D. LA PERTINENCE DES INDICATEURS DE LA DURÉE DU TRAVAIL DES SEULS ACTIFS DOIT ÊTRE RELATIVISÉE
La durée hebdomadaire ou annuelle des seuls actifs
occupés reflète mal la
mobilisation des capacités de
travail
d'une Nation. En effet, les indicateurs actuels de la durée
du travail ne tiennent pas compte de la forme extrême de partage du
travail que constitue le chômage. De même, les pays occidentaux se
caractérisent par des écarts de
taux d'activité
(ratio population active/population en âge de travailler)
considérables -de 58 % en Italie à 80 % au Danemark-,
dont les indicateurs habituels de durée du travail ne rendent pas
compte. Pour évaluer la mobilisation des capacités de travail
d'une Nation, il est ainsi souhaitable de combiner les indications fournies par
la proportion de personnes en âge de travailler qui occupent
effectivement un emploi - le "
taux d'emploi
" - et
par leur
durée moyenne de travail (cf. tableau ci-après).
Par ailleurs l'augmentation de l'
espérance de vie
, la tendance
à l'allongement de la formation initiale, à la multiplication
d'itinéraires complexes en fin de vie active et le développement
de dispositifs favorisant à tous les âges des aller-retour entre
activité et non-activité (congé parental
d'éducation, compte épargne temps, congés de longue
durée, formations en alternance), invitent à appréhender
le temps de travail sur l'ensemble du
cycle de vie
. Le calcul et
l'interprétation des indicateurs du temps de travail sur l'ensemble du
cycle de vie sont toutefois extrêmement complexes, en raison des
effets de génération
. Par exemple, les nouveaux
retraités actuels sont le plus souvent entrés très jeunes
dans la vie active, cependant que les jeunes actifs d'aujourd'hui entreront
probablement en retraite à un âge plus avancé que leurs
aînés.
E. LES COMPARAISONS INTERNATIONALES DE LA DURÉE DU TRAVAIL SONT DIFFICILES
Alors que les instituts statistiques nationaux se sont
efforcés d'harmoniser leurs définitions du chômage, du PIB,
etc., il n'existe pas de
définition universelle
de la
durée du travail. Ainsi, les pauses, la formation, les temps syndicaux,
les astreintes, les heures supplémentaires, sont intégrés
de manière divergente dans les indicateurs de la durée du
travail, en fonction le plus souvent des spécificités des droits
du travail nationaux. En outre, les comparaisons internationales peuvent
être biaisées par des divergences de méthodologie
statistiques
44(
*
)
. Au total,
l'OCDE, qui recense des données nationales sur la durée du
travail présentées ci-après, précise que ces
données " visent à effectuer des comparaisons de tendance
dans le temps ; en revanche, à cause de la disparité des sources,
elles ne permettent pas des comparaisons en niveau "
45(
*
)
.
Toutefois, l'Office statistique des Communautés européennes,
EUROSTAT
, conduit des enquêtes sur les conditions de travail de
manière identique dans l'ensemble des pays de l'Union européenne,
et propose ainsi, pour ces pays, des estimations comparables de la durée
du travail, présentées ci-après.
· Par ailleurs, la diversité des durées du travail
observées reflète la diversité des réalités
institutionnelles, économiques et sociales selon des mécanismes
difficiles à appréhender.
Ainsi, la durée effective du travail est susceptible de variations
importantes au cours du
cycle économique
. De même, le
nombre de
congés maladie
déclarés varie dans les
pays de l'OCDE dans une proportion de 1 à 7 en fonction de
l'organisation des systèmes d'assurance maladie, la France se situant
sur ce point dans la moyenne. Enfin, la durée annuelle du travail
reflète très largement le poids relatif des différents
secteurs
dans l'économie
46(
*
)
, la part de
l'emploi
indépendant
47(
*
)
, le
développement de l'
emploi féminin
48(
*
)
, l'inégale diffusion du temps
partiel, le rôle de la formation en alternance, des préretraites
partielles, etc.
Au total, selon qu'on l'effectue sur la semaine, sur l'année ou sur
l'ensemble de la vie active, la comparaison internationale de la durée
du travail aboutit à des diagnostics différents. Il est donc
nécessaire de recourir à l'ensemble des indicateurs du
marché du travail recensés ci-après : taux
d'activité en fonction de l'âge, part de l'emploi à temps
partiel, taux de chômage, dispersion des temps de travail individuel,
temps de travail sur le cycle de vie, etc.