2. Exposé de M. Toomas SAVI, Président du Parlement estonien (Lundi 22 janvier)
" Madame la Présidente, je vous félicite
pour votre élection. Monsieur le Secrétaire
général, Mesdames, Messieurs, les membres de l'Assemblée,
c'est pour moi un plaisir que de m'adresser à l'Assemblée
parlementaire en ma qualité de Président du Parlement estonien.
" L'Estonie continue de voir dans le Conseil de l'Europe l'une des
pierres
angulaires de la démocratie européenne. Les principes
incarnés et défendus par le Conseil -Etat de droit, droits de
l'homme et élections démocratiques- unissent désormais
l'ensemble de l'Europe de la Baltique à la Méditerranée.
Depuis son adhésion au Conseil, il y a trois ans, l'Estonie a fait de
grands progrès dans la suppression des vestiges de l'occupation
soviétique, non seulement en devenant membre d'organisations
internationales et en signant des conventions, mais aussi par sa propre
politique.
" Nos lois sur la résidence et la citoyenneté ont
été élaborées sous les auspices du Conseil de
l'Europe et sont parfaitement conformes au droit international. La
réforme judiciaire fondée sur la primauté du droit est
achevée. Les droits des individus et des minorités sont garantis
par notre Constitution. La meilleure preuve de notre engagement aux principes
du Conseil sera peut-être la présidence estonienne du
Comité des ministres qui débutera en mai. Nous nous
réjouissons de cette tâche exaltante à laquelle nous
voulons nous consacrer, sachant que cette présidence sera l'occasion de
démontrer l'aptitude de l'Estonie à remplir une fonction
dirigeante dans les forums internationaux.
" Le Conseil de l'Europe a largement secondé les efforts
déployés par l'Estonie pour assumer un rôle en Europe. Ses
travaux, ses conseils et son inspiration ont permis à mon pays de
trouver sa juste place aux côtés d'autres Etats européens
imprégnés de traditions démocratiques. Je peux dire avec
fierté que l'Estonie est maintenant l'Etat européen normal
qu'elle avait toujours été.
" Je fais l'éloge des progrès de l'Estonie, mais je dois,
pour être honnête, admettre qu'il subsiste un différend -la
ratification de la Convention européenne des Droits de l'Homme, celle-ci
impliquant l'interdiction de la peine de mort. L'Estonie est une
démocratie et nous devons débattre des problèmes avant de
prendre des décisions. Je peux vous assurer que le débat sur la
peine de mort a commencé. Un projet de loi et un nouveau Code
pénal supprimant la peine de mort vont être soumis au Parlement,
et nous nous efforcerons de ratifier la Convention aussi rapidement que
possible.
" Une grave question va être débattue dans cette institution
démocratique historique, c'est la demande d'adhésion de la
Russie. Certes, nous condamnons les actes terroristes des
Tchétchènes ; mais la méthode russe de
résoudre la crise par des attaques massives d'obus, en justifiant ses
actions par une désinformation et une propagande éhontées,
ne respecte pas la primauté du droit, les droits de l'homme ni la
solution pacifique des conflits. Or, ces valeurs sont
généralement exigées des Etats candidats. En outre, il ne
faut pas oublier que la crise trouve son origine dans l'attaque russe sur la
Tchétchénie en décembre 1994. Elle s'était
caractérisée par la force brutale et un total mépris pour
la vie humaine.
" La communauté des Etats civilisés
représentés au Conseil a réagi à cette attaque par
le gel, durant sept mois, de la demande d'adhésion de la Russie.
" Le Conseil doit agir pour arrêter la perte de vies innocentes, et
pour promouvoir et négocier une solution du conflit.
" L'Estonie sait bien qu'il importe de soutenir une démocratie
russe déclinante. Une Russie démocratique dessert les
intérêts de l'Estonie et de l'Europe. Si la démocratie
surmonte en Russie la crise actuelle -et nous espérons qu'il en sera
ainsi- l'Estonie se réjouira de l'accueillir en qualité de membre
durant sa présidence. Au lieu d'intégrer la CEI, comme le
voudraient de nombreux dirigeants russes, l'Estonie aurait l'occasion de
superviser l'intégration de la Russie au Conseil de l'Europe.
" C'est pour moi un plaisir que de rendre hommage aujourd'hui devant
le
Conseil au Président Miguel Ángel Martínez qui, durant
toutes ces années à la présidence de l'Assemblée
parlementaire, n'a cessé de travailler à la réunification
d'une Europe fondée sur la prééminence du droit, des
droits de l'homme et des élections démocratiques. Ayant pris ses
fonctions en 1992, un an tout juste après l'effondrement de l'Union
Soviétique, M. Martínez était particulièrement
qualifié pour faire retrouver aux Etats concernés le chemin du
bercail européen. Ancien dissident lui-même, il a pu comprendre
l'héritage du totalitarisme et le désir des peuples de rompre
avec le passé. Il a compris aussi les défis que devaient relever
les Etats de l'Europe centrale candidats au Conseil, et il a contribué
à y répondre. Sous la présidence de M. Martínez,
dix-sept pays sont devenus membres du Conseil de l'Europe, dont l'Estonie.
" Les conseils et le soutien dont l'Estonie a
bénéficié de la part de M. Martínez et de
l'Assemblée n'ont pas de prix. Afin de marquer notre gratitude pour sa
contribution au rétablissement de la liberté en Estonie, j'ai
remis, il y a quelques heures à M. Martínez, de la part du
Président estonien, l'Ordre de première classe de l'Etoile
blanche. Mais, j'en suis convaincu, il considérera comme un honneur plus
grand encore de revenir en Estonie pour voir en pleine floraison les semences
de démocratie qu'il a plantées.
" Je vous remercie de votre attention. "