corruption à l'égard des personnalités exerçant de hautes fonctions politiques et de la police nationale. Réfutant l'idée d'une corruption systémique en Hongrie, en raison notamment de l'attractivité économique de son pays, le ministre a expliqué que les cas de corruption mentionnés dans le rapport du GRECO sont des cas isolés, comme il en existe dans toutes les démocraties, et qu'ils devront bien évidemment faire l'objet d'une enquête.

3. Le discours de M. Edgars Rinkçviès, ministre des affaires étrangères de la Lettonie et président du Comité des Ministres

Au cours de la séance du mardi 20 juin 2023, M. Edgars Rinkçviès, ministre des affaires étrangères de la Lettonie, s'est exprimé devant l'Assemblée, en sa qualité de président du Comité des Ministres.

Considérant que le Sommet de Reykjavik a été un tournant important pour l'Organisation à un moment critique et qu'il a témoigné d'une forte unité européenne face à l'agression russe contre l'Ukraine, il a souligné l'importance du nouveau Registre des dommages, première mesure concrète sur la voie d'un futur mécanisme international d'indemnisation, et a appelé tous les États membres du Conseil de l'Europe et au-delà à se joindre à cette initiative. La Lettonie favorisera le lancement opérationnel du registre et la première réunion des participants, à la fin du mois de juin, portera sur les mesures pratiques à prendre.

« Nous ne devons ménager aucun effort pour que les auteurs des crimes commis par la Russie répondent pleinement de leurs actes », a-t-il déclaré. « Les États doivent poursuivre leur action pour créer un tribunal spécial chargé de juger le crime d'agression et le Conseil de l'Europe devrait prendre part à ce processus en apportant ses compétences en la matière ».

En septembre, la Lettonie organisera une conférence informelle des ministres européens de la Justice afin d'offrir une plateforme de discussion sur la manière de mettre en jeu la responsabilité de la Russie ainsi que sur la question du regroupement des enfants ukrainiens avec leurs familles.

La présidence lettone oeuvrera aussi en faveur de la défense des priorités nationales, parmi lesquelles le renforcement de la démocratie et de l'État de droit, dont la promotion de l'exécution des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme, l'éducation et la jeunesse, la liberté d'expression, la sécurité des journalistes et l'intelligence artificielle.

M. André Gattolin a interrogé M. Edgars Rinkçvièssur les actions qu'il comptait mettre en oeuvre pour renforcer la lutte contre les disparitions forcées - dont le nombre a augmenté à la suite de l'agression russe contre l'Ukraine - notamment pour inciter les États membres du Conseil de l'Europe à ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. Sur ce sujet, M. Edgars Rinkçvièsa indiqué qu'il préparerait une réponse écrite.

4. Le discours de Mme Nataa Pirc Musar, Présidente de la Slovénie

Lors de son discours du 21 juin 2023, Mme Nataa Pirc Musar, Présidente de la Slovénie, a rappelé la nécessité de défendre le rôle du Conseil de l'Europe, de promouvoir le droit de l'homme à un environnement propre et sain, de travailler avec les jeunes, de continuer à soutenir l'Ukraine dans sa lutte contre l'agression russe et de réfléchir à la reconstruction d'après-guerre, et de s'attaquer au recul de la démocratie en Europe.

S'exprimant à l'occasion du 30e anniversaire de l'adhésion de la Slovénie à l'Organisation, la présidente slovène a souligné l'importance de traiter les problèmes régionaux, tels que les tensions actuelles dans les Balkans occidentaux et la fuite massive des cerveaux parmi les jeunes de la région, ainsi que les questions européennes et mondiales plus vastes, telles que l'aggravation de la polarisation géopolitique et le retour de la mentalité de bloc, la montée des violations des droits de l'homme et du populisme, l'affaiblissement de l'État de droit et des institutions démocratiques en Europe, ainsi que les défis environnementaux.

« Nous savons qu'il n'y a pas de planète B », a souligné Mme Pirc Musar. « Nous devons intensifier nos efforts combinés contre la crise climatique, car l'horloge se rapproche dangereusement de l'heure où il sera trop tard ». Elle a salué le travail des membres de l'APCE en faveur du droit à un environnement propre et sain. « Nous resterons unis face à la triple crise planétaire de la pollution, de la perte de biodiversité et du changement climatique, ou nous tomberons tous ensemble, grands et petits, riches et pauvres », a-t-elle affirmé.

S'agissant de l'agression actuelle de la Russie contre l'Ukraine, la Présidente de la Slovénie a réitéré l'importance du travail accompli par le Conseil de l'Europe pour garantir la justice, notamment par l'établissement du Registre des dommages résultant de l'agression de la Russie. Elle a exprimé son soutien à tous les efforts qui ouvriraient la voie à une paix durable et juste en Ukraine, mais a souligné que « pas un seul mètre sur cette voie ne peut être construit sans l'Ukraine elle-même ».

« Ce qui se passera après la guerre en Ukraine est également important », a-t-elle déclaré. « L'Ukraine connaîtra une reconstruction massive à bien des égards, de la reconstruction des infrastructures à la reconstruction des relations avec les minorités vivant en Ukraine. Le rétablissement de la confiance sera un processus lent et douloureux, mais sans confiance, il ne peut y avoir de sécurité ».

La Présidente slovène a également exprimé sa conviction que le Conseil de l'Europe doit rester un porte-drapeau mondial pour relever les nouveaux défis en matière de droits de l'homme, y compris ceux liés à l'intelligence artificielle. Elle a salué les progrès du processus d'adhésion de l'Union européenne à la Convention européenne des droits de l'homme et à la Convention d'Istanbul, puis a réitéré l'impératif d'une mise en oeuvre complète et rapide des arrêts de la Cour européenne des droits de l'Homme, ainsi que de la promotion et de la protection de la diversité et du respect pour tous.

« Je pense que le Conseil de l'Europe joue un rôle très important en tant que fondement juridique de l'Europe, et qu'il peut et doit être une source d'inspiration et d'orientation au niveau mondial dans l'élaboration de nouvelles normes pour répondre aux défis nouveaux et évolutifs en matière de droits de l'homme. Mais nous ne serons crédibles que dans la mesure où nous respecterons nous-mêmes le principe d'égalité et d'universalité des droits de l'homme dans nos propres pays », a conclu Mme Pirc Musar.

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