b) Garantir aux élus locaux qu'il n'y aura pas de " marché de dupes "
Le présent rapport l'a déjà
souligné : si les élus locaux sont fortement attachés
à la présence postale, c'est qu'ils y voient un symbole de la
considération que leur porte la Nation. C'est aussi très
concrètement -et comment ne pas les comprendre- qu'ils savent ce qu'elle
leur apporte et qu'ils craignent qu'une évolution du réseau
-fut-elle inspirée des meilleures intentions- aboutisse en
définitive à les dépouiller. Leur sensibilité sur
ce point est à vif car, nous l'avons vu, leur confiance dans
l'attachement de La Poste aux territoires fragiles a été
ébranlée par certains des comportements de l'opérateur
public observés notamment avant l'instauration du moratoire. Et, il est
vrai, force est de le constater, que La Poste a parfois procédé,
même ces derniers temps, à des transformations internes de son
réseau de manière autoritaire. Elle n'a pas encore assez
recherché à établir avec eux un dialogue franc et ouvert
pour leur expliquer les enjeux de ces transformations, ni à leur
garantir que leurs principales préoccupations seraient respectées.
C'est pourquoi, il s'agit de restaurer sans attendre cette confiance
ébranlée. Pour ce faire, deux chemins doivent être suivis :
inciter La Poste à donner des gages de la fermeté de son
engagement en faveur des territoires fragiles, par un renforcement de sa
politique de relocalisation et de revalorisation des territoires ;
créer les conditions d'un dialogue transparent et sincère, seul
à même d'enclencher un processus mutuellement profitable à
La Poste et aux élus locaux.
La Poste n'est pas un opérateur centralisé et jacobin. Son
organisation territoriale
188(
*
)
,
l'importance de ses activités dans le tissu économique
local
189(
*
)
, et la
densité de son réseau immobilier
190(
*
)
en sont des preuves manifestes. Sa
politique de relocalisation de certains de ses services en province en est une
autre démonstration : elle a déjà répondu à
l'appel en faveur du territoire, lancé notamment par la loi
" Pasqua " de février 1995. Ainsi qu'en atteste sa
politique de décentralisation de ses activités qui ne sont pas
directement en contact avec la clientèle, ses actes plaident en sa
faveur.
La Poste a, en effet engagé un processus ambitieux de relocalisation de
certains de ses services financiers. Depuis qu'elle s'est avancée dans
cette voie, le transfert de plus de 2.500 emplois parisiens vers la
province a été annoncé ou effectué. Les plus
importants de ces transferts sont centrés sur les régions
orléanaises, nantaises et bordelaises, mais il y a eu aussi près
de 500 emplois créés ou relocalisés au
Mas-Loubier
,
dans la banlieue de Limoges. Et ce n'est pas fini. Entre février et mai
1998, 100 agents de La Poste, dont une cinquantaine venant du centre
d'Orléans-La Source, amèneront avec eux à Limoges 150.000
comptes postaux.
Cette politique de relocalisation est bonne. Mais elle se doit d'être
encore amplifiée et, surtout, davantage " ciblée " sur
les départements comportant le plus grand nombre de zones de
revitalisation rurale
191(
*
)
.
Ainsi qu'a observé, avec une grande justesse de ton et un profond
discernement politique, Mme Janine Bardou, Sénateur de Lozère,
à l'occasion de la communication de votre rapporteur à la
Commission des Affaires économiques le 8 octobre 1997 : "
Des
solutions doivent être envisagées afin de compenser
d'éventuelles fermetures de bureaux de poste par l'implantation d'autres
services de La Poste
", afin d'éviter que les zones rurales ne soient
marginalisées.
L'apaisement des inquiétudes locales qui résulteraient de
la proclamation de cette priorité et de sa mise en oeuvre vigoureuse ne
saurait toutefois suffire.
Dans tous les départements,
et tout particulièrement dans
ceux englobant le plus grand nombre de zones vulnérables,
il
conviendrait d'organiser, dès 1998, des "
tables
rondes
" Poste-élus
auxquelles participeraient :
- les responsables locaux de La Poste et des représentants de sa
Direction générale mandatés à cet effet par son
Président ;
- les représentants des organisations d'élus locaux ;
- les élus nationaux du département qui souhaiteraient y
participer ;
- les fonctionnaires désignés par le représentant de
l'État dans le département pour suivre l'élaboration des
schémas d'organisation et d'amélioration des services publics.
Ces "
tables rondes
" auraient notamment pour objet
de se
mieux connaître, de permettre l'expression des attentes et des
contraintes des uns et des autres, de recenser les besoins postaux locaux, de
déterminer les moyens les plus adaptés à leur satisfaction
-en particulier, du point de vue du développement des services mobiles
de La Poste-, d'examiner l'éventuelle implantation de services postaux
relocalisés ou redéfinis et, au total, de contribuer à
définir le cadre territorial de la loi d'orientation postale
réclamée par le présent rapport.
Ces tables rondes auraient vocation à constituer le socle
démocratique de la redynamisation postale des territoires ruraux.