C. DES BASES FINANCIÈRES ENCORE MAL ASSURÉES
Le bilan de la situation financière des
collectivités du territoire apparaît contrasté.
Le
constat global de bonne santé laisse cependant voir l'émergence
de réelles difficultés qui reflètent tant le poids des
investissements des années passées que celui d'une gestion
manquant souvent de rigueur.
Cependant la fragilité financière de certaines structures
s'alimente aussi à trois sources qui n'ont pas encore été
analysées dans le présent rapport :
- les imprécisions et les lacunes du dispositif budgétaire
prévu par le statut de 1988 ;
- les incohérences des régimes de prêts aux
collectivités locales prévus par la Caisse française de
développement (CFD) ;
- le développement d'un secteur parapublic, notamment de
sociétés d'économie mixte provinciales, échappant
à tout contrôle du fait d'une législation insuffisamment
précise.
1. Un bilan contrasté de la situation financière des collectivités du territoire
a) Les provinces
Les provinces ont diversement absorbé le "choc" de
l'effort d'investissement qui leur a été demandé dans le
cadre du statut de 1988. Il apparaît cependant de plus en plus clairement
qu'aucune des trois ne peut continuer à "maintenir le rythme" des
contrats de développement, comme en témoigne la faiblesse du taux
d'exécution indiqué plus haut (A du présent chapitre).
Si la province Sud présente des références solides en
raison de la concentration de richesses dont elle bénéficie,
l'heure des ajustements a déjà sonné pour les deux autres
collectivités. Le retard pris par la province Nord à les
opérer rend sa situation financière particulièrement
préoccupante.
Dans le détail, la situation de la
province Sud
, seule
collectivité à pouvoir disposer d'une assiette fiscale autonome,
demeure saine bien que le taux des dépenses de personnel reste proche de
50 % des dépenses réelles de fonctionnement.
En 1996, le maintien du budget au niveau antérieur n'a pu se faire que
grâce à un recours accru à l'emprunt et à la
mobilisation de fonds de réserve. La marge en matière d'emprunt,
compte tenu du faible taux d'endettement actuel, demeure certes non
négligeable. En revanche, il n'existe plus désormais de fonds de
réserve disponible. Il faudra donc, pour les années à
venir, envisager de nouvelles diminutions de l'investissement à
défaut d'augmentation des ressources.
Par ailleurs, les engagements de la province, par l'intermédiaire de la
société d'économie mixte Promo Sud, dans la
Société des Hôtels de Nouméa qui exploite
l'hôtel Méridien, pourrait entraîner des difficultés
financières dans l'avenir.
La lecture des comptes administratifs de l'exercice 1994 montrait, dans la
province des Iles Loyauté
, que les dépenses de
fonctionnement semblaient maîtrisées et, en tout état de
cause, progressaient au rythme des recettes. Les frais de personnel
étaient contenus à 44,03 % des dépenses
réelles. Le fonds de roulement théorique était
satisfaisant (41 jours fin 1994) mais l'épargne était faible
(6,03 % des produits) et la capacité d'investissement avait
tendance à diminuer.
Les élus à la tête de la
province des Iles
Loyauté
depuis les dernières élections (juillet 1995)
ont souhaité donner une nouvelle orientation à l'action de leur
collectivité en adoptant un profil de gestion plus compatible avec les
moyens de celle-ci.
Leur action, en raison des nécessités (contraction des dotations
territoriales) et de leur volonté politique s'est traduite en 1996 par
une diminution de près de 13 % du budget par rapport à 1995.
Cependant, la section d'investissement a reculé de 45 % alors que
la section de fonctionnement ne diminuait que de 2,4 %.
La province n'a volontairement pas inscrit les opérations de la tranche
1996 du contrat de développement, privilégiant la
réalisation complète des opérations des tranches annuelles
antérieures.
D'autre part, une remise en cause de certaines situations au sein de la SODIL,
société d'économie mixte dont la province est actionnaire
à près de 80 %, pourrait avoir certaines
répercussions budgétaires importantes à l'avenir.
Plus que les deux autres, la
province Nord
connaît
une
situation incontestablement difficile
, qui fait craindre pour sa
viabilité.
L'augmentation des dépenses de fonctionnement n'a pas été
maîtrisée en 1994 même si les dépenses de personnel
ont été contenues à 46,71 % des dépenses
réelles ; l'épargne est très réduite
(4,64 % des produits de fonctionnement) ; le fonds de roulement est
également faible (17 jours fin 1994) et une vision réaliste,
c'est-à-dire la prise en compte de l'ensemble des impayés, le
rendrait très probablement négatif ; la trésorerie
est chroniquement déficitaire ; enfin, l'investissement
fléchit.
La province Nord a ainsi dû réduire ses dépenses en 1995.
L'exercice a été, en outre, marqué par des
difficultés permanentes de trésorerie, auxquelles il a
été remédié par un emprunt à court terme (le
troisième du genre contracté par cette collectivité)
auprès de la Banque de Financement et de Trésorerie (BFT).
Le volume du budget primitif 1996 est à nouveau en diminution, de
4,82 % par rapport à celui de 1995, lui-même en diminution de
1,04 % par rapport à 1994. La totalité de l'effort à
réaliser est imputé à la section d'investissement
(dépenses en diminution de 26,4 %) alors que les dépenses de
la section de fonctionnement continuent de progresser, à un rythme il
est vrai ralenti (+ 1,24 %).
Outre cette contraction, différents indicateurs montrent une situation
délicate : le prélèvement sur recettes de
fonctionnement est tout juste suffisant pour couvrir le remboursement en
capital de l'emprunt ; les recettes d'emprunt sont réduites, les
capacités dans ce domaine s'amenuisant d'année en
année ; les dépenses de personnel, après une pause en
1995, augmentent en 1996 de 5,59 % en volume et représentent
47,47 % des dépenses réelles de fonctionnement contre
46,51 % en 1995.
La traduction budgétaire du retard dans la réalisation du
contrat de développement est désormais claire. Par ailleurs, la
situation financière réelle de la société
d'économie mixte SOFINOR, et donc ses implications éventuellement
négatives pour l'actionnaire public, demeurent une inconnue.
La Chambre territoriale des comptes de Nouméa a inscrit la province
Nord à son programme et devrait adresser ses premières
observations au début du printemps.