III. RÉPONDRE AUX DÉFIS DE LA FILIÈRE « POLICE MUNICIPALE »
L'essor des polices municipales observé au cours des dernières années s'est accompagné d'une augmentation significative du nombre de recrutements de policiers municipaux par les communes. Cette tendance devrait perdurer à l'avenir, puisque 11 000 policiers municipaux supplémentaires devraient être recrutés entre 2020 et 2026.
La hausse sensible des besoins de recrutement a été marquée par l'apparition de tensions, tant au niveau du recrutement que de la formation des policiers municipaux.
S'agissant du recrutement, les auditions conduites par la mission d'information ont mis en lumière les difficultés rencontrées par les communes pour pourvoir les postes, notamment en ce qui concerne les postes de direction, même si ce constat mérite d'être nuancé. Des phénomènes de concurrence entre les communes ont également émergé, afin d'attirer les meilleurs profils.
Des tensions sont également apparues autour de la formation des policiers municipaux, assurée par le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT). La plupart des critiques se sont cristallisées autour de la question du délai de départ en formation des policiers municipaux recrutés, même si la rapporteure constate que des efforts ont été faits pour réduire celui-ci. La mission d'information appelle néanmoins à poursuivre la rationalisation du parcours de formation, afin de répondre plus rapidement aux besoins des communes en termes de formation des policiers municipaux, tout en assurant parallèlement l'adéquation de la formation dispensée aux conditions d'exercice du métier.
Ces mesures doivent s'accompagner globalement d'un renforcement de l'attractivité de la filière « police municipale ». Si la mission a pu constater que le régime indemnitaire avait récemment évolué, d'autres mesures restent encore à mettre en oeuvre pour fluidifier le déroulement de carrière des agents et pour valoriser leurs missions à la hauteur des services rendus à la population, notamment sur le plan symbolique.
A. LA POLICE MUNICIPALE : UNE FILIÈRE MARQUÉE PAR DES BESOINS IMPORTANTS DE RECRUTEMENT
1. L'essor des polices municipales s'est traduit par une augmentation des besoins de recrutement
L'essor des polices municipales s'est traduit par une hausse significative des effectifs de policiers municipaux. Entre 2013 et 2023, le nombre de policiers municipaux a ainsi augmenté de 41 %, passant de 19 916 à 28 161.
Ce phénomène devrait se poursuivre dans un avenir proche, compte tenu du besoin croissant de sécurité exprimé par la population et évoqué dans les développements précédents. Ainsi, selon les informations transmises par le CNFPT et par la DGCL, 11 000 recrutements supplémentaires d'agents de police municipales devraient intervenir entre 2020 et 2026.
Le cas de la police municipale de Paris, qui compte à l'heure actuelle 2 300 agents de police municipale et assimilés selon les données communiquées par la ville de Paris115(*), illustre le maintien à un niveau élevé des prévisions de recrutement, puisque 600 recrutements supplémentaires sont d'ores et déjà programmés pour l'année 2025 et que, selon la direction générale de l'administration et de la fonction publique (DGAFP), l'effectif cible est fixé à 5 000 agents à la fin du mandat.
2. L'accroissement du nombre de postes de policiers municipaux a provoqué l'apparition de tensions autour du recrutement, qui doivent cependant être nuancées
a) La hausse du nombre de postes de policiers municipaux à pourvoir a provoqué l'apparition de difficultés de recrutement
Le développement des polices municipales et la hausse du nombre de postes à pourvoir ont provoqué l'apparition de tensions autour du recrutement de ces agents.
Déjà, en 2020, la Cour des comptes notait que « les collectivités rencontrent, (...) des difficultés de recrutement » et relevait par exemple qu'à la fin de l'année 2018, sur un total de sept postes à pourvoir, la police municipale de Vanves ne comptait que trois agents en poste116(*).
Ces difficultés de recrutement se sont accentuées « après les élections municipales de 2020 du fait d'une plus forte demande de policiers municipaux. Pour répondre aux sollicitations de leurs habitants et au ressenti d'un retrait des forces de sécurité nationales de l'espace public local, les communes ont ouvert de nouveaux postes117(*) ».
Ce constat se vérifie encore à l'heure actuelle. Les auditions conduites par la mission d'information ont ainsi mis en lumière le nombre relativement élevé de postes vacants ainsi que l'allongement des délais nécessaires afin de les pourvoir, pour des raisons variées, mais tenant principalement au déficit d'attractivité de la filière « police municipale ».
Ainsi, Rémi Jeanmougin, chef de service de la police pluricommunale de Loches, a indiqué lors de son audition, qu'à la suite du départ d'un agent en 2024, plus de six mois avaient été nécessaires pour recruter un nouvel agent, en raison, d'une part, du salaire « pas forcément attractif au regard des autres communes du département » et, d'autre part, du caractère relativement isolé du territoire, qui implique de recruter des agents venant d'autres régions.
De même, Thierry Ruflet, chef de service de la police municipale de Fondettes, a fait état d'un faible nombre de candidatures lié, selon lui, aux contraintes inhérentes au métier en termes de disponibilité, qui requièrent une présence six jours sur sept, ainsi qu'à l'absence d'armes létales dans l'équipement des policiers municipaux de la commune.
Concernant le nombre de postes vacants, les données transmises par France urbaine, issues d'une enquête auprès des adhérents réalisée en 2022, faisaient état d'une moyenne de sept postes vacants par collectivité adhérente.
Ce constat d'un accroissement des difficultés de recrutement est également partagé par les syndicats de police municipale.
Ainsi, selon la Fédération syndicale unitaire Territoriale (FSU Territoriale), il manquerait actuellement 10 000 policiers municipaux sur le territoire national, car « les métiers de la police municipale ne sont plus attractifs, du fait de l'exposition quotidienne à la violence ».
De même, Force Ouvrière Police municipale (FO Police municipale) note « des difficultés de recrutement croissantes dans de nombreuses communes, notamment en raison des conditions salariales peu compétitives et de l'absence de reconnaissance statutaire à la hauteur des responsabilités confiées ».
Des difficultés de recrutement sont également constatées en ce qui concerne les gardes champêtres. En effet, selon la Fédération nationale des gardes champêtres (FNGC), de nombreuses offres d'emplois de gardes champêtres demeurent non pourvues, en raison du faible nombre de concours organisés. Seul le centre de gestion de la fonction publique territoriale d'Alsace organise en effet un concours annuel, ce qui est insuffisant pour répondre aux besoins.
b) Des difficultés de recrutement à nuancer
Les difficultés de recrutement de policiers municipaux observées méritent cependant d'être nuancées, comme en témoigne le fait que le métier de policier municipal ne fait plus partie du top 10 des métiers en tension depuis 2022118(*), alors qu'il était classé 5e en 2018 et 7e en 2020.
En premier lieu, ces difficultés ne concernent pas l'intégralité des communes dotées d'une police municipale. Certains directeurs de police municipale, entendus par la mission d'information, ont ainsi indiqué ne pas rencontrer de difficultés pour pourvoir les postes vacants, à l'instar d'Olivier Cases, directeur de la police municipale de Saint-Laurent-du-Var, ou de Caroline Videlaine, directrice de la sécurité et de la tranquillité publiques de la ville d'Orléans. De même, concernant les gardes champêtres, la Brigade verte d'Alsace a indiqué, pour l'heure, ne pas être confrontée à des difficultés de recrutement « dans la mesure où le dispositif “ Brigade verte ” présente un certain attrait de par la diversité des missions et le fait d'être un organisme corporatif de taille importante ».
Les résultats de la consultation des maires lancée par la mission d'information corroborent ce fait, puisque 60 % des maires ayant répondu à la consultation119(*) affirment qu'ils ne sont pas confrontés à des difficultés de recrutement.
Consultation des élus locaux - Réponses à la question : « Êtes-vous confrontés à des difficultés de recrutement au sein de votre service de police municipale ? »
Note : nombre de répondants : 737
Source : commission des lois du Sénat, d'après les résultats de la consultation des élus locaux, « Polices municipales : quel bilan ? quelles réformes ? »
Les disparités constatées sont liées au fait que les policiers municipaux prennent plusieurs critères en compte avant d'accepter un poste, tels que la situation géographique, le régime indemnitaire, ou encore l'équipement et l'armement de la police municipale.
Plus largement, « certaines communes ont de grosses difficultés pour recruter et surtout attirer des profils de qualité, car elles souffrent de certains handicaps (immobilier coûteux, zone peu attractive, délinquance importante) », comme l'a résumé Mathieu Zagrodzki, chercheur associé au Centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales (CESDIP).
En deuxième lieu, le nombre de candidats et de lauréats aux concours de policiers municipaux demeure important.
Les concours d'accès aux cadres d'emplois de la police municipale
Les policiers municipaux peuvent être recrutés :
- par concours, pour l'accès aux trois cadres d'emplois ;
- par le biais d'un examen professionnel, uniquement pour le recrutement de chefs de service ;
- ou par la voie du détachement ou de l'intégration directe dans les cadres d'emplois de la police municipale, pour les fonctionnaires civils et les militaires.
Les concours de recrutement des policiers municipaux sont organisés par les centres de gestion de la fonction publique territoriale (CDG), sur la base des besoins exprimés par chaque commune ou établissement public de coopération intercommunale (EPCI). Les emplois de chaque collectivité territoriale sont en effet créés par l'organe délibérant de la collectivité120(*), laquelle informe ensuite le CDG de la création ou de la vacance de tout emploi permanent.
À l'issue du concours, les lauréats sont inscrits par ordre alphabétique sur une liste d'aptitude121(*). L'inscription sur cette liste, valable deux ans et renouvelable, sous certaines conditions, jusqu'à quatre années au total ne vaut pas recrutement, mais permet aux lauréats de postuler, directement auprès des communes ou des EPCI, pour les emplois vacants. Chaque collectivité est donc libre de recruter toute personne figurant sur cette liste, et le cas échéant, de la titulariser à l'issue d'une période de formation et de stage. Une fois titularisé, l'agent peut être recruté par une autre collectivité.
Le nombre de candidats aux concours de la police
municipale démontre, selon la DGCL, « qu'il n'y a
pas de problème d'attractivité en tant que tel des concours
de policiers municipaux ». Ainsi,
les données récoltées
par la DGCL
auprès des CDG font état de 2 956 candidats
aux concours externes de gardien brigadier organisés en 2023, pour
un total de284 postes ouverts122(*).
Tableau des concours externe et interne de gardien
brigadier
de la police municipale
Année |
Type de concours |
Nombre de postes ouverts |
Nombre de candidats |
Nombre d'admissibles |
Nombre de candidats |
2023 |
Externe |
284 |
2 656 |
737 |
284 |
Interne |
182 |
453 |
226 |
117 |
|
2022 |
Externe et interne |
5 715 |
1 264 |
571 |
|
2021 |
Externe et interne |
3 149 |
875 |
421 |
|
2020 |
Externe |
5 116 |
295 |
153 |
|
Interne |
1 208 |
144 |
84 |
||
2019 |
Externe |
286 |
2 476 |
465 |
212 |
Interne |
234 |
783 |
247 |
101 |
|
2018 |
Externe |
363 |
6 119 |
702 |
344 |
Interne |
292 |
4 465 |
441 |
199 |
|
2016 |
Externe |
9 175 |
547 |
351 |
Source : commission des lois du Sénat, à partir des données transmises par la DGCL.
Par ailleurs, selon la DGCL, « le constat de difficultés de recrutement à est relativiser au regard du nombre de lauréats inscrits sur les listes d'aptitude à l'issue des concours ».
Ainsi, au 1er juillet 2024, il y avait encore :
- 859 lauréats inscrits sur la liste d'aptitude des gardiens brigadiers123(*), parmi lesquels 459 lauréats inscrits depuis moins d'un an, 206 en cours de deuxième année, 141 en cours de troisième année, 38 en cours de quatrième année et 15 en prolongation, au-delà de la quatrième année ;
- 145 lauréats inscrits sur celle des chefs de service de la police municipale, dont 81 lauréats inscrits depuis moins d'un an et 64 dans leur deuxième année.
Pour la DGCL, « ces chiffres démontrent que les collectivités peuvent, entre chaque concours, pourvoir à leurs besoins de recrutement au regard du nombre de lauréats inscrits sur les listes ».
De plus, le nombre de concours organisés a été augmenté, pour tenir compte des prévisions de recrutement à horizon 2026 et répondre aux besoins exprimés par les collectivités territoriales.
En revanche, le niveau exigé aux concours peut conduire à ne pas recruter suffisamment de policiers municipaux. Ainsi, le directeur de la police municipale de Paris, Michel Felkay, a indiqué qu'aucun « des quatre derniers concours de gardien brigadier ouverts par la Ville de Paris n'est parvenu à pourvoir l'ensemble des postes ouverts. L'épreuve sportive très sélective élimine nombre de candidats admissibles ».
Des difficultés similaires apparaissent pour le recrutement par concours des directeurs de police municipale, à l'échelle nationale, comme illustré par les concours organisés en 2024. En effet, sur un total de 79 candidats au concours externe, seuls quatre candidats ont été déclarés admissibles et le nombre de lauréats s'est finalement établi à deux, pour un total de 22 postes ouverts.
En troisième lieu, l'ensemble des forces de l'ordre sont confrontées à des difficultés pour pourvoir les postes vacants et pour fidéliser les agents recrutés, ce qui illustre une tendance globale, et non un déficit d'attractivité spécifique de la filière « police municipale ». Ainsi, dans un rapport publié en 2023124(*), la Cour des comptes relevait que « les forces de sécurité intérieure peinent de plus en plus à recruter et fidéliser leurs personnels » et pointait « un nombre record de départs », tant dans la police nationale que dans la gendarmerie nationale.
3. L'essor des polices municipales a également été marqué par l'émergence d'une concurrence entre les communes, afin d'attirer les meilleurs profils
a) Les communes cherchent à attirer les meilleurs profils, donnant lieu à une concurrence croissante
En réaction à l'accroissement des besoins de recrutement de policiers municipaux, des phénomènes de concurrence entre communes se sont développés afin de pourvoir les postes créés et d'attirer des agents déjà formés et expérimentés.
Cette concurrence se traduit le plus souvent par des difficultés de fidélisation des policiers municipaux tout juste formés et titularisés, qui sont alors démarchés par d'autres communes souhaitant recruter des policiers municipaux sans avoir à supporter le coût de la formation ni attendre le temps de la formation pour disposer d'agents opérationnels.
Entendu par la mission d'information, Michel Felkay, directeur de la police municipale de Paris, a ainsi confirmé que « les communes de la région Île-de-France démarchent et recrutent des policiers municipaux fraîchement recrutés et formés par la Ville de Paris ».
Pour attirer des policiers municipaux et pourvoir les postes vacants, les communes utilisent principalement la marge de manoeuvre importante dont elles disposent pour déterminer le montant du régime indemnitaire. Ce constat avait déjà été formulé par la Cour des comptes en 2020, qui notait qu'une « concurrence entre collectivités [s'était] installée, alimentée notamment par la disparité des régimes indemnitaires125(*) ». Ainsi, selon FO Police municipale, « la concurrence entre communes est réelle, certaines offrant des avantages supplémentaires (primes, logement de fonction) pour attirer les agents ». Les candidats se dirigent alors vers les collectivités offrant les conditions les plus avantageuses.
Les paramètres de cette concurrence ne se limitent toutefois pas aux seules considérations financières. En effet, d'autres éléments sont également mis en avant pour attirer davantage de policiers municipaux, tels que l'armement et l'équipement offerts, ou encore la diversité des missions proposées. Comme souligné par l'Association nationale des cadres de la police municipale (ANCPM), « la concurrence est indéniable ; rémunération, moyens matériels, organisation des rythmes de travail orientent les choix des candidats ». À titre d'exemple, le fait que la police municipale de Paris ne soit pas armée semble nuire fortement à son attractivité.
b) Face à ces phénomènes de concurrence, des dispositifs visant à favoriser la fidélisation des policiers municipaux ont été institués
Plusieurs mécanismes ont été institués pour limiter la concurrence entre les communes et fidéliser les policiers municipaux recrutés.
(1) Le versement d'une compensation financière à la collectivité d'origine par la collectivité d'accueil
D'une part, l'article L. 512-25 du code général de la fonction publique prévoit qu'en cas de mutation d'un fonctionnaire territorial intervenant dans les trois ans suivant sa titularisation, la collectivité territoriale d'accueil doit verser à la collectivité d'origine une indemnité, au titre :
- de la rémunération perçue par l'intéressé pendant le temps de formation obligatoire - correspondant, pour les policiers municipaux, à la formation initiale d'application ;
- du coût de toute formation complémentaire suivie, le cas échéant, au cours de ces trois années (ce qui inclut par exemple la formation préalable à l'armement).
(2) La création d'un dispositif d'engagement de servir, spécifique aux policiers municipaux
En sus de ce dispositif général, un mécanisme spécifique pour les cadres d'emplois de la police municipale a été introduit par l'article 9 de la loi dite « Sécurité globale126(*) ». Ce dispositif, codifié à l'article L. 423-10 du code général de la fonction publique, donne la possibilité aux communes et aux intercommunalités qui le souhaitent d'instaurer un dispositif d'engagement de servir.
Concrètement, une commune ou un EPCI à fiscalité propre ayant pris en charge la formation d'un fonctionnaire stagiaire de police municipale peut lui imposer un engagement de servir d'une durée maximale de trois ans à compter de la date de titularisation de l'agent.
Dans le cas où le fonctionnaire rompt l'engagement, par exemple pour travailler auprès d'une autre collectivité, il doit alors rembourser à la commune ou l'EPCI une somme correspondant au coût de sa formation. Ce dispositif n'est pas cumulable avec celui prévu par l'article L. 512-25 du même code.
Il peut toutefois être dispensé par le maire ou par le président de l'EPCI de tout ou partie du remboursement, pour des motifs impérieux liés notamment à son état de santé ou à des nécessités d'ordre familial. Si l'exemption de remboursement porte sur la totalité de la somme due, il peut alors être fait application des dispositions de l'article L. 512-25 du code précité.
Les modalités de mise en oeuvre de ce dispositif d'engagement de servir sont précisées par le décret n° 2021-1920 du 30 décembre 2021 pris pour l'application de l'article L. 412-57 du code des communes relatif à l'engagement de servir des policiers municipaux, qui fixe notamment le montant du remboursement, lequel tient compte de la date à laquelle intervient la rupture de l'engagement, appréciée à compter de la date de titularisation de l'agent.
À titre d'exemple, un directeur de police municipale qui romprait son engagement dans l'année suivant sa titularisation devrait rembourser un montant forfaitaire de 39 875 €. En revanche, si l'engagement a été rompu e au cours de la deuxième année suivant sa titularisation, il ne devrait plus rembourser que 60 % du montant forfaitaire.
Ce dispositif, issu d'une recommandation formulée par les députés Alice Thourot et Jean-Michel Fauvergue127(*), visait à limiter la concurrence entre les communes, et plus précisément, à éviter la multiplication des cas de policiers municipaux tout juste titularisés et démarchés par d'autres communes.
En effet, « former un policier municipal constitue un investissement, pour la société mais aussi, au premier chef, pour la collectivité qui le recrute et prend en charge sa formation. C'est également un investissement qui ne porte ses fruits que dans la mesure où l'élève devenu professionnel exerce pendant un certain temps ses fonctions, en particulier au profit de la commune (ou de l'intercommunalité) qui a assumé financièrement les conséquences d'un recrutement) ».
Il est à noter que ce dispositif avait été supprimé par le Sénat, durant l'examen en première lecture de la loi « Sécurité globale », au motif que son caractère « excessivement rigide (...) risquait de pénaliser les communes qui peinent déjà à attirer des agents de police municipale (...) alors que les communes disposent déjà de possibilités leur permettant de se voir rembourser la formation exposée pour l'agent128(*) ».
(3) Le bilan mitigé du dispositif d'engagement de servir
Même s'il s'agit d'un mécanisme relativement récent, le bilan du dispositif d'engagement de servir, qualifié de « fausse bonne idée129(*) », apparaît en demi-teinte.
D'une part, peu de collectivités territoriales se sont saisies de cette faculté. Ainsi, en 2023, l'engagement de servir a concerné seulement 10 % des agents formés par le CNFPT, soit 285 agents sur un total de 2 874 agents ayant suivi la formation initiale d'application.
Les dispositions prévues à l'article L. 512-25 du code général de la fonction publique continuent ainsi d'être le plus souvent mises en oeuvre.
D'autre part, le dispositif produit parfois des effets contraires à l'objectif recherché. En effet, selon la DGCL, « dans les zones en tension, l'absence d'engagement de servir dans une collectivité peut être un argument de recrutement ». En définitive, il conviendrait donc d'évaluer ce dispositif et de réfléchir, le cas échéant, à le supprimer pour « revenir au droit commun applicable, sans pénaliser les agents eux-mêmes. [Le dispositif prévu par l'article L. 512-25 du code général de la fonction publique] répond déjà à l'objectif de régulation de la concurrence entre collectivités, en faisant peser le remboursement, non pas sur l'agent, mais sur la collectivité d'accueil ».
* 115 Selon les données du ministère de l'intérieur, la ville Paris employait 1 229 policiers municipaux stricto sensu au 31 décembre 2023.
* 116 Cour des comptes, Rapport public thématique sur les polices municipales, octobre 2020.
* 117 Rapport d'information n° 1544 du 19 juillet 2023 de Lionel Royer-Perreaut et d'Alexandre Vincendet sur les missions et l'attractivité des polices municipales.
* 118 Fédération nationale des centres de gestion de la fonction publique territoriale et Association nationale des directeurs et directeurs-adjoints des centres de gestion de la fonction publique territoriale, « Panorama de l'emploi territorial », 13e édition, 2024.
* 119 737 maires ont répondu à cette question.
* 120 Article L. 313-1 du code général de la fonction publique.
* 121 Article L. 325-38 du code général de la fonction publique.
* 122 Ces données agrègent les résultats communiqués par la Fédération nationale des centres de gestion de la fonction publique territoriale ou publiés en ligne par les CDG et ne sont par conséquent pas exhaustives.
* 123 Un concours de gardien brigadier est organisé chaque année.
* 124 Cour des comptes, Analyse de l'exécution budgétaire 2022, mission « Sécurités », avril 2023.
* 125 Cour des comptes, Rapport public thématique sur les polices municipales, octobre 2020.
* 126 Loi n 2021-646 du 25 mai 2021 pour une sécurité globale préservant les libertés.
* 127 Rapport d'Alice Thourot et de Jean-Michel Fauvergue, « D'un continuum de sécurité vers une sécurité globale », septembre 2018.
* 128 Rapport n° 409 (2020-2021) du 3 mars 2021 de Marc-Philippe Daubresse et Loïc Hervé sur la proposition de loi relative à la sécurité globale.
* 129 Rapport d'Alice Thourot et de Jean-Michel Fauvergue, « D'un continuum de sécurité vers une sécurité globale », septembre 2018.