CHAPITRE II -
CRÉONS LES CONDITIONS NATIONALES DU
SUCCÈS
Sauver La Poste, tel est l'objectif !
Au total, les conditions du succès sont au nombre de sept : le
maintien du statut public de l'opérateur ; la définition
d'un service public ambitieux ; le développement d'une conception
innovante du réseau ; l'optimisation de l'aide postale à la
presse ; le fait de conforter les compétences financières de La
Poste ; la juste compensation de ses charges financières, d'une
part, en clarifiant les relations financières entre l'Etat et
l'opérateur et, d'autre part, en recherchant une solution à la
dérive des retraites ; enfin, dans la mobilisation résolue
de La Poste et de ses personnels.
I. LA POSTE DOIT RESTER UN OPÉRATEUR PUBLIC AU SERVICE DU PAYS.
A en croire des échos publiés dans une frange de
la presse d'opinion, le présent rapport n'aurait pour ambition que de
recommander la privatisation de La Poste. Il n'en est rien !
Tant pour la Commission des Affaires économiques que pour le groupe
d'études sur l'avenir de la Poste et des
Télécommunications du Sénat,
La Poste doit conserver
son statut public et les droits de ses personnels ayant la qualité de
fonctionnaires doivent être préservés
.
A. LA PRIVATISATION EST EXCLUE
1. Il n'y a pas de motif de privatisation et il existe beaucoup de raisons au maintien du statut public
A contempler le paysage postal européen, on
s'aperçoit que les processus de privatisation d'un opérateur
historique déjà accomplis ou en voie d'être menés
reposent, soit sur la volonté de remédier à une
qualité de service défaillante, soit sur la préoccupation
de donner à cet opérateur tous les moyens d'adopter un
comportement prioritairement commercial.
Le projet de privatisation d'
Ente Poste
, la poste italienne
relève de la première catégorie de motifs. Songeons
qu'à Rome, pour une lettre postée dans un quartier de la ville
à destination d'un autre quartier, il est fréquent que
l'acheminement prenne dix jours et qu'il n'est pas rare qu'il en
nécessite quinze. A tel point que les touristes avertis, effectuant un
séjour dans la ville éternelle, préfèrent confier
leur courrier à la poste du Vatican, pour qu'il n'arrive pas à
bon port après qu'ils soient rentrés dans leur pays.
La privatisation de KPN, opérateur à l'inverse très
efficace, illustre quant à elle l'autre objectif pouvant être
poursuivi : organiser l'adaptation la plus rapide possible d'une poste
historique à des exigences presque exclusivement commerciales.
Ni l'une ni l'autre de ces hypothèses ne concernent La Poste
française. La qualité des services qu'elle assure est globalement
bonne
145(
*
)
, et l'Etat n'a
jamais eu l'ambition d'en faire un " prédateur " du
repostage
et un destructeur des idéaux de l'Union postale universelle.
En revanche,
il existe de puissantes raisons de conserver à La Poste
son statut d'opérateur public
.
La première d'entre elles est que les Français sont
attachés à une poste publique de service public. On l'a
souligné antérieurement, en France, contrairement à
d'autres pays, on considère le plus souvent que seules des personnes
publiques présentent les garanties suffisantes pour accomplir
correctement des missions d'intérêt
général
146(
*
)
. Les
Français, dans l'ensemble aiment leur poste comme elle est et
n'éprouvent pas le besoin de la changer.
D'autre part, l'Etat ne peut en aucun cas envisager de se dépouiller des
moyens d'action dont il dispose, au travers de La Poste, pour fournir à
la Nation des services qui ne relèvent pas du secteur marchand : aide au
transport et à la distribution de la presse démocratique,
participation à l'aménagement du territoire, accueil financier
des moins favorisés ... Le Président de la République
l'a affirmé clairement : "
La Poste est le coeur du service
public.
".
Alors, peut-on sérieusement imaginer de privatiser " l'aïeule
des services publics de la vie quotidienne "
147(
*
)
? A l'évidence, non ! Et si,
par impossible, d'aucuns en caressaient le projet, ils se heurteraient à
un problème constitutionnel.