Restructuration de l'industrie aéronautique européenne
COLLIN (Yvon)
RAPPORT D'INFORMATION 414 (98-99) - COMMISSION DES FINANCES
Rapport au format Acrobat ( 719 Ko )Table des matières
-
PREMIERE PARTIE :
DES RAISONS D'AGIR POUR L'UNION -
CHAPITRE PREMIER :
UNE INDUSTRIE EXIGEANTE -
CHAPITRE II :
LE MATCH « EUROPE-ETATS UNIS »- I. DES POSITIONS DE MARCHE SANS COMMUNE MESURE
-
II. DES ACTEURS A L'EFFICACITE INEGALE
- A. DES INDUSTRIES INÉGALEMENT PERFORMANTES
- B. LES ENTREPRISES AMERICAINES SONT MIEUX ARMEES QUE LEURS CONCURRENTES EUROPEENNES
-
DEUXIÈME PARTIE :
LES ILLUSIONS PERDUES ? -
CHAPITRE PREMIER :
DES PROJETS AMBITIEUX-
I. LA TRANSFORMATION DU GIE AIRBUS
- A. LE GIE A CONNU UN SUCCÈS REMARQUABLE
-
B. LES FAIBLESSES DU GIE
- 1. La répartition des rôles dans le consortium avec une dissociation des fonctions commerciales et productives semble induire des difficultés
- 2. Le GIE, une structure de coopération soumise aux défis de la gestion
- 3. Les contraintes d'une extension de la gamme d'activité d'Airbus illustrent les enjeux du changement de statut
- 4. Tentative d'appréciation des avantages attendus de la transformation du GIE en société
- II. LE PROJET DE CONSTITUTION D'UNE ENTREPRISE UNIQUE AÉRONAUTIQUE EN EUROPE
-
I. LA TRANSFORMATION DU GIE AIRBUS
-
CHAPITRE II :
UNE INDUSTRIE FRANCAISE MIEUX STRUCTUREE
- I. LE TRANSFERT DE LA PARTICIPATION DE L'ETAT DANS DASSAULT AVIATION À AÉROSPATIALE, UNE DÉMARCHE INACHEVÉE
- II. LE TRANSFERT DES ACTIVITÉS SATELLITES À THOMSON, UNE OPERATION A LA COHÉRENCE REMISE EN CAUSE
- III. LE RAPPROCHEMENT AÉROSPATIALE - MATRA HAUTES TECHNOLOGIES, UN EVENEMENT MAJEUR
-
CHAPITRE III :
DES PROJETS À RELANCER - CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS
- EXAMEN EN COMMISSION
-
ANNEXE N° 1
INDICATEURS RELATIFS AUX INDUSTRIES AÉRONAUTIQUES DE QUELQUES PAYS EUROPÉENS -
ANNEXE N° 2
FICHES D'IDENTITÉ DES PRINCIPALES ENTREPRISES AÉRONAUTIQUES ET D'ÉLECTRONIQUE OCCIDENTALES -
ANNEXE N° 3
QUELQUES ELEMENTS RELATIFS A LA FUSION
AEROSPATIALE-MHT 3434 Source : Crédit Lyonnais Securities Europe -
ANNEXE N° 4
QUESTIONNAIRE ADRESSÉ À M. LE MINISTRE DE L'ÉCONOMIE ET DES FINANCES LE 18 MARS 1999 ET RESTÉ SANS RÉPONSE A LA DATE DU 9 JUIN 1999 -
ANNEXE N° 5
QUELQUES DONNÉES RELATIVES À L'ADMINISTRATION BRITANNIQUE ET AU SOUTIEN PUBLIC.
LA SUPRÉMATIE DES QUESTIONS DE DÉFENSE -
ANNEXE N° 6
PROGRAMME DE TRAVAIL DU RAPPORTEUR
N°
414
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1998-1999
Annexe au procès-verbal de la séance du 9 juin 1999
RAPPORT D'INFORMATION
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur la restructuration de l'industrie aéronautique européenne,
Par M.
Yvon COLLIN,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet, vice-présidents ; Jacques-Richard Delong, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri Torre, René Trégouët.
Industrie aéronautique. |
AVANT-PROPOS
Le
présent rapport exhorte, comme l'indique assez son titre, à
l'union des forces aéronautiques en Europe.
Cet appel n'est certes pas une nouveauté. Un précédent
rapport
1(
*
)
en juin 1997, en avait
déjà fourni l'occasion. Quelques mois plus tard, en
décembre de la même année, les gouvernements
lancèrent une même initiative.
Depuis, si les acteurs du théâtre se sont rapprochés de
l'objectif assigné par les gouvernements, celui-ci est loin d'être
atteint.
On doit même déplorer certains atermoiements, certaines
initiatives aussi, au terme desquels la perspective d'une union de l'industrie
aéronautique de l'Europe se trouve compromise.
Et pourtant, cet objectif doit rester une vraie priorité. Sans union,
les positions acquises par les industriels européens ne pourront
être enrichies et risqueront d'être rognées. Sans union le
coût de l'industrie aéronautique pour les finances publiques
nationales continuera d'être excessivement et inutilement
élevé. Sans union, l'ambition d'une capacité
aéronautique européenne autonome sera définitivement
ruinée.
L'urgence d'une intégration poussée de l'industrie
aéronautique européenne a pu être masquée par des
événements exceptionnels. Une certaine désinvolture au
regard des exigences de bonne gestion des deniers publics a par exemple pu
contribuer à celer des enjeux financiers d'importance.
Une incapacité certaine à bâtir une Europe-puissance a
trouvé un alibi facile dans la considération toujours sensible et
donc toujours invoquée d'intérêts nationaux qui n'ont
souvent pas plus de prolongements ni de réalité que ceux,
purement matériels, des entreprises concernées.
Rien de tout cela ne peut ni ne doit aujourd'hui subsister qu'au risque
très grave de miner une industrie source de prospérité
économique et d'acquis technologiques mais aussi, il faut y insister,
condition de puissance politique.
Les gouvernements doivent, une fois pour toutes, mettre en accord leurs
décisions avec leurs intentions. Cela suppose d'abord de prendre
celles-ci au sérieux, ensuite d'arrêter et d'appliquer
celles-là avec la fermeté qui s'impose.
Alors, le défi de l'union pourra être relevé avec
succès.
PREMIERE PARTIE :
DES RAISONS D'AGIR POUR L'UNION
La
politique industrielle est passée de mode, prétend-on souvent.
Le marché imposerait naturellement, avec efficacité, les choix
nécessairement avisés à ses principaux acteurs que sont
les entreprises.
Ce rapport ne se veut certes pas une dissertation philosophique portant sur les
vertus associées à tel ou tel choix dans la gamme des
systèmes alternatifs d'organisation économique.
Il prétend se situer dans la dimension du réel et, se nourrissant
de considérations très pratiques, reposant sur des faits concrets
ou encore des témoignages d'acteurs, aboutir à des
recommandations et plus encore peut-être à des observations
fécondes.
A cet effet, cette première partie veut rendre compte, à partir
d'éléments nécessairement partiels de la richesse d'une
industrie qui est autant faite de ses perspectives, des enjeux qui s'attachent
à sa maîtrise que des contradictions qu'elle affronte et des
risques qui l'entourent (Chapitre 1
er
). L'industrie
aéronautique est impitoyable pour les faibles.
C'est ce constat qui conduit alors à s'interroger sur le rapport des
forces en présence (Chapitre II). Au terme d'un examen que l'on
veut nuancé, un déséquilibre apparaît au
détriment de l'industrie européenne, ou plutôt des
industriels européens, et au bénéfice de l'industrie
américaine.
En bref, nos moyens actuels ne sont pas à la hauteur des enjeux. C'est
là que se situent les raisons d'agir pour l'union.
CHAPITRE PREMIER :
UNE INDUSTRIE EXIGEANTE
L'industrie aéronautique occupe une place de choix dans
le
paysage industriel mondial. Elle représente un pôle important de
l'activité économique et exerce en particulier, à ce
titre, une fonction intégratrice majeure ; elle est le type
même de l'industrie « mondialisée »
c'est à dire avant tout d'une industrie soumise à des contraintes
contradictoires ; elle est aussi au carrefour d'enjeux essentiels de
puissance politique.
C'est aussi, une industrie exigeante ce dont témoigne assez
l'émergence d'une sorte de « duopole ».
I. UNE INDUSTRIE STRATÉGIQUE
L'industrie aéronautique recèle des enjeux stratégiques par la place qu'elle occupe dans l'économie mais aussi sous l'angle géostratégique.
A. UN PÔLE ESSENTIEL DE L'ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE
1. Un chiffre d'affaires en expansion
Comme on
y insistera plus loin, les contours de l'industrie aéronautique sont
flous. Aussi ne doit-on pas accorder une précision qu'elles n'ont pas
aux données statistiques usuellement avancées pour rendre compte
de son importance économique. Il serait utile d'ailleurs pour mieux
cerner celle-ci d'approfondir nos connaissances économiques d'un secteur
industriel dont on ne peut aujourd'hui qu'évoquer faute de mieux le
caractère structurant pour toute une série d'activités
industrielles ou de service qui y sont associées.
Selon les données du rapport 1997-1998 du groupement des industries
françaises aéronautiques et spatiales (GIFAS),
le chiffre
d'affaires du secteur dans les seuls quatre grands pays occidentaux
particulièrement concernés s'est élevé en 1997
à 159,9 milliards d'écus, soit sur la base du cours moyen de
l'écu contre franc en 1997, à 1.056,9 milliards de francs.
Chiffres
d'affaires des principales industries
aéronautiques et spatiales
occidentales en 1997
(en millions d'écus)
|
France |
Allemagne |
Grande-Bretagne |
Etats-Unis |
CA (1) total non consolidé |
19.947 |
10.819 |
21.748 |
|
CA (1) total consolidé |
16.744 |
9.566 |
19.331 |
114.305 |
CA (1) exportation |
11.743 |
6.327 |
16.277 |
44.356 |
(1) CA : Chiffre d'affaires Source : AECMA, AIA
Il est
à noter que ces chiffres, déjà impressionnants, excluent
le chiffre d'affaires des industriels asiatiques et, en Europe, de pays
à tradition aéronautique forte comme l'Espagne, l'Italie ou la
Suède.
En Europe même, la décomposition du chiffre d'affaires
était la suivante en 1995 :
Grande-Bretagne |
35,3 % |
France |
30,4 % |
Allemagne |
14,6 % |
Italie |
8,5 % |
Suède |
3,8 % |
Espagne |
2,6 % |
Autres |
4,8 % |
La
taille actuelle du chiffre d'affaires de l'industrie aéronautique
provient d'une croissance soutenue de ses marchés
. Dans les
années 80, la croissance annuelle moyenne du chiffre d'affaires
consolidé de l'industrie européenne s'est ainsi
élevée à 5,3 % en volume. Si cette croissance s'est
significativement ralentie au début des années 1990, une nouvelle
accélération s'est produite depuis et les perspectives du
marché des appareils commerciaux notamment - v.infra - sont la promesse
d'un essor de l'activité.
Pour la France seule, la construction aéronautique représente
environ 4 % de la production industrielle totale et de l'ordre de 2 % du
produit intérieur brut marchand
soit une valeur ajoutée en
volume de 67 milliards sur un total de 3246 milliards de francs en 1997.
Comme le montre le tableau ci-dessous, l'évolution de la production de
la branche s'est orientée en France comme dans le reste du monde.
Evolution de la production de la branche construction aéronautique
Année |
En milliards de francs courants |
En milliards de francs constants 1980 |
1980 |
40,6 |
40,6 |
1990 |
122,8 |
65,3 |
1995 |
127,8 |
65,5 |
1996 |
140,4 |
70,9 |
1997 |
152,2 |
72,2 |
Source : Annuaire statistique de la Défense -
Décembre 1998
Après une progression soutenue dans les années 80, à un
rythme annuel moyen proche de 5 % en volume, le début des années
90 a connu une stagnation puis une vive reprise depuis 1995.
Cette analyse est corroborée par des chiffres qui, de source et de
champs différents
2(
*
)
, traduisent les
mêmes inflexions.
Evolution du chiffre d'affaires consolidé de
l'industrie
aéronautique française
de 1988 à 1997
(en millions de francs)
|
1988 |
1989 |
1990 |
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
Francs courants |
83.379 |
93.174 |
100.893 |
102.909 |
103.357 |
90.315 |
88.589 |
84.022 |
88.940 |
110.725 |
Francs constants 1997* |
98.971 |
107.150 |
112.697 |
111.245 |
109.662 |
93.747 |
90.627 |
84.862 |
88.940 |
110.725 |
% évolution annuelle en FF courants |
10,5 % |
11,7 % |
8,3 % |
2,0 % |
0,4 % |
- 12,6 % |
- 1,9 % |
- 5,2 % |
5,9 % |
24,5 % |
*
L'indice INSEE des prix du produit intérieur brut marchant figurant dans
les comptes de la Nation 1997 a été utilisé
Source : GIFAS Rapport d'activités 1997/98
2. Commandes civiles et militaires, des marchés qui s'équilibrent
Ces
évolutions ne sont que le reflet des dynamiques contrastées des
ressorts de l'activité dans ce secteur. Deux grandes sources de chiffre
d'affaires peuvent y être identifiées, les marchés civils,
les commandes militaires.
« Grosso modo », ces deux sources sont responsables
moitié-moitié de l'activité du secteur, une certaine
prédominance des commandes militaires subsistant sans doute.
Répartition du chiffre d'affaires de l'industrie aéronautique et spatiale
(en %)
|
1980 |
1990 |
1995 |
|||
|
Europe |
États-Unis |
Europe |
États-Unis |
Europe |
États-Unis |
Chiffre d'affaires militaire |
70,3 |
54,5 |
52,7 |
61,0 |
46,8 |
55,7 |
Chiffre d'affaires civil |
29,7 |
45,5 |
47,3 |
39,0 |
53,2 |
44,3 |
TOTAL |
100 |
100 |
100 |
100 |
100 |
100 |
Cependant, le déclin de la partie militaire du
chiffre
d'affaires du secteur et l'expansion des marchés commerciaux sont les
deux tendances notables marquant l'environnement de l'industrie
aéronautique.
Le déclin de la part militaire de l'activité est pour une part
importante, le résultat d'une diminution des budgets militaires
d'équipement aux Etats-Unis et en Europe.
Aux Etats-Unis, les ventes de produits et services aérospatiaux au
ministère de la Défense - DOD - ont été
considérablement réduites.
Ventes de l'industrie aérospatiale américaine au
Ministère de la Défense
Année |
Produits aérospatiaux et services
|
1990 |
60,5 |
1991 |
56,6 |
1992 |
52,2 |
1993 |
46,4 |
1994 |
44 |
1995 |
41,9 |
1996 |
39,1 |
Si,
depuis, une réelle reprise de ces ventes a pu être
enregistrée, la part des commandes du Pentagone dans le chiffre
d'affaires du secteur s'est nettement repliée, passant de 45 % du total
en 1990 à moins de 35 % en 1996.
Ce processus ne doit cependant pas masquer le niveau élevé des
commandes militaires aux Etats-Unis qui, en 1999, est remonté à
49 milliards de dollars, soit avec quelques 318 milliards de francs bien
davantage que l'ensemble du budget de la Défense français et plus
de 16 fois le budget national d'équipement de l'armée de
l'air
.
La disproportion des moyens publics susceptibles d'alimenter la base
industrielle nationale aux Etats-Unis et en Europe respectivement, est
d'ailleurs renforcée par les concentrations industrielles intervenues
aux Etats-Unis au terme desquelles les crédits militaires
américains sont désormais destinés à un nombre
restreint de contractants.
Évolution du nombre de maîtres d'oeuvre par secteur
Produits |
Ampleur du nombre de contractants |
Situation en 1990 |
Situation en 1998 |
Missiles tactiques |
de 13 à 4 |
Boeing |
Boeing |
|
|
Ford Aérospace |
Lockheed Martin |
|
|
General Dynamics |
Northrop Grumman |
|
|
Hughes |
Raytheon |
|
|
Lockheed |
|
|
|
Loral |
|
|
|
LTV |
|
|
|
Martin Marietta |
|
|
|
Northrop |
|
|
|
Raytheaon |
|
|
|
Rockwell |
|
|
|
Texas Instrument |
|
Avions |
de 8 à 3 |
Boeing |
Boeing |
|
|
Ford Aérospace |
Lockheed Martin |
|
|
General Dynamics |
Northrop Grumman |
|
|
Grummann |
|
|
|
Lockheed |
|
|
|
Loral |
|
|
|
LTV - Aircraft |
|
|
|
Martin Marietta |
|
|
|
Mc Donnell Douglas |
|
|
|
Northrop |
|
|
|
Rockwell |
|
Lanceurs |
de 6 à 2 |
Boeing |
Boeing |
|
|
General Dynamics |
Lockheed Martin |
|
|
Grummann |
|
|
|
Lockheed |
|
|
|
LTV - Aircraft |
|
|
|
Mc Donnell Douglas |
|
|
|
Rockwell |
|
Satellites |
de 8 à 5 |
Boeing |
Boeing |
|
|
General Electric |
Lockheed Martin |
|
|
Hugues |
Hugues |
|
|
Lockheed |
Loral Space Systems |
|
|
Loral |
TRW |
|
|
Martin Marietta |
|
|
|
TRW |
|
|
|
Rockwell |
|
Missiles stratégiques |
3 à 2 |
Boeing |
Boeing |
|
|
Lockheed |
Lockheed Martin |
|
|
Martin Marietta |
|
Hélicoptères |
de 4 à 3 |
Bell Helicopters |
Bell Helicopters |
|
|
Boeing |
Boeing |
|
|
Mc Donnell Douglas |
Sikorsky |
|
|
Sikorsky |
|
Source : document GAO/NSLAD-98-141-mis à
jour
Enfin, le maintien d'un important effort de soutien à la recherche -
développement de la part du DOD doit être souligné
.
Ainsi, le budget du ministère est doté en 1999 de 36,6 milliards
de dollars de crédits à ce titre (238 milliards de francs)
alors même qu'un certain nombre de programmes structurants ont acquis une
maturité telle que les soutiens dont ils bénéficient
peuvent maintenant diminuer. C'est en particulier le cas pour le J.S.F (Joint
Strike Fighter) pour lequel l'achèvement de la phase de
prédéveloppement et de démonstration permet
désormais une réduction des crédits qui passent de
923 millions de dollars en 1998 à 478,6 millions de dollars en
1999 (3,1 milliards de francs) ou encore pour le F18 Super Hornet
désormais en phase de production.
La diminution des crédits de défense a sans doute
été globalement moins accusée en Europe comme le montrent
les deux tableaux ci-après
.
Evolution en valeur des budgets de la défense (hors pensions)
(en milliards de francs courants *)
Année |
France |
Allemagne |
Royaume-Uni |
Espagne |
Italie |
Etats-Unis |
1990 |
189,4 |
170,5 |
229,4 |
52,5 |
103,3 |
1.871,2 |
1991 |
194,5 |
163,3 |
234,9 |
50,5 |
103,8 |
1.672,3 |
1992 |
195,3 |
162,1 |
228,9 |
44,0 |
101,8 |
1.801,9 |
1993 |
198,0 |
153,9 |
241,6 |
42,5 |
102,2 |
1.826,8 |
1994 |
193,8 |
150,9 |
230,8 |
44,1 |
104,4 |
1.783,2 |
1995 |
194,3 |
152,2 |
212,6 |
45,9 |
100,4 |
1.720,8 |
1996 |
189,6 |
151,6 |
207,6 |
45,0 |
118,5 |
1.672,7 |
1997 |
190,9 |
149,2 |
202,0 |
44,1 |
115,8 |
1.687,2 |
Source : Annuaire statistique de la Défense. Décembre 1998
Evolution de la part des dépenses de défense
(hors
pensions)
dans le produit intérieur brut
Année |
France |
Allemagne |
Royaume-Uni |
Espagne |
Italie |
Etats-Unis |
1990 |
2,91 % |
2,22 % |
3,80 % |
1,73 % |
1,69 % |
5,16 % |
1991 |
2,87 % |
1,84 % |
4,00 % |
1,56 % |
1,64 % |
4,53 % |
1992 |
2,79 % |
1,69 % |
3,65 % |
1,33 % |
1,54 % |
4,76 % |
1993 |
2,80 % |
1,56 % |
3,73 % |
1,24 % |
1,54 % |
4,44 % |
1994 |
2,62 % |
1,42 % |
3,38 % |
1,25 % |
1,48 % |
4,05 % |
1995 |
2,54 % |
1,38 % |
3,08 % |
1,24 % |
1,36 % |
3,74 % |
1996 |
2,41 % |
1,34 % |
2,91 % |
1,17 % |
1,57 % |
3,50 % |
1997 |
2,36 % |
1,27 % |
2,73 % |
1,10 % |
1,50 % |
3,38 % |
Source : Annuaire statistique de la Défense.
Décembre 1998
Mais, le niveau de départ étant sans commune mesure avec celui
observé aux Etats-Unis et les dépenses d'équipement
étant essaimées du fait de la dispersion des industriels
européens de la défense le point d'arrivée est tel que la
diminution des crédits y revêt un impact marginal très
significatif.
Ainsi, la réduction des dépenses en capital de l'armée de
l'air en France s'est traduite par une diminution sensible du chiffre
d'affaires des industriels concernés. Le niveau des dépenses
d'équipement militaire de l'armée de l'air n'atteignant plus en
1998 qu'un peu plus des ¾ du niveau atteint 8 ans plus tôt.
Evolution des dépenses en capital de l'armée de
l'air
et du budget de la défense.
(En milliers de francs)
Année |
Air |
Total |
1987 |
21.753 |
85.810 |
1988 |
22.140 |
90.847 |
1989 |
24.138 |
98.000 |
1990 |
25.036 |
102.100 |
1991 |
25.334 |
103.148 |
1992 |
25.206 |
102.934 |
1993 |
25.680 |
102.940 |
1994 |
23.062 |
94.916 |
1995 |
22.721 |
94.939 |
1996 |
21.092 |
88.948 |
1997 |
21.624 |
88.705 |
1998 |
19.162 |
81.003 |
Source : Annuaire statistique de la Défense.
Décembre 1998
Ce déclin de la demande militaire pourrait, selon les analystes
être endigué du fait des besoins de renouvellement des
équipements qu'il a, lui-même, générés ainsi
que de l'arrivée à maturité de nouveaux programmes. Cette
perspective entrainerait une certaine remontée du niveau de
l'activité des industriels venant des commandes militaires dont seuls
les industriels capables de développer une offre dans ce secteur seront
à même de tirer profit
En contrepartie de la réduction des budgets militaires du monde
occidental l'essor des marchés commerciaux ouverts à l'industrie
aéronautique a permis de soutenir une activité qui, globalement,
a connu le développement soutenu mentionné plus haut.
Après un déclin au début des années 90, le
marché
des appareils
commerciaux
s'est depuis
montré dynamique.
Commandes mondiales d'appareils commerciaux entre 1994 et 1997
|
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
Nombre |
273 |
631 |
1.092 |
1.054 |
Source : World Jet Inventory Year-End 1997, Jet
Information
Services 1998.
Sur la longue période, entre 1952 et 1997, 15 803 appareils auront
été livrés générant un chiffre d'affaires de
809 milliards de dollars (5 259 milliards de francs).
Les livraisons d'appareils commerciaux entre 1952 et 1997
(En milliards de dollars)
Catégories |
Modèles |
Milliards de dollars 1997 |
% |
Nombre |
% |
Couloir unique |
|
|
|
|
|
50-90 |
RJ 145
|
23,2 |
2,9 |
1.072 |
6,8 |
91-120 |
727-100
|
98,1 |
12,1 |
3.916 |
24,8 |
121-170 |
727-200
|
189,7 |
23,5 |
5.050 |
31,9 |
171-240 |
757
|
107,5 |
13,3 |
2.062 |
13,0 |
Intermédiaires |
|
|
|
|
|
230-310
|
767
|
118,2 |
14,6 |
1.403 |
8,9 |
311-399
|
L-1011-1
|
122,4 |
15,1 |
1.164 |
7,4 |
Gros porteurs |
|
|
|
|
|
S400 |
747 |
149,6 |
18,5 |
1.136 |
7,2 |
Total |
|
808,7 |
100 |
15.803 |
100 |
Les autres segments de l'activité commerciale : spatial, hélicoptères, moteurs... ont également connu une forte expansion dont témoigne l'évolution récente des commandes civiles globales adressées à l'industrie française.
Evolution des commandes civiles adressées à l'industrie française entre 1993 et 1997
(en millions de francs courants
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
1997 |
38.234,7 |
44.633,6 |
62.566,8 |
81.611,1 |
106.456,7 |
Source : GIFAS - Rapport 1997-1998
Ainsi, même si à court terme une inflexion des commandes commerciales devrait survenir conforme à la cyclicité d'une part importante de ce type de demande (v.infra), l'industrie aéronautique devrait continuer à bénéficier d'un ressort devenu de plus en plus déterminant pour elle.
3. Une industrie de main d'oeuvre
L'industrie aéronautique a sans doute connu une nette
diminution de ses effectifs. Entre 1980 et 1995, ils sont passés, dans
l'ensemble constitué de l'Europe, des Etats-Unis, du Canada et du Japon
de 1.381.487 à 1.023.600 unités, soit une baisse de l'ordre de
358.000, ou près de 25 % de la situation de départ.
Cette réduction, de date à date, a principalement touché
les Etats-Unis où les effectifs se sont contractés entre 1980 et
1995 de 250 000 personnes.
Ces données ne doivent cependant pas être
considérées comme significatives d'une tendance lourde au terme
de laquelle l'industrie aéronautique serait fortement destructrice
d'emplois.
En réalité, la moyenne des effectifs occupés a beaucoup
moins varié que ce qu'indiquent des comparaisons en glissement.
Celles-ci enregistrent en effet les variations cycliques de l'activité
qui génèrent des évolutions fortes d'effectifs du fait de
la flexibilité à l'oeuvre chez certains industriels, tout
particulièrement américains. L'évolution de l'emploi
aéronautique aux Etats-Unis respectivement entre 1980 et 1990 et depuis
illustre spectaculairement les effets de cette flexibilité.
Le niveau des emplois atteignait, en 1990, 946 000 personnes, soit 116 000 de
plus qu'en 1980 ; il n'était plus en 1995 que de 580 000, soit 250
000 de moins qu'en 1980 et même une perte de 366 000 par rapport à
1990.
Ces à coups, nettement moins accusés en Europe en moyenne,
n'empêchent pas l'industrie aéronautique d'être,
malgré les progrès technologiques, une industrie de main d'oeuvre.
Effectifs des principales industries aéronautiques et spatiales occidentales en 1997
|
France |
Allemagne |
Grande-Bretagne |
Etats-Unis |
Grands systémiers |
46.900 |
38.076 |
44.745 |
358.600 |
Motoristes |
20.900 |
8.534 |
29.501 |
100.600 |
Equipementiers |
27.500 |
16.404 |
46.845 |
139.400 |
Total |
95.300 |
63.014 |
121.091 |
598.600 (1) |
(1)
Autres + 270.000 = 868.600
Source : GIFAS - Rapport 1997-1998
Ils
témoignent plutôt des enjeux qui s'attachent pour chaque
entreprise et chaque pays à accroître ses parts d'un marché
fluctuant pour sauvegarder et développer l'emploi.
Cette ambition se justifie encore par les qualifications exigées par un
travail hautement spécialisé.
Effectifs de l'industrie aéronautique française (1)
|
|
1990 |
1996 |
1997 |
|||
|
Ingénieurs et cadres |
26.700 |
22,1 % |
25.000 |
26 % |
25.200 |
26,4 % |
|
Techniciens, dessinateurs, agents de maîtrise |
|
|
|
|
|
|
|
Employés |
16.300 |
13,5 % |
12.500 |
13 % |
12.200 |
12,8 % |
|
Ouvriers |
35.600 |
29,5 % |
23.900 |
25 % |
24.100 |
25,3 % |
|
Total |
120.700 |
100 % |
96.000 |
100 % |
95.300 |
100 % |
|
Grands systémiers |
57.000 |
47,2 % |
47.900 |
49,9 % |
46.900 |
49,2 % |
d'activités |
Motoristes |
27.800 |
23 % |
21.500 |
22,4 % |
20.900 |
21,9 % |
|
Equipementiers |
35.900 |
29,8 % |
26.600 |
27,7 % |
27.500 |
28,9 % |
(1)
95.300 salariés inscrits au 31 décembre 1997
(- 0,7 %), 92.000 emplois en équivalents temps plein.
Source : GIFAS Rapport 1997-1998
Cette caractéristique de l'emploi aéronautique rend, en effet,
beaucoup plus lourds de conséquences à la fois pour les
personnels et pour les entreprises les ajustements que peut nécessiter
la marche des affaires. Pour les premiers, ils peuvent s'accompagner d'une
déqualification qui, à son tour, est susceptible de menacer les
secondes d'une perte de substance difficilement recouvrable.
4. Une industrie génératrice d'excédents commerciaux extérieurs
L'industrie aéronautique est fortement
dépendante de
l'extérieur - v.infra.
Cette dépendance qui peut être un handicap est aussi une chance.
Pour les pays dotés d'une industrie aéronautique puissante, c'est
le gage d'excédents commerciaux dont on connaît toute
l'utilité macro-économique et monétaire.
La puissance exportatrice de l'industrie aéronautique se traduit par
quelques données bien connues. Boeing est le premier exportateur
américain, l'Eximbank chargée de financer le commerce
extérieur américain étant à ce titre usuellement
dénommée la « Boeing Bank « ; les
économistes ont pris l'habitude pour apprécier l'allure du
commerce extérieur français de manier le concept des
« exportations hors - Airbus » tant le poids des ventes de
la firme est important.
En France, les exportations de la branche aéronautique se sont de fait
considérablement développées.
Exportations de la branche construction aéronautique
En millions de francs
Année |
S 33 |
1980 |
20.914 |
1990 |
34.856 |
1995 |
38.445 |
1996 |
35.961 |
1997 |
45.857 |
Source : Annuaire statistique de la défense -
décembre 1998
Ces exportations dynamiques sensiblement plus importantes que les importations
permettent de dégager des excédents commerciaux structurels
considérables.
Balance commerciale de la profession
(en millions de francs courants)
|
1988 |
1991 |
1994 |
1997 |
Exportations |
49.386 |
54.976 |
47.903 |
77.651 |
Importations des constructeurs |
7.714 |
11.401 |
9.556 |
16.852 |
Solde des constructeurs (Exports - imports) 3( * ) |
41.672 |
43.579 |
38.347 |
60.799 |
Solde des utilisateurs nationaux (Exports - imports 4( * ) |
- 7.455 |
-14.185 |
- 6.602 |
- 11.675 |
Solde aéronautique et spatial |
34.217 |
29.390 |
31.745 |
49.124 |
5. Une industrie de hautes technologies
L'industrie aéronautique est une activité
à
très fort contenu technologique.
La gamme des technologies à maîtriser y est
particulièrement étendue, ce qui a des effets
d'entraînement essentiels pour une large série de techniques et
d'industries qui en dépendent.
La maîtrise technologique y revêt une importance commerciale encore
grande dès lors qu'elle permet aux clients d'assurer une meilleure
exploitation, en particulier en réduisant les coûts par passager.
Elle est même susceptible d'être décisive comme l'a
démontré la percée commerciale d'Airbus, largement
expliquée par l'introduction des commandes électriques ou comme
pourrait l'établir la capacité démontrée de faire
voler de très gros porteurs.
Mais la maîtrise technologique y est aussi essentiel en raison de ses
aspects stratégiques lorsqu'il s'agit d'assurer une capacité
nationale autonome comme en matière de défense ou de
télécommunications.
Le niveau technologique élevé de cette activité
industrielle suppose des investissements importants.
Pour la France seule, le tableau ci-après rend compte de l'effort
nécessaire.
Dépenses d'études, recherche et développement
|
1990 |
1993 |
1995 |
1996 |
1997 |
Chiffre d'affaires |
118.553 |
109.484 |
101.116 |
109.040 |
131.902 |
Recherche et développement totale |
28.869 |
33.287 |
26.692 |
24.879 |
23.988 |
dont recherche et développement autofinancée |
8.150 |
10.109 |
9.963 |
8.571 |
9.717 |
Part de la recherche et développement dans le chiffre d'affaires total |
24,4 % |
30,4 % |
26,4 % |
22,8 % |
18,2 % |
Source : GIFAS. Rapport annuel 1997/1998
B. UNE INDUSTRIE AU CoeUR DE LA GLOBALISATION
L'industrie aéronautique n'est plus, depuis longtemps,
l'industrie d'un seul métier. La diversification de son offre s'est
assise sur l'élargissement et l'approfondissement de ses savoir-faire
qui l'a conduite à annexer une série d'activités
dépassant largement son corps de métier initial. Elle a
exercé une force intégratrice majeure.
Cette globalisation des activités s'est accompagnée d'une
globalisation de l'environnement dans lequel les entreprises du secteur
évoluent. Sous certaines réserves importantes, l'industrie
aéronautique est devenue l'archétype de la mondialisation. Cela
ne va pas sans susciter des contraintes et sans créer quelques
contradictions à l'intensité plus importante pour les
européens que pour les Etats-Unis.
1. Une fonction intégratrice majeure qui doit être disciplinée
Au cours
de sa, finalement, assez courte histoire, l'industrie aéronautique a
connu une double évolution contradictoire faite, d'une part, d'une
extériorisation de certaines tâches correspondant à la
production d'éléments simples autrefois assumées par les
avionneurs et, d'autre part, de l'agrégation d'une série de
métiers proches de ceux exercés par ces mêmes avionneurs
soit du fait d'un cousinage entre les techniques mobilisées (les
missiles ou lanceurs...) soit à cause de l'apport des produits
concernés aux plates-formes conçues et développées
par les avionneurs (missiles, systèmes d'armes, électronique...).
Il est donc relativement malaisé de dessiner les frontières
précises de l' industrie aéronautique qui, de fait, a
montré sa vocation à englober une gamme de métiers fort
étendue.
Dans cette industrie élargie, la position des acteurs peut être
présentée à partir de points de vue multiples, la
distinction traditionnelle entre avionneurs et équipementiers pouvant
laisser place à un panorama plus diffus d'entreprises diversement
concernées par les activités d'un spectre à la fois plus
large et moins nettement articulé.
On peut, semble-t-il, raisonner sur l'idée que les industriels du
secteur ont vocation à exercer au moins les douze métiers
suivants :
Avions commerciaux
Avions d'affaires
Avions combat
Avions militaires (hors combat)
Hélicoptères
Missiles tactiques
Missiles balistiques
Missiles air air
Lanceurs spatiaux
Satellites
Infrastructures spatiales
Electronique
Cette vocation ne signifie évidemment pas que pour exister les
industriels du secteur doivent exercer effectivement tous ces métiers
pour exister mais, au moins, qu'ils ont tendance à élargir leur
offre à l'ensemble de ces produits et services.
Dans les faits, cette perspective oppose cependant au moins deux
visions-opposition qu'il importe de présenter brièvement ici- on
y revient plus loin - compte tenu de son impact sur le processus
d'intégration européenne.
Celle selon laquelle des
concentrations verticales
s'imposent,
stratégie qui reste assez minoritaire dans le monde aéronautique
et ne paraît guère privilégiée que par l'industrie
britannique. Celle, au contraire, selon laquelle les seules
concentrations
horizontales
ont un sens technique et économique.
On observera d'emblée que cette dernière conception qui restreint
le domaine d'intervention des entreprises de l'aéronautique n'entame
pourtant pas vraiment son rôle intégrateur. Les concentrations de
nature horizontale sont susceptibles d'englober tous les métiers
cités ci-dessus excepté l'électronique. De plus, elle
laisse à l'industrie aéronautique son influence de donneuse
d'ordres ou comme productrice des supports nécessaires au
développement d'une vaste gamme d'activités qui en
dépendent et, en particulier, de l'ensemble très innovant et
protéiforme des télécommunications.
La question de l'opportunité des concentrations verticales semble
résolue, en pratique, par une certaine aversion des industriels mais
aussi des pouvoirs publics concernés par les perspectives qui s'y
attachent.
Les concentrations les plus dynamiques ont en effet consisté à
unir les forces consacrées à des métiers semblables
plutôt qu'à intégrer des actifs dédiés
à des produits connexes mais différents de nature
. Les
quelques exceptions observées ont concerné, soit des entreprises
relativement marginalisées dans chacun des grands métiers du
secteur par rapport à leurs concurrents (tentavive Lockheed -
Martin/Northrop - Grummann),
5(
*
)
soit des
opérations dont la justification industrielle ou commerciale a pu
être mise en doute (fusion BAe - GEC Marconi - v. infra).
C'est ce doute et des considérations fortes de maintien des conditions
de concurrence, lorsque les aspects horizontaux et verticaux des fusions
étaient susceptibles de se cumuler, qui expliquent
l'aversion des
pouvoirs publics devant les regroupements verticaux.
Celle-ci s'est
manifestée spectaculairement aux États-Unis avec les
réticences du DOD face à l'opération Lockheed Matin /
Northrop - Grummann. Mais, elle a également marqué de son
empreinte, - avec plus que des nuances au Royaume-Uni (v. infra) -, la
démarche des pouvoirs publics européens. Ceux-ci qui n'avaient
pas envisagé, en lançant l'initiative d'un regroupement des
forces aéronautiques européennes, un processus de fusion
verticale ont en effet réagi très négativement à
l'initiative de cette nature prise par les deux industriels britanniques.
2. L'archétype de la mondialisation ?
L'industrie aéronautique est souvent
présentée
comme un archétype de la mondialisation. Ce jugement s'appuie sur des
tendances nettement affirmées à la mondialisation de
l'activité aéronautique et à la
« privatisation » du secteur, faite d'une domination de
plus en plus aigüe de la finance sur une activité qui était
jusqu'alors surtout l'affaire des ingénieurs.
Cette présentation des choses recouvre des aspects essentiels des
évolutions récentes de l'industrie aéronautique qui
recèlent, on le verra, des contraintes préoccupantes.
Toutefois, elle masque des réalités qui sont autant de traditions
de l'industrie aéronautique encore très vivaces :
. La mondialisation n'y est pas telle que le « nationalisme
aéronautique » soit réellement affaibli.
La « privatisation »sait, quant à elle, composer
avec l'appel récurrent aux soutiens publics.
Certes, la plupart des marchés du secteur sont mondiaux comme en
témoigne la part importante des exportations dans le chiffre d'affaires
des industriels.
Cette part s'élève à 38,8 % pour les Etats-Unis et,
en Europe, elle est sensiblement plus élevée : de
58,7 % en France, elle passe à 65,5 % en Allemagne et
même 84,4 % en Grande-Bretagne. Ainsi, l'industrie
aéronautique apparaît fortement dépendante des
marchés étrangers
Chiffre d'affaires aéronautique et spatial 1997 (1)
|
Grands systémiers |
Motoristes |
Equipementiers |
Total |
CA réalisé avec l'Etat français |
12.943 |
3.888 |
5.562 |
22.383 |
CA réalisé avec les constructeurs aérospatiaux français |
4.728 |
2.188 |
14.261 |
21.177 |
CA réalisé avec les autres utilisateurs français* |
7.619 |
2.170 |
901 |
10.691 |
CA réalisé à l'exportation (directe) |
47.544 |
14.394 |
15.713 |
77.651 |
Total |
72.834 |
22.640 |
36.427 |
131.902 |
*
Dans le CA métropole, on distingue l'Etat et les constructeurs du
secteur aérospatial des autres utilisateurs français. Ces
derniers sont les compagnies aériennes, aéro-clubs,
privés...
(1) Non consolidé.
Du fait de l'importance des marchés étrangers et de la
nécessité d'optimiser les coûts de production, des
pratiques commerciales et industrielles particulières se sont en outre
répandues qui ont accentué la globalisation du secteur.
Il s'agit, bien sûr, des
compensations industrielles
qui font du
partage des taches industrielles avec les pays clients une condition
fréquente de succès commercial. On retiendra incidemment que ces
compensations qui résultent d'un jeu complexe entre industriels et
pouvoirs publics suscitent, semble-t-il, chez les autorités politiques
des pays de la source quelques réserves venant, en particulier, de
soucis de non-dissémination de technologies sensibles. Mais,
globalisation oblige, la capacité de maîtrise de ces
autorités reste en question.
Associée à cet impératif commercial,
la
sous-traitance
internationale se développe avec pour autre but la
réduction des coûts de production. Cette tendance n'est sans doute
pas exempte d'inflexions, comme l'a démontré en particulier
l'échec de la coopération entre l'Europe et la Chine pour le
développement d'un avion de 100 places, ou encore de rapatriements de
sous-traitance mais elle est étayée par les faits et les
stratégies des industriels. Ainsi, selon une étude
récente, 60 % des industriels américains et 90 % des
européens du secteur considèrent que la mondialisation est
devenue leur priorité numéro 1.
En outre, les constructeurs font assaut de chiffres pour démontrer le
caractère de plus en plus global de leurs activités.
Ainsi, Boeing prétend que, hors moteurs, le « contenu
étranger » du 727, lancé en 1959, s'élevait
à 2 % au plus contre 10 à 26 %
6(
*
)
pour le 767 lancé en 1978 et entre 15 et
29 %
1
pour le 777 lancé en 1990.
De son côté, Airbus indique que le « contenu
étranger », principalement américain, de l'A310-300
s'élève à 30 % ; à 17 % pour l'A320
et 30 % pour l'A330-300.
Au-delà des mécanismes appartenant à la sphère
économique, la globalisation qui touche le secteur se manifeste aussi
par d'autres évolutions : la privatisation et une financiarisation
de plus en plus importante.
La «
privatisation
» c'est d'abord le transfert au
secteur privé de la totalité des grandes entreprises occidentales
du secteur avec, pour prolongement en France la privatisation
d'Aérospatiale.
Mais, c'est surtout la prise en compte de plus en plus grande des actionnaires
dans l'élaboration des stratégies des entreprises. Le secteur
aéronautique, pourtant industriel par excellence, n'échappe pas
en effet à la financiarisation ambiante synonyme d'un renforcement des
contraintes financières sur les ingénieurs.
Ce processus qui s'accompagne d'une pression à la baisse
systématique des coûts et d'une augmentation de l'aversion face
aux risques est lourd de difficultés pour une industrie exigeante en
innovations
. Il suppose des arbitrages avisés sans lesquels les
entreprises risquent leur existence. Les déboires rencontrés
récemment par Boeing ne sont-ils pas, pour les observateurs, le fruit
d'une insuffisance passée d'investissements ? La chute de
Mc Donnell-Douglas n'a-t-elle pas été unanimement
considérée comme l'aboutissement logique d'une stratégie
excessivement timide ?.
Les effets de la globalisation sur les entreprises du secteur sont ainsi
susceptibles de créer des conflits appelant des arbitrages
délicats.
Il faut ici insister sur l'importance particulière de ces contraintes
pour l'industrie européenne
.
Elle vient d'une part de la nécessité pour ses entreprises
d'assumer les coûts fixes élevés nécessaires pour
combler leur retard sur leurs concurrentes américaines, d'autre part,
d'un niveau de soutien public moins favorable, et enfin d'une situation
d'échelle plus modeste.
A ce stade, il faut souligner les paradoxes et les limites de la globalisation.
La « privatisation » du secteur n'empêche pas sa
très grande dépendance aux décisions publiques.
Les relations entre pouvoirs publics et industriels sont naturellement
étroites s'agissant d'une industrie :
. dont une part importante du chiffre d'affaires provient de ventes de produits
militaires ;
. dont le contenu en technologies est tel sur les plans civil et militaire
qu'il appelle l'intervention publique sous forme de financements
7(
*
)
mais aussi de contrôle ;
- qui, confrontée à des conditions commerciales
sévères, est naturellement encline à souhaiter le soutien
des pouvoirs publics.
Cette interdépendance suscite partout une immixtion des autorités
publiques. Elles ont certes eu tendance à se retirer de la gestion
même des actifs aéronautiques mais, elles conservent des leviers
d'actions puissants dont elles usent plus ou moins. Sur ce point, ce n'est pas
le moindre des paradoxes que de constater qu'en la matière l'abstention
atteint son paroxysme en Europe où elle confine à l'abstinence.
Autre nuance importante au mythe
de l'industrie
« mondialisée », l'ouverture des marchés est
loin d'être entière
comme le démontre assez le tableau
mentionné ci-dessus où l'on rendait compte des sources du chiffre
d'affaires des industriels français.
Une part variable mais substantielle du secteur repose sur des positions
nationales plus ou moins solides et plus ou moins inexpugnables.
Sous cet angle, l'existence d'un vaste marché intérieur importe
encore beaucoup. Mais, il y a plus.
Une fraction très importante de l'activité des industriels
provient de sources qui, elles, échappent totalement à la
concurrence internationale qui est l'une des facettes de la globalisation. Il
s'agit bien sûr des commandes militaires nationales. En effet, si les
marchés militaires des pays sans capacités industrielles propres
sont ouverts, une part importante de la commande militaire est effectivement
réservée à des industriels locaux même si des
industriels de pays tiers peuvent parfois y être associés.
Enfin, l'abri dont peuvent disposer les industriels du fait des
caractéristiques de la demande adressée à l'industrie
aéronautique est, en particulier, susceptible de se doubler d'une
protection tirée d'une situation plus favorable que celle des
concurrents qu'il s'agisse des caractéristiques structurelles de
l'entreprise, comme la dualité de ses métiers, ou de ses
produits, le monopole pouvant dérègler les conditions de la
concurrence
3. Une industrie au coeur de la puissance politique
La
maitrise de l'industrie aéronautique s'impose pour satisfaire les
conditions de la puissance.
C'est assez évident au regard des capacités de défense,
l'actualité dispensant de beaucoup insister sur ce point. Il suffira
à ce sujet de souligner les paradoxes choquants d'une situation
où l'Europe dispose de 3 avions de combat - le Rafale, l'Eurofighter, le
Gripen - développés à grands frais par les contributeurs
publics mais où lui font défaut les vecteurs d'observation et de
transport qui sont indispensables.
Mais, c'est aussi vrai du point de vue des capacités économiques
et culturelles puisque la capacité d'assembler des plates-formes
conditionne celles de porter les produits et services qui en
dépendent.
II. UN BRILLANT AVENIR
Les prévisions concernant le marché des appareils commerciaux illustrent le dynamisme d'un secteur dont les autres segments d'activité - espace, missiles - restent prometteurs. Certains aléas de ces prévisions notamment ceux portant sur la structure prévisible de la production doivent être soulignés. Ils sont l'une des manifestations des difficultés de pilotage des entreprises aéronautiques.
A. LES PERSPECTIVES TRES FAVORABLES DU MARCHE DES AVIONS COMMERCIAUX
Le
chiffre d'affaires de l'industrie aéronautique commerciale
anticipé pour les 20 ans à venir est considérable.
Selon les estimations de Boeing
8(
*
)
, il
s'élèverait à
1.255 milliards de dollars entre
1997 et 2017
, soit une
moyenne de 62,8 milliards de dollars par
an.
C'est ainsi une source de revenus de 8.157,5 milliards de francs dans les
20 ans à venir -407,9 milliards de francs, l'an- que
générerait le marché des avions commerciaux.
Par rapport à la période 1952-1997 au cours de laquelle le
chiffre d'affaires moyen annuel de l'industrie aéronautique civile s'est
élevé à 210,3 milliards de francs, les perspectives
de marché laissent donc entrevoir un quasi-doublement des revenus
liés à cette activité.
Ces perspectives sont assises sur l'hypothèse d'une croissance soutenue
du trafic aérien, de 5 % l'an entre 1997 et 2017, les vols cargo
étant d'ailleurs un peu plus dynamiques que les transports de passagers.
Cet essor du transport aérien qui répondrait à une
croissance économique proche de 3 % en moyenne continuerait,
notons-le, à être particulièrement important en Asie
malgré les crises récemment observées.
Le nombre des appareils
nécessaires à la satisfaction des
besoins se monterait à
17.651
soit une flotte installée en
2017 égale à plus de deux fois celle des avions en
activité en 1997.
Livraisons
Prévisions 1998-2017
Nombre de sièges |
Principaux modèles |
Dollars 1997
|
% |
Unités |
% |
Couloir unique
:
|
BAe 146
|
38,7 |
3,1 |
1.578 |
9,0 |
91-120 |
737-500/-600
|
70,6 |
5,6 |
2.148 |
12,2 |
121-170
|
737-300/-400/-700/-800
|
229,8
|
18,3
|
5.299
|
30,0
|
Avions intermédiaires :
|
767
|
207,6
|
16,5
|
2.031
|
11,5
|
747
et plus :
|
747
|
184,1 |
14,7 |
1.029 |
5,8 |
TOTAL |
|
1.254,7 |
100,0 |
17.651 |
100,0 |
Source : Boeing Current Market Outlook 1998
1) 17000 appareils de transport de passagers ; 651 nouveaux cargos.
La séquence temporelle des livraisons serait celle décrite dans
le graphique ci-après.
Source : Boeing Current Market Outlook 1998
L'essentiel des nouveaux appareils voudrait augmenter les capacités en
place, les 2/3 de la flotte installée restant opérationnels en
2017.
La flotte mondiale ferait ainsi plus que doubler dans les 20 ans
à venir.
Source : Boeing Current Market Outlook 1998
L'accroissement de la flotte serait de 5.400 appareils entre 1997 et
2007 ; il s'amplifierait dans la décennie suivante avec 8.500
nouvelles livraisons.
B. UNE INCERTITUDE MAJEURE : LA PART DES GROS PORTEURS
La
structure de l'équipement se déformerait un peu avec un
déclin relatif des avions à couloir unique au profit, non pas des
gros porteurs type 747, mais des avions intermédiaires.
Ce dernier résultat est évidemment discutable
. Il suppose que
la congestion des infrastructures de transport aérien ne soit pas un
obstacle à la multiplication des vols.
Il suppose aussi que les compagnies privilégient des liaisons de point
à point plutôt que de structurer leurs dessertes à partir
des plates-formes de correspondance que sont les « hubs ».
Cette prévision serait aussi assise sur la considération d'un
défaut d'adaptation des aéroports à l'accueil de
très gros porteurs doublé des difficultés de gestion de
vols réunissent de très gros contingents de passagers.
L'ensemble de ces présupposés est contestable comme l'est
d'ailleurs l'idée sous-jacente d'un prix du pétrole suffisamment
bas pour ne pas inciter fortement les compagnies à limiter le nombre de
leurs vols.
Ainsi, même si avec seulement 5,8 % des livraisons prévues le
chiffre d'affaires générés par les gros-porteurs
s'élèverait déjà à 14,7 % du total,
soit près de 1.200 milliards de francs, l'on peut raisonnablement
envisager un volume de livraisons de ce type d'appareils supérieur
à ce qui est envisagé par Boeing.
9(
*
)
A supposer que les prix anticipés restent identiques si la demande
devait être plus importante (
a priori
, les projections de Boeing
anticipent l'arrivée d'un concurrent - l'A3XX, lancé par Airbus),
on peut illustrer la marge d'incertitude en indiquant que 1 point de livraisons
de gros porteurs représente 207 milliards de francs.
On rappelle incidemment que les coûts de développement de l'A3XX
sont estimés entre 10 et 12 milliards de dollars, soit à peine
6 % du marché des gros-porteurs tel qu'il est prévu par
Boeing.
La perspective d'un développement de cette gamme de produits,
relativement plus important que prévu est d'ailleurs confortée
par les prévisions relatives à la répartition des
commandes par groupes de pays.
Si un peu moins d'un quart du chiffre d'affaires anticipé proviendrait
des Etats-Unis où, en dépit d'un réel encombrement du
trafic aérien, les perspectives d'un développement des liaisons
point à point sont réalistes, une part considérable des
investissements serait réalisée en Asie et en Europe. Or, ces
deux zones pourraient rencontrer des besoins d'équipements en
très gros porteurs tout particulier du fait, en Europe, de la saturation
des aéroports et, en Asie, de ce phénomène à quoi
s'ajoute de la croissance de gigantesques mégalopoles.
Achats
d'appareils par groupes de pays
1998 - 2017
Pays |
Dépenses en milliards de dollars 1997 |
Livraisons |
Etats-Unis |
306 |
5.200 |
Chine |
125 |
1.800 |
Japon |
92 |
810 |
Allemagne |
61 |
780 |
Royaume-Uni |
60 |
770 |
France |
48 |
570 |
Singapour, Corée du Sud |
30-35 |
230-290 |
Australie, Brésil, Canada, Italie, Espagne |
25-30 |
310-420 |
Inde, Mexique, Pays-Bas, Arabie Saoudite, Taiwan |
15-25 |
160-280 |
Indonésie, Malaisie, Suède, Suisse, Afrique du Sud, Thaïlande, Turquie |
10-15 |
90-290 |
Argentine, Autriche, Belgique, Finlande, Grèce, Israël, Nouvelle Zélande, Pakistan, Philippines, Vietnam |
5-10 |
60-130 |
Autres |
1-5 |
10-100 |
Source : Boeing Current Market Outlook 1998
III. UNE INDUSTRIE EXIGEANTE
Le moins
qu'on puisse en dire est que l'industrie aéronautique commerciale est un
secteur exigeant, ce dont rend compte le qualificatif employé à
son sujet aux Etats-Unis de « sporty business ».
Le taux de mortalité des entreprises en témoigne ainsi d'ailleurs
que la prééminence sur ce marché de deux entités
seulement : Airbus et Boeing.
Ce duopole, certes imparfait et incomplet, a été engendré
par la nature même et les caractéristiques de cette
activité industrielle. Celles-ci posent à l'évidence la
question de la perpétuation d'un duopole d'autant que celui-ci reste
très déséquilibré.
A. LES CYCLES DU MARCHE DES APPAREILS COMMERCIAUX
Le
chiffre d'affaires des industriels du secteur dépend des commandes des
compagnes aériennes et aussi, de plus en plus, des entreprises de
leasing
. La demande de ces entreprises dépend de leurs situations
financières respectives, elles-mêmes très liées
à l'état de la croissance économique qui est cyclique.
Certes, d'autres facteurs plus structurels sont susceptibles de jouer -comme
l'ancienneté de la flotte installée ou les changements de
réglementation-, mais l'alternance de phases d'expansion et de
dépression demeure la règle.
Commandes : évolution 1989-1997
Le
graphique ci-dessus illustre l'ampleur des retournements. Même si les
excès de 1988-1989 semblent avoir été corrigés au
cours de la récente reprise et si le graphique ci-après
démontre que les fluctuations sont moins grandes pour les livraisons,
les mouvements du marché restent un défi permanent pour les
industriels.
Cette réalité s'inscrit dans les subtilités des contrats
aéronautiques faits de commandes, d'options plus ou moins fermes, de
conversions en cours des contrats vers des appareils différents par leur
nature ou encore d'engagements de reprises d'appareils.
Le caractère cyclique du marché des appareils commerciaux suscite
deux difficultés majeures pour les industriels.
D'une part, la lisibilité des industriels est réduite ce dont ont
suffisamment rendu compte les développements consacrés aux
perspectives du marché à moyen terme.
D'autre part, il est susceptible d'exister en permanence un effet de ciseau
entre les coûts supportés par les industriels et leurs revenus,
ceux-ci venant généralement à fléchir à
l'instant même où les charges sont à leur plus haut.
B. UN SECTEUR A HAUTS RISQUES
La
cyclicité du marché, son imparfaite lisibilité se
conjuguent en effet avec l'importance des coûts qu'entraîne tout
développement nouveau des affaires.
Dans les circonstances normales, c'est-à-dire hors lancement de nouveaux
programmes, les investissements à réaliser pour satisfaire la
demandes sont déjà élevés. La saturation des
capacités de production doit être évitée ce qui
suppose des équipements structurellement surcapacitaires ou, en cas de
goulots d'étranglement, de dégager rapidement les moyens de
production nécessaires. Dans tous les cas, la lourdeur des
équipements pose problème, les immobilisations étant
financièrement coûteuses. Il faut impérativement pouvoir
les amortir sur de longues séries, ce qui ne va pas de soi étant
donné la segmentation du marché (voir ci-dessous). Mais, les
équipements ne sont pas seuls en cause. L'industrie aéronautique
demeure une industrie de main-d'oeuvre et, en particulier de main d'oeuvre
qualifiée, donc relativement coûteuse. La masse salariale des
entreprises aéronautiques occupe toujours une place importante dans leur
valeur ajoutée. Entendue au sens large, elle représente bon an,
mal an, près des ¾ de la valeur ajoutée de l'entreprise chez
Aérospatiale .
Cette caractéristique incite certains à adopter une politique
d'adaptation des effectifs au plus près des conditions du cycle. Mais,
en-dehors de la difficulté de calibrer au mieux une telle gestion des
effectifs, ce choix qui, de toute évidence, pose les habituels graves
problèmes sociaux des politiques de flexibilité lorsque la
collectivité publique refuse de les assumer, ne s'impose pas aussi
nettement que cela du seul point de vue de l'intérêt de
l'entreprise. Les difficultés récemment traversées par
Boeing illustrent les inconvénients d'une telle option sous cet angle
précis.
Il faut ajouter que la vie d'une entreprise du secteur est rarement faite de
circonstances normales
. Elle est plutôt ponctuée par une
succession d'événements exceptionnels, la volonté de
défendre ou de conquérir des parts de marché supposant des
décisions lourdes en coûts pour améliorer les combinaisons
productives ou encore élargir l'offre de produits. C'est ce dernier type
d'objectifs qui est financièrement le plus risqué.
Les coûts de développement d'appareils nouveaux sont en effet
toujours importants. Ainsi, le 747 lancé par Boeing en 1966 aurait
entraîné une charge de l'ordre de 1,2 milliard de dollars
représentant alors plus de trois fois la capitalisation boursière
de l'entreprise. De la même manière, les coûts de
développement d'un éventuel nouveau gros porteur (l'A3XX) par
Airbus sont évalués entre 10 et 12 milliards de dollars. Si
les avions dérivés d'appareils déjà existant sont
financièrement moins exigeants - ce qui explique une part de la faveur
dont ils jouissent auprès des constructeurs -, ils n'en restent pas
moins fort coûteux et ne peuvent en toute hypothèse, constituer
une solution systématique aux problèmes d'amélioration de
l'offre des industriels.
Coûts de développement de quelques appareils
|
|
Coûts de développement en dollars (millions) |
Coûts de développement en dollars de 1991 (millions) |
Coûts de développement par siège en dollars de 1991 |
DC-3 |
1936 |
0,3 |
3 |
0,1 |
DC-6 |
1947 |
14 |
90 |
1,7 |
DC-8 |
1959 |
112 |
600 |
3,8 |
747 |
1970 |
1.200 |
3.300 |
7,3 |
777 |
1995* |
5.000* |
4.300 |
14* |
Or, face à ces coûts considérables qui supposent de réunir les conditions d'un accès optimal aux ressources financières externes, élément devenu essentiel pour la compétitivité d'une entreprise aéronautique, les perspectives de recettes sont, non seulement sujettes à des retournements cycliques, mais encore fort incertaines du fait de l'extrême concurrence qui sévit sur le marché.
C. UN SECTEUR EXTREMEMENT CONCURRENTIEL
Même si certains articles de presse ont nourri des
rumeurs
d'entente entre les deux entreprises qui dominent le marché des avions
commerciaux, rumeurs qui à leur tour ont provoqué des
enquêtes communautaires sans équivalents aux Etats-Unis et,
semble-t-il, infructueuses,
c'est bien la concurrence extrême qui
caractérise le marché de l'aviation commerciale
.
Les variables sur lesquelles s'exerce la concurrence sont nombreuses mais on
peut en faire une présentation simplifiée en distinguant celles
qui portent sur la qualité des produits et celles qui portent sur les
prix.
En apparence, les premières se sont quelque peu
équilibrées à mesure qu'Airbus est monté en
puissance, c'est-à-dire s'est trouvé en mesure d'offrir une gamme
de produits plus complète, un service après-vente mieux
structuré et des produits plus innovants que ceux d'un concurrent qui
jouissait d'une position de marché de départ beaucoup plus solide.
C'est sans doute pour cette raison qu'en revanche la concurrence par les prix,
favorisée par l'appréciation du dollar sans laquelle Airbus
n'aurait pu suivre, s'est, elle, très significativement
intensifiée au cours de la plus récente période.
L'évolution des résultats des ventes d'appareils commerciaux
traduit cette intensification de la concurrence. La marge de la division de
Boeing consacrée à l'aviation commerciale s'est
considérablement réduite passant de 10 % en 1996 à
5 % en 1997 et même 4 % en 1998. Pour Airbus dont les
résultats ne sont pas directement accessibles, un
phénomène semblable s'est produit, une perte de 1,2 milliard
devant être constatée. En dépit d'une progression des
ventes, les résultats des divisions Airbus des industriels partenaires
se sont effrités, Aérospatiale assumant pour des raisons diverses
(voir infra) une perte de 68 millions de francs en 1998 et BAe une perte
de l'ordre de 238 millions de francs, semble-t-il.
Si une partie de cette dégradation des résultats est imputable
à des hausses de coûts susceptibles elles-mêmes
d'explications variées, il est constant que, malgré la bonne
orientation des commandes, la guerre des prix entre les constructeurs s'est
déchaînée à tel point que des ventes à pertes
se sont sans doute multipliées. Cette inquiétude a
été en tout cas clairement confiée à votre
rapporteur lors de ses entretiens auprès de la responsable du secteur
aéronautique et spatial du ministère du commerce américain.
Les prolongements de cette concurrence sont évidemment dépendants
de l'avenir du duopole (voir infra) mais ses effets de court terme peuvent
déjà être envisagés.
Une course à la compression des coûts s'est
déclenchée qui a plusieurs effets.
Le premier d'entre eux est évidemment d'exercer une très forte
pression sur les fournisseurs des avionneurs
. La réduction des
coûts de leurs fournitures est une de leurs priorités qui, nulle
part ailleurs plus que dans le secteur des moteurs, se manifeste.
Les particularités commerciales de l'industrie des moteurs
Si, dans
ce secteur, la demande provient des compagnies aériennes, l'offre est
médiatisée par les avionneurs qui choisissent les motorisations
disponibles pour chaque modèle. Ce choix est certes technique mais il
résulte surtout d'une négociation sur les prix que les motoristes
s'engagent à consentir. De fait, ceux-ci ont été conduits
à envisager des concessions commerciales considérables pouvant
atteindre 100 % du prix-catalogue de leurs produits. En un mot, certains
moteurs ont été fournis gratuitement, la
rémunération des industriels ne provenant plus que des besoins de
réparation et d'entretien des machines.
Cette pression sur les fournisseurs est, généralement,
considérée comme un facteur devant déboucher à
l'avenir sur de nouvelles concentrations chez les sous-traitants et
équipementiers du secteur.
Mais, les ensembliers eux-mêmes ont entrepris une politique
systématique, plus ou moins radicale, de diminution de leurs propres
charges.
Cette volonté est apparue très forte à votre rapporteur au
cours de ses entretiens avec les responsables de Boeing. La restauration de la
profitabilité de l'entreprise est une priorité martelée
par ses dirigeants. Une revue systématique des programmes a
été entreprise en ce sens démontrant qu'une partie des
actifs de l'entreprise n'était pas rentable. Ces programmes seront
vraisemblablement abandonnés si les tentatives de redressement devaient
apparaître vaines. De la même manière, l'entreprise entend
réduire considérablement
ses charges salariales
. Elle
envisage une diminution des effectifs dont l'ampleur pourrait varier entre 27
et 40.000 unités. En tout état de cause, l'entreprise devrait
rapidement passer de 220.000 à 193.000 employés. Enfin, la
volonté de réduire les coûts a pour effet une
révision significative
des investissements
et, en particulier, de
l'effort de recherche-développement (R et D). Chez Boeing, cette
économie a provoqué non seulement une baisse des dépenses
de recherche-développement de la division « aviation
commerciale » en proportion de son chiffre d'affaires mais encore une
diminution de la valeur nominale, et donc
a fortiori
encore du volume,
des frais de R et D.
Cette dernière tendance ne va pas sans susciter des
inquiétudes de la part des responsables administratifs du secteur aux
Etats-Unis
. Elle porte sur la capacité des industriels de maintenir
un courant continu d'innovations dans les domaines civil mais aussi militaire.
Elle est l'expression d'un conflit souvent occulté entre des entreprises
aéronautiques soucieuses de séduire leurs actionnaires en
améliorant toujours leur rentabilité et des responsables
administratifs inquiets des exigences des marchés et de leur impact de
moyen terme sur la capacité concurrentielle des appareils commerciaux et
sur la capacité de défense nationale.
C'est à ce propos que l'on peut évoquer une autre dimension
importante de la concurrence entre industriels. Chacun d'entre eux essaie en
effet de s'assurer de
marges de manoeuvre à travers le
bénéfice d'interventions publiques.
La question des soutiens publics ayant fait l'objet d'un
précédent rapport
10(
*
)
, on ne
reviendra pas sur l'ensemble des aides publiques protéiformes que
l'industrie aéronautique mobilise. On se bornera ici à insister
à nouveau sur leur importance sur les conditions de concurrence de
chacun des acteurs et à mettre en évidence
l'apparition aux
Etats-Unis d'une tonalité nouvelle dans les discours des responsables
administratifs. Ainsi, face à la recherche par les entreprises des
moyens de satisfaire au mieux leurs actionnaires, l'idée d'une
inefficacité des marchés « aveuglés »
par les préoccupations de court terme est désormais
avancée pour justifier les interventions publiques.
On
vérifiera aisément combien cette approche s'éloigne du
schéma, trop simple en l'occurrence, du jeu spontané du
marché. Elle justifie en effet des interventions destinées
à prendre en charge au moyen de ressources publiques toutes les
catégories de coûts que l'aversion des marchés commande de
réduire. Elle fait plus puisqu'elle a justifié l'accompagnement
par les pouvoirs publics des charges de restructuration des entreprises du
secteur. 700 millions de dollars (4,5 milliards de francs) ont
été ainsi consacrés par le MoD (ministère de la
défense) à la prise en charge des frais de licenciements
résultant des restructurations du secteur.
*
* *
Les
enjeux associés à la maitrise d'une industrie aéronautique
puissante sont économiquement et politiquement, considérables.
Les contraintes qui pèsent sur l'industrie aéronautique qu'il
s'agisse des contraintes propres à cette industrie ou de celles qu'elle
rencontre du fait de son environnement sont aussi très importantes et
vont se resserrant.
Une manière de duopole s'est progressivement formée donnant
naissance à une compétition très relevée. Il reste
à apprécier la forme des équipes dans ce qu'on peut
appeler le match Europe-Etats-Unis.
CHAPITRE II
:
LE MATCH « EUROPE-ETATS
UNIS »
En
dépit de l'émergence, en Asie ou en Amérique Latine, ou de
la subsistance, en Russie, d'une industrie aéronautique et spatiale, le
monde se partage essentiellement dans ce secteur entre les Etats-Unis et
l'Europe
Ce « duopole » apparaît très
déséquilibré.
Les entreprises américaines ont connu des mutations certes douloureuses
et pas totalement achevées qui ont encore accru leur puissance. Elles
bénéficient de plus d'un environnement leur conférant des
avantages comparatifs considérables.
De son côté, l'Europe de l'aéronautique regroupe des
acteurs sans doute influents mais guettés par le danger de la
disparition ou de la satellisation
I. DES POSITIONS DE MARCHE SANS COMMUNE MESURE
La comparaison des chiffres d'affaires des industries aéronautiques en Europe et aux Etats-Unis illustre tout le profit qu'a pu tirer l'industrie américaine des avantages comparatifs dont elle bénéficie.
A. L'ACTIVITE AÉRONAUTIQUE AUX ETATS-UNIS ET EN EUROPE, DEUX MONDES À PART
Les grandes caractéristiques du rapport de force sont sommairement illustrées par les données figurant dans le tableau ci-dessous qui rappelle les ordres de grandeur relatifs à l'activité de l'industrie aéronautique.
Chiffres d'affaires des industries aéronautiques et spatiales occidentales en 1997
(en millions d'écus)
|
France |
Allemagne |
Grande-Bretagne |
États-Unis |
CA total non consolidé |
19.947 |
10.819 |
21.748 |
|
CA total consolidé |
16.744 |
9.566 |
19.331 |
114.305 |
CA exportation |
11.743 |
6.327 |
16.277 |
44.356 |
Source : AECMA, AIA
Le
chiffre d'affaires de l'industrie aéronautique américaine
équivaut, avec 755 milliards de francs, à plus de deux fois
et demi celui des trois principaux pays aéronautiques en Europe qui
s'est élevé en 1997 à 301,7 milliards de francs.
Cet ordre de grandeur ne change que très légèrement
lorsque l'on agrège l'activité aéronautique de l'ensemble
de l'Union européenne, la dimension du chiffre d'affaires de l'industrie
américaine apparaissant alors comme un peu plus de deux fois celle de
l'industrie européenne.
L'accès à un niveau d'activité élevé est un
atout majeur pour les acteurs de l'industrie aéronautique. Il permet une
plus grande souplesse d'organisation, justifie économiquement les lourds
investissements qui sont nécessaires aux lancements de nouveaux
programmes et à travers les économies d'échelles qu'il
provoque autorise, toutes choses égales par ailleurs, un meilleur niveau
de compétitivité.
Cette disproportion dans l'activité des deux branches du duopole a
évidemment des répercussions sur le volume des effectifs des
industries aéronautiques de part et d'autre de l'Atlantique.
Effectifs des principales industries aéronautiques et spatiales occidentales en 1997
|
France |
Allemagne |
Grande-Bretagne |
Etats-Unis |
Grands systémiers |
46.900 |
38.076 |
44.745 |
358.600 |
Motoristes |
20.900 |
8.534 |
29.501 |
100.600 |
Equipementiers |
27.500 |
16.404 |
46.845 |
598.600 (1) |
(1)
Autres + 270.000 = 868.600
Mais les différences entre les chiffres d'affaires des industries
aéronautiques américaine et européenne ne sont pas
seulement des différences de niveau. Il s'agit aussi de
différences de nature.
Il ressort d'abord du tableau ci-dessus une première donnée
importante.
La dépendance des industriels américains aux exportations
est
, avec 38,8 % du chiffre d'affaires réalisé à
l'exportation,
importante mais
beaucoup plus réduite qu'en
Europe
où, en moyenne, 75,2 % du chiffre d'affaires provient de
commandes extérieures.
Ainsi, même si l'industrie américaine occupe une place plus vaste
du le marché mondial que l'industrie européenne
(44,4 milliards d'euros contre 34,3 milliards d'euros en 1997), elle
apparaît moins soumise aux phénomènes liés à
la mondialisation.
Elle peut en particulier compter sur un équilibre entre son
marché intérieur et le marché étranger ce qui,
compte tenu des écarts de conjoncture qui peuvent exister entre ces deux
segments de la demande, constitue un facteur de solidité.
De plus,
l'industrie américaine reste orientée plus vers la
satisfaction de la demande militaire que vers les marchés
commerciaux
. Une situation différente prévaut en
Europe.
|
1980 |
1990 |
1995 |
|||
|
Europe |
Etats-Unis |
Europe |
Etats-Unis |
Europe |
Etats-Unis |
Chiffre d'affaires militaire |
70,3 |
54,5 |
52,7 |
61,0 |
46,8 |
55,7 |
Chiffre d'affaires civil |
29,7 |
45,5 |
47,3 |
39,0 |
53,2 |
44,3 |
Total |
100 |
100 |
100 |
100 |
100 |
100 |
Source : Commission européenne « The European Aerospace Industry » 1997
Cette
caractéristique recèle à son tour plusieurs avantages pour
l'industrie américaine.
Issue pour beaucoup du niveau nettement plus élevé qu'en Europe
de la commande militaire aux Etats-Unis, elle permet aux industriels
américains de pouvoir compter sur un marché protégé
de la concurrence extérieure.
En outre, même si le budget de la défense américaine s'est
inscrit ces dernières années sur une tendance à la baisse,
et si le Pentagone met en concurrence les entreprises nationales, les
industriels tirent de cette situation le bénéfice d'une meilleure
visibilité de leur chiffre d'affaires. Leurs anticipations sont mieux
assurées, ce qui constitue un avantage décisif dans une
activité qui suppose de prendre en compte le temps.
La concurrence relativement moins aiguë rencontrée sur les
marchés militaires intérieurs permet de surcroît de
dégager des marges plus satisfaisantes que celles usuellement
autorisées dans le cadre des marchés commerciaux.
Enfin, la recherche militaire étant, plus que la recherche civile,
financée sur des ressources extérieures, et d'ailleurs le plus
souvent préfinancée, l'industrie aéronautique
américaine retire de l'équilibre particulier de ses sources de
chiffre d'affaires un dernier avantage de taille.
B. LES AVANTAGES COMPARATIFS DE L'AÉRONAUTIQUE AMÉRICAINE
La prééminence de l'industrie américaine qui s'appuie sur une volonté politique forte d'en assurer la suprématie mondiale repose en particulier sur une série d'avantages comparatifs liés à son environnement.
1. Un soutien public qui ne se relâche pas
Les
Etats-Unis considèrent avec raison que la maîtrise d'une industrie
aéronautique puissante est une condition même de la puissance
politique du pays.
Du coup, ils mettent volontiers celle-ci au service des intérêts
de l'industrie nationale, les administrations animant un réseau
très élaboré d' « advocacy »
c'est-à-dire de promotion des produits américains. Il est
loisible de s'interroger sur l'existence de pratiques, pourtant
prohibées, d' « inducement », autrement dit de
pressions des autorités politiques américaines sur les clients
étrangers qui sont souvent encore des compagnies publiques.
En tout cas, la diplomatie américaine sait se mettre au service des
entreprises élaborant et conduisant des stratégies
cohérentes face auxquelles les européens paraissent souvent mal
armés.
L'illustration parfaite de ces propos peut être trouvée dans
l'accord du 17 juillet 1992 entre l'Europe et les Etats-Unis sur les
soutiens publics aux constructeurs d'avions commerciaux de plus de
100 places. On relèvera que cet accord très
défavorable aux intérêts européens aura
été négocié par une commission dont les services
n'avaient alors qu'une culture aéronautique réduite.
Le soutien public n'est évidemment pas seulement politique et
administratif. Il est aussi d'une espèce, plus décisive,
financière.
Le tableau ci-après récapitule les données quantitatives
disponibles pour apprécier le niveau comparé de soutien public en
Europe et aux Etats-Unis.
Soutien public dans l'Union européenne (UE) et aux Etats-Unis
(Niveaux en millions d'Euros)
|
Union européenne |
Etats-Unis |
||||||||||
|
Contrats de recherche |
Autres |
Total |
Contrats de recherche |
Autres |
Total |
||||||
|
Niveau |
% |
Niveau |
% |
Niveau |
% du C.A. |
Niveau |
% |
Niveau |
% |
Niveau |
% du C.A. |
1990 |
4.793 |
30 % |
11.155 |
70 % |
15.949 |
35 % |
11.974 |
22 % |
42.478 |
78 % |
54.452 |
64 % |
1994 |
4.162 |
29 % |
10.353 |
71 % |
14.514 |
37 % |
7.393 |
16 % |
38.045 |
84 % |
45.348 |
60 % |
Source : « The european aerospace
industry ». Commission européenne.1997
Il apparaît que le total des fonds publics alimentant l'industrie
américaine s'élève à plus de trois fois le niveau
atteint en Europe.
Cet écart n'est pas seulement le fait d'un niveau de commandes
militaires sans communes mesures.
Il est aussi le résultat d'un niveau de financement de la recherche bien
supérieur.
Depuis la période concernée par le tableau ci-dessous, la
disproportion des soutiens publics s'est encore amplifiée. Le
gouvernement américain a accru les dotations publiques à la
recherche aéronautique militaire qui s'établissent dans le budget
1999 à 36,6 milliards de dollars. Les européens ont
réduit la voilure sous l'effet des difficultés budgétaires
et été pris à contre-pied par l'accord de 1992.
Les entreprises européennes ont dû s'ajuster ce qu'elles ont fait
soit en réduisant leur effort de recherche, soit en absorbant vaille que
vaille les contraintes d'un autofinancement plus important de leurs
investissements en la matière.
Mais, la comparaison des niveaux de soutiens publics financiers à
l'industrie aéronautique doit être complétée en
soulignant la diversification des interventions publiques aux Etats-Unis et
leurs caractéristiques qui sont beaucoup plus avantageuses pour les
industriels américains.
Sur le premier point, une fois rappelée la mise à disposition de
l'industrie américaine d'infrastructures publiques à des
conditions de prix très avantageuses (travaux industriels,
souffleries...), il faut insister sur la prise en charge sur les crédits
du DoD d'une fraction très considérable des coûts des
restructurations de l'industrie aéronautique.
De fait, une analyse de sept grandes opérations
11(
*
)
démontre que les crédits publics
devraient financer environ 56 % des coûts résultant des
restructurations soit 856,2 millions de dollars sur 1.522,5 millions.
On observera que ces seuls crédits représentent près de 4
fois le montant du soutien public français prévu en 1998.
S'agissant de la comparaison globale de la qualité des
systèmes de soutien en Europe et aux Etats-Unis, il est manifeste que
l'efficacité est là aussi du côté
américain.
La gestion des soutiens y paraît meilleure ne serait-ce que parce qu'ils
sont gérés de façon unifiée, la dispersion
étant de règle en Europe en raison des caractéristiques
politiques du vieux continent avec sa cohorte de doubles-emplois. En outre, les
équipes chargées de concevoir et d'appliquer l'intervention
publique sont dotées de plus de moyens aux Etats-Unis.
Mais,
surtout, les mécanismes sollicités aux Etats-Unis
relèvent de la subvention tandis qu'en Europe l'essentiel du soutien est
accordé sous forme d'avances remboursables par programmes
. Ce
dernier mécanisme, certes ingénieux, a ceci contre lui qu'il fait
dépendre les aides accordées aux constructeurs de programmes
nouveaux les privant de la continuité des flux dont
bénéficient les industriels américains et qu'il peut se
retourner contre les constructeurs lorsque, comme c'est le cas depuis quelques
années, le bilan du mécanisme s'accompagne de davantage de
remboursements d'avances que de nouvelles dotations.
2. Des avantages économiques naturels
Les
avantages économiques des industriels américains reposent sur
l'existence combinée d'une demande mieux assurée qu'en Europe et
d'une offre de produits plus complète qui bénéficie en
outre de la prééminence du dollar.
Un vaste marché intérieur du transport commercial constitue un
premier avantage très substantiel.
Même si la concurrence auprès des compagnies
américaines se durcit entre Boeing et Airbus la firme de Seattle trouve
un accueil encore privilégié auprès de celles-ci dont
l'épisode controversé des accords d'exclusivité
passés avec trois des principaux transporteurs aériens
américains a donné la juste mesure.
La taille du marché américain, du transport aérien, des
hélicoptères, des télécommunications..., constitue
un atout important pour l'industrie nationale. Elle explique la situation
singulière des Etats-Unis mieux abrités que les européens
par leur marché intérieur. Cet abri n'est pas sans failles ce que
démontre assez les performances d'Airbus auprès des compagnies
aériennes américaines. Il constitue cependant une
« atténuation » de concurrence pour des industriels
nationaux moins soumis à la globalisation que leurs homologues
européens.
Mais ce qui est vrai des marchés commerciaux l'est aussi pour les
marchés militaires.
A cet égard, le tableau ci-après démontre quels avantages
les industriels américains sont susceptibles de tirer de cette situation.
Répartition mondiale des dépenses
militaires
par
zone géographique
USA |
32,0 % |
France |
6,0 % |
Angleterre |
4,0 % |
Allemagne |
5,0 % |
Italie |
3,0 % |
Autre Europe |
9,0 % |
Russie |
8,0 % |
Moyen Orient |
7,0 % |
Chine |
5,0 % |
Japon |
6,0 % |
Asie Sud |
3,0 % |
Autre Asie |
8,0 % |
Autres |
4,0 % |
Source : Jane's
En effet, malgré la très forte réduction du budget de
défense américain, les Etats-Unis concentrent encore 1/3 des
dépenses militaires mondiales. Et, si l'Europe suit, il faut souligner
que c'est en ordre dispersé si bien qu'il est, en l'état de
l'industrie européenne, totalement illusoire de cumuler les
dépenses publiques militaires pour rendre compte du niveau du chiffre
d'affaires « garanti » aux industriels du secteur.
Là également, la globalisation atteint moins les industriels
américains que leurs compétiteurs européens.
Ces avantages qui tiennent à la maîtrise d'une demande fournie
et qui échappe largement aux phénomènes de concurrence se
double d'une meilleure maîtrise de l'offre.
La gamme des produits aéronautiques américains est la plus large
du monde. L'étendue de la gamme de production est tellement plus vaste
que les situations de monopole mondial -gros porteur commercial (747) ;
transporteur de troupes (C130)- permettent aux industriels d'échapper
pour les produits en cause aux rigueurs e la concurrence.
C'est le résultat d'un effort historique qui a deux conséquences
au moins :
elle oblige les concurrents européens à supporter aujourd'hui
les coûts très lourds qui constituent la contrepartie d'un droit
d'entrée sur les marchés ou de l'acquisition d'une autonomie
industrielle désirée ;
elle permet aux industriels américains de bénéficier
d'une plus grande marge de manoeuvre commerciale en étant capables
d'offrir des prestations liées mais surtout des produits à plus
faibles prix les marges dégagées sur les appareils pour lesquels
ils ont un monopole et les points morts de programmes offerts étant
déjà atteints autorisation des concessions plus importantes sur
les produits soumis à concurrence.
Ces marges de manoeuvre commerciales sont confortées par les
caractéristiques des ventes aéronautiques et, en particulier, par
la suprématie du dollar comme signe monétaire des
échanges
. De celle-ci les industriels européens subissent le
handicap d'avoir à composer avec un risque de change dont les
systèmes de couverture leur imposent de lourds surcoûts.
II. DES ACTEURS A L'EFFICACITE INEGALE
Les
avantages comparatifs de l'industrie aéronautique américaine se
retrouvent dans les performances comparées des industries
américaines et européenne.
Ils sont amplifiées par une meilleure structuration des entreprises dont
rend compte la suprématie de Boeing face à des concurrents
européens éparpillés.
A. DES INDUSTRIES INÉGALEMENT PERFORMANTES
1. Aperçu général
Des données globales, malheureusement un peu anciennes, permettent de former une image d'ensemble des performances comparées des entreprises américaines et européennes du secteur.
Indicateurs relatifs à l'industrie aéronautique dans l'Union européenne - Année 1994
(En millions d'euros)
Chiffre d'affaires |
52.983 |
Valeur ajoutée (VA) |
20.520 |
Charges salariales |
16.498 |
Résultat d'exploitation |
4.022 |
Capitaux propres |
14.469 |
Actifs |
27.596 |
R & D autofinancée |
- |
R & D Totale |
- |
Investissements |
2.077 |
Effectifs |
418.858 |
|
|
Ratios |
|
Productivité du travail |
|
Valeur ajoutée sur charges salariales |
124,4 % |
Valeur ajoutée par employé (milliers d'écus) |
49 |
Effort de recherche |
|
Recherche autofinancée/CA |
- |
Recherche Totale/CA |
- |
Investissements/VA |
10,1 % |
Endettement à moyen et long terme/capitaux propres |
55,3 % |
Profitabilité |
|
Résultat d'exploitation/VA |
19,6 % |
Résultat net/VA |
5 % |
Source : « The European Aerospace Industry ». Commission Européenne 1997
Indicateurs relatifs à l'industrie aéronautique aux Etats-Unis - Année 1994
(En millions d'euros)
Chiffre d'affaires |
101.321 |
Valeur ajoutée (VA) |
34.140 |
Charges salariales |
23.871 |
Résultat d'exploitation |
10.269 |
Capitaux propres |
33.865 |
Actifs |
55.192 |
R & D autofinancée |
4.595 |
R & D Totale |
11.988 |
Investissements |
2.480 |
Effectifs |
616.000 |
|
|
Ratios |
|
Productivité du travail |
|
Valeur ajoutée sur charges salariales |
143 % |
Valeur ajoutée par employé (milliers d'écus) |
55,4 |
Effort de recherche |
|
Recherche autofinancée/CA |
4,5 % |
Recherche totale/CA |
11,8 % |
Investissements/VA |
7,3 % |
Endettement à moyen et long terme/capitaux propres |
50,5 % |
Profitabilité |
|
Résultat d'exploitation/VA |
30,1 % |
Résultat net/VA |
13,9 % |
Source : « The European Aerospace Industry ».
Commission Européenne 1997
La disproportion dans l'activité des deux groupes d'entreprises est
quelque peu atténuée lorsqu'on envisage leurs résultats au
regard de la valeur ajoutée produite, signe de l'importance des
consommations intermédiaires dans les processus industriels
américains.
L'industrie américaine apparaît globalement plus productive si
l'on s'en tient au ratio exprimant la valeur ajoutée par employé
supérieur de 13 % aux Etats-Unis.
Les conditions d'allocation de la valeur ajoutée diffèrent aussi
très sensiblement. Les charges salariales sont relativement plus
lourdes dans l'Union européenne où la valeur ajoutée
rapportée à elles s'élève à 124,4 %
contre 143 % aux Etats-Unis. De plus, les industriels européens
doivent supporter des dépenses d'investissement supérieures pour
combler leur retard en la matière. Par exemple, le ratio des
investissements rapportés à la valeur ajoutée atteignait
10,1 % en Europe en 1994, contre 7,3 % aux Etats-Unis. Cet
écart qui porte sur des indicateurs relatifs, rappelons-le, se retrouve,
s'agissant des charges de recherche-développement, et tout
particulièrement de la recherche-développement
autofinancée qui n'atteint que 4,5 % du chiffre d'affaires total
aux Etats-Unis.
Comme de surcroît les capacités financières des entreprises
américaines sont plus grandes qu'en Europe -les capitaux propres n'y
couvrent que 52 % des actifs contre 61,3 % aux Etats-Unis- le
résultat net des entreprises américaines, supérieur
à celui des entreprises européennes, l'est dans une proportion
encore plus grande que pour le résultat d'exploitation.
Les conclusions issues de données globales sont confirmées par
les résultats de quelques grandes entreprises entre 1990 et 1995.
Cumul des résultats nets entre 1991 et 1995
|
En monnaie nationale |
En millions de francs sur la base de parités conventionnelles (1) |
Boeing |
5.614 |
28.013,9 |
Mc Donnell Douglas |
1.596 |
7.964,0 |
British Aerospace |
- 1.131 |
- 8.912,3 |
DASA |
- 5.655 (2) |
- 19.679,4 |
Aerospatiale |
- 5.690 |
- 5.690,0 |
(1)
Sur la base des parités 1995 des devises contre francs
(2) Le résultat pour 1991 n'est pas disponible
Les pertes cumulées par les entreprises européennes au cours du
début des années 90 démontrent leur fragilité
face à des retournements de marché défavorables. Ces
entreprises ont sans doute entrepris des réformes parfois radicales
-voir infra- mais l'amélioration récente de leurs
résultats ne peut être entièrement assimilée
à des gains structurels d'efficacité.
2. Quelques images des industries aéronautiques européennes
En Europe, deux puissances se dégagent. Le Royaume-Uni suivi de près par la France : l'Allemagne suit, l'Italie offrant le visage des problèmes mais aussi des atouts d'une industrie un peu en retrait.
a) L'industrie aéronautique au Royaume-Uni
Avec un
chiffre d'affaires consolidé de 19,3 milliards d'euros en 1997,
l'industrie aérospatiale britannique civile et militaire qui exporte
plus des ¾ de sa production, constitue l'un des fleurons de
l'économie britannique.
Elle figure bon an mal an au 1
er
ou au 2
e
rang
européen, proche de la France, et au 2
ème
ou au
3
ème
rang mondial.
Cette industrie est caractérisée par l'étendue de sa gamme
de produits qui bien que s'étant un peu
rééquilibrée entre ses sources civiles et militaires reste
dominée par les activités de défense.
Le quadruplement des ventes aéronautiques civiles pendant les
années 1980 a toutefois permis à ce secteur d'accroître son
poids relatif dans l'ensemble de l'industrie aéronautique passé
de 26 à 42 % du chiffre d'affaires total.
Depuis la reprise des ventes intervenue en 1994, le secteur civil s'est
maintenu aux alentours de 45 % du total.
Répartition du chiffre d'affaires et des
exportations
selon l'activité civile ou militaire
|
1980 |
1985 |
1990 |
1994 |
1995 |
1996 |
Chiffre
d'affaires
|
4,76 |
7,88 |
11,07 |
10,221 |
11,355 |
13,066 |
CA civil (milliards £) |
1,42 |
2,33 |
4,782 |
4,714 |
5,212 |
5,782 |
CA civil en % |
25,7 |
32,7 |
41,6 |
46,5 |
45,9 |
44,2 |
Exportations totales (milliards £) |
2,50 |
3,25 |
7,652 |
6,229 |
8,008 |
9,702 |
Exportations civiles (milliards £) |
0,796 |
1,05 |
3,666 |
3,528 |
4,020 |
4,603 |
% Exportations civiles |
37,6 |
40,6 |
48,5 |
57,4 |
50,5 |
47,4 |
Source : SBAC
Le poids des exportations s'est considérablement accru
. Les
exportations de matériels aéronautiques s'élevaient en
1996 à 9,702 milliards de £ dont 4,6 pour le domaine
civil et 5,1 pour le militaire.
La progression des exportations est remarquable puisque leur part du chiffre
d'affaires total est passée de 47 % du total en 1980 à
65,4 % en 1990 pour atteindre 74,2 % en 1996, représentant
9,7 milliards de £ et même 84 % en 1997.
La part relative des exportations de matériels civils qui a
culminé en 1994 avec 57,4 %, est redescendue à 47,4% sous
l'effet mécanique des succès à l'exportation des avions de
chasse britanniques en particulier grâce au contrat Al Yamamah 2
signé avec l'Arabie Saoudite.
En termes de produits, les structures d'avions représentant près
de la moitié du total des ventes aéronautiques (46,2 %) en
progression régulière depuis 1985 (40,6 %).
En revanche, la rubrique espace n'a pas suivi l'évolution de l'industrie
et son importance relative n'est plus que de 3% de l'ensemble en 1996.
Répartition du chiffre d'affaires par famille de produits
(milliards £)
|
1985 |
1990 |
1994 |
1995 |
1996 |
Structures |
2,879 |
5,611 |
4,018 |
5,007 |
6,044 |
Moteurs |
1,727 |
2,673 |
2,203 |
2,231 |
2,749 |
Equipements |
2,332 |
3,308 |
3,826 |
3,678 |
4,089 |
Espace |
0,150 |
0,114 |
0,174 |
0,439 |
0,183 |
Total |
7,088 |
11,706 |
10,221 |
11,355 |
13,066 |
Source : SBAC
Une présentation sommaire des acteurs conduit à souligner que la
tendance à la concentration des actifs a dominé une industrie
aéronautique britannique constituée par quelques grands groupes
(British Aerospace, Rolls-Royce, GEC Marconi, GKN-Westland). Etant revenus sur
les diversifications opérées dans les années 1980, ils se
sont recentrés sur certains métiers et ont préparé
les grandes restructurations en cours en Europe et dans le monde.
On y trouve également de grands équipementiers comme TI Group,
Smith Indutries, Lucas Varity et Cobham qui travaillent dans le monde entier.
Il s'agit par ailleurs d'une industrie à capitaux privés
,
l'Etat se bornant à détenir une
golden share
dans les
entreprises les plus sensibles. Le management des entreprises
bénéficie de stocks-options, ce qui est susceptible d'influer sur
les choix de gestion.
Les acteurs de l'industrie aéronautique britannique en 1996
|
Rang 1996 |
Rang 1995 |
Capital millions £ |
CA millions £ 1996 |
CA millions £ 1995 |
|
Effectifs 1996 |
Effectifs 1995 |
Domaines d'activité |
GEC |
15 |
22 |
10.954 |
10.990 |
10.330 |
981 |
82.967 |
82.200 |
élec., nav. |
British Aerospace |
45 |
57 |
4.538 |
5.741 |
7.153 |
234 |
45.200 |
56.400 |
aérosp., élec. |
GKN |
56 |
66 |
3.949 |
2.893 |
2.470 |
322 |
32.861 |
32.300 |
terr., hel. |
Rolls Royce |
64 |
71 |
3.533 |
3.597 |
3.163 |
175 |
43.200 |
43.500 |
aéro, moteurs |
TI Group |
78 |
83 |
2.766 |
1.480 |
1.420 |
185 |
22.400 |
22.600 |
aéro. |
Smiths Industries |
84 |
98 |
2.407 |
899 |
759 |
138 |
11.718 |
11.000 |
aéro. |
Lucas Varity* |
61 |
99 |
3.644 |
- |
2.796 |
30 (1995) |
- |
48.500 |
aéro., électr. |
Pilkington |
100 |
112 |
1.962 |
2.899 |
2.676 |
55 |
35.800 |
37.100 |
optron. |
Vickers |
164 |
178 |
951 |
1.144 |
727 |
75 |
9.627 |
9.100 |
terr. |
Racal Electronics |
177 |
183 |
856 |
1.059 |
950 |
70 |
12.855 |
11.300 |
élec. |
SEMA Group |
168 |
237 |
901 |
678 |
596 |
37 |
8.734 |
8.156 |
élec., inform. |
Cobham |
213 |
288 |
585 |
228 |
211 |
30 |
3.457 |
3.470 |
aéro. |
Hunting |
496 |
372 |
141 |
1.128 |
1.126 |
31 |
12.680 |
13.500 |
terr., aéro. |
Les
options des industriels visent pour l'essentiel à accroître leur
activité dans le respect d'un principe constant d'optimisation
financière.
Les industriels britanniques ont, en 1996, élaboré un document
important traduisant leur conception des enjeux du secteur.
Ce document dénommé « Action Foresight »
dénombrait huit programmes spécifiques prioritaires et en faisait
une évaluation.
Évaluation du marché potentiel des nouveaux
programmes aéronautiques
pour le Royaume-Uni
Marché aéronautique |
Début de production |
Opportunités pour le Royaume-Uni |
Valeur
estimée
|
CIVIL |
|
|
|
Airbus A3XX |
2002/3 |
Ailes, réacteurs, principaux équipements |
25 |
AI (R) 70 places |
2002/3 |
Ailes, réacteurs, principaux équipements |
3 |
Boeing B 747 |
2000/1 |
Structures, réacteurs, principaux équipements |
15 |
China AE 100 |
2002 |
Structures, réacteurs, principaux équipements |
2 |
MILITAIRE |
|
|
|
FLA (ATF) |
2003 |
Ailes, réacteurs, principaux équipements |
7 |
FOAS (futur avion de chasse) |
2010/15 |
Maîtrise d'oeuvre des systèmes-structures, réacteurs, équipements |
17 |
JSF (futur avion de chasse américain) |
2005/10 |
Partenaires minoritaires d'entreprises américaines-structures, réacteurs, équipements |
21 |
TOTAL |
|
|
90 |
Source : SBAC
L'orientation militaire de l'industrie britannique est sous-jacente à
l'évaluation des industriels.
On observera en effet que si que la répartition des priorités est
à l'équilibre entre le civil et le militaire, toutefois, certains
programmes civils étant, depuis, abandonnés ou retardés
« sine die », cet équilibre est largement optique.
Les aspirations « américaines » de l'industrie
britannique se dégagent aussi. Il est assez frappant de noter que les
industriels britanniques n'excluaient pas, au moins en affichage, de participer
à des programmes concurrents comme l'A3XX d'Airbus et la modernisation
du 747 de Boeing. Leur volonté d'être associés au JSF va
dans le même sens.
Enfin, l'évaluation des contraintes ressenties par les industriels
britanniques n'est pas sans enseignement. Celle-ci est conduite dans le cadre
de la SBAC, qui regroupe les industriels comme en France le fait le GIFAS.
Constatant que 25 % du budget total de la défense aux USA sont
alloués aux démonstrateurs technologiques contre seulement
5 % au Royaume-Uni, et que la contribution du gouvernement au financement
de la R&D a augmenté en termes réels de 7 % aux USA de
1985 à 1992 alors qu'il a baissé de 25 % au Royaume-Uni, le
Directeur Général de la SBAC a demandé formellement au
gouvernement en juin 1997 d'affecter aux programmes de démonstrateurs
tout ou partie des remboursements des avances consenties à Rolls Royce
et à British Aérospace dans les années 80 estimées
à 100 millions de £ par an pendant les cinq prochaines
années.
Les industriels et le gouvernement investiraient à parité
égale 80 millions de £ en 1997 et jusqu'à
100 millions la cinquième année.
b) L'industrie aéronautique italienne
(1) La galaxie Finneccanica
L'industrie aéronautique italienne hors les
activités
de motoriste exercés par Fiat Avio est pour l'essentiel regroupé
dans le groupe Finmeccanica qui, depuis 7 ans, a concentré les
entreprises du secteur.
L'activité de Finmeccanica n'est pas seulement aéronautique mais
celle-ci occupe une place importante dans l'ensemble du chiffre d'affaires.
Le chiffre d'affaires de Finmeccanica en 1996
(en millions de dollars)
Activité |
Niveau |
% du total |
Mécanique |
2.410 |
25 % |
Hélicoptères |
574 |
6 % |
Aéronautique |
1.848 |
19 % |
Energie |
2.280 |
26 % |
Transports |
730 |
8 % |
Défense |
1.480 |
16 % |
Le
groupe exerce à travers ses filiales tous les métiers du domaine
de l'électronique de défense et de l'aéronautique.
Les principales filiales du groupe sont Alenia Difesa, Alenia Aérospajio
Agusta et Aermachi.
Alenia Difesa
a réalisé en 1996 un chiffre d'affaires de
1,5 milliard de dollars. Ses effectifs s'élevaient alors à
10.018 personnes.
Issue de la fusion en 1989 d'Aeritalia et de Selenia, Alenia Difesa est
dorénavant la filiale du groupe Finmeccanica chargée des
activités de défense (hors aéronautique militaire). Le
mariage en 1998 avec GEC-Marconi dans 3 de ses métiers (missiles,
systèmes navals et radars) est significatif de la stratégie de la
société.
Alenia Difesa développe son activité dans 5 secteurs principaux
représentés par les divisions :
Elle comporte deux divisions :
-
La division aéronautique
(huit usines, dont une au Texas)
participe dans le domaine militaire au programme EF 2000 -Eurofighter-
(21 % du consortium Eurofighter avec BAe, DASA, et CASA), au programme AMX
(avec Aermacchi et Embraer) et au programme FLA. Elle participe
également (au sein de la société conjointe LMATTS avec
Lockheed Martin) à la production du C27J. Dans le domaine de l'aviation
civile, elle est impliquée dans le programme ATR avec
Aérospatiale. L'entreprise a également signé un accord
avec Airbus Industrie pour la participation au développement de l'A3XX
et participait avec Avic of China et Singapore Technology au
développement d'une nouvelle famille d'avion de 100 places
désormais abandonné. Une partie importante de son activité
consiste dans la fabrication d'éléments de voiture mobile pour
Boeing (767 et 777) et d'éléments pour le MD80 de McDonnell
Douglas.
- La division Espace
(2.100 personnes, 7 usines) oeuvre dans le domaine
des :
- missiles : « Divisione Sistemi Missilistici »
(17 % du chiffre d'affaires)
- systèmes navals : « Divisione Sistemi
Navali » (16 % du chiffre d'affaires)
- radars : « Divisione Sistemi Radar » (30 % du
chiffre d'affaires)
- avionique : « Divisione Sistemi Avionici ed
Equipaggiamenti » (21 % du chiffre d'affaires)
- armements navals et terrestres : « Divisione
Otobreda » (16 % du chiffre d'affaires)
Alenia Aerospazio
a réalisé en 1997 un chiffre d'affaires
de 1,3 milliards de dollars. Elle emploie 12.300 personnes.
- satellites de télécommunication (Artemis pour l'Agence spatiale
européenne, European Mobile telecommunication system, Globalstar,
Intelsat, Eutelsat),
- senseurs satellitaires (radars altimétriques, radiomètres
à micro ondes) pour les programmes européens,
- satellites scientifiques,
- infrastructures spatiales en orbite.
Aermacchi
, quant à elle, réalise un chiffre d'affaire plus
modeste, de 182 millions d'euros en 1997, et occupe 1.772 personnes.
L'acquisition récente de la société SIAI-Marchetti,
appuyée par le ministère de l'industrie, a permis à
Aermacchi de devenir le principal constructeur italien d'avions
d'entraînement. Aermacchi a une activité réduite dans le
domaine de l'aviation civile, se consacrant surtout au secteur militaire. Les
principaux produits militaires développés par Aermacchi sont les
avions légers d'entraînement et d'attaque MB 99, AMX (en
coopération avec Alenia et Embraer), MB 399 (en coopération avec
Lockheed Martin et Raytheon-Hugues), YAK-130 destiné au marché
russe, en coopération avec le russe Yakovlev : le système
complet d'entraînement Primary Training System (PTS 2000) en
« joint-venture » avec DASA.
Agusta
enfin opère dans le secteur des hélicoptères
où elle a réalisé en 1997 un chiffre d'affaires de
492 millions d'euros (84 % venant des activités militaires).
Elle occupe 5.200 personnes.
(2) Quelques considérations stratégiques
Finmeccanica
détenue à 63 % par l'IRI
s'est vue
fixée par son actionnaire public une stratégie d'excellence dans
les domaines économique et financier pour toutes ses filiales, avec pour
objectif une vente ou un mariage avec des groupes européens,
activité par activité, dans les meilleures conditions possibles.
Cette stratégie s'est déclinée dans les différents
secteurs.
Dans le domaine
des missiles
, Alenia Difesa (avec GEC-Marconi) a
entrepris en 1998 des discussions sur les termes d'une alliance avec
Thomson-Aérospatiale (le programme franco-italien FSAF/ASTER constituant
une bonne base structurante) et en parallèle avec MBD (avec lequel il
coopère sur l'Otomat et le Milas). Un accord de principe a
été conclu avec BAe.
Dans le domaine de
l'aviation
, l'Italie a manifesté avec force sa
volonté de faire entrer Alenia Aerospazio dans la société
de plein exercice Airbus en cours de constitution, à hauteur de 8
à 10 %. Le Gouvernement italien a annoncé avoir
provisionné les crédits publics nécessaires au soutien de
l'A3XX. Il faut noter enfin que l'Italie participe au consortium EF 2000 avec
BAe, DASA et CASA.
L'hélicoptériste
Agusta, pour sa part, a noué une
alliance avec la société britannique GKN Westland (production de
l'hélicoptère EF 101) ce qui en fait un pôle d'importance.
Dans le domaine
des satellites
, des accords de principe ont
été conclu avec MMS.
L'Italie a d'ailleurs été associée aux discussions
étatiques sur la constitution d'une grande société
aérospatiale européenne (European Aerospace Defense Company). Ces
orientations qui d'ailleurs coïncident avec une volonté de
privatisation des différentes filiales ne doivent pas être
négligées.
Il faut cependant mettre en évidence quelques difficultés
posées en l'état à l'intégration de l'industrie
italienne dans les processus européens.
La première d'entre elles réside dans la nature publique des
entreprises aéronautiques qui, si l'on en croit les propos de certains
partenaires -BAe et DASA-, serait un obstacle majeur. Il faut raisonnablement
tempérer cette appréciation en ce sens que la place des
entreprises italiennes dans une des deux unités européennes plus
vastes qui sont en chantier ne serait pas telle que leur statut public dont le
changement est d'ailleurs programmé, puisse être
considéré comme un obstacle dirimant.
Il est d'ailleurs probable qu'une participation des entreprises italiennes
à un ensemble européen s'accompagnerait d'un changement de statut
de leur actionnariat, sans compter les effets mécaniques qui, de ce
point de vue, résulteraient de leur fusion avec des actifs
gérés par des personnes privées.
Une difficulté plus substantielle vient de la nature de certaines
activités des industriels italiens et de certaines de leurs alliances
qui font de l'industrie de la péninsule une industrie largement
tournée vers les Etats-Unis
.
La chose est évidente pour les hélicoptères où
l'alliance entre Agusta et Bell prévient tout apport italien à
cette partie des productions aéronautiques.
Pour les appareils commerciaux, le plan de charge de l'industrie italienne
lié à Boeing est important même si la cessation des
programmes de MDD va rapidement en réduire le volume.
Il reste à déterminer comment les industriels italiens sont
prêts à arbitrer entre leurs activités pour Boeing -qu'on
voit mal la firme américaine maintenir quelque soit le devenir de ses
partenaires italiens- et un renforcement de son ancrage européen.
Un élément important de réponse viendra assurément
des perspectives ouvertes par Airbus à des industriels italiens qui ont
des expériences mitigées en la matière, satisfaisante pour
l'A320 et plus encore les A340-500 et 600 mais beaucoup moins pour l'avion de
100 places
12(
*
)
, l'A318.
Une autre variable importante viendra des orientations retenues par Boeing qui
selon les témoignages recueillis est pris entre deux logiques :
celle, financière, au terme de laquelle les programmes conduits avec les
industriels italiens en passe d'extinction ne seraient pas remplacés,
des sous-traitances asiatiques étant plus avantageuses au regard de
considérations stratégiques et de coûts ; celle
où la poursuite de relations intimes avec l'industrie italienne permet
de conserver une forte présence en Europe.
En toute hypothèse, l'industrie italienne encore plus que son homologue
suscite toutes les convoitises comme réunissant un ensemble d'actifs
susceptibles de renforcer la position de celui qui s'assurera sinon de son
contrôle du moins d'une étroite association avec lui.
Il est d'ailleurs notoire qu'une banque d'affaires a récemment
acheté 15 % du capital de Finmeccanica au profit d'un industriel
que certains désignent comme particulièrement
intéressé par les perspectives offertes par la part italienne de
l'Eurofighter.
c) L'industrie aéronautique en Allemagne
L'industrie aéronautique allemande emploie environ
63 000 personnes et dégageait un chiffre d'affaires un peu
supérieur à 9 milliards d'écus en 1997.
Décimée après la dernière guerre mondiale, elle a
su se reconstituer autour d'une gamme d'activités diversifiée,
toutes conduites en coopération.
L'industrie allemande est dominée par Daimler-Benz Aerospace Group
(DASA) dont le chiffre d'affaires s'est élevé en 1997 à
7,8 milliards d'euros (environ 51 milliards de francs)
Sa répartition entre les différentes activités est
illustratrive de la présence relative de l'industrie aéronautique
allemande sur les différents métiers du secteur.
Chiffre d'affaires de DASA
(en millions de DM)
|
1997 |
1996 |
Avions commerciaux |
5,970 |
4,603 |
Avions militaires |
1,654 |
1,589 |
Espace |
1,105 |
1,012 |
Satellites |
1,450 |
1,183 |
Systèmes |
2,841 |
2,747 |
Moteurs |
2,963 |
2,311 |
Total |
15,983 |
13,445 |
Elle
dénote une prépondérance des activités de nature
commerciale mais aussi une place dans chaque secteur respectable mais seconde
en général.
L'industrie aéronautique est en Allemagne l'objet d'une grande attention
politique.
Elle a bénéficié dans le passé d'un soutien public
financier actif qui a d'ailleurs suscité des contentieux avec les
Etats-Unis.
Elle a fait l'objet d'un rapport gouvernemental récent
13(
*
)
récapitulant la stratégie des
autorités allemandes.
Principales conclusions du rapport Lammert
La
République fédérale d'Allemagne voit dans une industrie
aéronautique performante et compétitive un intérêt
politiquement comme économiquement vital. Dans les années
à venir, il importera que l'industrie aéronautique allemande
obtienne en cogestion un rôle de direction dans les domaines importants.
Ceci dépend de manière cruciale des décisions
concrètes et dont le report aurait de grandes conséquences sur la
situation et les perspectives de développement de l'industrie
aéronautique allemande. L'Allemagne ne prendrait plus part aux
décisions européennes concernant le développement de
nouveaux systèmes et ne pourrait plus maintenir les maîtrises
d'oeuvre de sous-systèmes qu'elle détient. A moyen terme, des
sites industriels et des emplois de haute qualification pourraient être
perdus.
Les discussions en cours sur une nouvelle structure européenne
seront largement déterminées par la dynamique
générée par le processus de consolidation engagée
en France.
L'objectif déclaré de l'industrie allemande consiste
à :
- conserver les marchés,
- garantir les capacités systèmes et les facultés
fondamentales correspondant à leurs compétences et leurs
capacités,
- garantir une importante participation allemande dans les programmes
stratégiques
- être un partenaire incontournable en Europe ou dans d'autres
coopérations internationales.
L'Allemagne voit là dans des structures européennes
relevant de l'économie privée une base déterminante pour
une compétitivité à l'échelle mondiale.
Les scénarios visant à doter l'industrie aéronautique
d'une structure efficace et compétitive à l'échelle
internationale ne sont pas encore suffisamment décantés. Une
très large intégration de toutes les activités
aéronautiques et spatiales européennes (« full
merger ») apparaît comme l'objectif le plus logique avec
toutefois de considérables implications en politique concurrentielle.
Les difficultés d'un tel scénario amène à
envisager un processus d'intégration par étapes successives dans
lequel plusieurs domaines de l'aéronautique et de l'espace
fusionneraient en unités de plus grande ampleur (« package
merger »).
Sur cette voie l'objectif de l'industrie allemande est de conserver l'actuel
portefeuille de compétences pour pouvoir préserver au mieux son
poids relatif dans une entreprise future entièrement
intégrée.
La partie la plus important d'un tel scénario concerne la
restructuration d'Airbus Industrie (AI). Les partenaires Airbus doivent
rapidement concrétiser la constitution d'une société
à capital européenne. Une importance particulière
réside d'abord dans les décisions relatives aux apports dans la
nouvelle société et à leur évaluation. Ces
décisions sont en rapport direct avec les sites industriels et les
emplois en Allemagne. Le gouvernement fédéral apporte un soutien
politique à la restructuration. Restructurée, Airbus pourrait
ultérieurement servir de noyau pour une intégration de
l'industrie aéronautique militaire, d'abord dans la construction
d'avions de transport.
Mais, la restructuration des seules activités civiles d'Airbus sous
forme d'une société européenne de capitaux ne permettra
pas, à moyen et à long terme, d'assurer de façon durable
la compétitivité d'une industrie aéronautique et spatiale
européenne.
La consolidation requiert aussi l'incorporation d'autres partenaires
européens comme par exemple l'Italie et la Suède.
Pour garantir la position acquise par Airbus sur le marché, des
décisions sont en outre nécessaires quant aux futures
stratégies projets et gammes de produits pour permettre
d'éliminer le monopole détenu par Boeing dans le domaine des
avions commerciaux de plus de 350 places. D'ici la fin 1998 devront
être achevés les travaux préparatoires pour une
décision du conseil de surveillance d'Airbus sur le nouveau gros porteur
A3XX.
Dans l'armement et d'un point de vue national le maintien d'une
capacité minimum demeure indispensable pour garantir les propres
compétences et les capacités nécessaires comme la
possibilité de participer aux réalisations communes et à
la coopération. Une amélioration du contexte
général appliqué à l'industrie d'armement
nécessite un marché européen de l'armement et des
approvisionnements qu'il faut soutenir politiquement. Pour cela, il importe en
particulier :
- de procéder à une large privatisation des entreprises
européennes de l'armement,
- d'harmoniser les politiques d'exportation et
- d'établir en Europe des règles communes d'approvisionnement.
En effet, la diminution de la part des investissements dans le budget de la
défense pose la question de savoir s'il est possible de maintenir le
minimum des capacités industrielles nécessaires du point de vue
stratégique. Dans cette perspective, l'on peut conclure que face
à la baisse des commandes provenant des forces armées nationales
et face à une compétition internationale renforcée,
l'exportation des armes est nécessaire pour maintenir l'essentiel des
capacités liées aux techniques e défense. Dans ce
contexte, l'harmonisation des politiques d'exportation dans les
différents pays concurrents joue un rôle essentiel. La
république fédérale souhaite un alignement sur le niveau
élevé de l'Allemagne.
Dans le domaine de la construction des avions de combat, il sera
impossible de maintenir, comme le par le passé, des capacités
parallèles. L'objectif visant à renforcer les synergies des
compétences civiles et militaires, tel que c'est aujourd'hui le cas aux
Etats-Unis, exige également une intégration croissante dans ce
domaine.
Dans un passé récent les exemples américains ont
montré combien des modifications structurelles pouvaient être
générées par des décisions concrètes portant
sur des projets. Sur ce point les décisions sur les programmes en cours
conditionnent les chances allemandes d'accompagner une aéronautique
européenne intégrée. De prompts décisions sont
particulièrement urgentes quant à la poursuite des programmes
Eurofighter 2000 FLA et des projets d'infrastructure satellitaires dans le
domaine de la navigation et des communications.
Les problèmes fondamentaux et les perspectives en suspens ne peuvent
être réglés qu'avec le soutien de l'échelon
politique. Sur ce point, des discussions doivent être poursuivies entre
les Etats au niveau le plus élevé. Les gouvernements partenaires
en particulier la France et la Grande-Bretagne devraient ainsi être
invités à désigner un fondé de pouvoir de rang
élevé.
Cette implication politique forte ne débouche pour autant pas sur la
conduite d'une vraie politique industrielle.
Le Gouvernement allemand, pourtant conscient des enjeux politiques d'un projet
aéronautique européen et largement pourvoyeur de fonds publics
à ses entreprises, s'abstient de toute influence sur les entreprises .
Il ne dispose à l'inverse de l'Etat britannique ou français
d'aucune « action spéciale » dans DASA.
Il a tout particulièrement insisté sur les inconvénients
du statut public d'Aérospatiale.
Cette abstention est le reflet d'une situation où, comme au Royaume-Uni,
les entreprises sont entièrement privées.
B. LES ENTREPRISES AMERICAINES SONT MIEUX ARMEES QUE LEURS CONCURRENTES EUROPEENNES
La
dimension des entreprises américaines supérieure à celle
des entreprises européennes et, avec quelques nuances,
l'éclectisme de leur activité leur offre des avantages
compétitifs importants.
Cette situation provient pour beaucoup des concentrations qui ont marqué
l'histoire récente de l'industrie aéronautique américaine
et qui contrastent avec les divisions des industriels européens. Elle
constitue non seulement un élément de puissance pour les
entreprises américaines mais aussi une source d'économies
publiques.
Elle confère au tissu industriel américain un ensemble de
caractéristiques qui font défaut en Europe. Compact face à
une industrie européenne encore éparpillée, il est
puissant, grâce à ses entreprises géantes, et
cohérent du fait d'un équilibre des portefeuilles
d'activités de ses acteurs lui assurant des ressources
diversifiées.
1. Les consolidations intervenues dans l'industrie aéronautique aux Etats-Unis
Le tableau ci-après rend compte de l'importance des processus de structurations intervenues dans l'industrie américaine depuis 1992.
Les consolidations dans l'industrie américaine de défense
Acteurs en 1992 |
Acteurs en 1997 |
Boeing |
Boeing/Mc Donnell/Rockwell |
Mc Donnell Douglas |
Lockheed/Martin |
Rockwell |
Raytheon Hugues |
Martin Marietta |
Northrop Grumman |
Lockheed |
|
Loral |
|
LTV |
|
GE Aerospace |
|
Raytheon |
|
Hugues |
|
Texas Instruments |
|
E-Systems |
|
Northrop Grumman |
|
Westinghouse |
|
Carlyle |
|
Les
principales consolidations industrielles intervenues aux Etats-Unis dont
été les suivantes :
Hugues-General Dynamics, UDLP, Martin Marietta-General Electric,
Northrop-Grumann-Vought, Martin Marietta-General Dynamics, Lockheed-Martin
Marietta, Hugues- CAE Link, Boeing-Rockwell, Boeing-Mc Donnell Douglas.
a) Des consolidations souhaitées par les pouvoirs publics
L'origine des restructurations intervenues aux Etats-Unis
mérite d'être évoquée. Même si leur
déroulement a suivi des logiques complexes et même si les
témoins varient sur ce point, il est acquis que
la volonté des
autorités politiques américaines a joué un rôle
essentiel.
La culture du milieu aéronautique américain reste
imprégnée par le souvenir du « last supper »
au cours duquel le secrétaire à la défense
américain aurait annoncé aux responsables des différentes
entreprises l'inéluctabilité de leur regroupement.
De façon plus prosaïque, les choix du Pentagone ont exercé
une influence décisive sur la fusion Boeing-MDD par exemple. Dans un
contexte de pertes de parts du marché commercial, MDD étant
devenu particulièrement vulnérable aux contrats militaires, le
choix de confier l'étude du « Joint Strike Fighter »
aux concurrents de MDD, Boeing et Lockheed Martin, a constitué un
élément déclenchant.
Cette part active au remodelage de l'industrie américaine qui
s'accompagne en contrepoint d'une opposition efficace à des projets
jugés négatifs (fusion Lockheed Martin / Northrop Grumman)
s'étend jusqu'à la prise en charge d'une part des coûts des
restructurations (v.supra)
L'intervention publique américaine en matière de concentrations
aéronautiques comme toute autre intervention dirigée vers des
entreprises privées ne peut certes pas réussir sans l'assentiment
d'une des entreprises concernées au moins lorsqu'il s'agit d'initier des
fusions.
Mais, il est démontré par l'exemple américain, d'une part,
qu'elle peut efficacement surmonter les réticences de l'entreprise-cible
et, d'autre part, que ses objectifs, sans doute autonomes sous certains
aspects, peuvent, et ont toutes chances de coïncider avec les
intérêts de l'un des partenaires.
b) Des objectifs largement communs aux entreprises et aux pouvoirs publics
L'examen
des objectifs
poursuivis par les acteurs des restructurations aux
Etats-Unis, qu'il s'agisse des pouvoirs publics ou des entreprises
privées, montre en effet que, différents par nature, ils
coïncident pourtant.
S'agissant des entreprises, les buts poursuivis sont assurément
axés autour des gains financiers des concentrations.
La logique des fusions consiste «
grosso modo
»
à accroître sa présence sur les marchés tout en
recherchant une diminution des coûts à travers une optimisation
des actifs regroupés.
Les regroupements aéronautiques ne permettent pas en
général d'additionner les chiffres d'affaires des entreprises qui
fusionnent. En effet, leurs produits étant au moins partiellement
concurrents, ces fusions conduisent dans un premier temps à nationaliser
les lignes de production. Ainsi chez Lockheed Martin, où les lignes de
produits ont été diminuées passant de 80 à 60, ou
encore de Boeing où les appareils commerciaux de MDD sont appelés
à l'extinction à l'exception peut-être du 717-200 si
toutefois Boeing en accepte la coexistence avec le 737.
Si donc les opérations de croissance externe ont un impact effectif plus
limité que leur impact théorique à court et moyen terme,
elles permettent toutefois
d'élargir l'activité
tout en
créant une situation où la concurrence est partiellement
éliminée pour l'avenir.
Elles permettent aussi et c'est capital
de diversifier l'activité
ce qui a joué un rôle majeur dans la fusion Boeing-MDD. Cette
dernière opération était, en effet, destinée moins
à augmenter le chiffre d'affaires commercial de Boeing qu'à
rééquilibrer l'activité de la firme en accroissant la part
militaire et aérospatiale de celle-ci.
La réduction des coûts est un objectif concomitant des
opérations de fusion dont la réalisation est le plus souvent
retardée.
Sans doute, les consolidations commencent-elles en général par
générer des coûts comme le montrent les tableaux
ci-après qui récapitulent les estimations faites, en la
matière, à partir de sept grandes restructurations intervenues
récemment aux Etats-Unis.
Coûts de quelques restructurations industrielles Etats-Unis
(en millions de dollars
|
Montants |
Hugues-General Dynamics |
319,1 |
UDLP |
38,5 |
Martin Marietta-General Electric |
233,9 |
Northrop-Grumman-Vought |
75,1 |
Martin Marietta- General Dynamics |
63,0 |
Lockheed- Martin Marietta |
419,5 |
Hugues-CAE Link |
38,7 |
TOTAL |
1.187,8 |
Source : General Accounting Office. Defense Industry
Restrcturing - Avril 1998.
La répartition de ces coûts est précisée ci-dessous.
Répartition des coûts de quelques
restructurations
industrielles américaines par catégories
(en millions de dollars)
Catégories de doûts |
Montants |
Coûts autres que de personnel |
|
Restructuration des usines |
547,4 |
Harmonisation des systèmes |
93,7 |
Restructuration des programmes |
124,8 |
Autres |
146,3 |
Coûts liés au personnel |
|
Mobilité |
140,4 |
Formation |
10,5 |
Autres |
9,3 |
Coûts de licenciements |
|
Indemnités |
95,8 |
Prolongation des allocations sociales |
4,1 |
Replacements |
4,1 |
Autres |
11,4 |
TOTAL |
1.187,8 |
Source : General Accounting Office. Defense Industry
Restrcturing - Avril 1998.
Les coûts des restructurations examinées se partagent entre les
charges des ajustements touchant le personnel pour à peu près
¼, le reste venant des restructurations de sites et de la mise en synergie
des produits et des moyens.
Les coûts supportés par les entreprises sont compensés par
des perspectives d'économies nettes.
Avec celles-ci, se présente un premier type de convergence
d'intérêt entre entreprises et pouvoirs publics. Mais il faut au
préalable évoquer les coûts pour les pouvoirs publics
susceptibles d'accompagner les restructurations.
Le premier d'entre eux s'attache aux risques de voir émerger une offre
monopolistique potentiellement coûteuse. Aux Etats-Unis, ce risque est
géré par des interventions publiques, réalisées
dans le cadre de la législation anti-trust et dans une affectation
équilibrée des moyens, destinées au maintien d'une
concurrence entre les entreprises.
Mais il faut souligner encore qu'il est illusoire d'espérer des
restructurations qu'elles ne s'accompagnent de conséquences sociales.
Les réductions d'effectifs consécutifs aux restructurations
industrielles aux Etats-Unis ont été nombreuses.
Pour les restructurations concernées par l'étude ci-dessus
mentionnée, elles se sont réparties comme indiqué
ci-dessous
Réductions d'effectifs associées à
quelques
restructurations
industrielles aux Etats-Unis
Opérations |
Projetées |
Réalisées |
Hugues-General Dynamics |
6.600 |
6.441 |
UDLP |
483 |
500 |
Martin Marietta-General Electric |
1.453 |
1.504 |
Northrop-Grumman-Vought |
450 |
450 |
Martin Marietta- General Dynamics |
1.150 |
1.250 |
Lockheed- Martin Marietta |
10.678 |
7.049 |
Hugues-CAE Link |
548 |
665 |
TOTAL |
21.362 |
17.859 |
Les
différentes restructurations qu'a traversées Northrop-Grumman au
cours de ces dernières années ont entraîné 5.000
licenciements sur un total de 40.000 employés.
Quant à la fusion entre Boeing et MDD elle devrait se traduire par une
très nette réduction des effectifs à travers l'abandon de
certaines productions (ainsi, le site historique de MDD à Long Beach qui
a déjà perdu 6.000 de ses 14.000 employés semble promis
à un avenir incertain) ou les gains d'efficacité
réalisés dans les fonctions transversales (gestion,
commerce, ...).
Les conséquences sociales des restructurations ne doivent donc pas
être dissimulées
. Elles sont importantes à court terme
ce qui d'ailleurs est conforme au poids des charges salariales dans les
entreprises aéronautiques qui les désigne comme une variable
importante d'ajustement des coûts.
Cet envers négatif des restructurations est cependant susceptible de
beaucoup varier selon les situations et dans le temps.
Les ajustements
observés aux Etats-Unis ne sont ainsi pas entièrement
représentatifs du fait des modalités particulières de la
gestion sociale dans ce pays et, surtout, des caractéristiques des
fusions américaines qui ont le plus souvent conduit à des
regroupements d'activités jusqu'alors concurrentielles et non pas
complémentaires. Il s'agit là d'une différence essentielle
avec ce qui pourrait advenir en Europe.
Surtout, le coût social des restructurations est susceptible de
s'atténuer dans le temps à mesure que la
compétitivité des entreprises s'améliore, leurs parts de
marché grandissant.
Cette perspective amène à tirer la conclusion forte que le
coût social de l'immobilisme a toute chance d'être plus
élevé que celui des rationalisations industrielles.
Cette dernière conclusion est confortée par la
considération des économies attendues de ces opérations
par les pouvoirs publics dont les données ci-dessous donnent un
aperçu à partir de quelques unes des opérations
menées aux Etats-Unis.
Économies estimées pour le ministère de
la
défense américain du fait
de quelques restructurations
industrielles aux Etats-Unis
(en millions de dollars)
Opérations |
(I)
|
(II)
|
Économies nettes |
Ratio (I/II) |
Hugues-General Dynamics |
505,8 |
132,5 |
373,3 |
3,82 - 1 |
UDLP |
79,7 |
29,1 |
50,6 |
2,74 - 1 |
Martin Marietta-General Electric |
305,4 |
156,3 |
149,1 |
1,95 - 1 |
Northrop-Grumman-Vought |
263,4 |
46,7 |
216,7 |
5,64 - 1 |
Martin Marietta- General Dynamics |
139,6 |
50,7 |
88,9 |
2,75 - 1 |
Lockheed- Martin Marietta |
2.675,8 |
405,9 |
2.269,9 |
6,59 - 1 |
Hugues-CAE Link |
148,1 |
35,0 |
113,1 |
4,23 - 1 |
TOTAL |
4.117,8 |
856,2 |
3.261,6 |
4,81 - 1 |
1)
Crédits publics consacrés à l'accompagnement des
restructurations.
Source : General Accounting Office. Defense Industry Restructuring - Avril
1998.
Les chiffres mentionnés ici font apparaître une économie
globalement importante puisque les opérations envisagées auraient
permis d'économiser 4,1 milliards de dollars (soit près de 27
milliards de francs de dépenses publiques).
L'origine de ces économies publiques provient sans doute des gains
d'efficacité réalisés au sein des entreprises mais aussi
des rationalisations intervenues dans la gestion des programmes publics.
Elles dégagent des marges de manoeuvre budgétaires susceptibles
de profiter aux contribuables ou d'être allouées à des
dépenses publiques alternatives.
2. BOEING : la suprématie d'un concurrent en pleine restructuration
Depuis sa fusion avec Mac Donnell-Douglas, Boeing est plus encore qu'auparavant l'entreprise qui domine, et de loin, le paysage aéronautique mondial. Les difficultés traversées par l'entreprise doivent être relativisées. Même si certaines options peuvent susciter des inquiétudes pour l'avenir, la capacité de rebond de l'entreprise est telle qu'elle que sa suprématie demeure face à des concurrents désunis.
a) Une suprématie maintenue
Données financières relatives à Boeing 14( * )
en millions de dollars
|
1998 |
1997 |
1996 |
1995 |
1994 |
Chiffres d'affaires |
56.154 |
45.800 |
35.453 |
32.960 |
34.969 |
Résultat Net |
1.216 |
632 15( * ) |
1.905 |
1.479 |
1.483 |
Carnet de commandes |
112.896 |
121.640 |
114.173 |
95.488 |
86.596 |
Recherche-Développement |
1.895 |
1.924 |
1.633 |
1.674 |
2.076 |
Investissement Net |
1.584 |
1.391 |
971 |
747 |
883 |
Dette totale |
6.972 |
6.854 |
7.489 |
5.401 |
5.247 |
Dividendes |
564 |
557 |
480 |
434 |
395 |
Evolution des effectifs
Même s'ils sont en retrait par rapport aux résultats
enregistrés en 1996, les résultats de Boeing sont en nette
amélioration en 1998 avec 1,2 milliard de dollars de
bénéfices, soit le double du résultat de 1997.
En réalité, l'amélioration est encore plus importante
puisqu'en 1997 des charges exceptionnelles résultant de la fusion
avec MDD avaient été constatées. Une correction de 876
millions de dollars après impôts (1 400 avant
impôts) pour tenir compte d'une estimation des stocks et d'engagements
hors bilan auprès des clients avait conduit à extérioriser
une perte de 178 millions de dollars.
Présentation détaillée des
résultats
de Boeing
1996-1998
|
RESULTATS NETS |
CHIFFRE D'AFFAIRES
|
||||
|
1998 |
1997 |
1996 |
1998 |
1997 |
1996 |
Avions commerciaux |
63 |
- 1.837 |
956 |
35.545 |
26.929 |
19.916 |
1. Avions militaires et missiles |
1.283 |
1.317 |
1.387 |
12.990 |
18.125 |
14.934 |
2. Espace et communications |
248 |
|
|
|
|
|
Sous-Total 1 + 2 |
1.531 |
1.317 |
1.387 |
19.879 |
|
|
Autres |
367 |
381 |
329 |
730 |
746 |
603 |
Résultat d'exploitation |
1.567 |
- 256 |
2.485 |
|
|
|
Autres |
283 |
428 |
388 |
|
|
|
Charges de la dette |
- 453 |
- 513 |
- 393 |
|
|
|
Résultat avant impôt |
1.397 |
- 341 |
2.480 |
|
|
|
Impôt sur les sociétés |
277 |
- 163 |
662 |
|
|
|
Total |
1.120 |
- 178 |
1.818 |
56.154 |
45.800 |
35.453 |
Les
résultats des différentes branches de l'entreprise ont
évolué de façon très contrastée.
La section « défense et espace » désormais
séparée en deux divisions autonomes (« Avions
militaires et missiles » d'un côté, « Espace
et communication », de l'autre) est une source de profit plus solide
que la division des avions commerciaux qui a connu des variations très
accusées de ses performances.
Le chiffre d'affaires résultant des ventes d'appareils
commerciaux
a pourtant occupé au cours des trois dernières
années une place de plus en plus importante, passant de 56 à 63 %
du total entre 1996 et 1998.
Les livraisons se sont réparties comme suit :
Structure des livraisons
|
1998 |
1997 |
1996 |
737 Classic |
116 |
132 |
76 |
737 NG |
165 |
3 |
- |
747 |
53 |
39 |
26 |
757 |
50 |
46 |
42 |
767 |
47 |
41 |
42 |
777 |
74 |
59 |
32 |
MD-90 |
8 |
16 |
12 |
MD - 80 |
34 |
26 |
24 |
MD- 11 |
12 |
12 |
15 |
Total |
559 |
374 |
269 |
Elles
ont généré 20 milliards de dollars de recettes en 1996 et
35 milliards en 1998 soit une progression de 75 %. Cette augmentation du
chiffre d'affaires est moins importante que celle des ventes qui ont plus que
doublé. Cela tient à deux facteurs concomitants : une
augmentation de la part des avions de faible capacité, moins
rémunérateurs , dans l'ensemble à quoi s'ajoutent sans
doute des tensions sur les prix de vente.
La marge d'exploitation de la division s'est ainsi considérablement
réduite passant de plus de 10 % en 1996 à 4 % en 1998
après avoir fléchi de moitié entre 1996 et 1997.
Cette évolution provient certes de la dégradation des conditions
d'extériorisation du chiffre d'affaires de l'entreprise.
La montée en puissance des nouveaux appareils sur lesquels les marges
sont moins élevées que sur les appareils plus anciens et des
pressions sur les prix de vente dans un contexte économique
perturbé et de forte concurrence avec Airbus sont également
responsables de cette situation. Cependant, ce dernier facteur ne doit pas
être surestimé.
La capacité d'Airbus à livrer une guerre des prix apparaît
en effet limitée -ce qu'illustre l'évolution des résultats
du consortium en 1998 qui, malgré des succès commerciaux,
auraient été lourdement négatifs. Au regard d'un tel
combat, Airbus est en effet vulnérable en raison de quatre
faiblesses : une moindre profitabilité ; le monopole de Boeing
sur le segment haut du marché ; le caractère exclusivement
commercial de ses productions quand Boeing peut compter sur les flux plus
continus des crédits militaires et spatiaux qu'elle sait convertir en
marges ; enfin le défaut de maîtrise du dollar, la
compétition par les prix supposant pour Airbus en cours du dollar
relativement élevé.
Les autres facteurs de dépréciation des marges de Boeing viennent
des difficultés d'assurer une production en forte augmentation avec des
pénuries de matériaux et d'équipements et une baisse
importante de la productivité du travail. Elles sont en passe
d'être résolues à la fois par une adaptation des moyens de
production passant notamment par un effort signification de formation et par
l'évolution naturelle des marchés.
Le chiffre d'affaires du segment spatial et de défense
s'est
développé moins rapidement, sur un rythme toutefois significatif,
avec une progression d'un tiers entre 1996 et 1998. Il s'élève
à 19,9 milliards de dollars
16(
*
)
répartis en 13 milliards pour les avions militaires et les missiles et
6,9 milliards, pour la division « Espace et
communications ».
Mais, malgré le développement du recours par le Pentagone aux
marchés à remboursement de coûts par rapport aux
marchés à prix fixes, plus propices à
l'extériorisation de bénéfices, Boeing trouve dans ces
activités à forte marge d'exploitation (12,7 % en 1998 avant
frais de recherche et développement) une source permanente de profit.
C'est d'ailleurs cette considération qui a primé lors de
l'absorption de MDD qui a permis un rééquilibrage des
activités de l'entreprise.
La suprématie de Boeing s'en est trouvée renforcée
malgré les coûts transitoires de fusion avec une entreprise
à la culture différente et même si la fusion n'a pas
débouché sur une addition des chiffres d'affaires des deux
firmes. Cet objectif n'était d'ailleurs pas recherché, la
maximisation des profits commandant de se centrer sur les activités les
plus profitables des deux entités au prix de restructurations
coûteuses dans l'immédiat mais porteuses d'avenir.
b) Quelques options contestées
Une entreprise aéronautique doit faire face à des besoins d'investissement importants qu'il s'agisse d'investissements en recherche-développement ou d'investissements productifs. Elle doit aussi disposer d'une main-d'oeuvre qualifiée sans laquelle elle rencontre des problèmes de performance. Or, certaines annonces suscitent des inquiétudes sur ces deux plans.
(1) La recherche-développement
L'effort annuel de recherche-développement de Boeing s'est stabilisé entre 1,5 et 2 milliards de dollars au cours des 5 dernières années. En 1998, il s'est élevé à 1,9 milliard comme en 1997. Mais le ressaut enregistré alors par rapport à l'année précédente où les dépenses de recherche s'étaient élevées à 1,6 milliard de dollars n'est pas entièrement significatif ; il provient essentiellement de l'intégration de Rockwell.
Evolution des charges de recherche-développement
Les charges de recherche varient fortement d'une division à l'autre de
l'entreprise.
Boeing
Dépenses de R-D par segment
(en millions de dollars)
|
1996 |
1997 |
1998 |
|||
|
Niveau |
en % du CA |
Niveau |
en % du CA |
Niveau |
en % du CA |
Aviation commerciale |
1.156 |
5,8 |
1.208 |
4,5 |
1.021 |
2,9 |
Avions militaires et missiles |
N.C. |
N.C. |
N.C. |
N.C. |
304 |
2,3 |
Espace et communications |
N.C. |
N.C. |
N.C. |
N.C. |
570 |
8,3 |
Plus de
la moitié de l'effort de recherche provient encore de la branche des
avions commerciaux en 1998 malgré une montée en charge des autres
divisions et une baisse des coûts de recherche de la division civile.
Celle-ci vient de l'achèvement des grands programmes
développés ces dernières années et de l'absence,
peut-être apparente, de nouveaux programmes significatifs dont
témoigne le tableau ci-après.
|
|
1995 |
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
2000 |
2001 |
777-200 |
|
|
|
|
|
|
|
|
777-200ER |
|
|
|
|
|
|
|
|
777-300 |
|
|
|
|
|
|
|
|
737-700 |
|
|
|
|
|
|
|
|
737-800 |
|
|
|
|
|
|
|
|
737-600 |
|
|
|
|
|
|
|
|
737-900 |
|
|
|
|
|
|
|
|
757-300 |
|
|
|
|
|
|
|
|
767-400ER |
|
|
|
|
|
|
|
|
717-200 |
|
|
|
|
|
|
|
|
Source : Boeing. Rapport annuel 1998
Le niveau de l'effort de R et D de Boeing apparaît relativement modeste
et a pu susciter les réserves de certains analystes et quelques
réactions de la part de l'administration américaine. Si son
évolution n'apparaît pas compatible avec un maintien de la
capacité installée de recherche, son niveau est pourtant
très substantiel. Manifestation des effets de taille, il paraît
pouvoir concilier un « trend » d'innovations satisfaisant
et l'extériorisation de marges financières propres à
séduire les investisseurs.
(2) Les investissements
Il en va de même pour les investissements que la fusion avec MDD a permis au surplus de rationaliser.
Boeing
Investissement par segment
(en millions de dollars)
|
1996 |
1997 |
1998 |
|||
|
Niveau |
en % du CA |
Niveau |
en % du CA |
Niveau |
en % du CA |
Aviation commerciale |
336 |
1,7 |
531 |
2 |
754 |
2,1 |
Avions militaires et missiles |
N.C. |
N.C. |
N.C. |
N.C. |
198 |
1,5 |
Espace et communications |
N.C. |
N.C. |
N.C. |
N.C. |
273 |
4 |
(3) La politique d'effectifs
L'aspect
le plus contestable de la gestion de Boeing reste sans doute la
flexibilité des effectifs que l'entreprise pratique sans états
d'âme. Il ne s'agit pas ici d'en déplorer les conséquences
sociales mais d'insister sur les difficultés qu'elle peut provoquer pour
l'entreprise elle-même. Cette modalité de gestion sociale a en
effet suscité des goulots d'étranglement. Quand l'entreprise a
dû faire face au développement de commandes adressées
à elle, elle ne disposait plus de la main d'oeuvre nécessaire, ni
en quantité, ni en qualité.
Il est évidemment dangereux dans une industrie où la main
d'oeuvre apparaît comme assez proche d'un investissement
stratégique d'adopter une gestion des personnels qui,
dépréciant régulièrement cet investissement, n'en
assure pas le renouvellement ni même le simple maintien.
Pour autant, cette capacité d'adaptation permanente de charges
considérées comme des coûts variables, quelque choquante
qu'elle soit, est sans doute l'un des atouts de l'entreprise américaine.
Si, dans la période récente, elle a pu constituer un handicap
c'est très largement en raison de la situation exceptionnellement
favorable de l'emploi aux Etats-Unis. Dans les situations où
l'économie américaine ne connaît pas le plein emploi, une
pénurie telle que celle qui a été observée ne se
rencontre pas.
Les entreprises européennes malgré le chômage qui
sévit en Europe, ne disposant pas d'un tel réservoir de main
d'oeuvre, ne peuvent envisager d'adopter une telle flexibilité que
pourtant certaines d'entre elles pourraient souhaiter mettre en oeuvre,
évoluant dans des espaces économiques et politiques où une
telle stratégie serait acceptée.
3. Des entreprises européennes encore dispersées
Le schéma ci-après rend compte quant à lui de la dispersion de l'industrie européenne.
Organigramme de l'industrie de défense
européenne
après les opérations Thomson CSF
et Aérospatiale Matra
Hautes Technologies mais avant la fusion BAe GEC Marconi
51 %
Source : CLSE
49 %
50 %
50 %
50 %
100 %
30 %
50 %
51 %
50 %
50 %
30 %
37,9 %
33 %
30 %
38 %
12 %
4,2 %
30 %
50 %
20 %
20 %
37,9 %
70 %
50 %
50 %
50,1 %
49,9 %
33 %
33 %
16 %
49 %
6 %
48 %
4 %
100 %
49,9 %
45,8 %
49 %
33 %
GIE
Société cotée
Mac
Alenia Marconi
Matra Marconi Space
Alenia
ATR
Finmeccanica
Daimler-Chrysler
Matra BAE
Dynamics
GEC Marconi
MMDD (Matra Marconi Dasa Dorner)
SAAB
DASA
LFK
BAE
CASA
Thomson Marconi Sonar
Gtdar (Radars)
Eurofighter
Alcatel
Thomson CSF
JV Satellites
Thomson SA
Dassault
Industrie
Dassault Aviation
Aérospatiale
Airbus (GIE)
Euromissile
Eurocopter
État Français
Lagardère SCA
Cette dispersion a pour conséquence la coexistence d'entreprises souvent sous-dimensionnées et en situation paradoxale de concurrence et d'alliances.
a) British Aerospace (BAe)
(1) Histoire récente
British
Aerospace, qui comptait 47.000 salariés en 1996 contre 102.500 en
1992, regroupe deux grandes divisions :
-
British Aerospace Defence
qui rassemble
British Aerospace
Systems
, maître-d'oeuvre des programmes militaires,
British
Aerospace Military Aircraft
, constructeur d'avions de combat (Tornado,
Harrier, Gripen, Hawks, Eurofighter),
Matra British Aerospace Dynamics
(missiles) et
Royal Ordnance
(armes et munitions) ;
-
British Aerospace Commercial Aerospace
chargée de la
fabrication des ailes des Airbus et de la commercialisation des avions
régionaux.
British Aerospace est privatisée depuis 1985, mais l'Etat
détient une « golden share » à laquelle sont
attachés les droits suivants :
- droit de limiter la participation étrangère dans le
capital ;
- droit de veto sur la modification de certains articles des statuts
(règle selon laquelle aucun actionnaire ou groupe d'actionnaires
agissant de concert ne peut détenir plus de 15 % des actions, par
exemple) ;
- droit de s'assurer que les directeurs du « Board » sont
bien de nationalité britannique ;
- droit d'assister et de participer, sans droit de vote, aux
délibérations du conseil d'administration.
Le plafond de la participation étrangère a été
relevé pour renforcer l'attraction, financière de l'entreprise.
Initialement fixé à 14,9 %, il a été
relevé à 29,5 % en 1989. Il dépasse désormais
40 %. British Aerospace et Rolls Royce sollicitent d'ailleurs
régulièrement le gouvernement afin qu'il lève cette
règle contraignante, tant d'un point de vue financier (moindre
liquidité du titre) que d'un point de vue stratégique (obstacle
aux indispensables alliances internationales). Toujours est-il que la
participation étrangère dans British Aerospace
s'élève déjà aujourd'hui à plus de 26 %
dont l'essentiel provient de fonds de pension américains.
BAe, dans le passé récent, a traversé de profondes
évolutions
La crise de 1992
De
1987 à 1992, British Aerospace s'est lancée dans une politique
ambitieuse de croissance externe. La stratégie suivie était
surtout d'inspiration financière : il s'agissait de réduire
l'exposition au risque des actionnaires en diversifiant le portefeuille
d'activités, pratique courante dans les années 1980.
Les principales acquisitions ont été les suivantes :
- 100 % de
Royal Ordnance Plc
(munitions) ;
- 100 % de
Ballast Nedam NV
, deuxième société
de construction néerlandaise, en raison de synergies au sein du groupe
dans le cadre du contrat Al Yamamah qui prévoyait la construction de
bases aériennes (1987) ;
- 80 %
d'Austin Rover
, racheté pour 150 millions de
livres seulement à l'Etat, en 1988. Les conditions de cession
étaient à ce point avantageuses qu'elles ont suscité une
enquête des autorités de Bruxelles ;
- 100 %
d'Arlington Securities
(promotion immobilière)
(1989) ;
- 100 % de
Heckler & Koch
(fabricant allemand d'armes de petit
calibre), afin de compléter la gamme de Royal Ordnance (1991) ;
- 30 % des parts de
Hutchinson Telecommunications UK Ltd,
par pure
logique de diversification financière (1991) ;
- 100 % de
BMARC (munitions)
qui viennent aussi renforcer Royal
Ordnance (1992) ;
- 100 % de
Dowty-SEMA
(systèmes navals) qui est
incorporé à British Aerospace SEMA.
Mais les résultats se sont fortement dégradés à
partir de 1990. La branche aviation civile était en situation de
quasi-faillite en 1992 (337 millions de livres de pertes pour un chiffre
d'affaires de 1.650 millions de livres).
A partir de 1992, British Aerospace a mis en oeuvre un programme drastique
de restructurations
dont les principes ont été :
- le recentrage des activités sur l'aéronautique et la
défense, les « core businesses » (métiers de
bases) ;
- la rationalisation des activités conservées afin de gagner en
productivité au niveau des gammes de produits et des effectifs ;
- la recherche de partenaires industriels.
Aussi British Aerospace a-t-il procédé à des cessions
importantes, dont celles :
- de British Aerospace Corporate Jet Inc. à Raytheon, qui fait pourtant
partie du métier de base de British Aerospace, pour 250 millions de
livres (1993), mais dont le marché était en crise ;
- de Ballast Nedam NV (octobre 1993), pour 175 millions de livres, suite
aux abandons de projets de bases aériennes saoudiennes ;
- de 80 % des parts dans Rover à BMW pour 800 millions de
livres (début 1994) ;
- des activités spatiales (British Aerospace Space Systems), pour
56,4 millions de livres, à Matra Marconi Space, filiale commune
à GEC Marconi (49 %) et Matra-Hachette (51 %).
La production des avions régionaux turbopropulseurs Jetstream 31,
41 et 61 (ATP) a été progressivement arrêtée entre
1995 et 1997.
Les suppressions d'emplois ont été massives (41.700 entre 1990 et
1993). Au total, compte tenu des cessions d'activités ou des
suppressions d'emplois, les effectifs ont connu l'évolution
suivante :
Evolution des effectifs de British Aerospace : nombre d'employés en fin d'année
|
1995 |
1996 |
Défense |
37.400 |
30.000 |
Aviation civile |
21.900 |
11.800 |
Rover |
33.500 |
- |
Immobilier et Construction |
5.600 |
100 |
Autres et siège |
4.100 |
500 |
Sous-total groupe |
102.500 |
42.400 |
Joint-ventures (au prorata) |
- |
4.600 |
Total |
102.500 |
47.000 |
Source : British Aerospace, rapport annuel 1996
Enfin,
des joint-ventures ont été établies qui permettent de
partager les risques :
- British Aerospace SEMA, en juillet 1991, à 50/50 entre British
Aerospace et SEMA Group (systèmes navals) ;
- Matra British Aerospace Dynamics, à 50/50 entre British Aerospace et
Matra Défense (missiles), en octobre 1996 ;
- Aero International (Régional)-AIR- avec ATR (GIE regroupant
Aerospatiale et Alenia), en 1995.
Avant la fusion avec GEC-Marconi, le groupe offrait le visage d'une
entreprise principalement tournée vers les « marchés
militaires », aux résultats financiers brillants mais soumise
à quelques fragilités.
(2) Un groupe de défense
Le groupe est structuré en deux grandes divisions opérationnelles à l'activité principalement orientée vers les produits de défense.
Chiffres d'affaires consolidés passés et à venir (prévisions) de Bae
(en millions de livres)
|
1992 |
1994 |
1996 |
1997 (p) |
1998 |
Défense |
4.316 |
4.869 |
5.339 |
5.606 |
5.886 |
Aviation civile |
1.665 |
1.934 |
2.120 |
2.403 |
2.320 |
Immobilier |
88 |
84 |
76 |
78 |
81 |
Automobile |
3.427 |
807 |
- |
- |
- |
BTP |
792 |
- |
- |
- |
- |
Autres & siège |
332 |
299 |
34 |
32 |
32 |
Intra-groupe |
(407) |
(120) |
(128) |
(137) |
(145) |
Total |
10.213 |
7.873 |
7.441 |
7.983 |
8.174 |
Sources - Rapport annuel Bae 1996 et NatWest Securities
Juin
1997
Le groupe s'organise désormais autour de deux grandes activités
principales, une troisième venant faire l'appoint.
British Aerospace Defence Ltd
La division Défense est le noyau dur de l'activité de British
Aerospace
. D'abord parce qu'elle réalise 70,5 % des
7,44 millions de livres de chiffre d'affaires de British Aerospace, soit
5,339 millions de livres, ensuite parce qu'elle est la source des profits
de British Aerospace (553 millions de livres de résultat
opérationnel), la division aviation civile subissant toujours des pertes.
Au-delà des avions de combat qui demeurent le noyau dur de son
activité,
British Aerospace Defence a l'ambition d'embrasser
l'ensemble des métiers liés à la défense
pour
asseoir son leadership sur le marché de la maîtrise d'oeuvre.
Aviation civile (ou commercial aircraft)
La division aéronautique civile a longtemps pesé sur les
résultats du groupe. Elle a réalisé 28 % des ventes
de l'année 1996, soit 2.120 millions de livres, mais
enregistre encore des pertes (résultat opérationnel
négatif de 78 millions de livres en 1996).
Cette division s'organise autour de
deux pôles
:
-
le
pôle Airbus
: British Aerospace détient
20 % du GIE Airbus Industries, une part proportionnelle de la production
lui revient. Il s'agit pour l'essentiel de la fabrication des ailes et des
circuits d'alimentation en carburant (British Aerospace Airbus Ltd et Airbus
Industrie BIE). British Aerospace participe au développement de l'avion
de transport du futur (Euroflag SRL). Le pôle Airbus est plutôt
profitable et permet de compenser, mais juste partiellement, les pertes de
Regional Aircraft ;
-
le pôle régional Aircraft
: c'est la grande source
de pertes que British Aerospace cherche à éradiquer, soit en
arrêtant la production (Jetstream), soit en restructurant dans le cadre
de partenariats (Avro est incorporé dans AIR, consortium
anglo-franco-italien).
Théoriquement, il devrait exister des synergies avec l'aviation
militaire. A supposer que ce soit le cas, il ne semble pas qu'elles soient
exploitées à fond dans la mesure où, par exemple, les deux
divisions emploient des systèmes de conception assistée par
ordinateur (CAO) incompatibles.
Il faut noter cependant que la filiale Aerostructures travaille pour le compte
des deux divisions Military Aircraft et Commercial Aerospace.
La division immobilière (property development)
C'est la troisième division, relativement marginale, de British
Aerospace, mais qui peut être la source de profits significatifs.
(3) Un groupe financièrement puissant
L'analyse financière du groupe fait apparaître les données expoées ci-dessous:
Evolution passée et prévisible du résultat opérationnel de Bae
(en millions de livres)
|
1992 |
1994 |
1996 |
1997 |
1998 |
Défense |
352 |
412 |
553 |
600 |
647 |
Aviation civile |
(337) |
(156) |
(78) |
(13) |
64 |
Immobilier |
2 |
6 |
(1) |
0 |
0 |
Rover |
(80) |
- |
- |
- |
- |
BTP |
14 |
- |
- |
- |
- |
Autres & siège |
(38) |
6 |
(19) |
(10) |
(10) |
Total |
(87) |
268 |
455 |
577 |
701 |
Sources - BAe Rapport annuel 1996 et NatWest Securities Juin 1997
Evolution des taux de marge brute
|
1992 |
1994 |
1996 |
1997 |
1998 |
Défense |
8,1 |
8,5 |
10,4 |
10,7 |
11 |
Aviation civile |
(20,2) |
(8,1) |
(3,7) |
(0,5) |
2,8 |
Immobilier |
2,3 |
7,1 |
(1,3) |
0 |
0 |
Total |
(0,3) |
3,4 |
6,1 |
7,2 |
8,6 |
Sources - BAe Rapport annuel 1996 et NatWest Securities
Juin
1997
Les taux de marge se redressent au rythme des efforts de productivité
importants consentis par BAe. Ils atteignent 6,1 % en 1996, à
comparer avec les 8 % du grand rival, GEC.
Les perspectives d'avenir suivent celles du chiffre d'affaires, ce qui est
logique compte tenu du double mouvement d'abaissement du point mort et
d'augmentation des ventes.
Analyse de la performance financiere de BAe
-
Analyse de performance (1)
1995
1996
Ratios de profitabilité :
- retour sur actif total (%)
4,3
5,9
- retour sur capital immobilisé (%)
8,0
11,3
- marge de profitabilité (%)
5,3
6,1
- retour sur fonds propres (%)
35,5
26,9
Ratios de structure :
- fonds propres/total des dettes (%)
13,8
28,0
- fonds propres/actif total (%)
12,13
21,95
Productivité du travail
- salaire moyen
22.333,3
22.931,0
- profit par unité de salaire versé (£)
0,33
0,45
- profit par tête (£)
7.333,33
10.363,00
- CA par tête (£)
147.200
169.000
Ratio d'exportation (%)
81,0
87,0
1. dans toute cette analyse, le profit retenu est le bénéfice avant impôt.
La trésorerie du groupe s'est nettement redressée d'abord sous l'effet des produits des importantes cessions d'actifs réalisées par BAe puis grâce aux flux du cash flow courant . L'assainissement est bien réel et BAe peut désormais compter sur des flux de trésorerie réguliers.
Ce faisant, British Aerospace a reconstitué un « trésor de guerre » qui, estimé à 8 milliards de livres, lui donne des marges de manoeuvre impressionnantes même si certains traitements comptables 17( * ) peuvent faire illusion.
(4) Des facteurs de vulnérabilité
Malgré ces excellents résultats financiers, BAe
est
guettée par quelques sérieux éléments de
vulnérabilité.
Le premier d'entre eux tient aux ambiguïtés d'une activité
très -trop ?- majoritairement axée autour des productions de
défense. Si celles-ci apparaissent rémunératrices, il ne
faut pas négliger les risques d'une poursuite de la réduction de
la « demande militaire » non pus que quelques inconnues
importantes sur les perspectives de marges associées à des
programmes nouveaux comme l'Eurofighter.
Un deuxième facteur de vulnérabilité tient à la
place des exportations dans le chiffre d'affaires de BAe.
Répartition géographique du chiffre d'affaires consolidé de BAe
(en %)
|
1996 |
1995 |
Royaume-Uni |
13,6 |
17,2 |
Reste de l'Europe |
20,3 |
17,1 |
Moyen-Orient |
41,2 |
40,9 |
Etats-Unis et Canada |
9,6 |
10,8 |
Asie - Pacifique |
14,1 |
12,8 |
Amérique Latine |
0,7 |
0,8 |
Afrique |
0,5 |
0,5 |
Total |
100 |
100 |
Source : BAe Rapport annuel 1996.
La répartition géographique du chiffre d'affaires de BAe
révèle la grande dépendance de l'entreprise à
l'égard du Moyen-Orient, du fait en particulier du poids du contrat
« Al Yamamah » avec l'Arabie Saoudite (20 % du chiffre
d'affaires de l'entreprise). Or, les marchés à l'exportation sont
sans doute particulièrement rémunérateurs -les clients
payent en général d'avance- mais aussi fort concurrentiels. Leur
pérennité n'est pas garantie et la diminution des commandes du
royaume saoudien pourrait mettre en difficulté l'entreprise.
Enfin, BAe qui dispose d'une réelle expertise technique, la plupart du
temps insuffisante toutefois pour lui assurer la maîtrise entière
de ses produits, pousse sans doute trop loin sa logique financière en
réduisant excessivement son effort de recherche propre.
Eléments sur le niveau des dépenses
autofinancées
de R et D de quelques entreprises
|
1995 |
% du CA |
1994 |
1993 |
1992 |
Boeing |
816.050 |
6,5 |
1.097.513 |
1.069.818 |
1.188.973 |
Aérospatiale |
511.800 |
8 |
562.243 |
683.805 |
322.42 |
Thomson |
493.230 |
5 |
514.698 |
546.204 |
570.672 |
GEC |
412.000 |
7,1 |
406.000 |
398.000 |
417.000 |
Snecma |
312.796 |
12,6 |
390.633 |
460.699 |
381.545 |
Rolls-Royce |
206.000 |
5,7 |
218.000 |
253.000 |
229.000 |
Raytheon |
203.259 |
2,7 |
173.652 |
179.987 |
186.699 |
Mc Donnell |
200.309 |
2,2 |
191.292 |
219.631 |
327.837 |
BAe |
119.000 |
2,1 |
99.000 |
168 |
151.000 |
Northrop Grumman |
105.629 |
2,4 |
77.933 |
62.475 |
59.899 |
Source : Départment of Trade & Industry, the UK R&D Scoreboard 1996.
b) Daimler-Benz Aerospace (DASA)
DASA
offre le visage d'une entreprise en voie de redressement financier, fortement
impliquée dans les activités civiles mais, qui, souvent, souffre
d'une position relativement seconde.
Le chiffre d'affaires de DASA s'est élevé à près de
15,3 milliards de DM en 1997, en hausse de 20 % par rapport à 1996. Son
résultat d'exploitation brut s'est redressé passant d'une perte
de 443 millions de DM en 1996 à un bénéfice de 222
millions de DM.
L'entreprise a ainsi confirmé son redressement la très profonde
crise qu'elle a traversé à partir de 1994.
Après 438 millions de marks de pertes en 1994, DASA avait vu en effet
celles-ci atteindre 4,18 milliards de marks en 1995.
Daimler Benz Aerospace Airbus a été la plus touchée des
divisions de DASA. En 1995, son chiffre d'affaires a chuté de 4,3
à 3,6 milliards de marks et les pertes ont atteint 371 millions de marks.
La chute des commandes consécutive à la guerre du Golfe, la
faiblesse du dollar américain
18(
*
)
ainsi
que des choix stratégiques malheureux
19(
*
)
ont été préjudiciables à
Daimler Benz Aerospace. Les activités militaires ont aussi souffert des
restrictions budgétaire et de la chute des commandes gouvernementales.
Pour redresser la situation un plan de restructuration très strict a
été mis en place.
Baptisé
Dolorès (Dollar Low Rescue)
20(
*
)
et présenté en aout 1995, il
prévoyait la suppression d'environ 10 000 emplois d'ici la fin de 1998.
Entre 1993 et 1997, les effectifs ont alors été
considérablement réduits passant de plus de 80 000 à
environ 43 000 personnes.
Ces restructurations visaient à maintenir la compétitivité
de l'entreprise dans l'hypothèse où le dollar resterait à
un niveau bas et à préparer la société dans la
perspective des négociations sur la consolidation de
l'aéronautique européenne.
Le redressement de l'entreprise est toutefois fragile. L'endettement du groupe
est important et pèse sur les résultats.
Indicateurs de performance de DASA
(en millions de DM)
|
1997 |
1996 |
Chiffre d'affaires |
15.286 |
13.053 |
Coûts de revient |
- 13.032 |
- 11.428 |
Marge d'exploitation |
2.254 |
1.625 |
Recherche et développement |
- 619 |
- 711 |
Résultat brut |
222 |
- 443 |
Résultat net |
7 |
1.202 |
Actifs |
21.855 |
21.465 |
Capitaux propres |
6.478 |
6.267 |
DASA
paraît se trouver à une sorte de carrefour stratégique. Les
exigences de ses actionnaires, désormais, très largement
américains après la fusion entre Daimler et Chrysler la poussent
à opter pour les activités et les modes de gestion plus
susceptibles de dégager des marges d'exploitation. Or, cette exigence
n'est pas aisée à satisfaire en raison de la structure de
l'activité de DASA.
Le redressement de l'entreprise a certes été favorisé par
l'amélioration de son volume d'activité qui a concerné ses
différentes branches d'activité.
Mais, DASA apparaît surtout orientée vers les marchés
commerciaux, Airbus, la production de sous-systèmes et une contribution
à l'Europe de l'espace.
Evolution du chiffre d'affaires de DASA
(en milliers de DM)
|
1996 |
1997 |
Avions civils et hélicoptères |
5.970 |
4.603 |
Avions militaires |
1.654 |
1.589 |
Systèmes |
1.105 |
1.012 |
Satellites |
1.450 |
1.183 |
Systèmes civils et de défense |
2.841 |
2.747 |
Moteurs |
2.963 |
2.311 |
Total |
15.296 |
12.699 |
Près de 40 % de l'activité de DASA sont réalisés dans le domaine des appareils commerciaux (31,1 % du total) et des hélicoptères (8,9 % du total) dont les chiffres d'affaires ont augmenté de 35,9% et 9,8 % respectivement entre 1996 et 1997.
Division Avions commerciaux - Hélicoptères
(en millions de DM)
|
1997 |
1996 |
Chiffre d'affaires |
5.970 |
4.603 |
Effectifs |
19.250 |
19.306 |
R & D |
550 |
712 |
Avions commerciaux |
|
|
Chiffre d'affaires |
4.758 |
3.501 |
Effectifs |
15.403 |
15.319 |
R & D |
306 |
483 |
Hélicoptères |
|
|
Chiffre d'affaires |
1.212 |
1.102 |
Effectifs |
3.847 |
3.987 |
R & D |
244 |
229 |
L'activité de cette division résulte de
participations
dans les groupements européens Airbus, dont DASA détient comme
Aérospatiale 37,9 % des droits, et Eurocopter, à hauteur de
40 % des droits.
Les
divisions « systèmes »
et
« moteurs »
suivent à peu près
à égalité avec, l'une, 18,6 %, et l'autre, 19,4 % du
chiffre d'affaires.
L'importance relative de ces deux activités doit être
soulignée dans la mesure où leur entière
intégration
21(
*
)
dans un groupe
aéronautique européen n'est pas envisagée au stade actuel
des projets. Elle fait de DASA une entreprise partiellement
intégrée verticalement.
Systèmes
(en millions de DM)
|
1997 |
1996 |
Chiffre d'affaires |
2.841 |
2.747 |
Effectifs |
8.742 |
9.254 |
R & D |
861 |
631 |
L'activité de DASA dans le domaine spatial est très significative.
Espace (infrastructures)
(en millions de DM)
|
1997 |
1996 |
Chiffre d'affaires |
1.105 |
1.012 |
Effectifs |
1.946 |
1.919 |
R & D |
720 |
708 |
Satellites
(en millions de DM)
|
1997 |
1996 |
Chiffre d'affaires |
1.450 |
1.183 |
Effectifs |
1.623 |
1.648 |
R & D |
1.503 |
851 |
Les
infrastructures (7,2 % du chiffre d'affaires) et les satellites (9,5 % du
chiffre d'affaires) font de DASA une entreprise spatiale sans doute
relativement relativement modeste en termes absolus mais à l'importance
significative. Dans ce secteur, DASA intervient aux côtés de
partenaires européens dont Matra Marconi Space.
Enfin, les
avions militaires
génèrent un peu moins de 11 %
de l'activité globale.
Avions militaires
(en millions de DM)
|
1997 |
1996 |
Chiffre d'affaires |
1.654 |
1.589 |
Effectifs |
5.640 |
5.567 |
R & D |
407 |
403 |
Cette
division repose principalement sur deux programmes le Tornado et l'Eurofighter
qui représentent 50 % du chiffre d'affaires. Ces deux programmes sont
conduits en coopération, le premier avec BAe, le second avec le
partenaire britannique mais aussi Alenia et CASA.
Le reste de l'activité de la division consiste, d'une part dans une
contribution à l'assemblage des Airbus (20 % du total), plan de charge
bienvenu pour soutenir l'activité de la division, et dans des
participations à différents programmes étrangers,
américains principalement.
En dépit des perspectives de l'Eurofighter, la production d'appareils
militaires par DASA n'a pas atteint un niveau tel qu'elle puisse entrer
naturellement dans la stratégie de l'entreprise.
C'est pourquoi l'avenir de l'entreprise semble tout particulièrement
lié à sa place dans Airbus et à l'évolution du
consortium.
La clarification de la stratégie de DASA apparaît d'autant plus
urgente que l'entreprise n'occupe pas une place majeure au sein d'un groupe
considérable depuis la fusion avec Chrysler mais à vocation
automobile.
|
Chiffre d'affaires 1996 en milliards de marks |
Salariés fin 1996 |
Daimler-Benz |
106,3 |
290.029 |
Daimler-Benz Aerospace |
13 |
44.936 |
Division aéronautique |
6 |
25.483 |
Airbus |
3,4 |
13.241 |
Source : Daimler-Benz Aerospace
Dans ces conditions, DASA donne l'impression d'être placée sous
une contrainte de résultats par les dirigeants de sa maison-mère
pressés de satisfaire leur actionnariat.
En bref, l'heure n'est plus à la diversification mais à des
recentrages sur les points forts et, pour le reste, à des apports
à des tiers les mieux valorisés qu'il est possible.
c) Des entreprises dispersées
Les
entreprises aéronautiques restent en Europe dispersées. Elles
entretiennent ensemble des relations ambigües d'alliances mais aussi de
concurrence qui nuisent à leur cohérence.
Les relations entre les entreprises aéronautiques en Europe sont certes
nombreuses.
Elles prennent la forme de groupements d'intérêt économique
comme pour Airbus ou de sociétés conjointes comme c'est le cas
pour les hélicoptères, les missiles ou l'espace.
Ces alliances sont cependant triplement limitées.
Le plus souvent, elles ne regroupent pas l'ensemble des actifs
consacrés en Europe à une activité donnée. Elles
sont donc inachevées ce qui s'accompagne d'un certain
sous-dimensionnement d'entités qui, de plus, se livrent à une
concurrence entre elles.
Elles sont en outre inégalement efficaces sous l'angle de leur
potentiel d'intégration et d'unification de la gestion des actifs sur
lesquels elles portent.
Elles unissent enfin des entreprises dont les intérêts restent
divergents voire concurrents hors le domaine des activités
exercées en commun.
La situation des avions de combat est illustrative de chacune de ces trois
limites. Le consortium Eurofighter apparaît en effet comme :
une entité dont le périmètre n'épuise pas les
actifs consacrés en Europe aux avions de combat puisque, en particulier,
Dassault n'en fait pas partie ;
une structure qui n'a pas su conduire efficacement un programme dont les
coûts ont été gonflés par des règles
byzantines de répartition du plan de charge si bien qu'ils
s'élèveraient à plus de trois fois ceux du
Rafale
22(
*
)
dans un contexte de fiabilité
technique douteuse la multiplicité des entreprises intervenant en
matière de commandes de vol d'un (268, semble-t-il) ayant abouti
à des impasses techniques ;
une organisation réunissant des entreprises concurrentes dans
d'autres volets de leur activité (activités Airbus BAe et DASA
contre activités Boeing d'Alénia) même si d'autres
regroupements apparaissent de ce point de vue encore plus illustratifs.
En bref, les entreprises aéronautiques restent en Europe
éparpillées malgré des intérêts parfois
communs souvent mal gérés par des structures insuffisamment
fédératrices.
Il en résulte un sous-dimensionnement qui touche d'abord les
entreprises, la plus grande entreprise européenne n'atteignant pas le
tiers de la taille de Boeing, mais aussi et davantage encore chacun des
compartiments de leur activité.
L'on sait tous les inconvénients de cette situation dans une industrie
où l'effet de taille importe tant.
Cette dispersion des forces qui a aussi des effets sur l'ensemble de la
filière aéronautique, est également à l'origine de
gaspillages des deniers publics. La superposition des systèmes d'aide
à la recherche, l'empilement de programmes concurrents en Europe, des
coopérations mal conduites dont chacun sait qu'elles
génèrent des surcoûts par rapport aux projets conduits sur
une base unifiée constituent autant de sources de déperdition
d'énergie.
Cette situation est inacceptable quand l'industrie aéronautique
européenne est confrontée au défi d'une concurrence face
à laquelle elle ne dispose d'aucune des marges de manoeuvre de ses
compétiteurs.
DEUXIÈME PARTIE :
LES ILLUSIONS
PERDUES ?
La
réorganisation de l'industrie aéronautique européenne a
donné naissance à deux grands projets, inégalement
ambitieux mais, toutefois, l'un et l'autre significatifs d'une volonté
de réforme affirmée.
La transformation du groupement d'intérêt économique (GIE)
Airbus en une société de plein exercice dite SCE Airbus et la
constitution d'une grande entité regroupant les forces des industriels
du secteur (l'European Aerospace and Defence Company - EADC) sont les deux
visages quelque peu contradictoires d'une même ambition qu'on
décrit dans le chapitre 1.
Le chapitre 2 dresse le bilan de ses ambitions. Dans l'ensemble, la
déception l'emporte, comme si les illusions du départ
étaient désormais perdues.
Le chapitre III rappelle que la France a progressé vers une plus grande
cohérence de son industrie aéronautique, si bien qu'elle a
gagné des marges de manoeuvre susceptibles d'être
mobilisées au service de l'ambition européenne.
CHAPITRE
PREMIER :
DES PROJETS
AMBITIEUX
L'ordre chronologique des projets européens de
réaménagement de l'industrie aéronautique a vu la
promotion successive de l'idée d'un changement de la structure juridique
d'Airbus aux fins de donner davantage de cohérence au consortium, puis
d'un schéma d'organisation plus ambitieux, l'EADC, regroupant la
quasi-totalité des métiers de l'aéronautique.
Ces deux projets s'inscrivent dans le cadre d'une même ambition d'asseoir
mieux la compétitivité de l'industrie aéronautique
européenne.
Toutefois, le second d'entre eux, beaucoup plus large et plus ardu à
mettre en oeuvre, apparaît aussi beaucoup plus cohérent. C'est
d'ailleurs ainsi que l'ensemble des industriels concernés l'ont
jugé.
Cela ne signifie aucunement que la transformation d'Airbus doive être
abandonnée, au contraire. Mais cela suppose que les deux dossiers
avancent de conserve.
I. LA TRANSFORMATION DU GIE AIRBUS
La transformation du groupement d'intérêt économique (GIE) Airbus en une société de plein exercice est depuis plusieurs années un objectif déclaré des dirigeants et des partenaires du consortium. Elle est justifiée, malgré les succès d'Airbus par les limites du GIE qui appellent cette mutation.
A. LE GIE A CONNU UN SUCCÈS REMARQUABLE
Avec
12,7 milliards d'euros de chiffre d'affaires en 1998 et environ 100 000
personnes dépendant de son activité, Airbus est l'un des
géants de l'aéronautique mondiale.
Né en 1970, le consortium a progressivement conquis des parts de
marché de l'aviation commerciale toujours plus grandes si bien que d'une
situation où l'industrie aéronautique européenne
n'occupait alors que 10 % du marché des avions commerciaux, on est
aujourd'hui passé à une situation où elle occupe une part
très substantielle de celui-ci comme le montrent les données
ci-après.
Etat des commandes d'Airbus et de Boeing
|
1996 |
Six premiers mois 1997 |
||||
|
Commandes bruts |
Annulations |
Commandes nettes |
Commandes brutes |
Annulations |
Commandes nettes |
Airbus |
326 |
25 |
301 |
80 |
10 |
70 |
Boeing |
717 |
158 |
559 |
224 |
5 |
219 |
McDonnell Douglas |
45 |
7 |
38 |
9 |
1 |
8 |
Source : Bleu budgétaire 1999 Equipement, transports
La réussite d'Airbus dans sa conquête de parts de marché s'est poursuivie depuis. Elle est illustrée sur longue période dans le graphique ci-dessous.
Les
ventes d'avions de plus de 100 places
(1)
(En parts de marché)
Dans les années 80, la progression du GIE a été
très régulière, cette tendance s'interrompant au
début des années 90 où, sur fond de crise du
transport aérien, les performances des deux avionneurs en termes de
chiffres d'affaires ont été beaucoup plus heurtées.
Incidemment, cette dernière période rappelle que la place
occupée sur le marché aéronautique est susceptible de
connaître de très fortes variations et que les positions acquises
ne sont pas inexpugnables.
Désormais, les ventes d'avions des deux concurrents qui demeurent actifs
sur le marché apparaissent très équilibrées, Boeing
conservant cependant une longueur d'avance avec 54 % des avions vendus en
1998.
Comme Boeing dispose d'une gamme plus complète d'appareils, ces chiffres
minorent en fait les performances d'Airbus qui, sur les segments du
marché où son offre est présente, s'approchent, voire
dépassent dans certains segments, celles de Boeing.
Les grandes étapes de l'histoire d'Airbus sont résumées
dans l'encadré qui suit :
Les grandes étapes de l'histoire d'Airbus |
||
1969 |
Mai |
Signature de l'accord franco-allemand de construction de l'A300B |
1970 |
Décembre |
Création d'Airbus Industrie |
1972 |
Octobre |
A300 : premier vol de l'A300B |
1974 |
Mai |
Entrée en service commercail de l'A300B |
1975 |
Juin |
A300B4 : mise en service |
1978 |
Juillet |
A310 : lancement |
1980 |
Décembre |
A300-600 : feu vert |
1982 |
Avril |
A310 : premier vol de l'A310 |
1983 |
Mars |
A310-300 : feu vert |
|
Juillet |
A300-600 : premier vol |
1984 |
Mars |
A320 : lancement |
1985 |
Décembre |
A310-300 : mise en service commercial |
1987 |
Février |
A320 : premier vol |
|
Juin |
A330/340 : lancement |
|
Décembre |
A300-600 R : premier vol |
1989 |
Novembre |
A321 : lancement |
1991 |
Octobre |
A340 : premier vol |
1992 |
Novembre |
A330 : premier vol |
|
Décembre |
A340 : certification |
1993 |
Janvier |
A340 : première livraison |
|
Mars |
A321 : premier vol |
|
Juin |
A319 : lancement |
|
Octobre |
A330 : certification |
|
Décembre |
A
330 : première livraison
|
1994 |
Janvier |
A321 : première livraison |
|
Septembre |
A300-600ST : premier vol |
1995 |
Août |
A319 : premier vol |
|
Octobre |
A300-600ST : certification |
|
Novembre |
A330-200 : lancement |
1996 |
Avril |
A319 : certification |
|
|
A319 : première livraison |
|
Juillet |
Annonce de la création de la société Airbus |
|
Décembre |
A321-200 : premier vol |
1997 |
Janvier |
Lancement des études préliminaires pour l'A3XX |
|
Mai |
Accord industriel avec le constructeur chinois Avic pour le développement d'un jet de moins de 100 places |
1997 |
Juin |
Lancement de l'A340-500 et de l'A340-600 |
|
|
Lancement de l'A319Cj |
|
Août |
Premier vol de l'A330-200 |
1998 |
Septembre |
Lancement de l'A318M5 |
Après avoir commencé par occuper le segment intermédiaire du marché, le GIE a développé son offre d'avions de capacité inférieure - l'A320 - pour, ensuite avec les A330 et A340, occuper le segment des avions de grande capacité. Au terme de cette stratégie avisée, l'occupation du marché par les différents constructeurs peut être synthétisée ainsi.
On
notera que l'arrêt annoncé des programmes de Mc Donnell Douglas
(MDD) simplifie la donne et laisse face à face les gammes de Boeing et
d'Airbus.
La situation des deux concurrents peut alors être
appréhendée à partir des données suivantes.
AIRBUS : commandes, livraisons et carnet au 1 er juillet 1998
|
A300B2B4 |
A300-600 |
A310-200 |
A310-300 |
A330-200 |
A330-300 |
A340 |
A320 |
A321 |
A319 |
TOTAL |
Date de mise en service |
1974 |
1984 |
1983 |
1985 |
1998 |
1993 |
1993 |
1988 |
1994 |
1996 |
|
Commandes fermes |
250 |
238 |
87 |
174 |
101 |
137 |
198 |
1 017 |
237 |
477 |
2.916 |
Livraisons |
250 |
220 |
87 |
168 |
2 |
69 |
140 |
650 |
99 |
90 |
1.775 |
Carnet |
0 |
18 |
0 |
6 |
99 |
68 |
56 |
367 |
138 |
387 |
1.139 |
NB : ne figurent que les commandes et options sur contrat signé. Airbus Industrie a lancé en décembre 1997 deux nouvelles versions de l'A340, les A340-500 et A340-600. Au 1 er juillet 1998 deux A340-500 et trente deux A 340-600 avaient fait l'objet de commandes fermes. Celles-ci étaient assorties de 40 options pour des A340-600.
BOEING : commandes, livraisons et carnet au 31 décembre 1998
|
B747-400 |
B777& -200 300 |
B767 -
|
B 757
|
B 737 |
B 717-200 |
MD 11
|
MD 80
|
MD 90
|
TOTAL |
Commandes fermes |
1291 |
429 |
863 |
966 |
4324 |
115 |
200 |
1191 |
134 |
9.513 |
Livraisons |
1189 |
178 |
729 |
836 |
3256 |
0 |
186 |
1165 |
98 |
7.673 |
Carnet |
102 |
251 |
134 |
130 |
978 |
115 |
14 |
26 |
36 |
1.786 |
(1)
Appareils dont la production va être arrêtée entre 1999 et
2001
La disproportion entre le nombre des appareils livrés par Boeing et Mc
Donnell Douglas et celui des livraisons d'Airbus résulte pour
l'essentiel de l'entrée plus tardive du G.I.E sur le marché.
Cette réalité historique qui, on le sait, a un prolongement
important dans la domination de Boeing au regard de la flotte en service avec
75 % du total, tend cependant à s'estomper.
En effet, les carnets de commande des deux constructeurs se sont beaucoup
rapprochés à mesure que le partage des marchés
s'équilibrait même si Boeing conserve l'ascendant.
La réussite d'Airbus connaît une illustration remarquable dans sa
pénétration du marché américain où de 20
avions vendus il y a 6 ans, le consortium devrait passer à 100 avions
vendus en 1999, les perspectives étant de faire passer en 5 ans le
nombre des avions en exploitation dans les compagnies américaines de 500
à 1 000.
La réussite d'Airbus provient évidemment d'un grand nombre de
facteurs au premier rang desquels il faut citer la capacité du GIE
d'offrir des produits nouveaux, technologiquement en avance sur leurs
concurrents, ayant rencontré à un moment donné les besoins
du marché
La qualité technologique des produits a joué un rôle
important. C'est vrai de l'A-300 qui fut le premier bi-réacteur gros
porteur. C'est aussi vrai de l'A-320 qui fut le premier avion de ligne
équipé de commandes électriques et dont la conception
offrait des opportunités alors fort appréciables
d'économies de carburant.
La réussite d'Airbus est donc également venue de sa
capacité à satisfaire les besoins du marché. Ainsi, l'A320
a, pour beaucoup, bénéficié de l'impact de la
déréglementation du transport aérien aux Etats-Unis sur
les besoins des compagnies aériennes qui a dynamisé le
marché des avions du segment inférieur du marché.
Les performances du GIE sont d'autant plus remarquables que sa
pénétration du marché a été de beaucoup
postérieure à celle de ses concurrents.
Or, les nouveaux entrants sur le marché aéronautique civil
doivent pour s'imposer surmonter des handicaps considérables.
Le premier d'entre eux
consiste à assumer des coûts de
développement
élevés déjà partiellement
amortis chez leurs concurrents qui, de ce fait, bénéficient d'une
liberté de manoeuvre incomparable pour fixer leurs prix.
Le second, d'une importance pratique considérable, consiste
à
imposer des produits nouveaux
auprès de clients accoutumés
aux produits imposés par les industriels qui occupent le marché.
Car, l'achat par une compagnie d'un nouveau type d'appareil lui occasionne des
coûts très supérieure à ceux qu'elle supporte en
acquérant les avions appartenant à la famille de son
équipement. Les coûts de qualification des équipages,
véritablement considérables pour les compagnies, sont en effet
d'autant plus élevés que les appareils qui les impliquent sont
éloignés de ceux auxquels les personnels navigants sont
habitués. De la même manière, l'optimisation des
coûts de maintenance des flottes commerciales suppose que
l'équipement en avions d'un même type atteigne un seuil critique.
Ainsi, le coût des pièces de rechange est-il pour une compagnie de
l'ordre de 15 % du coût d'un avion, seul de son type dans sa flotte,
alors qu'il baisse à 7 % lorsque la compagnie dispose d'au moins
une dizaine d'appareils d'un type donné.
B. LES FAIBLESSES DU GIE
Certaines faiblesses d'Airbus sont « objectives », ressortent clairement d'une analyse factuelle et peuvent être imputées à la forme juridique du GIE, d'autres moins démontrables, reposent sur des opinions souvent subjectives.
1. La répartition des rôles dans le consortium avec une dissociation des fonctions commerciales et productives semble induire des difficultés
Avec un
effectif limité à 2.300 personnes principalement
dédié aux services à la clientèle, le GIE est
surtout responsable de la commercialisation des avions, du montage des
financements associés aux ventes et du service après vente. Les
partenaires assurent quant à eux la production et la conception
effective des appareils.
On relèvera que parmi les critiques adressées au consortium, il
apparaît d'abord qu'Airbus communiquerait moins bien avec ses
utilisateurs que ses concurrents.
Les quelques témoignages recueillis sur ce point
convergent vers
l'opinion selon laquelle la sophistication technologique des appareils du GIE
serait excessive et contrasterait avec les possibilités
d'équipement des cabines qui resteraient assez sommaires.
Les
« produits Airbus » seraient trop marqués par le
réflexe de l'ingénieur et pas suffisamment par des
préoccupations commerciales.
En bref, Airbus serait moins à l'écoute des besoins des
compagnies que ses concurrents américains
. Il est clair que la
façon dont a été conduit le projet concernant le Boeing
777 a marqué les esprits. Comme le soulignait le président de
Cathay Pacific Airways, le 777 a été le premier avion
conçu en coopération étroite entre le constructeur et les
compagnies aériennes. Le projet a d'ailleurs été
baptisé « Faisons-le-ensemble » par les parties
prenantes.
C'est ainsi que, par exemple, les compagnies ont imposé à Boeing
de pouvoir reconfigurer très rapidement la cabine inférieure du
777 afin de l'adapter aux besoins de l'exploitation commerciale. Cette exigence
a été satisfaite puisque la cabine du 777 peut être
entièrement réaménagée en moins de 72 heures contre
deux ou trois semaines pour les autres appareils. Poursuivre ce mode de
relations constitue désormais une priorité de la direction de
Boeing qui a d'ores et déjà adopté ce schéma pour
la conception des futurs 747.
Ces appréciations subjectives qui contrastent avec les succès
commerciaux du consortium restent partiellement à démontrer
.
Mais il faut relever qu'à leur appui, les observateurs font valoir des
éléments de fait, en particulier la multiplication en peu de
temps des modèles d'un même type d'appareil par le GIE
européen qui contrasterait avec la capacité des appareils
américains à satisfaire durablement la demande sans
nécessiter de développements complémentaires
rapprochés dans le temps.
Il est évidemment difficile d'établir un lien entre la
formulation de ces appréciations et la forme juridique actuelle
d'Airbus. Toutefois,
la dissociation entre la fonction commerciale du
consortium assumée par le GIE et les fonctions techniques et de
conception réalisées dans le cadre des diverses entreprises
partenaires pourrait être à l'origine de frottements susceptibles
d'affecter plus ou moins le dialogue avec les clients.
2. Le GIE, une structure de coopération soumise aux défis de la gestion
L'organisation des tâches de production au sein du GIE ne
serait pas optimum du fait de la règle de « retour
d'activité » chez chacun des partenaires. Plus globalement
,
la capacité d'action et de réaction de l'avionneur
européen suscite des doutes.
En réalité, cette appréciation négative se
décline sur plusieurs modes en partant de la base industrielle pour
arriver à la direction stratégique de l'entreprise.
Sont dénoncés tour à tour :
- des délais excessifs de fabrication ;
- les rigidités du processus de conception ;
- et la lenteur des décisions stratégiques.
S'agissant des questions relatives à la production
, un
élément essentiel est de réduire les délais
s'écoulant entre les spécifications demandées par les
clients et la livraison des appareils. Les délais observés en
1994 sont rappelés dans le tableau ci-dessous.
Délais de livraison
|
A300/A310 |
A320 |
A319/A321 |
A330/A340 |
1994 |
16,5 |
15,5 |
12,5 |
17,5 |
Ces
délais importants apparaissaient en particulier plus
élevés que ceux supportés par les clients de Boeing qui
serait en mesure de livrer ses gros-porteurs et ses avions à couloir
unique en un an et 10 mois respectivement.
Or, l'objectif d'un raccourcissement de ces délais est une
priorité compte tenu de ses implications commerciales et
financières.
Objectifs de délais de livraison
|
A300/A310 |
A320 |
A319/A321 |
A330/A340 |
1996 |
12 |
9 |
9 |
12 |
2001 |
10 |
6 |
6 |
10 |
Les
objectifs fixés pour 1996 ont été atteints. Mais, en
dépit des efforts de rationalisation entrepris afin de rassembler en des
lieux spécifiques les ateliers d'assemblage, il n'est pas certain que
les contraintes résultant d'un partage de la production des
éléments des appareils du GIE permettent de satisfaire
aisément les conditions de succès dans la poursuite de cet
objectif.
Cette contrainte se traduit, on le sait, par un partage de la production entre
les partenaires.
Le partage industriel dans Airbus est censé procurer aux entreprises une
prestation financièrement équivalente à leurs poids dans
le consortium. Il est équilibré programme par programme et peut
conduire à des retours de sous-traitance.
Il obéit à la répartition suivante.
Aérospatiale est responsable :
- de la conception générale des avions,
- de la pointe avant, cockpit inclus et avionique associée,
- des commandes de vol,
- de l'assemblage des A300/310, A330/340 et des A320,
- de l'aménagement intérieur des A330/340
- de la réalisation de tronçons dont la jonction ailes-fuselage,
- des mâts réacteur,
- des essais en vol,
- de la certification.
BAe est responsable de la fabrication des tronçons d'ailes.
Dasa est responsable :
- de tronçons de fuselage,
- de l'assemblage des ailes,
- de l'assemblage des A319/321,
- des dérives,
- des volets et spoilers,
- du cône arrière,
- de l'aménagement intérieur des A300/310 et A319/320/321
Casa est responsable :
- des portes,
- des empennages,
- du train d'atterrissage avant,
La spécialisation des tâches génère sans doute des
gains de productivité liés à une meilleure
technicité des équipes, une concentration des outillages
particulièrement coûteux, et au regroupement dans une
proximité immédiate des sous-traitants spécialisés.
Mais elle a des incidences importantes sur la localisation géographique
de la production du consortium.
On peut sans doute objecter que la société Boeing est
elle-même confrontée à la dispersion géographique de
ses lieux de production et de ses sources d'approvisionnement.
Toutefois, les usines d'assemblage du constructeur américain sont
beaucoup plus intégrées que celles d'Airbus, les sites de
Seattle, au demeurant idéalement placés pour recevoir les
très nombreux éléments produits en Asie du sud-est et au
Japon en particulier, abritant dans un ensemble aussi spectaculaire que
cohérent l'assemblage de la quasi-totalité des productions
civiles de l'entreprise.
La dispersion des sites d'assemblage d'Airbus présente donc un contraste
réel, source de coûts d'acheminement et de duplications
d'infrastructures qu'il ne sera guère aisé d'atténuer
à court terme, comme le montre le schéma ci-après.
Organisation géographique de la fabrication des Airbus
|
|
|
|
Dasa Brême |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
BAe Filton |
|
Fokker Amsterdam |
|
Dasa Hambourg |
|
|
|
|
|
BAe Chester |
|
Belairbus Gosselles |
|
Dasa Stade |
|
|
|
|
|
Aérospatiale Nantes |
|
|
|
Dasa Münich |
|
|
|
|
|
Aérospatiale St-Nazaire |
|
Aérospatiale Toulouse |
|
|
|
|
|
|
|
Casa Madrid |
|
|
|
Casa Séville |
Transport par route Transport par avion
Source : Airbus Industrie
Une faiblesse analogue atteindrait les bureaux d'étude du GIE.
Chaque bureau d'études national aurait tendance à
développer ses propres concepts au-delà du stade ou d'une
confrontation des différents projets naîtrait, idéalement,
la sélection de l'un d'entre eux.
En un mot, la logique d'appartenance à des entreprises
différentes pourrait l'emporter sur la logique d'appartenance au GIE.
Enfin, le GIE constitue sans doute une structure de coopération efficace
mais qui reste limitée.
La forme du groupement d'intérêt économique (GIE) est
régie par l'ordonnance française du 23 septembre 1967.
Cette formule qui permet des coopérations industrielles et commerciales
entre des entreprises conservant par ailleurs leur personnalité propre a
le mérite de la simplicité.
Le GIE peut être constitué sans apport en capital, c'est le cas
d'Airbus, pour se concentrer sur son objet social sans avoir à
gérer les moyens de son ambition, ceux-ci restant sous la
responsabilité de ses membres et dispose en outre d'une grande
transparence fiscale malgré une personnalité morale qui lui
permet, en particulier, de s'endetter.
Pour autant, la formule du GIE étant par excellence une formule de
coopération entre des membres indépendants suppose pour
connaître le plein succès un
« affectio
societatis »
proche de celui qu'exige le régime de la
société. Or, c'est bien parce que celui-ci fait défaut
qu'on recourt en général à la formule du GIE.
Plusieurs conséquences s'ensuivent.
En premier lieu,
la prise de décision dans un GIE est
nécessairement lente puisque, toutes les décisions importantes
devant recueillir l'unanimité des membres, ses modalités sont
celles de la négociation et non celles de la décision
unilatérale.
A titre d'illustration, il faudrait qu'Airbus modifie
ses statuts pour développer tout nouveau type d'appareil qui
n'apparaîtrait pas comme un dérivé des avions
mentionnés à l'article 3 de ses statuts.
En deuxième lieu,
la négociation impliquant compromis, il est
clair que les intérêts propres du groupement
d'intérêt économique doivent parfois céder la place
aux intérêts de chacun des partenaires qui peuvent
présenter quelques divergences avec ceux du groupement
lui-même.
En bref, les GIE mobilisant l'activité de partenaires
indépendants ne sont pas à l'abri de forces centrifuges
nées de l'évolution des intérêts bien compris de
chacun.
Ce risque est d'autant plus grand que les entreprises concernées sont
dissemblables dans leurs caractéristiques. Or, c'est
précisément le cas des entreprises qui constituent le GIE Airbus
(voir infra).
L'ensemble de ces considérations milite pour la transformation du GIE
Airbus en une société de plein exercice afin d'optimiser les
performances du consortium. C'est aussi elles qui rendent si délicat le
processus.
3. Les contraintes d'une extension de la gamme d'activité d'Airbus illustrent les enjeux du changement de statut
La gamme
des produits commerciaux du consortium doit être étendue.
Longtemps absent du segment inférieur des avions petits-porteurs, Airbus
avait entrepris de pallier cette lacune à travers le lancement de
l'A-319 mais aussi à travers le projet de développer un avion de
100 places sino-européen l'AE-31X devant combler le manque
existant entre les appareils du consortium ATR et le bas de la gamme Airbus.
Le programme AE-31 X
Compte
tenu de ses potentialités, le marché asiatique et plus
particulièrement sa composante chinoise, constitue un enjeu primordial
pour les constructeurs aéronautiques.
Dans ce contexte, la conclusion d'un accord portant création d'une
co-entreprise sino-européenne afin de développer un avion de
100 places a représenté une importante victoire des
constructeurs européens dans la compétition qui les opposait
à leurs concurrents américains.
Cette co-entreprise, qui devait regrouper AVIC, l'entreprise chinoise (pour
46 % des droits), les partenaires de Singapour (pour 15 % des droits)
et un consortium européen (pour 39 % des droits) constitué
à 62 % d'Airbus et à 38 % d'Alénia.
Ce programme impliquait un certain nombre de transferts de technologie et
devrait être le prélude à des coopérations portant
sur d'autres projets aéronautiques. Après avoir pris quelques
retards, il a finalement été abandonné, les industriels
concluant au défaut de viabilité économique d'une telle
entreprise.
Le programme
A-318
a alors pris la suite du programme AE-100.
Cet appareil qui sera dérivé de l'A319 est censé
concurrencer le Boeing 737-600 et l'éventuel futur B717, successeur du
MD-95. Son coût de développement serait avec 1,8 milliards bien
inférieur à celui occasionné par l'AE31X qui était
évalué à 12 milliards. La validité de ces
estimations reste toutefois à démontrer, compte tenu des
adaptations techniques nécessaires (touchant en particulier le train
d'atterrissage) aux exigences de l'exploitation commerciale d'un tel appareil
destiné aux compagnies régionales agissant à partir
d'aéroports parfois sommairement équipés.
Alors qu'Airbus entreprend de combler les insuffisances de sa gamme sur le
segment inférieur du marché,
les initiatives pour rivaliser
avec le très gros porteur de Boeing, le 747, sont plus
hésitantes.
Si, en la matière, les tergiversations ne sont pas l'apanage d'Airbus
puisque Boeing fait preuve d'une grande hésitation, il n'en reste pas
moins vrai que le GIE semble comme paralysé devant une décision
certes lourde de conséquences, mais qui paraît inéluctable.
Ce dossier est évidemment la grande affaire de la construction
aéronautique depuis déjà quelques années.
Les coûts de développement d'un futur A3XX sont
considérables, entre 40 et 60 milliards de francs selon les
sources. L'appareil engagera donc les entreprises qui le produiront pour
plusieurs dizaines d'années.
En tout état de cause, elles devront être en mesure d'emprunter
sur les marchés financiers dans des conditions optimales.
Par ailleurs, les soutiens publics nécessaires à un tel projet
devront être calibrés au mieux et éviter en particulier
toute redondance.
Enfin, l'organisation industrielle de la production et, plus en amont, de la
recherche-développement supposée par ce sujet devront être
entièrement rationalisées.
Remplir ces conditions, cruciales dans le cadre du lancement du programme A3XX,
suppose de transformer le GIE en société de plein exercice.
4. Tentative d'appréciation des avantages attendus de la transformation du GIE en société
Les
avantages attendus de la transformation du GIE résident tous dans des
gains de gestion associés à une direction plus centralisée.
Les analystes citent généralement à ce propos les
avantages suivants :
Une meilleure maîtrise de la politique commerciale de
l'entreprise
. Airbus éprouverait en effet quelques
difficultés à connaître précisément ses prix
de revient. La marge résultant des fabrications Airbus est le
résultat de deux types de marges, différentes selon chacun des
partenaires :
- la
marge commerciale
, résultat de l'écart entre le prix
de vente des avions et le prix de cession entre les partenaires industriels
(Aérospatiale, Dasa, British Aerospace et Casa) et le GIE Airbus. Cette
marge (de l'ordre de 4 % au titre de l'année 1996 et de
l'ordre de 2 % au titre de l'année 1997) sert à payer
les charges du GIE Airbus (personnel, frais de recherche et
développement, assistance aux clients). L'éventuel
excédent est distribué aux partenaires au prorata de leur
participation dans le GIE ;
- la
marge industrielle
est le résultat de l'écart entre
le prix de cession au GIE Airbus et le prix de revient des fabrications. Les
partenaires du GIE Airbus consolident le résultat de ces deux marges au
niveau de leur résultat consolidé.
La superposition de ces marges ne permet pas une connaissance suffisamment
précise de la structure des coûts. Cette méconnaissance
pourrait gêner Airbus dans la détermination de sa politique de
prix.
La réduction de certaines charges
. Il s'agit notamment de celles
concernant les achats externes. Actuellement, ceux-ci ne sont pas actuellement
centralisés ce qui ne permet pas de bénéficier de la
puissance d'une société réalisant un tel chiffre
d'affaires. Mais il s'agit des surcoûts résultant de la
séparation des tâches par industriel et par pays qui
entraîne des augmentations des encours à l'origine de
l'augmentation du besoin en fonds de roulement de chacun des membres du GIE.
L'accès aux marchés financiers
:
Le GIE Airbus ne peut pas avoir accès aux marchés financiers,
notamment en raison de l'absence de comptes publiés et de notation de la
part des agences de rating.
Un plus grand pouvoir de négociation
avec les banques
grâce à une surface financière supérieure dans les
interventions sur les marchés.
Ces différents arguments ont conduit les partenaires à
réaliser des évaluations des gains devant résulter de la
transformation du GIE.
Ces estimations sont bien entendu tenues secrètes par chacun
puisqu'elles reposent sur des scénarios significatifs des
stratégies propres de chaque industriel.
C'est donc avec une certaine précaution que l'on doit prendre le chiffre
parfois cité d'un gain d'efficacité de l'ordre de 15 %.
Il faut en effet souligner les incertitudes qui s'attachent à
l'impact de la transformation du statut d'Airbus
. L'on peut à cet
égard citer deux écueils.
A court terme, les coûts de cette opération pourraient l'emporter
sur les gains nécessairement retardés et dépendants de
l'amélioration , pour une part conjecturale, de la gestion de
l'entreprise associée au changement du statut.
Le détachement des actifs Airbus de chaque partenaire est quant à
lui susceptible d'engendrer des coûts immédiats d'ailleurs
d'autant plus élevés qu'il ne serait pas l'objet d'un
aménagement fiscal.
Plus encore, il est susceptible d'entamer la cohérence d'entreprises
qui, par définition, n'auraient plus alors la responsabilité des
actifs apportés au consortium. On sait que cette inquiétude est
tout particulièrement légitime chez Aérospatiale pour qui,
même après sa fusion avec Matra Hautes Technologies, les
activités Airbus représentent une part essentielle de ses
activités.
Mais surtout, il apparaît établi que l'avenir d'Airbus suppose
d'adjoindre à ses activités commerciales les autres sources de
chiffre d'affaires qui font la solidité de ses concurrents
américains
.
Car à supposer même établis les gains d'efficacité
résultant du changement du statut d'Airbus, il est manifeste que la
solidité de l'industrie aéronautique européenne reposera,
comme en sont convenues les principales entreprises du secteur -voir infra- sur
la constitution d'une entreprise à activités multiples.
II. LE PROJET DE CONSTITUTION D'UNE ENTREPRISE UNIQUE AÉRONAUTIQUE EN EUROPE
Les plus
hautes autorités politiques européennes ont,
le
9 décembre 1997, par une déclaration conjointe
,
lancé un processus ambitieux devant trouver son aboutissement dans
l'instauration d'une société unique intégrant les actifs
de l'industrie aéronautique européenne.
On rappelle la teneur de cette déclaration conjointe du président
de la République et du premier ministre français, du chancelier
de la République fédérale d'Allemagne et du premier
ministre du Royaume-Uni :
« La France, l'Allemagne et le Royaume-Uni partagent un
intérêt politique et économique essentiel à ce que
l'Europe dispose d'une industrie aérospatiale et d'électronique
de défense efficace et compétitive. Ceci permettra à
l'Europe d'améliorer sa position commerciale dans le monde, de renforcer
sa sécurité et de garantir qu'elle joue pleinement son rôle
dans sa propre défense.
« Nous sommes convenus de la nécessité urgente d'une
réorganisation des industries aérospatiale et
d'électronique de défense. Ce processus devrait inclure, dans le
secteur aérospatial, les activités tant civiles que militaires,
et aboutir à une intégration européenne fondée sur
un partenariat équilibré.
« En ce qui concerne le domaine aérospatial et des industries
de défense connexes, nous nous félicitons du fait que plusieurs
entreprises européennes, parmi lesquelles Daimler Benz, Aerospace,
Aérospatiale et British Aerospace, aient déjà
manifesté leur intention de regrouper leurs activités. Nous leur
demandons de présenter pour le 31 mars 1998 un projet clair et un
échéancier détaillé en vue de cette
réorganisation et de cette intégration.
Les premières étapes de ce processus d'intégration
européenne civile et militaire devraient comprendre des progrès
rapides dans la transformation d'Airbus en une société
intégrée, dans le sens préconisé par les quatre
présidents d'Airbus depuis le 13 janvier 1997.
Il revient en premier lieu à l'industrie de définir la structure
requise. Afin de faciliter une telle organisation, nous nous engageons pour
notre part à mettre en oeuvre les mesures nécessaires en
matière de politiques nationales.
Nous serions heureux de voir participer, selon des modalités
appropriées et au fur et à mesure que le processus se
déroule, d'autres entreprises et d'autres nations européennes, et
notamment celles qui sont déjà engagées dans des projets
en collaboration.
Cette initiative constitue un exemple concret de coopération entre
partenaires européens, que nous soutiendrons activement.
A la suite de l'appel lancé par les responsables politiques, les
industriels -Aérospatiale, British Aerospace, CASA et DASA- ont remis un
premier rapport le 27 mars 1998.
Ce rapport entendait « présenter un plan clair et un
calendrier détaillé de la restructuration industrielle et de
l'intégration ».
A. LES OBJECTIFS STRATÉGIQUES DES INDUSTRIELS
Les industriels sont parvenus à converger vers un ensemble d'objectifs stratégiques communs.
1. La constitution d'une grande entreprise intégrant les métiers de l'aéronautique
Les
industriels sont, semble-t-il, parvenus à partager la conviction que,
face aux changements profonds intervenus récemment dans leur
environnement concurrentiel, et face aux défis commerciaux et
technologiques attendus pour l'avenir, la prospérité de leurs
activités est
dépendante
d'une façon critique de
l'intégration complète et de la restructuration des industries
aéronautiques et spatiales en Europe, avec les industries de
défense connexes
.
Les justifications apportées à la poursuite de cet objectif sont
bien connues : garantir que l'industrie européenne dispose de la
puissance financière, des économies d'échelle, de
l'efficacité industrielle, du portefeuille de produits et des
technologiques attendus par le marché.
Dans cette perspective, la constitution d'une société unique et
intégrée European Aerospace and Defence Company (EADC),
rassemblant tous les actifs concernés, avec des
« coeurs » de métiers dans les domaines des avions
de transport civils et militaires, des avions de combat, des avions de missions
spéciales (drones), des hélicoptères, des lanceurs
spatiaux et des infrastructures en orbite, des missiles tactiques et des
systèmes aérospatiaux et de défense apparaît comme
une nécessité.
Si un large accord semblait donc prévaloir quant à la
définition du périmètre de la société, des
divergences subsistaient néanmoins sur l'inclusion éventuelle
dans le périmètre d'EADC des avions régionaux, des
satellites et de leur exploitation et des missiles balistiques.
Les divergences relatives au périmètre de la future entreprise
peuvent être résumées comme dans le tableau
ci-après.
|
Aérospatiale |
BAe |
CASA |
Dasa |
Avions régionaux (famille des moins de 100 places) |
|
Hors « coeur de métier » |
|
Hors « coeur de métier » |
Satellites et leur exploitation |
Hors « coeur de métier » |
« Coeur de métier » |
« Coeur de métier » |
« Coeur de métier » |
Missiles balistiques |
« Coeur de métier » |
« Coeur de métier » |
« Coeur de métier » |
Hors « coeur de métier » |
On
souligne que compte tenu des évolutions intervenues depuis, ces
divergences apparaissent pour certaines quelque peu anachroniques. Il en va
ainsi en particulier du domaine des satellites que les restructurations
nationales et les accords internationaux semblent désormais placer au
coeur d'une entreprise européenne unifiée.
En réalité, l'écueil majeur semble avoir
résidé dans le sort des avions de combat. Les partenaires
paraissent avoir considéré que l'activité
« avions de combat » était de première
importance pour la future EADC, en raison de sa taille, de son
intérêt comme génératrice de valeur et de l'impact
sur d'autres secteurs d'activité, et qu'elle devrait faire ainsi partie
d'EADC dès le départ et sur la base européenne la plus
large.
Néanmoins, il semble que l'une des entreprises associées aux
discussions ayant émis des doutes sur la faisabilité d'une
intégration précoce de l'ensemble de l'activité d'avions
de combat des partenaires, une étude complémentaire sur ce sujet
ait abouti aux conclusions suivantes :
- les facteurs de marché suggèrent le besoin de fusionner les
actifs européens ;
- pour les produits actuels, les perspectives de rationalisation de la
production sont probablement limitées ;
- une approche européenne unique est indispensable pour la prochaine
génération d'avions et pour les évolutions à
apporter aux produits existants ;
- les contraintes principales à prendre en compte pour gérer un
portefeuille de produits concurrents au sein d'EADC sont les suivantes :
. les objectifs nationaux de politique étrangère,
. les considérations nationales en terme d'emploi,
. les considérations en matière commerciale,
. les intérêts commerciaux des fournisseurs nationaux
d'équipement et de sous-systèmes.
Il semble qu'une certaine forme d'accord intergouvernemental sur ces sujets
soit alors devenue un préalable à l'intégration des
activités d'avions de combat dans l'EADC.
2. Un accord sur les objectifs de l'entreprise
Les
industriels sont également parvenus à un large accord sur les
objectifs à assigner à l'entreprise et sur son organisation.
S'agissant des objectifs que devrait poursuivre la future entité, il
devait s'agir de :
- la génération de bénéfices et de
trésorerie et de la maximisation de la valeur économique pour les
actionnaires ;
- la réalisation ou le dépassement par chaque secteur d'un seuil
de rentabilité (à moyen terme), l'intégration devant
augmenter la rentabilité dans chaque secteur, comparé au
«
statu quo
» ;
- la réalisation de performances économiques telles qu'elles
permettent de faire appel à des sources financières externes (par
exemple pour de nouveaux produits) ;
- la compétitivité à long terme sur les marchés
mondiaux, c'est-à-dire le maintien et le développement d'une
gamme de produits attractive, de l'efficacité industrielle, de la base
technologique nécessaire et d'une main-d'oeuvre qualifiée.
Un accord s'est dégagé sur la structure opérationnelle et
la direction de la future entreprise sur les bases d'une structure unique,
l'EADC détenant et contrôlant la totalité de ses actifs et
de ses ressources, quelle que soit leur localisation géographique, et
une équipe unique devant diriger l'ensemble des activités dans le
cadre d'un schéma comme ci-après.
Siège social et directions fonctionnelles |
|
|
|
|||||
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Secteurs d'activités |
|
|
Entités nationales |
|||||
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|
Avions militaires |
Airbus |
Missiles tactiques |
Espace |
Hélicoptères |
Systèmes |
|
|
France
|
Il
s'agissait donc de regrouper les différentes catégories
d'activités dans différents secteurs afin d'optimiser
l'exploitation interne de ses ressources industrielles, commerciales et de
gestion.
La structure opérationnelle de l'EADC devait donc comprendre :
- une
fonction centrale de siège social
assurant la
centralisation des fonctions financières, de coordination de direction,
de stratégie de groupe, de planification et d'autres fonctions
classiques de siège social auxquelles seraient rattachées toutes
les fonctions, services et ressources nécessaires, qui permettent de
générer davantage d'économies lorsqu'elles s'appliquent
à un ensemble de secteurs comme la R & D
générale et les services de soutien (comme le personnel et le
commerce international) ;
- divers
secteurs d'activités
, chaque secteur devant comprendre
les fonctions, les services et les ressources qui lui sont nécessaires
et qui peuvent être financés et économiquement
optimisés sur le long terme -par exemple, au moins les ventes, les
lignes d'assemblages principaux ou/et d'intégration finale, le support
produit, et les capacités de conception et de développement
spécifiques aux produits ;
B. LE CHEMINEMENT VERS L'AVÉNEMENT D'UNE ENTREPRISE UNIQUE
Le
processus devant aboutir à la création de l'EADC a fait l'objet
de trois scénarios différents : la « fusion en
l'état », la démarche par étapes et le
scénario « Airbus plus ».
La
«
fusion en l'état »
d'Aérospatiale, BAe, CASA et Dasa serait effectuée en une seule
opération, chaque partie prenante apportant la totalité de ses
activités
actuelles
dans le cadre convenu d'EADC, en excluant
éventuellement les activités vendues au préalable. En ce
qui concerne les activités hors « coeur de
métier » apportées à EADC, elles auraient, dans
le scénario de fusion en l'état, un statut transitoire, les
partenaires qui n'y seraient pas impliqués dans l'immédiat devant
être protégés contre les effets financiers
défavorables pour eux qui pourraient en découler Des
aménagements seraient définis dans des accords liant
juridiquement les parties : ces accords auraient une
durée
limitée et définie
et couvriraient, entre autres, les droits
de vote et les droits économiques durant la période transitoire.
Airbus SCE serait la filiale d'avions civils d'EADC, l'éventuelle
extension à d'autres parties prenantes se produisant
ultérieurement, en un certain nombre d'étapes distinctes.
La
démarche par étapes
verrait la constitution d'une
société holding au départ. Aérospatiale, BAe, CASA
et Dasa continueraient d'exister et d'agir temporairement comme actionnaires
d'EADC. Les filiales des secteurs d'activités seraient mises en place
successivement ou en parallèle, en impliquant éventuellement
différents partenaires puis, une fois prêts, apportés
à EADC.
« Airbus plus »
suivrait la démarche par
étapes, mais la société Airbus serait la
société holding et intégrerait successivement ou en
parallèle des lignes d'activités supplémentaires,
probablement sous forme de filiales.
Face à ces scénarios, les attitudes des industriels ont
révélé des divergences résumées dans le
tableau qui suit
.
|
Aérospatiale |
BAe |
CASA |
Dasa |
« Fusion en l'état » |
-
Accord sur le principe
|
-
Accord sur le principe en tant que seul schéma possible pour BAe
|
-
Accord sur le principe en tant que schéma préféré
|
-
Accord sur le principe en tant que schéma
préféré
|
Démarche par étapes |
-
Possible
|
- Non
acceptable
|
- Considéré comme défavorable |
- Considéré comme défavorable |
Airbus plus |
- Possible |
- Non acceptable |
- Considéré comme défavorable |
- Non acceptable |
Le
consensus s'est ainsi porté sur le scénario de la
« fusion en l'état », Aérospatiale
étant la seule entreprise à envisager avec faveur les deux autres
modalités d'intégration. Les entretiens que votre rapporteur a
conduits pour préparer cette étude montrent que les positions des
partenaires ont considérablement évolué par rapport
à ce consensus.
Un schéma d'évolution à partir d'une société
Airbus paraît désormais accepté par tous, ce qui semble
ouvrir la gamme des possibilités.
Les divergences, au fond mineures, reposaient, semble-t-il, sur une
évaluation contrastée des différents scénarios.
S'agissant de la « fusion en l'état », les
avantages identifiés par les industriels sont liés
à :
- la relative simplicité et la rapidité de la transaction de
fusion en une seule étape, évitant les problèmes des
transactions sectorielles, c'est-à-dire les dispositions relatives au
contrôle, la résolution des conflits entre blocs d'actionnaires,
l'identification des périmètres des activités et des
droits de propriété intellectuelle (les dispositions de non
concurrence, etc... ;
- l'accès total et immédiat aux bénéfices de la
consolidation : synergies industrielles, techniques et de
commercialisation, assise et maîtrise financière fortes,
possibilités de rationalisation ;
- l'occasion d'opérer une rationalisation sur l'ensemble des gammes
d'activités, et donc de permettre d'atteindre les équilibres
nationaux à travers plusieurs secteurs ;
- l'absence d'atteinte portée aux synergies existant à
l'intérieur des sociétés ;
- la construction d'un pôle d'attraction fort pour les tierces parties.
S'agissant de la démarche par étapes
, il était
jugé qu'elle pouvait tirer parti de ce que la consolidation par secteur
est plus facile. En outre, elle permettrait d'atteindre une masse
financière critique en cas d'inclusion d'Airbus et des avions
militaires, et pourrait faciliter l'entrée de tiers.
Cependant, la longueur du processus, sans garantie que l'objectif final serait
atteint, la possibilité de conflits d'intérêts entre les
actionnaires, qui pourraient aussi compromettre la réalisation de la
structure cible, une complexité accrue du fait des différents
tiers impliqués dans les différents secteurs, et du fait du
besoin d'un consensus entre les partenaires vis-à-vis des tiers, la
perspective d'évolutions des participations des partenaires en cas
d'ajout de nouveaux secteurs, l'affaiblissement possible des positions
financières de chaque partenaire et l'accès moins rapide aux
bénéfices de la future entité, du fait en particulier de
la limitation des occasions de rationalisation, ont, semble-t-il, compromis
l'attrait de cette démarche aux yeux de la majorité des
industriels.
La solution « Airbus plus »
a pu être
considérée comme présentant les mêmes
inconvénients, à quoi il faut ajouter que les règles de
gestion de l'entreprise en cours de définition pour la SCE Airbus
pourraient ne pas être adaptées à EADC, la SCE perdant en
outre sa focalisation sur le marché des avions civils.
Un consensus ambigu s'étant dessiné en faveur d'une fusion des
actifs des industriels en une étape unique, ceux-ci ont alors
précisé les problèmes à résoudre par les
pouvoirs publics afin de placer la future EADC dans une situation de
compétitivité favorable.
*
* *
Le
cheminement vers des projets communs de meilleure structuration de l'industrie
aéronautique européenne a connu un élan qu'il faut saluer
avec l'implication des plus hautes autorités politiques
européennes.
La formalisation de projets concrets par les industriels a constitué un
progrès prometteur.
Il reste à évaluer les prolongements de ces processus porteurs de
beaucoup d'espoirs.
CHAPITRE II :
UNE INDUSTRIE FRANCAISE MIEUX
STRUCTUREE
Ce
chapitre pourrait être intitulé « Chronique
d'Aérospatiale ». C'est en effet autour de cette entreprise
qui est un des grands acteurs de l'industrie aéronautique
européenne et mondiale que s'est constitué non sans peine un
ensemble qui, très rapidement, ayant conforté ses positions, doit
être en mesure de jouer un rôle-clef dans la structuration de
l'industrie aéronautique en Europe.
Le groupe Aérospatiale a en effet été l'objet de
modifications profondes au cours des derniers mois. Un examen attentif de ces
opérations s'impose. S'en dégage un bilan plutôt favorable
tant au regard de la solidité de l'industrie française
qu'à celui de la cohérence de l'industrie européenne.
Certaines interrogations subsistent pourtant face à ces
réorganisations. Il reste à parachever certaines d'entre elles.
Sur des points de détail des critiques de méthode doivent
être avancées.
Une première étape était intervenue avec l'annonce de la
filialisation des différents métiers d'Aérospatiale le
19 février 1998. La structure du groupe aurait été
constituée d'une holding coiffant deux pôles, l'un
« espace-défense » et l'autre aéronautique,
regroupant autant de filiales que l'entreprise Aérospatiale dispose de
métiers.
Le nouveau groupe Aérospatiale
|
Pôle espace défense |
|
|
Holding Aérospatiale |
|
|
Pôle aéronautique |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Aérospatiale balistique et transport spatial |
Aérospatiale missiles |
Aérospatiale ISTI |
Aérospatiale satellites |
Aérospatiale Airbus |
Aérospatiale ATR |
|
|
|
Le
schéma du nouveau groupe esquissé ci-dessus supposait une
réelle autonomie de chaque entité en charge des différents
« métiers » de l'entreprise.
L'on pouvait considérer qu'il était le prélude à
des évolutions portant sur le périmètre
d'Aérospatiale en ce sens, en particulier, qu'il permettait d'isoler les
différentes branches d'activité.
Toutefois, cette réorganisation n'étant, semble-t-il, pas
allée sans difficultés, les bureaux d'études qui
constituent une sorte d'actif commun posant notamment, le problème de
leur rattachement à telle ou telle entité du nouveau groupe, la
vie de l'entreprise était, depuis cette annonce, restée
dominée par l'unicité, les filiales n'ayant de réelle
substance.
Le rapprochement de Matra Hautes Technologies (MHT) et d'Aérospatiale,
événement majeur de la structuration de l'industrie nationale
mais aussi européenne, a donné un nouvel élan à
cette approche, significative d'une volonté de mouvement, mais aussi des
difficultés de réorganisation de l'entreprise.
I. LE TRANSFERT DE LA PARTICIPATION DE L'ETAT DANS DASSAULT AVIATION À AÉROSPATIALE, UNE DÉMARCHE INACHEVÉE
Fin
décembre 1998, l'Etat a transféré à
Aérospatiale 45,76 % du capital de Dassault Aviation.
Les conditions de ce transfert, véritable serpent de mer de la chronique
de l'industrie aéronautique française, restent assez obscures,
qu'il s'agisse de la négociation préalable, de son contenu ou de
son impact sur les parties concernées.
S'agissant des négociations
, un élément capital a
surgi avec la « découverte » des droits de vote
double attachés à la participation de l'Etat chez Dassault. Cette
soudaine prise de conscience mettait l'Etat en bonne situation pour
négocier avec l'entreprise un rapprochement de ses actifs avec ceux
d'Aérospatiale. La question s'est même posée de savoir si
l'Etat se trouvait en mesure d'imposer un tel rapprochement. Le
déroulement de la négociation a conféré à
cette interrogation un caractère seulement théorique mais elle
n'en est pas moins légitime d'un point de vue rétrospectif au vu
de l'histoire des tentatives de rapprochement entre les avionneurs
français.
Dans les faits, le problème des droits de vote double s'est enrichi de
la question de savoir si un transfert de la participation de l'Etat à
Aérospatiale s'accompagnerait du maintien ou de la perte des droits
liés à cette participation. Il semble que, saisi pour avis, le
Conseil d'Etat ait penché pour le maintien de ces droits. Mais, cette
façon de voir aurait pu être combattue devant les juridictions
commerciales compétentes qui auraient elles-mêmes pu adopter une
attitude différente.
C'est probablement cette considération, parmi d'autres, qui a
incliné les parties à négocier mais aussi à inclure
dans leurs négociations le sort des prérogatives
particulières attachées à la participation de l'Etat.
L'on entre alors dans les inconnues portant sur la
substance de l'accord
conclu entre les parties à la négociation. Celle-ci suscite un
nombre important de questions.
Evoquons d'abord les certitudes :
L'Etat s'est dessaisi de ses droits au profit d'Aérospatiale.
Ce dessaisissement n'a été que partiel puisque les droits de
l'Etat dans l'entité Dassault-Systèmes n'ont pas
été transférés à Aérospatiale. Cette
réduction du périmètre transféré à
l'entreprise publique est, à coup sûr, très notable compte
tenu de la valorisation boursière de Dassault-Systèmes et de ce
que la participation de l'Etat au capital de Dassault Aviation lui
confère 16,33 % de cette capitalisation. D'un point de vue
stratégique, l'exclusion de Dassault-Systèmes du
périmètre transféré à Aérospatiale
peut être justifiée par la nature du métier de l'entreprise
-conception industrielle par ordinateur- et par sa position commerciale qui
fait de Boeing l'un de ses premiers clients. Il n'en reste pas moins que
le
sort de la participation de l'Etat dans Dassault-Systèmes devra
être réglé.
Dernière certitude, l'Etat a renoncé à ses droits de vote
double.
L'on entre à ce stade dans le domaine des interrogations.
Une première question fondamentale porte alors sur ce qu'a obtenu l'Etat
à l'occasion de son renoncement à ses prérogatives
particulières. Autrement dit quelle a été la valeur
d'échange des droits de vote double de l'Etat, quelles contreparties
celui-ci a-t-il obtenu contre cet abandon ?
La réponse à
cette question est loin d'être éclaircie. La contrepartie acquise
par l'Etat consiste-t-elle dans le seul accord de Dassault au transfert
réalisé au profit d'Aérospatiale et au volet patrimonial
et industriel de l'accord entre les parties ? Peut-elle être alors
jugée suffisante et donc équitable ? D'autres clauses
viennent-elles l'enrichir ?
Autant de questions qui, étant donné leur caractère
stratégique et leur aspect financier -la détention de droits de
vote double a un prix qui peut-être considéré comme un
actif de la Nation-, méritent des précisions de la part des
pouvoirs publics.
Liée à cette problématique, la question se pose alors
évidemment du degré de contrôle d'Aérospatiale sur
Dassault Aviation résultant de cette opération.
Aérospatiale n'étant pas appelée à
bénéficier des privilèges liées à la
participation de l'Etat elle détient 45,76 % du capital de Dassault
Aviation, ce qui en fait certes un actionnaire de référence
majeur mais toutefois un actionnaire minoritaire par rapport à la
holding Dassault Industries qui en détient 49,90 %, le reste,
4,34 % étant en Bourse
L'accord intervenu entre les parties a, sans doute, inclus des dispositions
élargissant les droits d'Aérospatiale au-delà des seuls
droits attachés à sa participation et dont seule une connaissance
précise permettrait d'en évaluer l'impact.
L'identité des parties liées par l'accord, l'intensité de
ces liens, la substance de cet accord, d'éventuelles clauses
dérogatoires, tout cela mérite d'être précisé.
En tout état de cause, la voie de la fusion entre Dassault Aviation
et Aérospatiale ayant été écartée, la
question de la cohérence de l'opération se pose à
l'évidence.
Sur le plan financier,
cette question est celle du bilan de
l'opération pour les trois acteurs. Elle renvoie aux questions relatives
à la substance même de ce qui a été
échangé et à son évaluation pour les uns et les
autres.
Le sentiment se dégage que l'accord n'a guère été
exigeant pour Dassault Aviation
23(
*
)
tandis que,
pour l'Etat, la perte de ses droits de vote double et le traitement comptable
de l'apport réalisé au bénéfice
d'Aérospatiale suscitent certaines interrogations. Du côté
d'Aérospatiale, les évaluations sont complexes. Compte tenu de la
valorisation boursière de Dassault Aviation hors Dassault
Systèmes, les droits de l'Etat ont pu être évalués
à 880 millions d'euros, soit 5.764 millions de francs.
Cependant, un certain nombre d'objections peuvent être faites à
l'adoption de cette seule méthode de valorisation, ces objections
revenant à relativiser la valorisation de marché de l'entreprise,
susceptible compte tenu du nombre d'actions en bourse de ne pas refléter
entièrement sa valeur. A partir de méthodes d'évaluation
alternatives passant par des valorisations comptables ou l'examen des plans
d'affaires, on est conduit à insister sur des variables plus complexes
et notamment celles relatives aux avances clients et fournisseurs qui, dans le
secteur de l'industrie aéronautique, occupent une place très
importante. De la même manière, il apparaît alors qu'en tout
état de cause, l'évaluation de la participation
d'Aérospatiale dans Dassault Aviation est fondamentalement liée
au devenir du Mirage 2000-5 et surtout du Rafale, programme majeur de la
firme.
La réussite passée de Dassault, les comparaisons de prix des
avions de combat -voir tableau ci-après -, la disponibilité du
missile MICA pour équiper les appareils de Dassault, les incertitudes
entourant les capacités opérationnelles de certains concurrents
et, tout particulièrement, de l'Eurofighter plaident en faveur du
succès de ces deux programmes.
Prix du Rafale par rapport à ses concurrents
Type d'appareil |
Pays |
Constructeur |
Montant (M$) |
Date dispo |
Rafale |
France |
Dassault |
40 à 50 |
2000 |
F18 E/F |
US |
Boeing MDD |
70 à 80 |
2001 |
F15E |
US |
Boeing MDD |
60 à 70 |
Opérationnel |
F16C/D Block 50 |
US |
Lockheed |
40 |
Opérationnel |
Sukhoi 37 Flanker |
Russie |
Sukhoi |
NP |
2000 |
F22 |
US |
Boeing MDD |
100 |
2005 |
Mirage 2000-5/9 |
France |
Dassault |
NP |
Opérationnel |
Eurofighter |
GB All. Ital. Esp. |
BAe Dasa Casa Alenia |
50 à 60 |
2004 |
Gripen |
Suède |
Saab |
30 à 33 |
Opérationnel |
Source : estimations Crédit Lyonnais Securities
à partir de sources Jane's
En sens inverse, le poids de la diplomatie économique américaine,
l'isolement de Dassault, l'engagement des autres grands européens de la
défense en faveur de l'Eurofighter constituent autant d'obstacles.
Ces données amènent à adopter un parti pris qui peut
paraître décevant, celui consistant à considérer
qu'une pleine valorisation économique de ces programmes est
prématurée.
Aussi, en l'état, faute de mieux, l'évaluation mentionnée
plus haut peut-elle être considérée comme significative du
renforcement financier d'Aérospatiale du fait d'une opération au
terme de laquelle les capitaux propres de l'entreprise ont, notons-le,
été accrus de 20 %.
La cohérence
stratégique de l'opération reste quant
à elle à démontrer.
Il semble que l'accord industriel conclu entre les parties ait plus valeur
d'armistice que le mérite de constituer un socle offensif. Les positions
étant figées par des droits de préemption consentis
à Aérospatiale et l'extention du champ des décisions
requérant une majorité qualifiée des 2/3 - les
décisions d'accords industriels restent, semble-t-il, soumises à
la majorité simple -, chacun reste maître chez soi.
Une telle situation ne peut à l'évidence perdurer puisque, dans
le futur, les avions de combat ne pourront être produits qu'au sein de
groupes puissants financièrement, commercialement et politiquement. Des
décisions devront être prises dans ce sens. De ce point de vue,
l'opération pourrait avoir pour grand mérite de les faire
dépendre du consentement d'un ensemble industriel national puissant,
autrement dit de désigner un partenaire national comme partenaire
obligé. On éviterait ainsi la perspective de choix excluant des
entreprises françaises même si, de ce point de vue, la
dépendance du développement d'un appareil militaire envers les
crédits publics constituait déjà une certaine garantie.
A ces questions s'ajoutent celles portant sur les effets plus immédiats
de l'accord.
Au-delà du renforcement de la capacité financière
d'Aérospatiale résultant de l'augmentation de ses fonds propres,
de sa participation au capital d'une entreprise aux ratios bien
supérieurs et d'un meilleur équilibre entre les sources civile et
militaire du chiffre d'affaires de l'entreprise, ces effets ont
été quasi-nuls jusqu'à présent.
La réorganisation en cours chez Dassault Aviation, avec une
séparation des branches militaire et civile qui paraît conduite
« proprio motu », ne semble d'ailleurs pas intégrer
une quelconque dimension nouvelle liée à la constitution d'un
groupe.
Sauf à être durablement sous-optimale, la démarche de
rapprochement entre Aérospatiale et Dassault Aviation devra donc
être prolongée.
II. LE TRANSFERT DES ACTIVITÉS SATELLITES À THOMSON, UNE OPERATION A LA COHÉRENCE REMISE EN CAUSE
Une importante modification du périmètre d'Aérospatiale est intervenue avec le transfert à Thomson CSF des activités d'Aérospatiale dans le domaine des satellites à l'été 1998. Le chiffre d'affaires de cette division s'était élevé à 3,4 milliards de francs en 1997 contre 5 milliards en 1996 représentant 6 % de l'activité totale de l'entreprise. Ce transfert était accompagné d'une clause de non rétablissement par laquelle Aérospatiale était engagée à abandonner toute activité dans le secteur. En contrepartie de ce transfert, Aérospatiale avait reçu 4 % du capital de Thomson CSF remodelé après l'entrée d'Alcatel et de Dassault Industries dans l'entreprise, si bien que celle-ci s'est trouvée privatisée de facto.
Le nouveau capital de Thomson-CSF
Thomson SA |
|
Aérospatiale |
|
|
Dassault Industries |
Alcatel |
|
|
|
Flottant |
|
6,0 % |
16,4 % |
|
|
4,0 % |
30,7 % |
|
|
|
42,9 % |
|
|
Thomson-CSF |
|
22,4 % |
|
|
|
|
49,0 % |
|
|
|
|
|
|
Alcatel Space |
51,0 % |
|
|
Source : Thomson-CSF
Cette opération a été remise en cause par le projet de
fusion entre Aérospatiale et Matra Hautes Technologies qui,
accompagnée de la privatisation d'Aérospatiale, constitue
l'élément principal des opérations portant sur
l'entreprise et l'événement majeur de la structuration de
l'industrie aéronautique française.
Toutefois, une solution de compromis a alors été
décidée consistant à sortir du périmètre
d'Aérospatiale sa participation dans Thomson CSF pour la faire porter
par l'Etat. Cette solution n'est évidemment pas appelée à
persister. Son dénouement sera certainement concomitant des
évolutions que devra entreprendre Thomson CSF.
III. LE RAPPROCHEMENT AÉROSPATIALE - MATRA HAUTES TECHNOLOGIES, UN EVENEMENT MAJEUR
Le
rapprochement qui devrait être prochainement finalisé
spécialisé entre Aérospatiale et Matra Hautes Technologies
(MHT) est, à coup sûr, l'un des événements majeurs
de l'histoire récente de l'industrie aéronautique
française et même européenne.
Lancé dans un contexte de privatisation d'Aérospatiale, cette
initiative devrait d'abord déboucher sur un remodelage du capital
d'Aérospatiale, annonciateur d'un nouveau cours imprimé à
la gestion de l'entreprise.
Elle devrait aussi permettre d'unir des forces concentrant une part importante
des actifs nationaux de l'industrie aéronautique nationale. Ce faisant,
et grâce aux alliances de l'une et de l'autre, elle devrait constituer
une réelle avancée vers l'intégration européenne de
certains métiers.
Opération de modernisation financière et de gestion, la fusion
entreprise devrait aussi pouvoir se prévaloir d'une logique industrielle
et commerciale.
La réalisation de ces différents objectifs reste sans doute
à démontrer. Tout pronostic à ce sujet serait imprudent.
Cependant, les bases qui ont été jetées incitent à
un optimisme raisonné.
En tout état de cause, l'opération invite à poser la
question de son équilibre financier pour les parties, et donc, celle du
respect des intérêts patrimoniaux de l'Etat. Cette question
essentielle ne peut donner lieu à une réponse tranchée de
la part de votre rapporteur. Les divers documents qui auraient pu étayer
un jugement propre ont été demandés en vain au ministre de
l'économie et des finances.
Du coup, seuls les documents publics étant disponibles, c'est sur cette
seule base qu'une appréciation peut se former. C'est à la fois
beaucoup - trop parfois, lorsque des éléments confidentiels
apparaissent au grand jour - et peu, compte tenu de la complexité d'un
dossier qui n'a d'ailleurs pas été exempt de rebondissements.
Au cours des développements consacrés à cet important
sujet, une idée directrice doit être toujours présente sous
forme d'une question : quelle était l'autre branche de
l'alternative ? Elle conduit à s'interroger toujours sur les moyens
pour l'Etat de valoriser autrement un actif important de son patrimoine.
A. L'APPORT DE MHT À AÉROSPATIALE DONNERA NAISSANCE À UN GÉANT
1. Matra Hautes Technologies
Matra
Hautes Technologies englobe les activités du groupe Lagardère SCA
dans l'espace, la défense, les télécommunications et la
conception assistée par ordinateur.
Ce pôle est organisé comme selon le schéma mentionné
ci-dessous.
La société Matra Hautes Technologies détenue en
totalité par Lagardère SCA dispose, seule ou en partenariat, tout
ou partie des parts du capital des entités mentionnées
ci-après.
|
|
Espace |
GEC
|
51 % |
Matra Marconi Space |
|
|
Défense |
BAe
|
50 % |
Matra BAe Dynamics |
|
100 % |
Matra Systèmes & Information |
|
100 % |
Matra
Défense
|
|
|
Télécommunications et CAO-CFAO |
Nortel
|
50 % |
Matra Communication |
Renault
|
80 % |
Matra Datavision |
Matra
Marconi Space
créée en 1990 s'est rapprochée à
partir de 1997 de Daimler-Benz Aerospace pour constituer le deuxième
groupe mondial opérant dans les
satellites
avec une gamme de
produits alliant les télécommunications civiles, les satellites
d'observation de la terre civils ou militaires, et les lanceurs.
Matra BAe Dynamics
résulte de la fusion des activités
missiles
de Lagardère et de British Aerospace. Cette structure,
née en octobre 1996, a pris une participation de 30 % dans le
capital de LFK, la filiale de Daimler-Benz Aerospace spécialisée
dans les missiles.
Matra Défense Équipements et Systèmes
est la
structure qui abrite les activités Défense de la Compagnie des
Signaux reprises par Lagardère en décembre 1997 et qui concernent
aussi bien les secteurs naval et terrestre qu'aéronautique.
Matra Systèmes et Information
regroupe les activités de
production de systèmes d'information et de commandement.
Dans le secteur des télécommunications,
Matra
Communications
, filiale de Lagardère et du canadien Northern
Telecom, gère une vaste gamme de produits tandis que
Matra
Datavision
exerce un métier de production de logiciels.
L'apport des actifs de Matra Hautes Technologies à
Aérospatiale, s'il était mené à bien,
déboucherait sur la constitution du cinquième groupe mondial en
termes de chiffre d'affaires.
Chiffre
d'affaires annuel des industriels mondiaux
de l'aéronautique et de
l'espace
1
(en milliards d'euros)
1) Avant la fusion entre GEC et British Aerospace
2. La naissance d'un géant
L'opération donnera naissance à une entreprise de
premier plan. Elle crée un « champion national »
plus musclé mais elle est aussi une étape importante, parfois
décisive, vers le regroupement des forces européennes. Le total
du
chiffre d'affaires du groupe
en 1997 peut, en effet, être
estimé à 13 milliards d'euros (85 milliards de francs)
se décomposant en :
9,9 milliards d'euros de chiffres d'affaires pour
Aérospatiale
24(
*
)
,
3,1 milliards d'euros de chiffres d'affaires pour Matra Hautes Technologies.
La répartition du chiffre d'affaires du nouveau groupe serait
caractérisée par un ressaut de la part Espace-Défense par
rapport à la situation actuelle d'Aérospatiale.
Répartition du chiffre d'affaires du groupe
Aérospatiale Matra Hautes Technologies
au titre de l'année 1999
Source : Crédit Lyonnais Securities Europe
Le
pôle aéronautique
resterait prédominant (56 % du
chiffre d'affaires), organisé autour d'Airbus (40 % du chiffre
d'affaires), de Dassault Aviation (8,4 % du chiffre d'affaires), le reste
(7,8 % du chiffre d'affaires) résultant de l'activité de
maintenance et des appareils d'ATR.
Le pôle Espace Défense
représenterait quant à
lui 31 % du chiffre d'affaires du groupe se décomposant entre :
les missiles (16,4 % du chiffre d'affaires total) ;
les lanceurs (4,3 % du chiffre d'affaires total) ;
et les satellites (10,2 % du chiffre d'affaires total) ;
Les apports en provenance de Matra Hautes Technologies concernent
essentiellement cette portion du chiffre d'affaires du nouveau groupe. Il
convient donc de s'y attarder un peu.
Le tableau ci-après récapitule l'évolution récente
du chiffre d'affaires des activités
missiles
d'Aérospatiale et de Matra Hautes Technologies respectivement.
Evolution du chiffre d'affaires missiles balistiques 1
|
1995 |
1996 |
Var (%) |
1997 |
Var (%) |
1998 |
Var (%) |
1999 |
Var (%) |
2000 |
Var (%) |
En M€ |
326 |
238 |
- 27 |
213 |
- 11 |
209 |
- 2 |
197 |
- 6 |
224 |
14 |
En MF |
2.155 |
1.570 |
- 27 |
1.405 |
- 11 |
1.380 |
- 2 |
1.300 |
- 6 |
1.480 |
14 |
1)
Aérospatiale seule.
Source : CLSE
Evolution du chiffre d'affaires missile tactiques
|
1995 |
1996 |
Var (%) |
1997 |
Var (%) |
1998 |
Var (%) |
1999 |
Var (%) |
2000 |
Var (%) |
Aérospatiale (M€) |
621 |
584 |
- 6 |
485 |
- 17 |
575 |
18 |
605 |
5 |
635 |
5 |
Matra Bae (M€ ) |
607 |
923 |
52 |
1.162 |
26 |
1.256 |
8 |
1.180 |
- 6 |
1.256 |
6 |
Aérospatiale (MF) |
4.107 |
3.860 |
- 6 |
3.208 |
- 17 |
3.800 |
18 |
4.000 |
5 |
4.200 |
5 |
Matra Bae (MF) |
4.010 |
6.101 |
52 |
7.683 |
26 |
8.300 |
8 |
7.800 |
- 6 |
8.300 |
6 |
Source : CLSE
Etant entendu qu'Aérospatiale disposait d'une responsabilité
exclusive en matière nucléaire, l'évolution
comparée du chiffre d'affaires des deux entreprises venant des missiles
tactiques a vu le déclin, sans doute transitoire,
25(
*
)
de cette activité chez Aérospatiale et
son essor chez MHT.
La fusion des actifs des deux entreprises se traduira par un renforcement
substantiel de la position du groupe qui devra, toutefois, régler les
problèmes de coexistence des missiles concurrents Otomat et Exocet.
Récapitulatif des caractéristiques des missiles tactiques
produits par Matra BAe Dynamics
Famille |
Nom |
Concurrents |
Destination |
Air/Air |
Mica
|
Amraam
|
Combat
aérien toutes distances
|
Air/Sol |
Apache
|
Taurus
|
Bombardement distance sécurité
|
Sol/Air |
Mistral |
Stinger SA7 Starburst |
Anti-aérien courte portée |
Mer/Mer |
Otomat |
Exocet |
Anti-navire |
Source : Groupe Lagardère
Récapitulatif des caractéristiques des missiles tactiques produits par Aérospatiale
Famille |
Nom |
Destination |
Anti-char |
Milan
|
Anti-char pour fantassin
|
Air/Sol |
AS30
|
Bombardement guidé laser
|
Anti-aérien |
Roland
|
Anti-aérien c ourte portée
|
Anti-missile |
Aster |
Anti-missiles moyenne portée |
Anti-navire |
Exocet
|
Anti-navire longue portée
|
Source : Aérospatiale
En ce qui concerne les satellites
, l'intégration des actifs de
MHT dans Aérospatiale aura pour effet de rétablir cette
activité dans le futur groupe, malgré les arrangements ayant
accompagné la cession du portefeuille satellites d'Aérospatiale
à Thomson (v.supra).
Evolution du chiffre d'affaires satellites
|
1995 |
1996 |
Var (%) |
1997 |
Var (%) |
1998e |
Var (%) |
1999e |
Var (%) |
2000e |
Var (%) |
Aerospatiale (M€) |
406 |
760 |
87 % |
51 |
- 32 % |
0 |
NS |
0 |
NS |
0 |
NS |
MMS (M€) |
1.025 |
1.276 |
24 % |
1.281 |
0 % |
1.271 |
- 1 % |
1.377 |
8 % |
1.437 |
4 % |
Aerospatiale (MF) |
2.685 |
5.024 |
87 % |
3.421 |
- 32 % |
0 |
- 100 % |
0 |
NS |
0 |
NS |
MMS (MF) |
6.777 |
8.437 |
24 % |
8.465 |
0 % |
8.400 |
- 1 % |
9.100 |
8 % |
9.500 |
4 % |
Cette
partie du dossier a d'ailleurs été à la source de vives
tensions entre industriels qui, n'étant pas l'objet de ce rapport ne
seront pas développés ici sinon pour mentionner à nouveau
que, dans le cadre de l'accord préparatoire à la fusion
Aérospatiale-MHT, le sort de la participation d'Aérospatiale dans
Thomson CSF devrait être résolu provisoirement par un transfert au
profit de l'Etat. On relèvera à ce stade que cette participation
ayant pu être évaluée à 1,5 milliard de francs,
« l'appauvrissement » d'Aérospatiale
consécutif à la solution choisie a favorisé la conclusion
de l'accord avec Lagardère SCA sans garantie que l'Etat puisse valoriser
cette participation sur une base équivalente dans un futur proche.
On le voit, la logique industrielle du rapprochement Aérospatiale-MHT
est satisfaisante dans l'ensemble. Elle peut toutefois faire l'objet
d'appréciations nuancées sur tel ou tel point.
En premier lieu, on ne peut que constater la variabilité du degré
de cohérence des actifs rapprochés. Incontestable et intense pour
les missiles, cette cohérence apparaît moins évidente pour
les satellites dont Aérospatiale vient de se dégager, et douteuse
s'agissant du pôle télécommunications de MHT.
La cohérence industrielle du futur ensemble doit toutefois être
également appréciée globalement.
Sous cet angle, le nouveau groupe sera en premier lieu le seul groupe
européen à maîtriser l'ensemble des douze métiers de
l'aéronautique et de la défense.
Comparaison des segments de marché des industriels
européens
|
Aérospatiale |
Matra BAe |
Aérospatiale MHT |
Dasa |
BAe |
Dasa BAe |
Avions commerciaux |
Oui |
Non |
Oui |
Oui |
Oui |
Oui |
Avions d'affaires |
Oui |
Non |
Oui |
Non |
Non |
Non |
Avions de combat |
Oui |
Non |
Oui |
Oui |
Oui |
Oui |
Avions mil (hors combat) |
Oui |
Non |
Oui |
Oui |
Oui |
Oui |
Hélicoptères |
Oui |
Non |
Oui |
Oui |
Non |
Oui |
Missiles tactiques |
Oui |
Oui |
Oui |
Oui |
Oui |
Oui |
Missiles balistiques |
Oui |
Non |
Oui |
Non |
Non |
Non |
Missiles air air |
Non |
Oui |
Oui |
Non |
Oui |
Oui |
Lanceurs spatiaux |
Oui |
Non |
Oui |
Oui |
Non |
Oui |
Satellites |
Non |
Oui |
Oui |
Oui |
Non |
Oui |
Infras.spatiales |
Oui |
Oui |
Oui |
Oui |
Non |
Oui |
Electronique |
Oui |
Oui |
Oui |
Oui |
Oui |
Oui |
Source : estimations CLSE
A ce
stade il faut relever qu'au-delà d'une agglomération bienvenue
d'actifs nationaux, la fusion entre Aérospatiale et MHT apporte
également une contribution importante à une plus grande
intégration de l'industrie européenne.
Si l'apport de Lagardère SCA à Aérospatiale n'a aucun
impact direct sur le plan de l'aéronautique pure, il n'en va pas de
même pour les missiles, activité dont les liens avec les
programmes aéronautiques sont étroits, et pour les
activités spatiales.
En soi, le regroupement des actifs des deux entreprises constitue
déjà, du fait de leurs tailles respectives, une importante
avancée sur le chemin de l'union des forces en Europe. Mais, il y a
plus. Chacune des deux entreprises étant liée par des
coopérations plus ou moins étroites avec des partenaires
européens, le regroupement de leurs activités est susceptible
d'élargir le réseau des actifs mis en commun en Europe.
En ce qui concerne l'espace, la fusion aura pour effet de constituer une
entité puissante.
Classements des industriels mondiaux fabricants de satellites
(en % de chiffre d'affaires)
Lockheed Martin |
31,2 |
MMS Dasa |
17,9 |
Hugues |
16,7 |
Alcatel Thomson |
14,2 |
TRW |
10,8 |
Loral |
9,1 |
Source : Euroconsult
Le nouveau groupe qui apparaît en particulier comme le deuxième
fabricant de satellites au monde toutefois loin derrière le premier
d'entre eux, alliera à cette activité qui pourrait être
encore plus concentrée à l'avenir une position très forte
dans les lanceurs.
Les résultats des activités espace
(en millions d'euros)
|
Au 31 décembre 1998 |
|
|
|
Quote-part du Groupe pro forma |
Prises de commandes |
1.939 |
10,8 % |
Carnets de commandes |
3.226 |
9,1 % |
Chiffre d'affaires |
1.524 |
12,4 % |
Résultat d'exploitation |
90 |
18,2 % |
Salariés |
6.220 |
11,9 % |
Cette
entité est, de plus, conduite en partenariat avec des industriels
étrangers à travers Matra Marconi Space (MMS) dont le
réseau d'alliances s'est étendu fin 1998.
Les sociétés Lagardère SCA, GEC et DASA ont en effet
conclu, le 23 décembre 1998, un accord relatif à la fusion
des activités de MMS et des filiales de DASA dans le secteur spatial
(DASA Raumfahrt-Infrastruktur et Dornier Satellitensysteme). Cette fusion
devrait créer un nouveau groupe intégré détenu de
manière paritaire en termes de droits de vote, MMS détenant
toutefois la majorité des droits économiques.
Le même jour, un accord de principe a également été
signé avec le groupe Finmeccanica pour la fusion du nouvel ensemble avec
la division espace Alenia Spazio.
A l'issue de l'ensemble des opérations projetées,
la
nouvelle entité sera la première entreprise spatiale
européenne avec un chiffre d'affaires supérieur à
2,7 milliards d'euros.
Le succès de ces différents opérations consacrerait donc
l'union des industries spatiales de l'Europe occidentale.
Ces heureuses perspectives appellent toutefois quelques observations.
Dans l'espace, l'accord conclu avec Finmeccanica n'étant qu'un accord de
principe, il reste à vérifier qu'il sera bien suivi d'effets, ce
qui peut supposer quelques turbulences.
De plus, il faut remarquer que la fusion entre BAe et GEC a pour effet de
substituer la première de ces entreprises à la seconde dans la
société commune MMS. Il reste, là aussi, à
vérifier que cette substitution d'actionnaires n'aura pas d'impact
négatif sur une coopération qui jusqu'alors concernait des
entreprises plus complémentaires que concurrentes.
Plus généralement, il convient de souligner que les actifs
apportés à Aérospatiale par MHT sont des actifs qui, pour
l'essentiel, sont cogérés avec British Aerospace depuis la fusion
entre Bae et GEC. Cette donnée pose la question de la mesure dans
laquelle les choix stratégiques de la future Aérospatiale-MHT
pourront se concilier avec les choix de BAe.
Enfin et surtout, la fusion n'a pas pour effet d'unifier l'industrie
aéronautique nationale puisqu'elle ne regroupe pas l'ensemble des actifs
concernés. De ce point de vue, la France conserve un certain retard sur
le Royaume-Uni, si bien que des étapes ultérieures devront
être franchies.
B. ESQUISSE D'UN BILAN PATRIMONIAL
1. Rappel des enjeux
La
dimension financière de la fusion a suscité bien des
interrogations.
La question a porté en substance sur la détermination de la
quotité du capital du nouvel ensemble à attribuer à MHT et
donc sur l'évaluation implicite d'Aérospatiale et des apports de
Lagardère.
Les enjeux attachés à cette question fondamentale doivent
être rapidement mentionnés.
Hormis les enjeux, privés,
concernant Lagardère, ils apparaissent relever de deux
catégories, patrimoniale et stratégique.
Sur le plan stratégique
, l'évaluation de MHT étant
supposée connue en raison de la cotation en bourse de Lagardère
SCA, l'attribution d'une quotité de titres Aérospatiale en
échange de l'apport de MHT à l'entreprise peut être
considérée comme une évaluation implicite
d'Aérospatiale. A l'heure où la structuration de l'industrie
aéronautique européenne bute en particulier sur des divergences
d'évaluation des entreprises, une telle évaluation consiste
à dévoiler ses cartes aux partenaires.
Elle résout implicitement les inconnues portant sur la valeur de
l'entreprise publique nées de son absence de cotation. C'est d'ailleurs
bien ainsi que les industriels extérieurs et les responsables politiques
à l'étranger rencontrés par votre rapporteur ont
appréhendé devant lui l'opération.
C'est probablement aussi la raison pour laquelle la Commission des
participations et des transferts (CPT) insiste tant dans son avis sur la
fusion
26(
*
)
sur l'absence de prise en compte
à ce stade des effets de synergie résultant du rapprochement des
deux entités et souligne que de tels effets devront en revanche
être estimés lors de la mise sur le marché du nouveau
groupe.
Sur le plan patrimonial
, étant rappelé
qu'Aérospatiale est jusqu'à nouvel ordre une entreprise publique,
il semble aller de soi que la valorisation implicite telle que retenue à
l'occasion de la fusion devait néanmoins, malgré les
précautions de la CPT, peser d'un poids certain au moment de la mise sur
le marché annoncée d'une quotité de 20 % du capital.
En outre, et surtout il importe de vérifier que la valorisation de
l'actif public n'a pas été minorée par rapport à
celle de l'actif apporté par Lagardère SCA ce qui serait synonyme
de perte sèche pour l'Etat.
2. Les grandes lignes de l'accord
L'accord
général a comporté trois accords particuliers.
L'accord du 15 février 1999
entre l'Etat et Lagardère SCA
précise
les solutions financières.
Le groupe Lagardère, en échange de ses apports, recevrait
31,45 % du capital de la future entreprise, le périmètre
d'Aérospatiale étant préalablement réduit du fait
du transfert à l'Etat de la participation de l'entreprise dans le
capital de Thomson CSF (3,87 %).
Le groupe Lagardère se voit reconnaître, par un pacte
d'actionnaires, le statut de
partenaire privilégié
dans la
future entreprise, statut défini à travers les droits reconnus
à Lagardère par ledit pacte d'actionnaire conclu avec l'Etat dont
il reste à préciser complètement la substance.
Outre l'apport des actifs de MHT à Aérospatiale, Lagardère
SCA versera à l'Etat une soulte de 850 millions de francs au minimum
représentative de 1,55 % du capital de l'entreprise, et dans la
limite de 1.150 millions de francs, une somme variant selon la performance
boursière relative du titre Aérospatiale-Matra
appréciée sur une période de deux ans.
Plus le titre se valorisera par rapport au CAC 40, moins la soulte à
verser par Lagardère sera substantielle ; si le cours du titre
monte de 10 % par rapport au CAC 40, la dette de Lagardère sera
annulée. Une clause prévoit en outre que tout
désengagement du nouvel actionnaire dans les deux ans rend exigible la
soulte calculée
prorata temporis
.
Selon le communiqué de presse du 15 février 1999, l'une des
clauses du
pacte
d'actionnaires
conclu entre l'Etat et
Lagardère SCA stipule que «
les principales
décisions concernant le nouveau groupe seront arrêtées d'un
commun accord entre ses deux premiers actionnaires, l'Etat et le groupe
Lagardère. »
L'avis de la CPT évoque en outre l'organisation d'un système
croisé de droits de préemption. L'Etat dispose de la
possibilité d'acquérir la participation de Lagardère SCA
si cette société change de contrôle ou si elle entend
céder cette participation.
L'avis indique que «
Réciproquement, Lagardère SCA
pourra acquérir les actions cédées par l'Etat si la
participation de celui-ci descendait en-dessous de 20 % ».
Le troisième pilier de l'opération est constitué par un
accord industriel
conclu le 3 mars 1999 entre Aérospatiale
d'une part, Lagardère SCA et MHT d'autre part. Cet accord restera en
vigueur tant que Lagardère SCA détiendra plus de 20 % des
droits de vote de la nouvelle entité.
Quatre clauses de l'accord industriel doivent être mises en
évidence :
- Aérospatiale rapprochera ses activités de missilier avec
Matra-Bae Dynamics dont l'actionnariat restera inchangé ;
- les fonctions à l'exportation du nouvel ensemble seront
assurées par un groupement d'intérêt économique
(GIE) constitué entre Lagardère SCA et Matra Aérospatiale,
avec la répartition suivante des parts sociales : 49 % pour la
première, 51 % pour la seconde ;
- les sociétés du nouveau groupe bénéficieront d'un
accès gratuit, mais non transférable, au savoir-faire et droits
de propriété industrielle de l'ensemble des membres du
groupe ;
- enfin, les conventions de prestations entre Lagardère SCA et les
entités de MHT sont maintenues jusqu'au 31 décembre 2003.
Cet accord industriel est complété par une série d'accords
passés avec les partenaires de Lagardère SCA et, en particulier,
GEC (MMS) et BAe (MBD), au terme desquels GEC exercera notamment son droit
d'équilibrer sa participation dans MMS avec celle de MHT.
3. Que penser de cet accord ?
Le
volet financier du rapprochement doit être apprécié en
gardant à l'esprit que les problèmes soulevés par
l'évaluation des entreprises sont à ce point complexes qu'une
part d'incertitude subsiste toujours, inévitablement
. Il faut donc
dépasser l'idée d'estimer l'équilibre d'un échange
à partir de l'ambition d'en établir la stricte équivalence
financière. Celle-ci est techniquement hors de portée.
En outre, d'autres considérations sont à prendre en compte et,
en particulier, le coût d'un non-accord
. Or, en l'espèce
celui-ci aurait été sans doute fort élevé de part
et d'autre, l'isolement d'Aérospatiale pouvant être
considéré comme annonciateur d'une perte patrimoniale pour l'Etat.
Une première méthode aurait pu consister à s'appuyer sur
la valeur de marché de Lagardère SCA. Sur cette base,
l'évaluation financière des apports de Lagardère SCA
aurait reposé sur le rapprochement de la contribution de MHT au
résultat du groupe et à appliquer le taux ainsi obtenu à
la capitalisation boursière du groupe.
Selon cette méthode, la valeur de MHT serait ressortie à environ
2,6 milliards d'euros (17 milliards de francs) au 30 juin 1998. En
effet, à cette date, le résultat d'exploitation de MHT
s'élevait à 140 millions d'euros, soit 57,5 % du
résultat d'exploitation d'un groupe dont la capitalisation
boursière s'élevait alors à 4,5 milliards d'euros.
Ainsi, accorder 33 % du capital de la future entité à
Lagardère serait équivalent à valoriser
Aérospatiale à hauteur de 5,2 milliards d'euros
27(
*
)
Hors la participation de l'entreprise au capital de
Dassault Aviation, la valeur d'Aérospatiale serait ainsi de l'ordre de
4,3 milliards d'euros (28,3 milliards de francs), soit près de
27 fois le résultat d'exploitation de l'entreprise en 1997, 20 fois son
résultat consolidé et 27 fois le résultat net
d'Aérospatiale en 1998.
Cette approche qui paraît soutenir l'idée que les
évaluations entreprises à l'occasion de la fusion ne manqueraient
pas d'un certain réalisme n'a toutefois pas été choisie
à titre principal par les négociateurs et n'a donc pas
été retenue comme telle par la CPT au cours de son examen.
Les raisons qui ont conduit à retenir une autre méthode
résultent d'abord de la relativité de l'exercice mentionné
plus.
Le rapport cours-bénéfice d'une entreprise est susceptible
d'évoluer considérablement. Ainsi ce ratio est aujourd'hui pour
Boeing de 30,3 mais il a oscillé dans les cinq ans passés entre
un sommet de 48,9 et un point bas de 14,2.
En outre, il fallait tenir compte de la dynamique de chaque entreprise dont
rend mal compte une situation observée statiquement.
C'est la raison pour laquelle la méthode centrale d'évaluation
utilisée à l'occasion de l'apport de MHT a plutôt
consisté à actualiser les flux de trésorerie
prévisionnels des deux entreprises dans les cinq années à
venir sur la base de l'estimation de leurs plans de développement
(business plan).
L'on ne peut conférer à une telle méthode classiquement
utilisée dans de telles négociations plus de vertus qu'elle n'en
a.
Pas plus qu'en macro-économie, la prévision
micro-économique ne peut se prévaloir du statut de la science
exacte.
L'exercice confine à l'art mais a pour avantage mais aussi pour
handicap, de reposer sur le consensus. Or, celui-ci est plutôt le
résultat de la négociation que son fondement.
A partir de là, il va de soi que la silhouette du départ de
chaque partie à la négociation profile celle-ci et
détermine donc largement ses résultats.
Ces remarques ne sont pas purement
« intellectuelles »,
« théoriques ».
Elles visent à rendre
intelligibles
les termes d'une négociation qui ont été
fortement déterminés par les événements qui ont
entouré la présentation des comptes d'Aérospatiale pour
1998.
La soudaine révision à la baisse des performances de cette
entreprise a joué un rôle considérable dans la
négociation
en favorisant la position de Lagardère SCA
et, finalement, le bon accueil réservé à ses
prétentions.
La signification des comptes d'une entreprise de production d'avions est encore
plus relative que celle de toute autre entreprise. On le démontrera
aisément à partir de l'évolution assez
déconcertante des résultats d'Aérospatiale entre 1997 et
1998.
Le résultat d'exploitation d'Aérospatiale est en effet
passé entre ces deux exercices de 1.078 à 409 millions de
francs, et ce malgré une hausse du chiffre d'affaires dans un contexte
où la contribution d'Airbus au résultat, historiquement positive,
s'est soldée par une perte (- 68 millions de francs contre un
profit de 1131 millions en 1997).
Les facteurs de variation du résultat de l'entreprise entre 1997 et
1998 sont étroitement liés à des événements
exceptionnels dont la récurrence semble établie du moins sur
courte période et pour certains d'entre eux.
a) Un ressaut de provisions : le problème des garanties commerciales « hors-bilan »
C'est
probablement le cas
des provisions
qui
ont été
considérablement augmentées de 650 millions de francs pour la
seule activité Airbus, sous l'effet d'exigences nouvelles du GIE. Cet
effort de provisionnement, brutal, semble résulter de la
considération d'engagements « hors-bilan »
constitués par les garanties sur les valeurs résiduelles offertes
aux clients d'Airbus.
Au terme de ces garanties (qui peuvent porter sur le paiement des loyers, la
valeur résiduelle des avions ou la participation au financement de la
vente de certains appareils), si le prix touché par le détenteur
d'un appareil au moment de sa revente éventuelle est inférieur
à la valeur résiduelle garantie par le constructeur lors de la
vente, celui-ci « rembourse la différence » à
son acquéreur.
L'ampleur des provisions passées à ce titre en 1998 peut
à bon droit susciter quelques interrogations
sur
elles-mêmes (ces provisions sont-elles justifiées ?
sont-elles passées de la même manière dans les autres
entreprises du GIE Airbus ?), mais aussi sur les conditions dans
lesquelles les comptes de l'entreprise ont pu être certifiés dans
le passé.
b) Des charges de R &D évaluées de façon pénalisante
Mais, il
faut aussi tenir compte
des frais de recherche-développement
autofinancés
par l'entreprise pour comprendre l'évolution
négative de son résultat en 1998. Ce type de charges qui a
joué un rôle important dans les évaluations ne peut
être quant à lui jugé entièrement récurrent
puisqu'il dépend en particulier des décisions des pouvoirs
publics
28(
*
)
De 527 millions d'euros
en 1997, ces charges sont passées à 587 millions lors de
l'exercice écoulé pour l'ensemble du groupe. La variation de ce
poste de charges paraît intégralement dû à
l'augmentation des remboursements d'avances consenties par l'Etat au titre des
premiers programmes Airbus. Elle s'élèverait à
622 millions de francs, les remboursements passant de 1.155 à
1.777 millions entre les deux années sous revue.
Même si une telle évolution est la résultante d'un mode de
soutien public garantissant les intérêts de l'Etat et conforme aux
engagements de la Communauté européenne, elle est symptomatique
d'un système de financement public de l'industrie aéronautique
mal adapté aux exigences de compétitivité des entreprises.
On renverra sur ce sujet aux conclusions d'un précédent rapport
de la commission des finances
29(
*
)
dont les
conclusions ont été malheureusement beaucoup
négligées.
En tout état de cause, l'effet des remboursements d'avances sur les
comptes d'Aérospatiale est très lourd.
Dans un contexte où le montant des charges de
recherche-développement supportées par Aérospatiale est
considérable, il s'élève à 7 % de son chiffre
d'affaires contre seulement 1,5 % pour British Aérospace et
5,5 % pour DASA, il faut souligner que cet effort est sensiblement plus
réduit pour MHT (3,4 % du chiffre d'affaires consolidé) dont
les activités de recherche sont plus souvent financées sur des
ressources externes.
Si les caractéristiques de l'activité d'Aérospatiale
expliquent le niveau relativement élevé par rapport à la
situation de MHT des charges de recherche-développement de l'entreprise,
la comparaison du niveau de ces charges par rapport à la moyenne des
entreprises comparables invite à approfondir cet aspect du dossier.
Les tableaux ci-dessous récapitulent, le premier, l'évolution du
chiffre d'affaires consolidé d'Aérospatiale, le second,
l'évolution des frais de recherche et développement de
l'entreprise.
Evolution détaillée du chiffre d'affaires consolidé d'Aérospatiale de 1996 à 1998
(En millions d'euros)
|
1998 |
1997 |
1996 |
|||
|
Niveau |
En % |
Niveau |
En % |
Niveau |
En % |
Aéronautique |
|
|
|
|
|
|
Airbus |
4.180 |
50 % |
4.116 |
48 % |
3.102 |
40 % |
ATR |
310 |
3,7 % |
337 |
3,9 % |
387 |
5 % |
Aviation légère |
52 |
0,6 % |
54 |
0,6 % |
54 |
0,7 % |
Maintenance |
413 |
4,9 % |
398 |
4,6 % |
361 |
4,7 % |
Hélicoptères |
1.698 |
20,3 % |
1.554 |
18,1 % |
1.458 |
18,8 % |
Autres avions |
266 |
3,2 % |
234 |
2,7 % |
193 |
2,5 % |
Total aéronautique |
6.919 |
82,7 % |
6.693 |
78 % |
5.555 |
71,6 % |
Espace et défense |
|
|
|
|
|
|
Espace et lanceurs stratégiques et spatiaux |
850 |
10,2 % |
772 |
9 % |
749 |
9,7 % |
Missiles tactiques |
524 |
6,3 % |
489 |
5,7 % |
589 |
7,6 % |
Divers |
60 |
0,7 % |
54 |
0,6 % |
17 |
0,2 % |
Total espace et défense |
1.434 |
17,2 % |
1.315 |
15,3 % |
1.355 |
17,5 % |
Divers |
12 |
0,1 % |
9 |
0,1 % |
12 |
0,2 % |
Total (hors activités cédées) |
8.365 |
100 % |
8.017 |
93,4 % |
6.922 |
89,2 % |
Evolution des frais de recherche et développement d'Aérospatiale entre 1996 et 1998
(En millions d'euros)
|
1998 |
1997 |
1996 |
|||
|
Niveau |
En % |
Niveau |
En % |
Niveau |
En % |
Aéronautique |
791 |
62 % |
685 |
40,9 % |
646 |
34,2 % |
Espace et défense |
479 |
37,5 % |
984 |
58,8 % |
1.234 |
65,3 % |
Divers |
6 |
0,5 % |
5 |
0,3 % |
10 |
0,5 % |
Total |
1.276 |
100 % |
1.675 |
100 % |
1.889 |
100 % |
Dont |
|
|
|
|
|
|
Financés en externe |
689 |
54 % |
1.148 |
68,5 % |
1.360 |
72 % |
Autofinancés |
587 |
46 % |
527 |
31,5 % |
329 |
28 % |
Ces
données permettent de tirer plusieurs conclusions.
Sur courte période
30(
*
)
, il n'existe pas
de causalité rigoureuse entre le chiffre d'affaires et les frais de
recherche-développement.
Deux observations le montre assez :
La croissance de l'activité d'Aérospatiale sur la période
récente s'est déroulée dans un contexte de
réduction des frais de recherche-développement.
Les montants relatifs par secteurs d'activité des charges de
recherche-développement sont sans liens avec les sources relatives de
l'activité de l'entreprise.
On est ainsi amené à considérer que les charges de
recherche-développement étant
à court terme
indépendantes de l'activité peuvent être
aménagées assez librement, ce qui en fait un poste de charges
ajustable à des fins comptables au moins jusqu'à un certain point.
L'analyse des frais de recherche-développement d'Aérospatiale
montre que ces dernières années le poids des charges
associées aux activités Espace et Défense, a
été sensiblement réduit et n'atteint plus que 38,8 %
de leur niveau de 1996. Cependant, par rapport à la part dans
l'activité totale de cette division (environ 17 %), les frais de
recherche-développement qui y sont consacrés restent, quoique de
façon atténuée, disproportionnés (37,5 % des
charges totales de recherche-développement en 1998 contre 65,3 % en
1996). On pourrait en conclure que cette situation réserverait quelques
marges d'économies à l'entreprise désormais largement
débarrassée des coûts de développement
d'Ariane V.
Une part de ces économies a été absorbée par la
croissance des frais de recherche-développement de l'activité
aéronautique en raison du développement des versions
allongées de l'A340, si bien que le montant des charges de
recherche-développement de l'aéronautique s'élève
à 791 millions d'euros (5,2 milliards de francs) en 1998. Ces
frais ne peuvent être considérés comme entièrement
récurrents. Ils ont vocation à diminuer à mesure de
l'achèvement des programmes en cours, ce qui offrira à son tour
quelques marges.
Cependant,
il est important d'observer que l'effort de réduction
globale des charges de recherche-développement d'Aérospatiale
qui a fait passer le niveau de cette catégorie de coûts de
27,3 % du chiffre d'affaires consolidé en 1996 à 15,2 %
en 1998
n'a pas permis de diminuer le coût nominal des charges
autofinancées par l'entreprise qui ont augmenté
, passant de
529 à 587 millions d'euros.
Leur poids relatif s'est atténué passant de 7,6 % à
7 % du chiffre d'affaires mais, comme on le voit, très
légèrement, puisque la montée en puissance des frais de
recherche-développement aéronautique s'est accompagnée
d'une augmentation des coûts à autofinancer passés de
28 % à 46 % du total.
C'est une évolution contraire qui a marqué sur ce point les
coûts de recherche-développement supportés par MHT qui,
surtout, possèdent des caractéristiques très
différentes.
Evolution détaillée du chiffre d'affaires consolidé de MHT de 1996 à 1998
(en millions d'euros)
|
1998 |
1997 |
1996 |
|||
|
Niveau |
En % |
Niveau |
En % |
Niveau |
En % |
Recherche et développement totale |
|
|
|
|
|
|
Espace |
1.262 |
39,4 |
1.287 |
40,7 |
1.285 |
43,1 |
Systèmes de missiles |
1.157 |
36,2 |
1.063 |
33,6 |
895 |
30,0 |
Systèmes, services et télécommunications |
781 |
24,4 |
810 |
25,7 |
803 |
26,9 |
Total |
3.200 |
100,0 |
3.160 |
100,0 |
2.983 |
100,0 |
Evolution des frais de recherche et développement de MHT entre 1996 et 1998
(en millions d'euros)
|
1998 |
1997 |
1996 |
|||
|
Niveau |
En % |
Niveau |
En % |
Niveau |
En % |
Recherche et développement totale |
|
|
|
|
|
|
Espace |
122 |
32,2 |
118 |
29,6 |
100 |
28,8 |
Systèmes de missiles |
183 |
48,3 |
193 |
48,5 |
161 |
46,4 |
Systèmes, services et télécommunications |
74 |
19,5 |
87 |
21,9 |
86 |
24,8 |
Total |
379 |
100 |
398 |
100 |
347 |
100 |
Dont autofinancée |
109 |
28,8 |
119 |
29,9 |
107 |
30,8 |
Dont financée en externe |
270 |
71,2 |
279 |
70,1 |
240 |
69,2 |
Investissements |
64 |
|
89 |
|
79 |
|
Pour
un chiffre d'affaires correspondant à un peu plus de deux fois celui
réalisé par Aérospatiale dans les activités
comparables de cette entreprise, le montant total des charges de R-D de MHT se
situe très en-dessous des charges similaires d'Aérospatiale,
même depuis la réduction mentionnée plus haut.
Cet avantage relatif est amplifié par l'importance des charges
financées par des sources externes, les frais de recherche
autofinancées ne dépassant pas 30 % en, moyenne sur la
période.
c) D'autres variables cruciales : les problèmes de change
Outre
ces évolutions intégrées dans les comptes de l'entreprise,
d'autres variables-clefs censées influer sur les comptes futurs ont
été prises en compte dans les négociations.
Il s'est essentiellement
agi de questions relatives au change des
devises
. Une partie considérable du chiffre d'affaires
d'Aérospatiale est réalisée à partir de ventes
libellées en dollar. Dans le même temps, les charges
supportées par l'entreprise sont principalement exprimées en
francs. Selon les analyses financières de la direction de l'entreprise,
le point mort est atteint lorsque le cours du dollar contre franc se situe aux
alentours de 5 francs.
Plus le cours du dollar est élevé, plus, toutes choses
égales par ailleurs, les performances d'Aérospatiale sont
bonnes
. Dans l'évaluation de l'entreprise, la variable de change
était donc centrale.
La valeur anticipée du cours du dollar n'ayant pas été
communiquée à votre rapporteur et ne figurant pas dans l'avis de
la CPT, on ne peut faire autrement que de supputer la solution retenue. A cet
égard, on ne peut que supposer qu'elle a consisté dans une cote
intermédiaire entre une valeur de l'ordre de 5,50 - 5,60 francs pour un
dollar compte tenu des couvertures de risques de change pratiquées en
1999.
Une telle option amène une observation. L'hypothèse pourtant
envisageable d'une montée en puissance des opérations
commerciales libellées en euros n'a pas été retenue lors
de la négociation. Or, sa réalisation aurait pour effet
d'insensibiliser plus ou moins totalement les comptes d'Aérospatiale aux
évolutions de change.
Mais la question du change a également été à
l'origine d'une charge imprévue pour Aérospatiale. L'existence
d'un risque de change résiduel a ainsi été
« découverte »
à l'occasion des
négociations.
Dès lors qu'une entreprise ne maîtrise pas ses recettes du fait de
variations possibles du change, il existe un risque de change que la prudence
commande de couvrir. Or, il est apparu que cette couverture n'était pas
entièrement organisée au delà de l'année 1999, un
volant d'affaires de l'ordre de 12 milliards de dollars restant non couverts.
La poursuite de la politique prudentielle d'Aérospatiale, c'est à
dire l'objectif de garantir des recettes sur la base d'un cours de 1 dollar
contre 5,50 francs
31(
*
)
, supposait de
compléter les mécanismes de gestion du risque au delà de
1999. Les coûts de ce parachèvement ont été
estimés à environ 300 millions de dollars compte tenu de
l'économie fiscale associée à cette charge.
Cette charge a été prise en compte dans la négociation, la
décision ayant été prise de passer en totalité les
coûts de l'extension de la couverture de change en charges dès
1999
32(
*
)
.
*
* *
Une
constatation s'impose, celle du cumul des événements
défavorables pour les comptes d'Aérospatiale survenus à
l'occasion de l'opération de fusion.
Ce faisceau de coïncidences ne peut pas conduire à conclure que des
manipulations artificielles auraient permis de réduire la valeur de
l'entreprise pour favoriser la bonne fin de la négociation. Mais, il
témoigne certainement de choix, certes pas arbitraires, mais discutables
qui ont pu peser sur la base à partir de laquelle a été
conduite l'évaluation du dynamisme de l'entreprise.
D'un autre côté, certaines prérogatives accordées au
nouvel arrivant pourraient paraître exorbitantes si elles
n'étaient pas provisoires.
Il reste que l'équilibre de l'opération doit être
jugé à l'aune de l'importance stratégique d'une
réorganisation du paysage industriel français qui n'est pas sans
effet sur la valeur patrimoniale de la participation du secteur public dans
l'entreprise.
A ce sujet, les conditions de la mise sur le marché d'une fraction de
cette participation - 17 % - approuvées par la Commission des
participations et des transferts laissent penser que l'Etat n'a pas tiré
tout le parti des perspectives d'une entreprise dont le potentiel devrait
être mieux exploité à l'avenir.
La sur-souscription du placement réservé aux institutionnels
(plus de 35 fois) et pourtant offert au prix le plus élevé de la
fourchette prévue dans le cadre du pré-placement, le bond du
titre le premier jour de sa cotation et l'introduction d'une clause de
revalorisation du produit de la cession consentie au bénéfice du
Consortium de réalisation(CdR), principal vendeur dans cette
opération en témoignent.
Dans une perspective patrimoniale et stratégique, il aurait
été souhaitable de mieux valoriser le nouveau groupe.
Il reste à souhaiter que la recomposition du paysage aéronautique
français soit approfondie ce qui suppose un meilleur arrimage des avions
de combat et de prolonger la logique des concentrations horizontales.
CHAPITRE III :
DES PROJETS À RELANCER
Les
objectifs fixés par les responsables politiques européens n'ont
pas été atteints.
Les obstacles aux processus d'intégration envisagés n'ont pas
été surmontés. Certaines initiatives malheureuses ont de
surcroît contrarié l'aboutissement nécessaire des
restructurations.
Principaux événements récents intervenus entre les
entreprises du secteur
1
er
rapport des industriels sur les questions posées par
l'intégration de l'industrie aéronautique européenne.
Accord de coopération entre Aérospatiale, Alcatel, Dassault
Industries, Thomson SA et Thomson CSF ouvrant la voie à la constitution
d'un pôle renforcé d'électronique professionnelle et de
défense.
Le capital de Thomson CSF est détenu provisoirement (v. infra) par
Thomson SA (42,94 %), Alcatel (16,36 %), Dassault Industries
(6 %) et Aérospatiale (4 %). L'entreprise passe de 38,5
à 45 milliards de chiffre d'affaires, Alcatel Space (Alcatel :
51 %, Thomson CSF : 49 %) disposant d'un chiffre d'affaires de
10 milliards de francs.
Dissolution du consortium Aero International Régional (AIR) qui
regroupait Aérospatiale, Alénia et BAe du fait de la
volonté britannique.
Parallèlement, renaissance d'ATR entre Aérospatiale et
Alénia.
Entrée à hauteur de 35 % de BAe dans le capital de SAAB,
constructeur du Gripen.
Relèvement à 49,5 % du plafond de participation des
investisseurs étrangers dans le capital de BAe.
Négociations privilégiées entre BAe et DASA.
Lancement du processus de rapprochement entre Aérospatiale et Matra
Hautes Technologies.
Transfert à Aérospatiale de la participation de l'Etat dans
Dassault Aviation.
Fusion BAe - GEC Marconi. Echec des négociations entre Thomson CSF et
GEC - Marconi. Rupture des négociations entre BAe et DASA.
Rapprochement entre Matra Marconi Space et DASA dans l'industrie des
satellites.
Accord de principe Lagardère - GEC-DASA - Finameccanica sur l'apport
des activités spatiales de l'industriel italien.
Les mariages d'entreprises supposent de résoudre une série de
difficultés préliminaires à l'union et de jeter les bases
d'une vie commune harmonieuse. Ces préparatifs peuvent être
laissés à l'initiative des futurs conjoints ou ils peuvent
être confiés à un tiers.
C'est la première voie qui a été suivie en Europe. Elle
a débouché sur une impasse dont il faut aujourd'hui sortir.
I. LES DIFFICULTES À SURMONTER NE MANQUENT PAS
Les difficultés à surmonter pour unifier l'aéronautique européenne sont importantes et nombreuses. Certaines viennent de la situation hétéroclite des entreprises aggravée par des initiatives malheureuses. D'autres résident dans des choix publics qui doivent être mieux arbitrés.
A. LES PROBLÈMES TENANT AUX ENTREPRISES
Les entreprises européennes présentent des caractéristiques propres qui rendent leur union difficile. Mais, s'il serait vain de nier leurs différences, il est dangeureux de les exalter.
1. Des actionnariats disparates
Le point
d'achoppement principal est venu de la question de la structure de
l'actionnariat de la future EADC. Sous-jacente à cette question, le
problème de la valorisation des apports de chacun n'a été
abordé que de façon incidente.
Le constat d'une grande hérérogénéité des
structures d'actionnariat des différentes entreprises concernées
peut être formulé simplement. A l'époque de la confection
du rapport :
Aérospatiale
était détenue à 99 % par
l'Etat français (directement ou indirectement).
BAe
était totalement privée, et cotée en bourse,
avec des actionnaires très diversifiés sans actionnaire de
« référence ». Le Gouvernement britannique
disposait d'une action avec droit de véto (« golden
share ») limité essentiellement à la détention
d'actions par des étrangers à hauteur de 49,5 %.
CASA
était détenue à 99% par l'Etat espagnol, le
gouvernement espagnol ayant l'intention de privatiser la société,
sans en avoir encore décidé les conditions.
DASA
était controlée par des actionnaires
privés (environ 94 % par Daimler-Benz AG, 6 % par Freie und Hansestadt
Hamburg et d'autres actionnaires privés minoritaires), le Gouvernement
allemand ne détenant aucune action avec droit de véto.
Cette diversité des formes d'actionnariat a fait naître des
divergences entre les industriels portant sur la conception de l'actionnariat
de la future EADC.
BAe et CASA
ont pu considéré que celui-ci devait reposer sur
la base d'un actionnariat distribué et d'investisseurs institutionnels.
Cette conception repose sur l'idée que l'intérêt des
actionnaires pour l'entreprise est d'une nature financière, la direction
de la société étant redevable devant les actionnaires des
bonnes performances économiques sans que ceux-ci n'interviennent dans la
direction des affaires au delà des questions pour lesquelles les
règles boursières exigent une présentation à
l'assemblée des actionnaires.
De leur côté,
les actionnaires de DASA et
d'Aérospatiale
ont pu conditionner la fusion de leurs actifs
à la conservation de la propriété directe de leur
participation sans dilution des droits attachés aux actions.
La conciliation entre la nature de l'actionnariat en bloc de Daimler Benz et
d'Aérospatiale qui aurait pu désavantager les actionnaires
éparpillés de BAe, a incité les industriels à
explorer les mécanismes et les procédures de contrôle
pouvant réconcilier les objectifs et les intérêts des
différents actionnaires. Cette exploration techniquement fructueuse n'a
cependant pas débouché sur des décisions.
Mais, d'importants progrès vers la résolution des
difficultés sont intervenus avec la cession par l'Etat d'une part
majoritaire du capital d'Aérospatiale et l'entrée dans le groupe
d'un actionnaire privilégié extérieur au secteur public et
doté de prérogatives importantes de gestion.
Là, comme ailleurs, les solutions à apporter doivent reposer sur
une volonté ferme d'équilibre.
L'on soulignera alors que le problème sera vraisemblablement
résolu dès qu'un accord aura été obtenu sur la
composition des organes dirigeants de la nouvelle entreprise qui, par
définition, devront réunir, sur la base de l'équilibre,
les gestionnaires de chacun des partenaires.
2. L'évaluation des actifs
Un
autre conflit latent est apparu, sans être examiné au fond, celui
portant sur la valorisation des actifs apportés par les
différents industriels, valorisation constituant en elle-même une
variable décisive pour déterminer les droits des actionnaires
dans la future entreprise unifiée.
En effet, si les industriels ont posé le principe selon lequel les
actionnaires actuels des sociétés partenaires devraient pouvoir
conserver au moins la valeur complète de leurs parts, ce principe
demande à être complété par des réponses
apportées à la question des méthodes de valorisation de
ces actifs.
Or, l'exigence posée par BAe de voir retenue pour évaluer ses
apports la capitalisation boursière de l'entreprise, concept non
extensible à DASA qui n'est pas cotée ni « a
fortiori » à Aérospatiale et à CASA, entreprises
encore publiques alors, était susceptible de susciter nombre
d'objections compte tenu de son aspect exagérément simplificateur.
Une telle méthode d'évaluation n'est en général pas
de mise dans les mariages préparés à l'avance,
c'est-à-dire dans les unions qui ne résultent pas d'une
volonté agressive d'absorber l'un des partenaires.
L'exemple de la fusion entre Aérospatiale et MHT -v. infra-
démontre que dans des opérations consensuelles, il est tenu
compte de l'ensemble des paramètres significatifs de la valeur des
apports et, en particulier, de la capacité de chacun à produire
des liquidités évaluée dans le temps. La signification
d'un cours de bourse à un instant donné n'apparaît en effet
que relative (v. supra, l'exemple de Boeing).
Une démarche fondée sur d'autres variables s'impose tout
particulièrement en l'espèce en ce sens que deux des principaux
acteurs concernés n'ont pas de « vécu
financier » autonome. La cotation d'Aérospatiale n'est en
effet acquise que depuis peu et ne saurait refléter le potentiel de
l'entreprise qui, appartenant au secteur public, n'a pas été
gérée selon les canons des entreprises privées du secteur.
Quant à DASA, elle fait partie, comme indiqué plus haut d'un
groupe beaucoup plus vaste.
Il reste fondamentalement à s'interroger sur les méthodes
d'évaluation des actifs qu'il faudrait suivre pour assurer une
distribution convenable des droits dans le futur ensemble aux
propriétaires des entreprises actuellement séparées.
Toute méthode fondée sur les performances financières
comparées des entreprises est de nature à introduire des
contestations sans fin compte tenu de la diversité des profils des
entreprises modelés par des activités diverses et des modes de
gestion qui s'ils tendent à s'uniformiser sont longtemps restées
disparates. Par ailleurs de tels critères déboucheraient en
l'état sur des déséquilibres difficilement compatibles
avec le principe d'équilibre de l'union.
Une parité de chiffres d'affaires dans de nombreux secteurs pourrait en
effet s'accompagner d'une profonde inégalité des droits dans le
nouvel ensemble.
Il faut donc, pour satisfaire le principe d'équilibre posé par
les autorités politiques européennes, et sans lequel les projets
d'intégration européenne sont insusceptibles d'aboutir pour le
plus grand dommage de chaque entreprise et de la capacité de puissance
de l'Europe, inventer des mécanismes équitables et rassurants
pour chacun.
Il ne s'agit pas d'imaginer une distribution du capital étrangère
aux valeurs comparée des actifs.
En revanche, il faut s'assurer de l'équité de l'exercice de
valorisation, ce qui suppose un arbitrage impartial.
A
ce propos, une question très importante doit être
résolue, celle de la contribution des différents modes de gestion
de flux publics destinés à l'industrie aéronautique aux
performances de chaque entreprise
. Les perspectives d'harmonisation des
modes de gestion des soutiens publics et des commandes publiques, en
particulier miliaires -v. infra- doivent être prises en compte dans
l'évaluation des entreprises afin d'éliminer les écarts de
performances qui pourraient trouver leur origine dans des pratiques
inégalement favorables.
Les corrections d'estimation qui pourraient en résulter sont
susceptibles d'atteindre des niveaux importants comme l'a montré la
clarification en cours des relations financières entre DASA et l'Etat
allemand.
Il faut aussi tenir compte d'une situation de départ dont les
déséquilibres éventuels pourraient provenir de
caractéristiques structurelles non récurrentes ou en voie de
correction. A cet effet, une période transitoire d'observation des
performances de chacun pourrait être ménagée au terme de
laquelle des ajustements capitalistiques interviendraient.
Un mécanisme également transitoire de dissociation des droits
financiers et de décision concernant des sujets limitativement
énumérés d'intérêt stratégique
pourrait enfin être introduit pour atténuer les
conséquences d'un partage inégal des droits dans le capital de la
nouvelle entreprise.
3. Des « personnalités » hétéroclites
L'une
des difficultés majeures des consolidations aéronautiques
consiste à unir des entreprises aux cultures dissemblables. La nature
des activités, les méthodes de travail, les orientations
stratégiques sont susceptibles de varier considérablement d'une
entreprise à l'autre.
Ce qui est vrai des entreprises d'un même pays l'est
a fortiori
lorsque les entreprises appartiennent à des espaces politique et
culturel différents. Il suffit de songer à la diversité
des langues en Europe pour mesurer la particularité des obstacles
rencontrés pour aboutir à l'union de l'aéronautique
européenne.
Sous bien des angles, les entreprises européennes présentent des
caractères différents.
La situation des entreprises européennes varie beaucoup, d'abord au
regard de la nature de leur activité
.
BAe apparaît comme essentiellement tournée vers les métiers
de la défense quand Aérospatiale a une vocation Airbus
affirmée, un peu atténuée depuis la fusion avec MHT,
partagée à un moindre degré par DASA.
Chiffre d'affaires généré par Airbus en
1997
pour les trois grandes sociétés
(en millions de francs)
Aérospatiale |
27.025 |
BAe (1) |
13.387 (1) |
DASA (1) |
14.383 (2) |
(1)
Sur la base d'une livre britannique = 9,80 francs.
(2) Sur la base d'un DM = 3,36 francs.
Les données du tableau ci-dessus en témoignent. Elles indiquent
aussi qu'en marge des règles de retour à chaque industriel au
sein du GIE Airbus -voir supra-, il existe une disproportion entre les chiffres
d'affaires générés par Airbus chez Aérospatiale et
DASA au profit de la première quand, pourtant, les deux entreprises ont
des droits équivalents dans le consortium (37,9 %).
Cette situation est d'ailleurs à l'origine de différents conflits
dont l'un, important, tient aux divergences d'intérêt qu'elle fait
naître entre les partenaires. On sait, en effet, que les entreprises du
GIE bénéficient de deux types de rémunérations du
fait de leur participation dans Airbus : l'une qui provient des ventes au
consortium qu'elles réalisent ; l'autre qui provient de la
redistribution des profits du consortium en fonction de leurs droits sociaux.
Les entreprises dont l'activité au profit du GIE est proportionnellement
supérieure à leurs droits dans Airbus ont intérêt
à pratiquer les prix de cession les plus élevés alors que
la situation inverse prévaut pour les autres.
En tout cas, la dépendance de chaque entreprise par rapport à
Airbus est très variable comme le montre le tableau ci-après
réalisé avant les opérations Aérospatiale-MHT et
BAe-GEC.
Part
du chiffre d'affaires Airbus dans le total du chiffre d'affaires
des trois
grandes sociétés en 1997
Aérospatiale |
48 % |
BAe |
16 % |
DASA |
28 % |
Cette inégalité de dépendance sous l'angle du volume d'activité n'est pas démentie lorsqu'on examine les contributions aux résultats.
Éléments relatifs aux résultats
d'exploitations
des trois grandes sociétés (en
1997)
|
Résultat d'exploitation |
Contribution d'Airbus |
|
|
|
Niveau |
en % |
Aérospatiale |
1.066 |
1.131 33( * ) |
106 |
BAe (1) |
5.253 |
|
|
DASA (1) |
1.451,5 |
|
|
Même si sous ce rapport ni DASA ni BAe ne communiquent
les
résultats de leur participation à l'activité d'Airbus, il
n'est guère douteux que, au moins pour BAe, l'ampleur de ceux-ci n'est
pas du même ordre que pour Aérospatiale.
L'on doit toutefois souligner que, depuis la période sous revue est
apparue une certaine « immunisation » de l'entreprise
française face aux évolutions d'Airbus.
Dans le même temps, BAe s'est encore éloignée des
préoccupations attachées à l'industrie commerciale
européenne, si bien qu'au total l'échelle relative de la
dépendance de chaque partenaire à Airbus s'est globalement
maintenue.
Le panorama offert par les industriels pourrait être résumé
à partir des caractéristiques suivantes :
une industrie britannique dominée par une entreprise fortement
orientée vers la défense et intégrée verticalement
(BAe) ;
une industrie française animée par une entreprise à
vocation plus commerciale qui, du fait des concentrations récentes, a
diversifié ses activités (Aérospatiale - MHT) ;
une industrie allemande disposant d'une entreprise au portefeuille
d'activités de dimension très significative et
diversifiées qui doit néanmoins faire des choix
stratégiques ;
des industries, l'espagnole, l'italienne, la suédoise, abritant des
acteurs disposant de savoir-faire incontestables mais sous-dimensionnés
et parfois insuffisamment intégrées aux alliances
européennes.
Différentes par leurs activités, les entreprises
européennes le sont aussi par leur culture managériale.
BAe apparaît de ce point de vue comme l'archétype de l'entreprise
orientée vers la performance financière tandis
qu'Aérospatiale et même DASA avaient moins le souci de la
profitabilité.
Cette situation est certes en voie de profonde modification. L'un des objectifs
prioritaires des dirigeants d'Aérospatiale est d'améliorer la
marge d'exploitation de l'entreprise, objectif qui est aussi depuis quelque
temps une priorité chez DASA.
Les changements de culture rapprochent les modes de gestion des trois
entreprises.
Néanmoins, cette convergence ne pourra être entière. L'un
des facteurs majeurs des écarts de coûts entre les entreprises
européennes résulte du niveau comparé de leur effort de
recherche-développement. En effet, la répartition inégale
des métiers exercés par les entreprises européennes
suppose des contraintes plus sévères pour l'entreprise
française à qui, en particulier, incombe une charge
d'autofinancement de son effort de recherche nettement plus
élevée qu'ailleurs. Cette contrainte est d'ailleurs
renforcée par un contexte où les productions du groupe
français rendent cet effort de recherche relativement plus exigeant.
Il reste que ces contraintes qui doivent être optimisées sont
aussi un atout pour l'industrie aéronautique européenne. Cet
atout doit être pleinement valorisé et à ce sujet, il faut
vérifier si, dans le passé, Aérospatiale a
entièrement répercuté ses coûts à ses
partenaires.
4. Des produits concurrents
L'une
des difficultés majeures à résoudre résulte de la
concurrence qui existe entre les productions des industriels européens.
Cette difficulté importante lorsqu'on envisage le portefeuille
d'activités de l'industrie italienne vouée aux productions
américaines atteint une ampleur considérable avec la coexistence
de deux avions de combat concurrents, le Rafale et l'Eurofighter.
Cette situation n'est pourtant pas sans solution. Ce qui devrait importer aux
partenaires et actionnaires réunis dans l'entreprise unique, c'est en
effet moins d'imposer un produit plutôt que l'autre que de dégager
à travers l'un ou (et) l'autre de ces produits les marges les plus
importantes. Dans cette perspective, une sélection naturelle permettrait
de régler une situation héritée du passé dont
l'intégration aéronautique européenne doit avoir l'heureux
résultat d'éviter l'occurrence à l'avenir.
Il reste que cette solution est difficilement modélisable notamment
parce qu'elle dépend de façon cruciale des choix des pouvoirs
publics -v. infra-. En tout cas, ceux-ci doivent être clarifiés
sur des bases politiques pour permettre au processus d'union de suivre son
cours.
B. LES PROBLÈMES RELEVANT DES POUVOIRS PUBLICS
La responsabilité de l'échec aujourd'hui constaté incombe partiellement aux pouvoirs publics européens qui doivent écarter de faux problèmes et réunir les conditions d'existence d'une entreprise aéronautique unique en Europe.
1. Les perspectives délicates d'une offre monopolistique
La
constitution d'une grande entreprise aéronautique en Europe offre une
perspective qui n'est jamais réjouissante pour un client, celle de se
trouver face à un unique fournisseur.
Or, les Etats européens sont appelés à être clients
d'une entreprise, souhaitée par eux, qui se retrouverait dans une telle
situation.
On rappelle que cette éventualité considérée avec
défaveur par le Pentagone a suscité aux Etats-Unis des
initiatives des pouvoirs publics destinées à garantir la
coexistence d'au moins deux fournisseurs.
L'aversion au monopole s'appuie sur deux considérations
principales :
les difficultés à se procurer dans un tel cas des
équipements au meilleur prix :
le danger d'une « anesthésie » du progrès
technique, le monopole supprimant toute incitation à la recherche de
produits de meilleure qualité que ceux de la concurrence.
Ces objections ne sont évidemment pas infondées. Cependant, elles
ne doivent pas être exagérées et ne peuvent en Europe
déboucher sur les mêmes décisions qu'aux Etats-Unis.
La capacité des Etats européens à développer des
moyens tels qu'au moins deux entreprises puissent concourir pour un même
grand programme d'avion militaire n'existe pas plus que la capacité de
chaque entreprise européenne à assumer seule les coûts d'un
tel programme.
L'exemple de la coexistence des programmes Rafale et Eurofighter
démontre qu'une telle option est excessivement coûteuse pour les
finances publiques.
Elle prive en outre des moyens de poursuivre des programmes diversifiés
alors que l'Europe a précisément besoin de se doter d'une
capacité industrielle élargie.
Dans l'arbitrage entre une diversité d'entreprises ou une
diversité de programmes, le second terme l'emporte évidemment.
Il est alors nécessaire de mettre en place les moyens pour surmonter les
risques du monopole. Etant observé que celui-ci ne sera pas parfait -des
offres non-européennes demeureront- l'on doit alors souhaiter la mise en
oeuvre d'un strict contrôle des coûts des programmes ainsi que
d'une politique de soutien à la recherche vigilante sur le degré
d'incorporation du progrès technique aux produits commandés.
Les gains d'efficience attendus des consolidations industrielles seront
aussi d'autant mieux mobilisés que les Etats européens seront
capables de gérer les incitations nécessaires à la bonne
gestion de tout programme militaire.
2. Les problèmes d'accompagnements à résoudre
Les
interdépendances entre l'industrie aéronautique et les pouvoirs
publics sont grandes.
L'européanisation de la base industrielle
suppose une européanisation de l'action des pouvoirs publics. :
L'intégration des industries aéronautiques européennes
nécessite suppose des progrès décisifs sur plusieurs
fronts :
- dans le secteur militaire
, sur l'harmonisation des
spécifications, l'engagement de financements à long terme et la
direction des programmes par une agence intergouvernementale du type de
l'Occar ;
- dans le domaine du soutien à l'industrie aéronautique,
sur la constitution de fonds européens d'avances remboursables pour
le lancement des nouveaux programmes et l'élaboration d'une politique
commune de promotion des exportations et d'aide à la
restructuration ;
- dans le domaine de la police administrative
sur l'édiction de
règles harmonisées concernant la sécurité
nationale, la sécurité d'approvisionnement, et le contrôle
des exportations ;
- enfin dans le domaine juridique et fiscal
, sur des engagements communs
concernant l'approbation des fusions aux niveaux européen et national,
des accords fiscaux afin de garantir aux Etats partenaires de recevoir un
revenu sur une base juste, ou encore les procédures de contrôle
sur l'entreprise à venir (procédures de changement de
contrôle, en particulier).
Sur ces différents points, un certain nombre de progrès ont,
semble-il, été réalisés comme en témoignent
le mémorandum d'accord sur les exportations ou la déclaration
commune de juillet 1998 sur la concertation des politiques d'aides aux
industriels.
Toutefois, des difficultés importantes demeurent. L'Europe de la
défense est loin d'être achevée. Le statut d'une
société européenne n'existe pas et se heurte à des
divergences. Les Etats européens principalement concernés par la
restructuration souffrent de la concurrence fiscale d'Etats européens
tiers par rapport à ce grand projet.
II. DES INITIATIVES MALHEUREUSES
Non contents de se montrer incapables de conduire une alliance équilibrée et de surmonter les difficultés suscitées par leur regroupement, les industriels, certains d'entre eux ou moins, se sont lancés dans des aventures contrariant directement les instructions des gouvernements.
A. DES PARTENAIRES À LA FIDÉLITÉ DOUTEUSE
1. Le « flirt » BAe-DASA
Alors
même que les discussions sur l'instauration d'une entreprise
aéronautique unique en Europe se déroulaient entre les
partenaires d'origine, BAe, DASA, CASA et Aérospatiale et étaient
élargies à des industriels extérieurs, suédois et
italiens, BAe et DASA entamèrent des négociations
séparées dans le but d'une fusion des deux entreprises.
Cette initiative motivée par l'absence de perspectives d'un changement
du statut d'Aérospatiale, condition posée par les deux
entreprises à une fusion plus large, fut pourtant prolongée alors
même que la privatisation d'Aérospatiale avait été
annoncée par le gouvernement.
Il ne fait guère de doute que l'identité publique de l'entreprise
française accompagnée
ipso facto
par la
prédominance d'un actionnaire étatique dans son capital a pu
constituer un obstacle important pour l'approfondissement des
négociations.
Mais, le déroulement des discussions parallèles entre BAe et DASA
montre que cet argument a également été un prétexte
or poursuivre, en marge du projet soutenu par les gouvernements, des objectifs
propres à chacune des entreprises : pour le constructeur allemand,
le renforcement de sa position au sein d'Airbus ; pour BAe, probablement,
une plus grande maîtrise du programme Eurofighter en échange de
quelques sacrifices dans le domaine des programmes Airbus.
L'échec final de négociations qui étaient, selon les
témoignages recueillis, proches du succès serait dû
à des divergences portant sur l'animation de la gestion de l'entreprise.
Cet échec et évidemment heureux au regard des exigences d'une
unification harmonieuse des industries aéronautiques européennes.
Mais, il ne doit pas être regardé comme sonnant le glas
d'initiatives déstabilisantes des industriels.
Les contraintes subies par chacun laissent intacts leurs objectifs que, si les
perspectives d'une intégration européenne complète
n'étaient pas relancées, chacun chercherait à atteindre de
son côté.
Une telle situation déboucherait sur l'accumulation de
difficultés et de retards dans la constitution d'une entreprise unique
en Europe, finalement préjudiciables à tous.
2. Les tentations atlantiques
Les
« tentations atlantiques » éprouvées par
certains industriels représentent le
summum
dans la panoplie des
stratégies des industriels directement contraires au projet lancé
par les autorités politiques.
Il est vrai que le projet d'unification de l'aéronautique
européenne n'est pas destiné à bâtir une forteresse
européenne sans contacts ni coopérations avec les industriels
américains.
Mais tous les exemples de coopérations dans le domaine
aéronautique démontrent que leur harmonie, lorsqu'elle est
souhaitée, dépend d'une situation d'équilibres des actions.
L'archétype d'une collaboration fructueuse peut certainement être
trouvé dans la société CFMI, société commune
entre SNECMA et GEC de production de moteurs. Cette remarquable
coopération profitable aux deux parties n'est pas pour autant conduire
sur un pied de totale égalité. L'entreprise américaine
conserve en effet le monopole des interventions sur les « parties
chaudes » des moteurs qui recèlent des enjeux technologiques
majeurs, mais aussi un potentiel commercial important en générant
une part essentielle du chiffre d'affaires tiré de la maintenance des
propulseurs.
Une certaine puissance technologique mais aussi financière et
commerciale apparaît donc comme un préalable à ces
coopérations strictement équilibrées. C'est aussi le sens
du projet d'unification des forces aéronautiques européennes.
Cela étant précisé, il faut souligner combien les
initiatives individuelles destinées à conclure ou approfondir des
alliances sur des programmes majeurs et
a fortiori
des alliances
capitalistiques avec des entreprises américaines constituent en
l'état un défi à l'intégration des forcs
aéronautiques en Europe.
Les conflits d'objectifs susceptibles d'en résulter sont
déjà sérieux lorsqu'une entreprise européenne se
trouve en situation de sous-traitance pour un concurrent de l'industrie
européenne comme c'est le cas pour Alénia.
Ils seraient insurmontables si de la sous-traitance on devait passer à
des alliances plus étroites.
Ce serait la fin du processus lancé parles autorités politiques
européennes et à terme la mort d'une capacité
aéronautique indépendante en Europe.
B. LA FUSION BAE - GEC MARCONI
La
fusion entre BAe et GEC-Marconi, apparue comme une demi-surprise, a
constitué une initiative considérée dans l'ensemble des
pays européens, excepté la Grande-Bretagne sans doute, comme
susceptible de constituer un obstacle sérieux sur la voie d'une
intégration de l'industrie aéronautique européenne.
Cette approche se recommande sans doute de justifications fortes mais il
apparaît cependant excessif de présenter cette fusion comme de
nature à empêcher l'union de l'industrie aéronautique
européenne, même si elle renvoie aux calendes la perspective d'un
groupe électronique européen puissant.
La fusion intervenue en janvier 1999 a consisté en l'absorption par BAe
des actifs d'électronique de défense de GEC regroupés dans
Marconi Electonic Systems.
Structure du groupe GEC avant la fusion
GEC
|
||||
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
MARCONI
|
|
MARCONI
|
|
Électronique industrielle |
Avionique
|
|
Réseaux mobiles
|
|
Picker
|
Alenia
Marconi Système (50 %)
|
|
Comstar (50 %) |
|
GDA (50 %) |
Du point
de vue financier, les arrangements pris à l'occasion de
l'opération ont amené à rémunérer les
actionnaires de GEC en leur distribuant 36,7 % du capital du nouveau
groupe et en leur payant une soulte de 440 millions de livres selon un
échéancier étalé sur quatre ans.
Ces conditions ont conduit alors à évaluer la transaction
à 7,7 milliards de livres, soit une valorisation de Marconi
jugée extrêmement favorable représentant plus de
18 fois le bénéfice d'exploitation de 1998.
Des considérations strictement financières excluant tout jugement
sur le potentiel de Marconi amènent toutefois à relativiser ce
jugement puisqu'aussi bien la rétribution des actionnaires de GEC devait
être étroitement dépendante du cours des actions
distribuées à eux. Les marchés ayant mal réagi
à une opération entraînant dilution du capital de BAe, le
bénéfice de la fusion pour les actionnaires de GEC s'est
révélé très inférieur à ce qui
était anticipé.
Une observation plus importante doit alors être faite : la fusion a
certes appauvri les actionnaires de BAe, elle n'a, en revanche, pas beaucoup
écorné les capacités financières de l'entreprise
puisque ses débours réels ont été limités
à la soulte évoquée plus haut. Dans ces conditions, les
marges de manoeuvre financières de BAe sont restées quasiment
intactes. On peut même considérer -v. infra- qu'elles ont
été améliorées.
Le bilan financier de l'opération conduit alors à s'interroger
sur les raisons profondes du refus que les dirigeants de GEC ont
opposées à l'offre concurrente de Thomson.
La pertinence de cette interrogation est renforcée par la
considération du volet stratégique de la fusion BAe-GEC.
L'intérêt industriel de cette opération conduit à
examiner les avantages des concentrations verticales entendues par opposition
aux concentrations horizontales.
Selon BAe, les avantages procurés par la fusion avec Marconi se
déclinent autour des éléments suivants :
- l'amélioration de l'efficience opérationnelle à travers
une meilleure gestion des programmes,
- une clientèle élargie,
- un potentiel de croissance accru du fait d'une capacité plus grande
à satisfaire les besoins de la clientèle,
- des gains à l'exportation,
- des réductions de coûts à hauteur chaque année de
275 millions de livres,
- la réunion de capacités technologiques plus importantes,
- et des opportunités de carrière plus grandes pour les
employés.
Il est significatif que la plupart des arguments produits par BAe concernent
non pas les aspects industriels de la fusion mais ses aspects commerciaux.
Les arguments de nature industrielle sont soit assez vagues
-l'amélioration de la capacité technologique-, soit quelque peu
contradictoires. En effet, les réductions de coûts
annoncées ne seraient que différées. Le bilan net de la
fusion serait même négatif au cours des deux années
à venir, les coûts de la fusion devant s'élever à
200 millions de livres contre un gain attendu de 190 millions. Ce
n'est qu'au-delà que les diminutions de charge interviendraient sans que
cette perspective soit assise sur des prévisions telles qu'on puisse
leur accorder quelque crédit.
Rien de cela n'est véritablement étonnant. Les concentrations
verticales ne sont pas assises sur la considération de synergies
industrielles susceptibles de déboucher sur une optimisation des
coûts de production et de recherche. C'est en ce sens que les
propositions de Thomson auraient sans doute mérité un meilleur
sort. Les seules réductions de charges réellement envisageables
concernent en fait les coûts d'administration générale ou,
éventuellement, les frais financiers.
La logique de l'opération est donc ailleurs.
Réside-t-elle dans les perspectives commerciales ouvertes par la
fusion ? Une approche nuancée s'impose. Elle conduit à
mettre en évidence l'importance des positions commerciales de Marconi
qui opère sur des marchés porteurs et a un accès
privilégié au marché américain. On rappelle
à ce sujet que 64 % des 3,7 milliards de livres de chiffre
d'affaires de Marconi Electronic Systems ont été
réalisés à travers des ventes à l'étranger
en 1998 et que, grâce au rachat de l'entreprise américaine Tracor,
Marconi est le sixième électronicien présent aux
États-Unis. Il est à ce titre associé à des
programmes aussi importants que le JSF.
Mais, en contrepartie, les dangers d'une intégration verticale doivent
être soulignés si celle-ci devait se traduire par des
préférences économiquement injustifiées. En outre,
l'aversion américaine à l'égard des concentrations
verticales manifestée spectaculairement avec le refus de la fusion entre
Lockheed - Martin et Northrop - Grumman pourrait nuire aux positions
commerciales du nouveau groupe.
Au fond, le seul intérêt totalement incontestable de
l'opération semble résider dans l'acquisition d'une entité
très profitable ayant atteint un niveau élevé de retour
sur chiffre d'affaires (11,3 % en 1998) moyennant un prix effectif modeste.
Cet aspect des choses, ironie du sort, renforce la portée très
négative de l'initiative de BAe au regard du processus
d'intégration des industriels européens. Il tend à
accroître les écarts de performance financières entre les
partenaires. Mais, l'essentiel est ailleurs. L'intégration des actifs de
GEC-Marconi dans l'entreprise aéronautique unique voulu par les pouvoirs
publics européens n'est pas souhaitable.
L'entreprise aéronautique unique a vocation à regrouper les
forces de l'aéronautique sur la base de concentrations d'actifs
horizontale, par métiers, et non d'introduire dans son
périmètre des électroniciens qui, par leur
intégration dans l'entreprise, apparaîtraient comme des
fournisseurs obligés.
En outre, la très forte vocation américaine de GEC-Marconi rend
tout à fait inenvisageable pour l'entreprise aéronautique mais
aussi pour GEC-Marconi elle-même une telle solution. La filialisation des
activités électroniques de BAe s'imposera.
Sera-t-elle suffisante pour restaurer les conditions du regroupement de
l'aéronautique européenne ?
La réponse à cette question dépend de façon
cruciale des équilibres de l'entité qui en résulterait, ce
qui en fait que rendre plus nécessaire encore l'émergence d'une
entreprise sans suprématie.
CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS
En
lançant dans leur déclaration conjointe du 9 décembre 1997
un appel à l'unification des forces de l'aéronautique en Europe,
les plus hautes autorités politiques européennes ont
consacré un projet ambitieux mais indispensable.
Certains ont pu juger qu'il s'agissait d'un rêve mais, il y a loin du
rêve à la chimère et ce rapport entend démontrer
que, sur ce front, c'est l'immobilisme qui appartient au domaine des
chimères.
Malheureusement, le processus animé par les industriels, s'il a
débouché sur des accords certes ambigüs mais portant sur des
points très importants, est désormais dans l'impasse.
Cet échec est celui des entreprises mais aussi un échec
politique.
Pour le surmonter,
il faut d'abord changer de méthode
. Les
divergences entre les industriels appellent l'intervention d'un arbitre qui ne
peut qu'être le pouvoir politique.
Les responsables politiques européens doivent reprendre la main et
élaborer le schéma détaillé d'une
réorganisation du paysage aéronautique européen.
Elle suppose d'abord qu'ils prennent leurs intentions au sérieux et
qu'ils ne sous estiment pas leurs responsabilités et leurs moyens.
Leurs responsabilités sont grandes tant la perpétuation d'une
industrie européenne désunie est porteuse de dangers et de
gaspillages.
Elles s'accompagnent de réels moyens d'action puisqu'aussi bien
l'industrie aéronautique est étroitement dépendante des
interventions publiques. Les Européens gagneraient à s'inspirer
sur ce point des pratiques de l'admnistration américaine.
Mais si cette volonté d'influence doit mieux s'exercer, elle doit aussi
s'accompagner des décisions sans lesquelles une entreprise
aéronautique européenne unifiée ne saurait voir le jour.
Il faut, rappelons-le, rapidement prendre des mesures :
-
dans le secteur militaire
, sur l'harmonisation des
spécifications, l'engagement de financements à long terme et la
direction des programmes par une agence intergouvernementale du type de
l'Occar ;
-
dans le domaine du soutien à l'industrie aéronautique
,
sur la constitution de fonds européens d'avances remboursables pour le
lancement des nouveaux programmes et l'élaboration d'une politique
commune de promotion des exportations et d'aide à la
restructuration ;
-
dans le domaine de la police administrative
sur l'édiction de
régles harmonisées concernant la sécurité
nationale, la sécurité d'approvisionnement, et de contrôle
des exportations ;
-
enfin, dans le domaine juridique et fiscal
, sur des engagements
communs concernant l'approbation des fusions aux niveaux européen et
national des accords fiscaux afin de garantir aux Etats partenaires de recevoir
un revenu sur une base juste, ou encore les procédures de contrôle
sur l'entreprise à venir (procédures de changement de
contrôle, en particulier).
Ces décisions sont indispensables, faut-il le souligner, tout à
la fois pour réunir les conditions de constitution de l'entreprise
aéronautique unique (aucune évaluation sérieuse des
apports des partenaires n'est possible sans des décisions sur les avions
de combat ou les modes de soutien public) et pour instaurer le cadre dans
lequel une telle entreprise pourra se développer.
Reprendre la main, c'est aussi pour les pouvoirs publics proposer un
schéma précis d'union que les entreprises ne sont pas parvenues
à définir.
Ce schéma doit s'appuyer sur les accords constatés lors des
discussions entre les industriels mais il doit surmonter les désaccords
en s'inspirant du souci d'équilibre qui constituait une forte
préconisation dans la déclaration du 9 décembre 1997.
En ce sens, la future entreprise doit être bâtie sur le
périmètre le plus vaste possible ce qui suppose des
aménagements nationaux avec, en France, la question des avions de combat
et, au Royaume-Uni, celle de l'électronique.
Comme la future entreprise doit regrouper les actifs aéronautiques sur
la base d'une concentration horizontale, par grands métiers, en excluant
donc les actifs dont l'inclusion aurait pour effet d'opérer des
concentrations verticales, cela suppose que les activités de
l'électronique ne soient pas apportées à la future
entreprise unique européenne de l'aéronautique.
Ce regroupement doit en revanche concerner les appareils militaires, ce qui
suppose de mettre en oeuvre les conditions d'une coexistence entre le Rafale et
l'Eurofighter. L'un des aspects importants de cette coexistence serait que les
pouvoirs publics européens assurent à leurs contribuables par des
décisions conjointes un équipement au meilleur coût.
Les frictions entre les entreprises du fait de la nature variable de leur
actionnariat et des conflits dans l'évaluation des actifs conduisent
d'abord à préconiser une évaluation de ces derniers
basée sur des plans d'affaires comparés réalistes
arbitrée par des tiers impartiaux. A ce sujet, on rappelle l'importance
d'une évaluation précise, conduite en dynamique, du passage d'un
mode d'interventions publiques national à un mode européen.
Au terme de cette évaluation qui pourrait déboucher sur une
inégalité de droits entre les partenaires, il serait avisé
de dissocier transitoirement les droits financiers de certains droits de
décision portant sur des domaines nécessairement limités
considérés comme stratégiques.
Mais, il faut aussi tenir compte de ce que l'inégalité des
situations financières de départ des partenaires provient de
caractéristiques tenant à leur passé respectifs qui
peuvent être en voie de correction.
Cela invite à imaginer un mécanisme objectif permettant de
redresser les évaluations initiales des actifs au terme d'un
délai raisonnable.
EXAMEN EN COMMISSION
Au cours
de sa séance tenue dans la matinée du mercredi 9 juin 1999
sous la présidence de M. Alain Lambert, président, la commission
a entendu la communication de M. Yvon Collin, rapporteur spécial des
crédits du transport aérien, sur son rapport consacré
à la restructuration de l'industrie aéronautique
européenne.
Après avoir indiqué qu'au long de la préparation de son
rapport, de multiples événements, fausses pistes et
rebondissements s'étaient produits, significatifs des relations
mouvementées entre les industriels européens et
inquiétants à tout point de vue, M. Yvon Collin, rapporteur
spécial, a exposé les raisons qui l'avaient décidé,
comme membre de la commission des finances en charge des questions d'aviation
civile, à se pencher sur le dossier de la restructuration de l'industrie
aéronautique européenne :
- le souci, du fait de la dépense publique allouée à cette
industrie, de prendre la mesure du cheminement vers une industrie
européenne plus forte ;
- le fait que l'industrie française était, dans ce secteur, une
industrie essentiellement publique dont le sort, en tant que telle, doit
naturellement mobiliser l'attention de la commission.
Il a alors précisé que la nature même des problèmes
l'avait incité à considérer l'industrie
aéronautique au sens le plus large.
Puis il a déploré que le questionnaire adressé le 10 mars
1999 au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie,
cosigné par le président de la commission des finances et
lui-même, n'ait pas reçu de réponse, appelant de ses voeux,
en tant que rapporteur spécial, des solutions qui permettent à la
commission, quelle que soit la configuration politique du moment, d'être
mieux respectée.
Il a alors expliqué que le regain d'intérêt pour l'union
des forces aéronautiques en Europe avait été
suscité selon lui par la fusion entre Boeing et Mac Donnell-Douglas qui
avait donné naissance à une entreprise géante, directement
et seule concurrente d'Airbus et par la prise de conscience, de plus en plus
aiguë, du gaspillage des moyens publics en Europe tenant à la
coexistence de deux programmes d'avions de combat, le Rafale et l'Eurofighter
concomitante avec l'absence de décision sur un programme européen
de transport de troupes, l'avion de transport du futur (ATF).
Ayant rappelé la teneur de la déclaration conjointe du 9
décembre 1997 des plus hautes autorités politiques
européennes, appelant les industriels à jeter les bases d'une
entreprise européenne unique regroupant l'ensemble des actifs de
l'aéronautique au sens large (avions civils et militaires, missiles,
spatial...) et placée sous le signe de l'urgence, il a
déclaré que tout l'objet de son rapport était
d'élucider ses justifications et de présenter ses prolongements.
S'agissant des justifications, le rapporteur spécial a jugé
qu'elles ne manquaient pas, l'industrie aéronautique étant
porteuse d'enjeux importants sur les plans économique et
géostratégique, mais se trouvant soumise à des contraintes
particulières.
Il a alors évoqué des contraintes propres -les coûts
très élevés de développement des produits, la
concurrence très vive sur certains marchés, l'existence pour
certains produits de cycles très accusés et difficiles à
esquiver- et a ajouté que les contraintes liées à
l'environnement de l'industrie aéronautique se durcissaient avec une
acuité toute particulière en Europe :
- la réduction des commandes militaires dans les pays occidentaux qui
affectait le potentiel d'activité des entreprises de façon
particulièrement sévère pour l'Europe, non que la
décrue y soit plus importante, mais parce qu'elle y concernait des
budgets éparpillés et d'un niveau infiniment moindre qu'aux
Etats-Unis ;
- les pressions sur les finances publiques, en Europe, conduisant à un
mode de soutien public moins généreux qu'aux Etats-Unis ;
- la mondialisation qui, s'accompagnant d'une « financiarisation » de
l'économie, posait des problèmes à des entreprises
gourmandes en investissements et dont les courbes de rendement s'inscrivent
dans la durée.
M. Yvon Collin, rapporteur spécial, a alors estimé que, face
à cet ensemble de contraintes, l'industrie américaine
était beaucoup mieux armée que l'industrie européenne,
avec des positions de marché sans commune mesure et des acteurs mieux
structurés.
A leur propos, il a d'abord évoqué la situation comparée
des pouvoirs publics, rappelant que le modèle américain
était compatible avec une implication très forte des pouvoirs
publics au service des entreprises nationales, mais aussi dans le modelage de
la base industrielle américaine, ce qui tranchait avec les
hésitations observées en Europe.
Puis il a souligné qu'au terme des processus de consolidation intervenus
aux Etats-Unis, le tissu industriel américain apparaissait dominé
par les caractéristiques qui font défaut en Europe et qu'ainsi il
était compact face à une réalité européenne
éclatée, puissant car maillé par des entreprises
géantes et cohérent, ses entreprises disposant d'un meilleur
équilibre dans leurs portefeuilles d'activités.
Il a salué sans réserve, dans ces conditions, l'initiative
politique lancée en Europe mais il a déploré qu'ayant
suscité beaucoup d'espoirs, ses prolongements effectifs puissent laisser
le goût amer des illusions perdues.
Ayant rappelé que deux grands projets étaient censés
cheminer, celui de transformer Airbus en une société commerciale
et celui, plus ambitieux, de doter l'Europe d'une entreprise
aéronautique unique, il les a jugés tous deux pertinents sous la
réserve, dont il a détaillé les justifications, qu'ils
avancent en parallèle.
Il a alors constaté que tel n'était pas le cas, la constitution
d'une grande entreprise aéronautique semblant paralysée.
Ayant jugé ce projet très ambitieux et totalement
justifié, il a considéré que la chimère serait de
croire que, en ce domaine, le « statu quo » pourrait suffire tant
l'avenir de l'industrie aéronautique en Europe dépendait de sa
capacité à unir ses forces.
Ayant longuement exposé les évolutions intervenues dans le
paysage français pour, malgré quelques réserves, s'en
féliciter, il a précisé l'évolution du dialogue
entre les entreprises européennes, les conditions de sa
dégradation, et déploré son échec finalement
constaté.
Il a alors jugé que cet échec ne devait pas être
considéré comme le résultat inéluctable d'un projet
marqué dès l'origine par une ambition excessive, citant les
très importants points d'accord obtenus sur le périmètre
des activités à transférer à la future entreprise,
les grandes orientations de sa gestion et sur son organisation.
Après avoir détaillé les raisons de la discorde entre les
entreprises et ses conséquences inacceptables, il a souligné que
l'échec des industriels était aussi l'échec des pouvoirs
publics européens, les entreprises n'ayant en effet pas répondu
à leur appel.
Il a alors précisé que cet échec était, pour les
pouvoirs publics, la manifestation d'une incapacité à prendre
certaines décisions formant autant de préalables à la
constitution d'une grande entreprise aéronautique européenne,
qu'il a alors énoncées, mais aussi à reconnaître le
sérieux de leurs intentions. Ayant précisé son analyse, il
a souligné l'importance des moyens d'action des pouvoirs publics en
Europe et, finalement, précisé les conditions lui semblant
indispensables pour sortir de l'impasse actuellement constatée.
M. Alain Lambert, président, a fait état de son irritation face
à l'absence de communication des documents nécessaires à
l'information du Parlement. Jugeant que cette situation était
indépendante de l'orientation politique des gouvernements, il s'est
demandé si elle ne provenait pas souvent d'un mauvais vouloir des
administrations, estimant qu'il conviendrait à l'avenir d'user de tous
les moyens disponibles pour le surmonter.
Un large débat s'est alors ouvert en commission.
M. François Trucy, après avoir salué le travail du
rapporteur spécial et souligné l'importance des emplois indirects
associés à l'industrie aéronautique et la diversité
de ses sites sur le territoire français, a demandé à quel
niveau l'on pouvait évaluer le soutien public à la recherche aux
Etats-Unis. Puis il s'est ouvert de ses interrogations sur le type de
négociations à conduire en Europe pour aboutir à une
industrie aéronautique unifiée.
M. Maurice Blin ayant félicité le rapporteur spécial de
son souci de clarification, a d'abord souligné la place exceptionnelle
de la France dans l'industrie aéronautique européenne, sortie
encore renforcée de la fusion entre Aérospatiale et Matra Hautes
Technologies, mais aussi ses faiblesses en termes de rentabilité.
Ayant dit son accord avec les analyses du rapporteur spécial sur la
modification du statut d'Airbus, il a rappelé que le consortium avait
rencontré des difficultés financières malgré ses
succès commerciaux et que l'on pouvait espérer du changement de
son statut une amélioration de ses performances. Il s'est alors
interrogé sur les perspectives de l'ATF et du futur gros-porteur civil,
l'A3XX.
M. Jacques Oudin a remercié le rapporteur spécial de son travail
et souhaité un effort conjoint des rapporteurs concernés pour
évaluer globalement les fonds publics alloués à
l'industrie aéronautique. Il s'est enfin interrogé sur le sort de
l'avion supersonique du futur.
M. Paul Loridant a rappelé que, rapporteur de l'Office parlementaire
d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, il avait pu
percevoir l'importance au XXIe siècle des enjeux attachés
à la maîtrise de l'espace et la nécessité d'unir
davantage les efforts des acteurs européens dans ce domaine.
En réponse aux intervenants, M. Yvon Collin, rapporteur spécial,
s'est félicité de la fermeté des propos du
président de la commission rappelant qu'il en allait non pas d'une
volonté politique de gêner tel ou tel gouvernement, mais de la
crédibilité des institutions de la République. Puis il a
confirmé l'importante contribution de l'industrie aéronautique
à l'emploi et à l'équilibre du territoire.
Il a alors précisé que la NASA consacrait environ 1 milliard de
dollars par an à soutenir la recherche aéronautique et beaucoup
plus que cela si l'on prenait en compte le secteur spatial, comparant ces
chiffres avec les plus de 30 milliards de dollars consacrés par le
Pentagone aux crédits de recherche aéronautique.
Il a déclaré partager totalement les analyses de M. Maurice Blin,
précisant que les gains liés à la transformation d'Airbus
pouvaient être considérés comme assez conjecturaux
dès lors que d'autres regroupements d'actifs ne l'accompagneraient pas.
Il a souligné le caractère transitoire des difficultés de
Boeing et l'erreur grave qui consisterait à négliger les
capacités de cette entreprise.
Il s'est associé au jugement selon lequel l'industrie française
rénovée et forte de ses savoir-faire occupait une position
exceptionnelle en Europe.
Il a souscrit à l'intérêt d'une étude permettant
d'évaluer le bilan complet des soutiens publics apportés aux
industriels du secteur, remarquant que la majeure partie des financements
résidait dans le budget de la défense.
Puis il a précisé que le projet concernant le supersonique du
futur semblait avoir pris en France un réel retard et insisté sur
le fait que la diversification des programmes aéronautiques en Europe
dépendait de façon cruciale de l'union des entreprises et de
l'harmonisation des décisions gouvernementales citant l'ATF, l'A3XX et,
dans le prolongement des propos de M. Paul Loridant, le domaine spatial.
La commission alors décidé la publication de l'étude
présentée par M. Yvon Collin, rapporteur spécial, sous la
forme d'un rapport d'information.
ANNEXE N° 1
INDICATEURS RELATIFS AUX INDUSTRIES
AÉRONAUTIQUES DE QUELQUES PAYS EUROPÉENS
Indicateurs relatifs à l'industrie aéronautique en France - Année 1994
(En millions d'euros)
Chiffre d'affaires |
17.329 |
Valeur ajoutée (VA) |
7.484 |
Charges salariales |
5.793 |
Revenus d'exploitation |
1.691 |
Capitaux propres |
3.593 |
Actifs |
6.147 |
R & D autofinancée |
- |
R & D Totale |
- |
Investissements |
552 |
Effectifs |
119.692 |
|
|
Ratios |
|
Productivité du travail |
|
Valeur ajoutée sur charges salariales |
129,2 % |
Valeur ajoutée par employé (milliers d'écus) |
62,5 |
Effort de recherche |
|
Recherche autofinancée/CA |
- |
Recherche Totale/CA |
- |
Investissements/VA |
7,4 % |
Endettement à moyen et long terme/capitaux propres |
64,3 % |
Profitabilité |
|
Résultat d'exploitation/VA |
22,6 % |
Résultat net/VA |
- 6,8 % |
Indicateurs relatifs à l'industrie aéronautique en Allemagne- Année 1994
(En millions d'euros)
Chiffre d'affaires |
9.038 |
Valeur ajoutée (VA) |
3.920 |
Charges salariales |
3.689 |
Revenus d'exploitation |
232 |
Capitaux propres |
3.441 |
Actifs |
7.830 |
R & D autofinancée |
468 |
R & D Totale |
2.253 |
Investissements |
350 |
Effectifs |
70.170 |
|
|
Ratios |
|
Productivité du travail |
|
Valeur ajoutée sur charges salariales |
106,3 % |
Valeur ajoutée par employé (milliers d'écus) |
55,9 % |
Effort de recherche |
|
Recherche autofinancée/CA |
5,2 % |
Recherche Totale/CA |
24 ,9 % |
Investissements/VA |
8,9 % |
Endettement à moyen et long terme/capitaux propres |
48,4 % |
Profitabilité |
|
Résultat d'exploitation/VA |
5,9 % |
Résultat net/VA |
- 5,8 % |
Indicateurs relatifs à l'industrie aéronautique au Royaume-Uni - Année 1994
(En millions d'euros)
Chiffre d'affaires |
15.728 |
Valeur ajoutée (VA) |
4.509 |
Charges salariales |
3.720 |
Revenus d'exploitation |
790 |
Capitaux propres |
3.465 |
Actifs |
4.756 |
R & D autofinancée |
409 |
R & D Totale |
1.141 |
Investissements |
564 |
Effectifs |
131.156 |
|
|
Ratios |
|
Productivité du travail |
|
Valeur ajoutée sur charges salariales |
121,2 % |
Valeur ajoutée par employé (milliers d'écus) |
34,4 |
Effort de recherche |
|
Recherche autofinancée/CA |
2,6 % |
Recherche Totale C/A |
7,3 % |
Investissements/VA |
12,5 % |
Endettement à moyen et long terme/capitaux propres |
53,6 % |
Profitabilité |
|
Résultat d'exploitation/VA |
17,5 % |
Résultat net/VA |
10,1 % |
Indicateurs relatifs à l'industrie aéronautique en Espagne - Année 1994
(En millions d'euros)
Chiffre d'affaires |
731 |
Valeur ajoutée (VA) |
404 |
Charges salariales |
260 |
Revenus d'exploitation |
144 |
Capitaux propres |
314 |
Actifs |
313 |
R & D autofinancée |
5 |
R & D Totale |
110 |
Investissements |
28 |
Effectifs |
8.299 |
|
|
Ratios |
|
Productivité du travail |
|
Valeur ajoutée sur charges salariales |
155,4 % |
Valeur ajoutée par employé (milliers d'écus) |
48,7 % |
Effort de recherche |
|
Recherche autofinancée/CA |
0,7 % |
Recherche Totale C/A |
15,0 % |
Investissements/VA |
7,0 % |
Endettement à moyen et long terme/capitaux propres |
46,5 % |
Profitabilité |
|
Résultat d'exploitation/VA |
35,7 % |
Résultat net/VA |
5,3 % |
Indicateurs relatifs à l'industrie aéronautique en Italie - Année 1994
(En millions d'euros)
Chiffre d'affaires |
6.327 |
Valeur ajoutée (VA) |
2.661 |
Charges salariales |
2.031 |
Revenus d'exploitation |
630 |
Capitaux propres |
2.570 |
Actifs |
5.972 |
R & D autofinancée |
198 |
R & D Totale |
659 |
Investissements |
212 |
Effectifs |
59.041 |
|
|
Ratios |
|
Productivité du travail |
|
Valeur ajoutée sur charges salariales |
131 % |
Valeur ajoutée par employé (milliers d'écus) |
45,1 |
Effort de recherche |
|
Recherche autofinancée/CA |
3,1 % |
Recherche Totale /CA |
10,4 % |
Investissements/VA |
8 % |
Endettement à moyen et long terme/capitaux propres |
44,2 % |
Profitabilité |
|
Résultat d'exploitation/VA |
23,7 % |
Résultat net/VA |
1 % |
ANNEXE N° 2
FICHES D'IDENTITÉ DES PRINCIPALES
ENTREPRISES AÉRONAUTIQUES ET D'ÉLECTRONIQUE
OCCIDENTALES
Aérospatiale
|
Aéronautique |
Missiles |
Espace |
Electronique |
1) Principales activités |
X |
X |
X |
|
2) Principales participations et filiales |
Airbus
Industrie
|
Euromissile
|
Arianespace
|
|
3)
Indicateurs
|
8.660
(en millions d'euros au 31.12.97)
|
|
||
4)
Répartition du capital social
|
62,2 %
|
|
|
|
5)
Analyse du chiffre d'affaires
|
80 %
|
|
|
|
Matra HT
|
Aéronautique |
Missiles |
Espace |
Electronique |
1) Principales activités |
|
X |
X |
X |
2) Principales participations et filiales |
|
Matra BAe Dynamics |
Matra
Marconi Space
|
Matra Nortel Communications |
3)
Indicateurs
|
3.185
(en millions d'euros au 31.12.97)
|
|
||
4)
Répartition du capital social
|
100 % |
|
|
|
5)
Analyse du chiffre d'affaires
|
12 %
|
|
|
|
Aérospatiale-Matra
|
Aéronautique |
Missiles |
Espace |
Electronique |
1) Principales activités |
X |
X |
X |
X |
2) Principales participations et filiales |
Airbus
Industrie
|
Matra
BAe Dynamics
|
Matra
Marconi Space
|
Matra Nortel Communications |
3)
Indicateurs
|
12.585
(en millions d'euros au 31.12.97)
|
|
||
4)
Répartition du capital social
|
48 %
|
|
|
|
5)
Analyse du chiffre d'affaires
|
61 %
|
|
|
|
Dassault Aviation
|
Aéronautique |
Missiles |
Espace |
Electronique |
1) Principales activités |
X |
|
|
X |
2) Principales participations et filiales |
Dassault Falcon |
|
|
Dassault Systèmes |
3)
Indicateurs
|
3.238
(en millions d'euros au 31.12.97)
|
|
||
4)
Répartition du capital social
|
49,90 %
|
|
|
|
5)
Analyse du chiffre d'affaires
|
34 %
|
|
|
|
Thomson-CSF
|
Aéronautique |
Missiles |
Espace |
Electronique |
1) Principales activités |
|
X |
|
X |
2) Principales participations et filiales |
|
Eurosam |
|
Sextant
Avionique
|
3)
Indicateurs
|
5.928
(en millions d'euros au 31.12.97)
|
|
||
4)
Répartition du capital social
|
42,94 %
|
|
|
|
5)
Analyse du chiffre d'affaires
|
35 %
|
|
|
|
Alcatel
|
Aéronautique |
Missiles |
Espace |
Electronique |
1) Principales activités |
|
|
X |
X |
2) Principales participations et filiales |
|
|
Space
System Loral
|
CEGELEC
|
3)
Indicateurs
|
28.595
(en millions d'euros au 31.12.97)
|
|
||
4)
Répartition du capital social
|
79 %
|
|
|
|
5)
Analyse du chiffre d'affaires
|
95 %
|
|
|
|
British Aérospace
|
Aéronautique |
Missiles |
Espace |
Electronique |
1) Principales activités |
X |
X |
|
|
2) Principales participations et filiales |
Airbus
Industrie
|
Matra BAe Dynamics |
|
|
3)
Indicateurs
|
12.567
(en millions d'euros au 31.12.97)
|
|
||
4)
Répartition du capital social
|
92,5 %
|
|
|
|
5)
Analyse du chiffre d'affaires
|
28,6 %
|
|
|
|
Daimler Chrysler Aérospace
|
Aéronautique |
Missiles |
Espace |
Electronique |
1) Principales activités |
X |
X |
X |
|
2) Principales participations et filiales |
Airbus
Industrie
|
Euromissile |
Arianespace |
|
3)
Indicateurs
|
7.916
(en millions d'euros au 31.12.97)
|
|
||
4)
Répartition du capital social
|
93,83 %
|
|
|
|
5)
Analyse du chiffre d'affaires
|
68 %
|
|
|
|
CASA
|
Aéronautique |
Missiles |
Espace |
Electronique |
1) Principales activités |
X |
|
X |
|
2) Principales participations et filiales |
Airbus Industrie* |
|
Arianespace |
|
3)
Indicateurs
|
738 M
(en millions d'Euros au 31/12/97)
|
|
||
4) Répartition du capital social - SEPI (Sociedad Estatal de Participationes Industriales) - DASA |
99,3 %
|
|
|
|
5)
Analyse du chiffre d'affaires
|
58 %
|
|
|
|
Airbus Industrie est un groupement d'intérêt économique dans lequel la participation de CASA est de 4,2 % |
FINMECCANICA/ALENIA
|
Aéronautique |
Missiles |
Espace |
Electronique |
1) Principales activités |
X |
X |
X |
X |
2) Principales participations et filiales |
ATR
|
EUROSAM |
Arianespace |
Alenia Marconi System |
3)
Indicateurs
|
8.057 M
(en millions d'Euros au 31/12/97)
|
u |
||
4) Répartition du capital social - IRI (holding public) - Investisseurs institutionnels et banques |
62 %
|
|
|
|
5)
Analyse du chiffre d'affaires
|
85 %
|
|
|
|
SAAB
|
Aéronautique |
Missiles |
Espace |
Electronique |
1) Principales activités |
X |
X |
X |
|
2) Principales participations et filiales |
|
SAAB DYNAMIC |
SAAB
ERICSON SPACE
|
|
3)
Indicateurs
|
1 020 M
(en millions d'Euros au 31/12/97)
|
|
||
4) Répartition du capital social - BAe
-
Famille Wallenberg
|
35 %
|
|
|
|
5)
Analyse du chiffre d'affaires
|
42 %
|
|
|
|
GEC
|
Aéronautique |
Missiles |
Espace |
Electronique |
1) Principales activités |
|
X |
X |
X |
2) Principales participations et filiales |
|
GEC MARCONI |
MATRA
MARCONI SPACE
|
GTAR
|
3)
Indicateurs
|
16.325 M
(en millions d'Euros au 31/12/97)
|
u |
||
4) Répartition du capital social - Bourse |
100 % |
|
|
|
5)
Analyse du chiffre d'affaires
|
67,4 %
|
|
|
|
Raytheon
|
Aéronautique |
Missiles |
Espace |
Electronique |
1) Principales activités |
X |
|
|
X |
2) Principales participations et filiales |
|
|
|
|
3)
Indicateurs
|
13.674 (en
millions d'euros au 31.12.97)
|
|
||
4)
Répartition du capital social
|
100 % |
|
|
|
5)
Analyse du chiffre d'affaires
|
55 %
|
|
|
|
Northrop Grumman
|
Aéronautique |
Missiles |
Espace |
Electronique |
1) Principales activités |
X |
|
|
X |
2) Principales participations et filiales |
|
|
|
|
3)
Indicateurs
|
9.153 (en
millions d'euros au 31.12.97)
|
|
||
4)
Répartition du capital social
|
100 % |
|
|
|
5)
Analyse du chiffre d'affaires
|
11 %
|
|
|
|
Lockheed Martin
|
Aéronautique |
Missiles |
Espace |
Electronique |
1) Principales activités |
X |
X |
X
|
|
2) Principales participations et filiales |
|
|
|
|
3)
Indicateurs
|
28 069 (en
millions d'euros au 31.12.97)
|
|
||
4)
Répartition du capital social
|
100 % |
|
|
|
5)
Analyse du chiffre d'affaires
|
34 %
|
|
|
|
Boeing
|
Aéronautique |
Missiles |
Espace |
Electronique |
1) Principales activités |
X |
X |
X
|
|
2) Principales participations et filiales |
|
|
|
|
3)
Indicateurs
|
45.800 (en
millions d'euros au 31.12.97)
|
|
||
4)
Répartition du capital social
|
100 % |
|
|
|
5)
Analyse du chiffre d'affaires
|
70%
|
|
|
|
ANNEXE N° 3
QUELQUES ELEMENTS RELATIFS A LA FUSION
AEROSPATIALE-MHT 34(
*
)
La
contribution d'Aerospatiale
Compte de résultat prévisionnel d'Aerospatiale en
euros
|
1995 |
1997 |
Var (%) |
1998e |
Var (%) |
1999e |
Var (%) |
2000e |
Var (%) |
Chiffre d'affaires |
7.447 |
8.516 |
11 |
9.081 |
7 |
10.250 |
13 |
10.583 |
3 |
Production stockée |
- 546 |
- 52 |
|
- 15 |
|
0 |
|
0 |
|
Autres produits |
156 |
108 |
|
106 |
|
106 |
|
106 |
|
Achats consommées |
- 4.545 |
- 5889 |
|
- 6.324 |
|
- 7.050 |
|
- 7.231 |
|
Valeur ajoutée |
2.511 |
2.683 |
6 |
2.848 |
6 |
3.306 |
16 |
3.458 |
5 |
Charges pers taxes |
- 2.047 |
- 2.210 |
|
- 2.345 |
|
- 2.632 |
|
- 2.708 |
|
RBE |
470 |
473 |
16 |
503 |
6 |
673 |
34 |
750 |
11 |
RBE/CA |
6,3% |
5,6 % |
|
5,5 % |
|
6,6 % |
|
7,1 % |
|
|
- 369 |
- 312 |
|
|
|
- 348 |
|
- 363 |
|
Résultat d'exploitation |
101 |
161 |
41 |
|
- 70 |
325 |
562 |
387 |
19 |
RE/CA |
1,4 % |
1,9 % |
|
|
|
3,2 % |
|
3,7 % |
|
Résultat financier |
- 69 |
14 |
|
|
|
- 2 |
|
0 |
|
Résultat exceptionnel |
- 282 |
11 |
|
|
|
0 |
|
0 |
|
Résultat net av. impôts |
- 250 |
186 |
115 |
|
- 84 |
324 |
997 |
387 |
19 |
RN av. impôt/CA |
- 3,4 % |
2,2 % |
|
|
|
3,2 % |
|
3,7 % |
|
Participation salariés |
0 |
0 |
|
- 1 |
|
- 1 |
|
- 1 |
|
Impôt bénéfices |
23 |
3 |
|
- 3 |
|
- 8 |
|
- 89 |
|
Rés. Net Soc. Intég |
- 228 |
188 |
125 |
26 |
- 86 |
315 |
1.126 |
296 |
- 6 |
Résultat SME |
14 |
27 |
|
33 |
|
37 |
|
38 |
|
Amotiss. Goodwill |
0 |
0 |
|
|
|
0 |
|
0 |
|
Résultat consolidé |
- 214 |
215 |
124 |
59 |
- 73 |
352 |
501 |
335 |
- 5 |
dont part groupe |
- 144 |
215 |
70 |
54 |
- 75 |
346 |
541 |
329 |
- 5 |
dont minoritaires |
- 70 |
1 |
|
5 |
|
6 |
|
6 |
|
Source rapport annuel et estimations CLSE
La
contribution de Dassault Aviation
Compte de résultat prévisionnel Dassault Aviation
déconsolidé de Dassault Systèmes
en euros
|
1995 |
1997 |
Var (%) |
1998e |
Var (%) |
1999e |
Var (%) |
2000e |
Var (%) |
Chiffre d'affaires |
1.608 |
2.939 |
64 |
3.012 |
2 |
2.746 |
- 9 |
2.526 |
-8 |
Production stockée |
369 |
- 231 |
|
- 227 |
|
- 45 |
|
0 |
|
Autres produits |
- 19 |
- 34 |
|
- 33 |
|
- 39 |
|
- 41 |
|
Achats consommées |
- 1.236 |
- 1.588 |
|
- 1.683 |
|
- 1.667 |
|
- 1.580 |
|
Valeur ajoutée |
723 |
1.086 |
34 |
1.070 |
2 |
995 |
- 7 |
905 |
- 9 |
Charges pers taxes |
-542 |
- 627 |
|
- 626 |
|
- 632 |
|
- 596 |
|
RBE |
180 |
459 |
81 |
443 |
- 4 |
363 |
- 18 |
309 |
- 15 |
RBE/CA |
11,2 % |
15,6 % |
|
14,7 % |
|
13,2 % |
|
12,2 % |
|
Dot amort. Prov. Transf. |
- 111 |
4 |
|
- 92 |
|
- 88 |
|
- 73 |
|
Résultat d'exploitation |
69 |
464 |
316 |
351 |
- 24 |
275 |
- 22 |
237 |
- 14 |
RE/CA |
4,3 % |
15,8 % |
|
11,7 % |
|
10,0 % |
|
9,4 % |
|
Résultat financier |
22 |
34 |
|
50 |
|
55 |
|
46 |
|
Résultat exceptionnel |
3 |
- 89 |
|
3 |
|
0 |
|
0 |
|
Résultat net av. impôts |
94 |
409 |
61 |
404 |
- 1 |
330 |
- 18 |
283 |
- 14 |
RN av. impôt/CA |
5,8 % |
13,9 % |
|
13,4 % |
|
12,0 % |
|
11,2 % |
|
Participation salariés |
- 27 |
-- 76 |
|
- 98 |
|
- 86 |
|
- 64 |
|
Impôt bénéfices |
- 22 |
- 117 |
|
- 160 |
|
- 117 |
|
- 100 |
|
Rés. Net Soc. Intég |
44 |
216 |
80 |
146 |
- 32 |
128 |
- 13 |
118 |
- 7 |
Résultat SME |
2 |
0 |
|
2 |
|
2 |
|
2 |
|
Amotiss. Goodwill |
0 |
0 |
|
0 |
|
0 |
|
0 |
|
Résultat consolidé |
46 |
216 |
77 |
148 |
- 32 |
129 |
- 12 |
120 |
- 7 |
dont part groupe |
38 |
206 |
98 |
144 |
- 30 |
123 |
- 15 |
101 |
- 17 |
dont minoritaires |
8 |
10 |
|
3 |
|
6 |
|
19 |
|
Source rapport annuel et estimations CLSE
La
contribution de Matra Hautes Technologies
Compte de résultat prévisionnel reconstitué Matra Hautes
Technologies en euros
|
1995 |
1997 |
Var (%) |
1998e |
Var (%) |
1999e |
Var (%) |
2000e |
Var (%) |
Chiffre d'affaires |
2.435 |
3.132 |
6 |
3.147 |
0 |
3.071 |
- 2 |
3.268 |
6 |
Production stockée |
0 |
0 |
|
0 |
|
0 |
|
0 |
|
Autres produits |
136 |
99 |
|
98 |
|
98 |
|
98 |
|
Achats consommées |
- 1815 |
- 2.042 |
|
- 2.028 |
|
- 2.042 |
|
- 2.118 |
|
Valeur ajoutée |
756 |
1.189 |
27 |
1.217 |
2 |
1.127 |
- 7 |
1.248 |
11 |
Charges pers taxes |
- 574 |
- 651 |
|
- 660 |
|
- 651 |
|
- 681 |
|
RBE |
182 |
539 |
89 |
557 |
3 |
477 |
- 15 |
567 |
19 |
RBE/CA |
7,5 % |
17,2 % |
|
17,7 % |
|
15,5 % |
|
17,4 % |
|
Dot amort. Prov. Transf. |
- 91 |
- 219 |
|
- 219 |
|
- 222 |
|
- 227 |
|
Résultat d'exploitation |
91 |
320 |
63 |
338 |
6 |
254 |
- 25 |
340 |
34 |
RE/CA |
3,7 % |
10,2 % |
|
10,7 % |
|
8,3 % |
|
10,4 % |
|
Résultat financier |
24 |
25 |
|
18 |
|
18 |
|
23 |
|
Résultat exceptionnel |
- 40 |
- 20 |
|
- 15 |
|
- 12 |
|
- 9 |
|
Résultat net av. impôts |
74 |
324 |
87 |
341 |
5 |
260 |
- 24 |
354 |
36 |
RN av. impôt/CA |
3,0 % |
10,4 % |
|
10,8 % |
|
8,5 % |
|
10,8 % |
|
Participation salariés |
- 7 |
- 9 |
|
- 13 |
|
- 6 |
|
- 11 |
|
Impôt bénéfices |
- 11 |
- 92 |
|
- 100 |
|
- 94 |
|
- 136 |
|
Rés. Net Soc. Intég |
56 |
223 |
95 |
228 |
2 |
160 |
- 30 |
207 |
29 |
Résultat SME |
0 |
11 |
|
14 |
|
17 |
|
20 |
|
Amotiss. Goodwill |
- 3 |
- 3 |
|
- 3 |
|
- 2 |
|
- 2 |
|
Résultat consolidé |
52 |
231 |
113 |
239 |
3 |
175 |
- 26 |
225 |
28 |
dont part groupe |
40 |
163 |
130 |
169 |
4 |
100 |
- 41 |
142 |
42 |
dont minoritaires |
12 |
68 |
|
70 |
|
76 |
|
83 |
|
ANNEXE N° 4
QUESTIONNAIRE ADRESSÉ À M. LE
MINISTRE DE L'ÉCONOMIE ET DES FINANCES LE 18 MARS 1999 ET RESTÉ
SANS RÉPONSE A LA DATE DU 9 JUIN 1999
Commission des Finances
Paris, le 10 mars 1999
DP/pz.md -n° 99-210
Monsieur le
Ministre,
Comme vous le savez la commission des finances du Sénat consacre depuis
plusieurs mois une attention particulière au processus de
restructuration de l'industrie aéronautique en Europe.
Or, d'importants événements nationaux sont récemment
intervenus à l'initiative du gouvernement, centrés sur le
remodelage de l'Aérospatiale.
Dans la perspective de réunir des éléments d'analyse
permettant d'apprécier complètement ces décisions, nous
sommes naturellement conduits à vous adresser le questionnaire ci-joint
qui comporte en outre des questions relatives au processus en cours à
l'échelon européen.
Nous vous prions de croire, Monsieur le Ministre, à l'assurance de nos
sentiments distingués.
PJ
Alain Lambert Yvon Collin
Sénateur de l'Orne Sénateur du Tarn & Garonne
Président de la commission Rapporteur spécial
des finances
Monsieur Dominique STRAUSS-KAHN
Ministre de l'Economie, des Finances &
de l'Industrie
139 rue de Bercy
75572 Paris Cedex 12
I - Rapprochement Aérospatiale-Matra
1.
Fournir le texte complet de l'accord constitutif du futur ensemble
Aérospatiale-Matra.
2.
Transmettre les rapports des banques-conseils de l'Etat,
d'Aérospatiale, et, si disponible, de Lagardère.
3.
Transmettre les procès-verbaux des négociations
préparatoires à l'accord.
4.
Préciser les droits attachés à l'action
spécifique détenue par l'Etat dans le nouveau groupe.
5.
Fournir, lorsqu'elles seront disponibles, des
délibérations des organes sociaux des entreprises
concernées et, le cas échéant, des autorités
communautaires chargées de la concurrence.
6.
Transmettre l'accord d'actionnaires conclu le 10 novembre 1998
entre Aérospatiale et Dassault-Industries.
7.
Transmettre l'accord industriel conclu le 8 décembre 1998
entre Aérospatiale, le groupe Lagardère, Alcatel et Thomson-CSF.
II - Processus européen de restructuration européenne
1.
Préciser les objectifs de gouvernement et, le cas
échéant, le calendrier qu'il s'est fixé.
2.
Préciser l'analyse du gouvernement sur les causes de
l'insuccès rencontré jusqu'à présent par l'appel
des gouvernements à l'intégration de l'industrie
aéronautique en Europe.
3.
Fournir les différents rapports des administrations et des
industriels élaborés depuis le lancement du processus
d'intégration dans le cadre des groupes de travail « ad
hoc ».
4.
Transmettre les procès-verbaux des réunions des groupes
de travail entre administrations nationales.
5.
Indiquer si des scénarios prospectifs ont été
élaborés par le gouvernement ou l'Aérospatiale,
décrivant les gains de productivité attendus de
l'intégration des industriels et, le cas échéant, les
transmettre.
ANNEXE N° 5
QUELQUES DONNÉES RELATIVES À
L'ADMINISTRATION BRITANNIQUE ET AU SOUTIEN PUBLIC.
LA SUPRÉMATIE DES
QUESTIONS DE DÉFENSE
I.
LE MINISTÈRE DE LA DÉFENSE (MOD) BRITANNIQUE
L'organisation du ministère de la défense britannique
présente plusieurs différences par rapport à celle de son
homologue français, notamment par le fait que les services dont les
activités se rapprochent de celles de la DGA étatique sont au
nombre de 4.
|
|
|
|
Etats-Majors |
|
|
|
|
Chef d'Etat-Major |
|
|
|
DCDS
|
Ministre
|
|
|
|
Chef adjoint d'Etat-major |
|
|
|
|
Permanent under Secretary of State |
|
|
|
DUS
|
Agences (dont DERA) |
|
|
|
Second PUS |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Chief scientific adviser |
|
Deputy under secretary (Science & technology) |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Chief of Defence procurement |
|
DCDP/Operations |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
DCDP/Support |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
DESO |
Très schématiquement, les tâches et les
responsabilités liées aux programmes d'armement, donc celles qui
ont une importance pour l'industrie de défense nationale, se
répartissent de la manière suivante :
la recherche amont (baptisée « Corporate
Research ») est sous la responsabilité des équipes du
Chief Scientific Adviser ;
l'expression du besoin et la définition des spécifications sont
du ressort des équipes du Deputy Chief of Defense Staff -DCDS- ;
ses équipes gèrent également les programmes de recherche
appliquée ;
la conduite proprement dite des programmes d'armement est de la
responsabilité des services du Procurement Executive sous la direction
du Chief of Defence Procurement.
Chacun de ces services, en tant que maître d'ouvrage tire ses
compétences techniques et scientifiques de la DERA (Defence Evaluation
and Research Agency).
Celle-ci, forte de 12.000 personnes, dont près de 70 % de
scientifiques, dépend directement du ministre de la défense, et
réunit tous les centres de recherche et d'évaluation non
nucléaires du MoD qui jouissaient jusqu'à la fin des
années 80 d'une indépendance dispendieuse. Dirigée par un
Chief Executive recruté au sein de l'industrie, la DERA a un chiffre
d'affaires de 1 milliards de livres et a été dotée
d'un statut de compte de commerce qui est censé la contraindre à
rechercher le financement de clients pour toutes ses activités et
installations.
La DERA a cependant été chargée par le MoD d'être
garante de la base scientifique et technologique de défense du
Royaume-Uni : son chiffre d'affaires dépend ainsi à
90 % des services rendus au MoD.
L'agence en fait représente le dernier bastion de l'ancienne
participation du MoD à l'effort industriel d'armement : jusque dans
les années 80, les laboratoires du MoD non seulement
définissaient de nouvelles technologies, mais les mettaient
également en oeuvre en conduisant les études jusqu'à la
définition des matériels. C'est au cours des années 80 que
les dernières activités de développement ont
basculé dans l'indsutrie.
Le MoD ne peut pas envisager facilement de se séparer de l'agence,
puisque celle-ci représente encore sa seule garantie de continuer
d'être un « acheteur intelligent ».La DERA
prévoit cependant de rompre avec la structure jusqu'à maintenant
très fonctionnelle (partage en secteurs de
« milieux » recherche aéronautique, missiles,
électronique...) en séparant le MoD (DERA Defence) des clients
extérieurs (DERA, tec). Ces deux entités s'appuieraient sur
l'ensemble des installations de recherche de l'agence.
Structure possible de la DERA à compter du 1 er avril 1998
|
MoD |
|
Non MoD |
|
||
|
|
|
|
|
|
|
|
DERA
|
|
DERA tec |
|
||
|
|
|
|
|
|
|
|
Installations |
|
L'unicité de la DERA et son importance en tant que
« réservoir technologique » créent un
équilibre tout à fait spécifique vis-à-vis de
l'industrie. L'agence recevant la majorité des budgets de recherche
amont et appliquée (estimés à environ £500 millions,
dont ¼ pour la partie amont), son appartenance au MoD pose le
problème du transfert de technologies à l'industrie : d'une
part (c'est la principale préoccupation du MoD) pour les retrouver sur
les matériels livrés aux forces armées et d'autre part (il
s'agit plutôt d'une préoccupation du DTI) pour que ces
technologies développées initialement pour la défense
puissent trouver leurs éventuels débouchés sur le
marché civil et participer ainsi à la « création
de richesses ».
La DERA avait dans cet esprit, mis en place les mécanismes
suivants :
EMR (Extra-Mural Research)
: c'est la sous-traitance de certains
travaux de recherche à l'industrie. 30 % (en valeur, a priori) des
travaux sont ainsi passés par l'agence aux différentes
sociétés de défense. Ce chiffre devrait augmenter
jusqu'à 35 % dans les toutes prochaines années.
Pathfinder
: au moyen de cycles de présentation à
l'ensemble de l'industrie britannique des grands axes de recherche à
venir, la DERA sollicite des propositions de travaux de recherche de la part
des sociétés britanniques. Ces travaux, s'ils sont retenus, font
alors l'objet d'un développement conjoint.
Strategic Alignment
: la DERA a mis en place des forums de
concertation avec chacun des industriels de défense les plus importants,
dans le but d'élaborer une planification des travaux que les deux
acteurs voient un intérêt à réaliser en commun.
Dual-Use Technology Centres
: la DERA propose à l'industrie
d'investir en commun sur des installations de recherche et de partager
celles-ci entre chercheurs de plusieurs horizons, afin de favoriser la
« fertilisation croisée » entre industriels et
étatiques et de permettre un amortissement plus rapide de
l'investissement. Le plus connu de ces centres est le Structural Materials
Centre, basé à Farnborough.
Enfin la DERA, par son statut d'agence en compte de commerce, a la
possibilité d'être sous-traitant de l'industrie pour des
programmes d'armement.
Les précédentes initiatives sont essentiellement destinées
à favoriser le
transfert des technologies
défense et
répondent donc principalement à la préoccupation du MoD.
La DERA a cependant depuis plusieurs années conscience de l'importance
des relations avec l'industrie civile, et ce pour de multiples raisons dont les
principales consistent à
récupérer une part des
investissements consentis
(la DERA conserve les sommes
récupérées et peut donc les ré-investir), et
à développer les transferts de technologies défense vers
des applications civiles afin de rentabiliser les efforts du MoD et de
participer ce faisant « à la création de richesses
nationales ».
Ces préoccupations ont conduit la DERA à créer en 1996 un
poste de
directeur pour les transferts technologiques
et à y
nommer un représentant de l'industrie afin de conduire le processus de
diversification technologique destiné principalement à promouvoir
l'utilisation civile des technologies militaires.
II. LE DÉPARTMENT DU COMMERCE ET DE L'INDUSTRIE
Le « Department of Trade and Industry » (DTI)
a pour
objectif fondamental d'aider l'industrie britannique à concourir avec
succès sur les marchés nationaux et internationaux.
Au sein de la direction générale
« Industries » une direction aérospatiale et
défense a la responsabilité à la fois de l'industrie
aéronautique (le spatial est traité par le British National Space
Centre) et de l'industrie de défense. Mais, la coordination des travaux
de recherche entre les domaines civil et militaire est effectuée par une
autre structure.
En matière de défense, le DTI, plutôt absent durant les
années 80 et le début des annéess 90, a vu son
rôle se renforcer en 1995, à la suite d'un rapport commun entre
les commissions parlementaires de la défense et du commerce et de
l`industrie préconisant, d'une part un « droit de
commentaire » du DTI dans les décisions du ministère de
la défense (MOD) en matière de choix des titulaires des
programmes d'armement, d'autre part l'établissement d'un dialogue entre
le MoD et l'industrie de défense. Le gouvernement britannique
(c'est-à-dire le MoD et le DTI) répondait quelques mois plus tard
en confirmant que le DTI serait désormais consulté avant les
choix d'acquisitions afin de (« mieux) prendre en compte la dimension
industrielle.
Le rôle général du DTI en matière d'industrie de
défense s'énonce officiellement de la manière
suivante :
il apporte un avis sur les implications de la politique d'acquisition du
MoD en particulier en termes d'impact sur la compétitivité de la
base industrielle du Royaume-Uni ;
sur les programmes importants (montants supérieurs à
50 millions de livres pour les services et 150 millions de livres
pour les fournitures) il est consulté à temps pour s'assurer que
les conséquences industrielles sont considérées dans leur
ensemble ;
DTI et MoD oeuvrent ensemble à la promotion des activités
conjointes dans le domaine de la recherche et à l'adaptation des
technologies militaires aux applications civiles ;
le DTI travaille avec le MoD au développement d'une base
d'information commune sur l'industrie de défense.
Le ministère du commerce et de l'industrie est, en outre pourvoyeur
d'1/3 des soutiens publics britanniques à l'industrie
aéronautique civile.
Ses interventions prennent deux formes :
l'octroi d'avances remboursables ;
la distribution de subventions pour aider la recherche.
Les soutiens à la recherche sont cohérents avec les objectifs des
« Civil Aircraft Research and Demonstration Programme »
(CARAD) qui sont des plans couvrant une période pluriannuelle de trois
ans. Le tableau suivant rappelle l'évolution des crédits publics
de recherche aéronautique civile.
Evolution des crédits publics de recherche aéronautique civile
(en millions de livres)
1993-1994 |
1994-1995 |
1995-1996* |
1996-1997* |
1997-1998* |
23 |
23,7 |
22,6 |
22,7 |
22,7 |
* Prévisions
*
* *
Malgré les inflexions mentionnées ci-dessus, le
MoD
exerce une place prépondérante dans le dialogue entre pouvoirs
publics et industriels.
Les soutiens publics britanniques à l'aéronautique civile sont,
pour deux tiers d'entre eux, gérés par la DERA. Un peu plus de la
moitié des crédits alloués à la DERA finance des
recherches conduites par elle-même ; elle redistribue l'autre
moitié de ses ressources à des partenaires industriels
principalement.
Cet agencement est conforme à la suprématie du ministère
de la Défense comme financeur de la recherche aéronautique. Les
crédits du ministère de la Défense consacrés
à l'industrie aéronautique -civile et militaire-
s'élevaient en 1991 et 1992 à 1,3 et 1,4 milliards de
dollars respectivement. Ils étaient ainsi 14 fois plus
élevés que les crédits civils en 1992.
Toutefois, ces ordres de grandeur ne doivent pas inciter à dénier
toute autonomie à la recherche aéronautique civile en
Grande-Bretagne et les modalités d'attribution des soutiens qui en
résultent.
Les programmes de recherche font l'objet d'une définition qui prend en
compte les priorités des industriels. Or, ceux-ci, confrontés
à la baisse des crédits militaires et exerçant chacun des
activités duales ont logiquement renforcé leurs activités
commerciales, ce qui n'est pas sans conséquence sur la proportion de
leur effort de recherche consacré à la recherche civile.
En outre, l'une des justifications apportées aux modalités
retenues pour la gestion des crédits de recherche civile consiste
à optimiser la recherche militaire de sorte qu'elle serve des objectifs
à la fois civils et militaires. De fait, les programmes militaires ont
été réformés dans le sens d'une réduction du
nombre des spécifications militaires et d'une plus grande
standardisation des produits. Si l'on estime qu'environ 35 % des
crédits consacrés à la recherche civile sont
utilisés pour des projets duaux, il reste à établir le
niveau de financement sur crédits militaires de programmes à
retombées commerciales.
Si aucun chiffre précis ne peut être formulé, on peut
cependant raisonnablement penser que la construction civile
bénéficie significativement des financements publics du
ministère de la Défense. Cependant, il est clair que
l'implication du ministère de la Défense dans la recherche civile
brouille un peu l'analyse tandis que la place occupée par les recherches
conduites par la DERA elle-même affecte sans doute l'impact des
crédits publics de recherche sur les industriels. C'est certainement
pour remédier à cette situation que la DERA et les industriels
ont conclu des accords portant sur les activités de recherche civile de
l'agence.
Au demeurant, les thèmes de recherche sélectionnés dans le
cadre des CARAD successifs regroupent des objectifs « a
priori » assez globaux pour couvrir n'importe quelle sorte de
recherches.
C'est ainsi que dans le budget 1995-1996, il était prévu
d'affecter les 24,5 millions de livres disponibles de la manière
suivante :
- 7 % pour l'aéronautique et les systèmes
mécaniques ;
- 34 % pour les systèmes de propulsion ;
- 37 % pour les matériaux et structures ;
- 12 % pour l'aérodynamique ;
- 9 % pour la soufflerie européenne ;
- 1 % pour les hélicoptères.
Cette concentration des aides est, d'une certaine manière, le reflet
de l'industrie aéronautique britannique civile marquée par
l'emprise du motoriste.
Il faut enfin observer combien le soutien public britannique s'oriente de plus
en plus vers des thèmes de recherche appliquée. Les
universités, qui bénéficiaient de 13 % des
crédits publics, ont vu leur part très sensiblement
réduite et ne reçoivent plus que 7 % des concours publics.
Plus généralement, les crédits ont glissé de
programmes de recherche fondamentale vers des projets
pré-compétitifs portant sur les produits eux-mêmes ou les
processus de production.
Le « Department of Trade and Industry » (DTI)
a
pour objectif fondamental d'aider l'industrie britannique à concourir
avec succès sur les marchés nationaux et internationaux.
Au sein de la direction générale
« Industries » une direction aérospatiale et
défense a la responsabilité à la fois de l'industrie
aéronautique (le spatial est traité par le British National Space
Centre) et de l'industrie de défense. Mais, la coordination des travaux
de recherche entre les domaines civil et militaire est effectuée par une
autre structure.
En matière de défense, le DTI, plutôt absent durant les
années 80 et le début des annéess 90, a vu son
rôle se renforcer en 1995, à la suite d'un rapport commun entre
les commissions parlementaires de la défense et du commerce et de
l`industrie préconisant, d'une part un « droit de
commentaire » du DTI dans les décisions du ministère de
la défense (MOD) en matière de choix des titulaires des
programmes d'armement, d'autre part l'établissement d'un dialogue entre
le MoD et l'industrie de défense. Le gouvernement britannique
(c'est-à-dire le MoD et le DTI) répondait quelques mois plus tard
en confirmant que le DTI serait désormais consulté avant les
choix d'acquisitions afin de (« mieux) prendre en compte la dimension
industrielle.
Le rôle général du DTI en matière d'industrie de
défense s'énonce officiellement de la manière
suivante :
il apporte un avis sur les implications de la politique d'acquisition du
MoD en particulier en termes d'impact sur la compétitivité de la
base industrielle du Royaume-Uni ;
sur les programmes importants (montants supérieurs à
50 millions de livres pour les services et 150 millions de livres
pour les fournitures) il est consulté à temps pour s'assurer que
les conséquences industrielles sont considérées dans leur
ensemble ;
DTI et MoD oeuvrent ensemble à la promotion des activités
conjointes dans le domaine de la recherche et à l'adaptation des
technologies militaires aux applications civiles ;
le DTI travaille avec le MoD au développement d'une base
d'information commune sur l'industrie de défense.
Le ministère du commerce et de l'industrie est, en outre pourvoyeur
d'1/3 des soutiens publics britanniques à l'industrie
aéronautique civile.
Ses interventions prennent deux formes :
l'octroi d'avances remboursables ;
la distribution de subventions pour aider la recherche.
Les soutiens à la recherche sont cohérents avec les objectifs des
« Civil Aircraft Research and Demonstration Programme »
(CARAD) qui sont des plans couvrant une période pluriannuelle de trois
ans. Le tableau suivant rappelle l'évolution des crédits publics
de recherche aéronautique civile.
Evolution des crédits publics de recherche aéronautique civile
(en millions de livres)
1993-1994 |
1994-1995 |
1995-1996* |
1996-1997* |
1997-1998* |
23 |
23,7 |
22,6 |
22,7 |
22,7 |
*
Prévisions
Le ministère de la défense :
Malgré les inflexions mentionnées ci-dessus, le MoD exerce une
place prépondérante dans le dialogue entre pouvoirs publics et
industriels.
En effet, les soutiens publics britanniques à l'aéronautique
civile sont, pour deux tiers d'entre eux, gérés en
réalité par la Defence Evaluation Research Agency - la DERA - qui
dépend du ministère de la Défense. Un peu plus de la
moitié des crédits alloués à la DERA finance des
recherches conduites par elle-même ; elle redistribue l'autre
moitié de ses ressources à des partenaires industriels
principalement.
Cet agencement est conforme à la suprématie du ministère
de la Défense comme financeur de la recherche aéronautique. Les
crédits du ministère de la Défense consacrés
à l'industrie aéronautique -civile et militaire-
s'élevaient en 1991 et 1992 à 1,3 et 1,4 milliards de
dollars respectivement. Ils étaient ainsi 14 fois plus
élevés que les crédits civils en 1992.
Toutefois, ces ordres de grandeur ne doivent pas inciter à dénier
toute autonomie à la recherche aéronautique civile en
Grande-Bretagne et les modalités d'attribution des soutiens qui en
résultent.
Les programmes de recherche font l'objet d'une définition qui prend en
compte les priorités des industriels. Or, ceux-ci, confrontés
à la baisse des crédits militaires et exerçant chacun des
activités duales ont logiquement renforcé leurs activités
commerciales, ce qui n'est pas sans conséquence sur la proportion de
leur effort de recherche consacré à la recherche civile.
En outre, l'une des justifications apportées aux modalités
retenues pour la gestion des crédits de recherche civile consiste
à optimiser la recherche militaire de sorte qu'elle serve des objectifs
à la fois civils et militaires. De fait, les programmes militaires ont
été réformés dans le sens d'une réduction du
nombre des spécifications militaires et d'une plus grande
standardisation des produits. Si l'on estime qu'environ 35 % des
crédits consacrés à la recherche civile sont
utilisés pour des projets duaux, il reste à établir le
niveau de financement sur crédits militaires de programmes à
retombées commerciales.
Si aucun chiffre précis ne peut être formulé, on peut
cependant raisonnablement penser que la construction civile
bénéficie significativement des financements publics du
ministère de la Défense. Cependant, il est clair que
l'implication du ministère de la Défense dans la recherche civile
brouille un peu l'analyse tandis que la place occupée par les recherches
conduites par la DERA elle-même affecte sans doute l'impact des
crédits publics de recherche sur les industriels. C'est certainement
pour remédier à cette situation que la DERA et les industriels
ont conclu des accords portant sur les activités de recheche civile de
l'agence.
Au demeurant, les thèmes de recherche sélectionnés dans le
cadre des CARAD successifs regroupent des objectifs « a
priori » assez globaux pour couvrir n'importe quelle sorte de
recherches.
C'est ainsi que dans le budget 1995-1996, il était prévu
d'affecter les 24,5 millions de livres disponibles de la manière
suivante :
- 7 % pour l'aéronautique et les systèmes
mécaniques ;
- 34 % pour les systèmes de propulsion ;
- 37 % pour les matériaux et structures ;
- 12 % pour l'aérodynamique ;
- 9 % pour la soufflerie européenne ;
- 1 % pour les hélicoptères.
Il apparaît toutefois que l'effort public de recherche est, en
Grande-Bretagne, principalement concentré sur les moteurs. Plus du tiers
des crédits leur sont spécifiquement consacrés. En outre,
une part importante des crédits de recherche sur les matériaux et
structures et en aérodynamique revient aux motoristes et, en
particulier, à Rolls-Royce.
Cette concentration des aides est, d'une certaine manière, le reflet
de l'industrie aéronautique britannique civile marquée par
l'emprise du motoriste.
Il faut enfin observer combien le soutien public britannique s'oriente de plus
en plus vers des thèmes de recherche appliquée. Les
universités, qui bénéficiaient de 13 % des
crédits publics, ont vu leur part très sensiblement
réduite et ne reçoivent plus que 7 % des concours publics.
Plus généralement, les crédits ont glissé de
programmes de recherche fondamentale vers des projets
pré-compétitifs portant sur les produits eux-mêmes ou les
processus de production.
ANNEXE N° 6
PROGRAMME DE TRAVAIL DU RAPPORTEUR
- I. MISSIONS
Lundi 22 juin 1998
9 h 15 |
M. Luc BOUREAU, Attaché d'armement, Ambassade de France |
10 h 30 |
M. Michael O'SHEA, Engineering Industries Director, Department of Trade & Industry |
12 h 30 |
M. Daniel BEVAN, Director, Institutionnal Equities, Crédit Lyonnais Laing |
16 h 30 |
M. Peter Mac LAUGHLIN , Director, Government Affairs, British Aerospace |
2. Programme de la mission en Italie
Lundi 21 septembre 1998
10 h 30 |
Réunion de travail au Poste d'Expansion Economique en compagnie de MM René GHESQUIÈRE, Ministre Conseiller pour les affaires économiques et commerciales, François COTIER, attaché commercial et Jean-Luc Ferrandi, Attaché d'Armement |
12 h 00 |
Ministère de l'Industrie
|
15 h 00 |
Alenia
Difesa
|
15 h 45 |
Chambre
des Députés
|
18 h 30 |
Ambassade de France
, Piazza Farnese
|
19 h 30 |
Dîner donné par M. René GHESQUIÈRE, Ministre Conseiller pour les Affaires Economiques et Commerciales, en compagnie de M. Jean-Louis FACHE, Directeur Aérospatiale Italie. |
Mardi 22
septembre 1998
8 h 30 |
Alenia
Spazio
, visite de l'usine de Nola en compagnie de M. Carmelo
CONSENTINO, Vice-Président « Business Development »
d'Alenia Aerospazio et du Dott. ROVERE, Responsable du marketing et de la
communication
|
17 h 15 |
Finmeccanica, Entretien avec le Président, M. Sergio CARBONE et l'Administrateur délégué, M. Alberto LINA. |
20 h 00 |
:
Dîner au Palais Farnese
donné par M. l'Ambassadeur de
France.
- M.
Giorgio ZAPPA, Président d'Alenia Aerospazio
|
3. Programme de la mission en Allemagne
Mercredi 17 février 1999
8 h 30 |
Dr HUMBERT, membre du directoire de Dasa et président du directoire de la branche aéronautique civile. |
10 h 00 |
Visite des installations d'Airbus Deutschland à Hambourg. |
17 h 00 |
Entretien avec le Dr OLLIG, directeur de l'industrie au ministère fédéral de l'économie et de la technologie. M. URBAN, chef du groupe de travail du coordonateur et M. Meyer, chef du bureau de l'industrie aéronautique. |
Jeudi 18 février 1999
10 h 00 |
Entretien avec M. POTIER, représentant d'Aérospatiale en Allemagne |
12 h 30 |
Déjeuner avec M. KINDLER, responsable du dossier aéronautique à la Chancellerie fédérale avec M. Brandis, son adjoint. |
|
|
4. Programme de la mission aux Etats-Unis
A) WASHINGTON
Lundi 3 mai
9 h 30 |
Entretien avec Mme Carol T. CRAWFORD, « Commissionner » International Trade Commission |
11 h 00 |
Entretien avec M. Jonathan SCHOFIELD, « chairman & CEO », Airbus Industrie of North America |
12 h 30 |
Déjeuner avec M. Pierre CLERC-RENAUD, « executive vice-president », Aérospatiale Incorporated, et M. Jean-Michel BOUR, conseiller aux transports à l'ambassade de France |
14 h 30 |
Entretien avec Mme Sally BATH, « director », Office of Aerospace, International Trade Administration - ministère américain du commerce (DOC) |
16 h 00 |
Entretien au Departement de la Defense (DOD) avec M. Victor CIARDELLO, directeur de l'ODUSD/IA/FEA (Office of the Under Secretary of Defense/Acquisition and Technology/Financial and Economic Analysis) et M. Karl TOOL, officier de liaison France du Pentagone |
Mardi 4 mai
8 h 15 |
Petit-déjeuner avec M. J.F. BOITTIN, ministre-conseiller, chef des services de l'Expansion économique aux Etats-Unis |
9 h 30 |
Entretien avec M. l'ambassadeur, ambassade de France |
B)
SEATTLE
Mardi 4 mai
16 h 30 |
Entretien avec M. Bill KING, directeur des programmes aéronautiques et spatiaux pour l'International trade division de l'Etat de Washington |
19 h 30 |
Dîner avec M. Jack COWAN, consul de France honoraire et directeur de la Chambre de commerce franco-américaine à Seattle, M. Olivier REDON (Localization and consulting services) et M. Norbert GAILLARD, CFM |
Mercredi 5 mai
Journée organisée par Boeing
10 h 00 |
Accueil par M. Gary SCOTT, vice-président Business strategy |
10 h 15 |
Présentation de la société par M. Warren BROWN, international communications |
11 h 00 |
Présentation des orientations de l'industrie aéronautique et spatiale par M. Gordon McHENRY, market requirements |
11 h 45 |
Discussion, avec également Mme Carol BURCH, european sales, M. Jerry CALHOUN, vice-president ressources humaines, M. Mike OLSZEWSKI, business strategy et M. Richard SCHNEIDER, coordinateur Boeing, International association of machinists and aerospace workers |
12 h 00 |
Déjeuner avec M. Warren BROWN, international communications, CALHOUN, VP employee & union relations, M. Gordon McHENRY, market requirements, M. Richard SCHNEIDER, overall Boeing coordinator, IAM, M. Gary SCOTT, VP business strategy, Mme Michele SHELBY, business strategy, et M. Tracey TALBOTT, business strategy |
18 h 15 |
Dîner offert par Boeing, avec Mme Carol BURCH, european sales, M. Mike OLZEWSKI, business strategy, M. Ragnar NORDVIK, european sales, M. Gary SCOTT, vice-président business strategy, M. Tracey TALBOTT, business strategy et M. Jean THOIN, Airline analysis, interprète |
C)
LOS ANGELES
Jeudi 6 mai
13 h 00 |
Présentation des activités de Boeing à Long Beach et du B-717 |
14 h 00 |
Visite du centre d'assemblage de Boeing Long Beach |
Vendredi 7 mai
-
14 h 30
Northrop Grumman - Présentation du groupe par M. Bob NELSON, Vice-Président, business strategy, corporate office et M. Ed LEVY, Night manager, F/A-18 Product delivery
15 h 30
Visite de la chaîne d'assemblage du F/A-18
II. AUDITIONS
M. Stéphane-Paul Frydman, cabinet de M. le ministre de l'économie et des finances.
M. François Auque, Aérospatiale.
M. Philippe Camus, Matra Hautes Technologies
M. Charles Edelsterne, Dassault.
M. Philippe Gossard, Crédit Lyonnais Securities Europe.
La déclaration conjointe du Président de la République et du Premier ministre français, du Chancelier allemand et du Premier ministre du Royaume-Uni du 9 décembre 1997 a tracé la voie d'une industrie aéronautique européenne forte, c'est-à-dire unie.
Le processus indispensable d'union n'a pas abouti et se trouve dans l'impasse.
Cet échec provisoire n'est pas seulement lourd de menaces économiques. C'est aussi l'échec d'une ambition politique.
Il importe de le surmonter.
Le présent rapport développe les raisons de s'unir, analyse les motifs de l'échec et plaide pour la relance d'un grand projet pour l'Europe.
1
« Pour prolonger notre envol.
Rapport sur les soutiens publics à la construction aéronautique
civile » Sénat Commission des Finances. M. Yvon Collin n°
367.24 juin 1997
2
En particulier, les chiffres du tableau sont consolidés.
3
C'est le solde commercial de l'ensemble des
sociétés du GIFAS
4
Il s'agit du solde des compagnies aériennes (importations
d'avions de plus de 15 tonnes, de pièces de rechanges et de travaux de
maintenance ; exportations de travaux de maintenance)
Les importations d'aéronefs légers ainsi que les importations de
matériels de services officiels français sont également
prises en compte.
5
Ce type de configurations est évidemment susceptible
d'introduire un profond décalage entre les schémas
théoriques défendus par les entreprises et leurs décisions
effectives. Il est assez frappant de ce point de vue de mettre en
parallèle les réactions vertueusement outragées de DASA
devant la fusion « verticale » BAEGEC-Marconi et les
intentions prêtées à l'industriel allemand d'une
étroite alliance avec Northrop-Grumman qui, du fait de l'ampleur des
activités électroniques de cette dernière, aurait
exactement les mêmes caractèristiques.
6
Cette fourchette correspond à des hypothèses
alternatives de motorisation de l'appareil.
7
Pour une appréciation comparée des systèmes
de soutien public, voir »Pour prolonger notre envol ».
Rapport sur les soutiens publics à la construction aéronautique
civile » Sénat Commission des Finances M. Yvon Collin n°
367 du 24 juin 1997.
8
Boeing Current Market Outlook 1998
9
Il existe d'ailleurs sur ce point une différence
d'anticipation entre Airbus et Boeing.
10
« Pour prolonger notre envol. Rapport sur les soutiens
publics à la construction aéronautique civile » .
Sénat. Commission des Finances. M. Yvon Collin - n° 367 -
24 juin 1997.
11
Hughes-General Dynamics, UDLP, Martin Marietta-General Electric,
Northrop-Grumman-Vought, Martin Marietta-General Dynamics, Lockheed-Martin
Marietta, Hughes-CAE Link.
12
L'échec du projet entre l'Europe et la Chine d'un avion de
100 places a conduit à écarter les industriels italiens d'un
programme petit porteur où ils pesaient pour plus d'1/3. Ils n'ont pas
été associés à l'A 318 dont certains interlocuteurs
rencontrés en Italie ont pu contester l'intérêt, jugeant
l'appareil à la fois hors de portée financièrement de
compagnies « comuters », souvent à courte
durée de vie, et techniquement mal calibré en raison d'un train
d'atterrissage inadapté.
13
Rapport Lammert du 14 mai 1997
14
La fusion entre Boeing et Mc Donnel Douglas (MDD) est effective
depuis le 1
er
août 1997
15
Hors charges spéciales de restructuration de MDD
16
La progression du chiffre d'affaires tient compte de l'absorption
de Rockwell en 1996
17
BAe aurait ainsi déjà enregistré des profits
sur le programme Eurofighter. Il aurait été plus rigoureux,
financièrement, de passer en provisions les quelques recettes
afférentes à l'Eurofighter (diverses avances, etc) en raison des
incertitudes sur ce programme.
18
Toutes les recettes de Daimler Benz Aerospace sont
calculées en dollar et les dépenses en Deutsche Mark. Le seuil de
rentabilité de l'entreprise est d'environ 1,5 mark pour 1 dollar ;
or, en 1995 le taux de change fut longtemps de 1,35 mark pour 1 dollar.
19
La reprise des constructeurs d'avions régionaux Ffokker et
Dornier n'a fait qu'amplifier le déficit du groupe
20
« Se sauver face à un dollar faible »
21
L'intégration de l'activité des missiles fait
exception. Elle a d'ailleurs déjà été
apportée, la filiale LFK étant rapprochée de MBD.
22
100 milliards contre 30 milliards, ces chiffres étant
à considérer avec prudence.
23
Il est notable qu'un accord fiscal non communiqué
à votre rapporteur soit intervenu à l'occasion du rattachement
des actifs Dassault-Systèmes sortis de Dassault Aviation à la
holding Dassault Industrie.
24
Dont 1,3 milliard d'euros au titre des droits de
l'entreprise dans Dassault Aviation.
25
Du fait de l'arrivée à maturité du missile
Aster, concurrent du célèbre Patriot.
26
Avis n° 99-AC-Z de la Commission des participations et
des transferts du 25 mars 1999 relatif au transfert du secteur public au
secteur privé d'une partie du capital de la société
Aérospatiale, société nationale industrielle. JO du
27 mars 1999.
27
Dont 880 millions au titre de la participation de l'entreprise
dans Dassault Aviation
28
Il faut observer que ce que l'Etat aurait gagné
patrimonialement à un équilibre des interventions publiques plus
favorable à Aérospatiale aurait été perdu via un
alourdissement des charges publiques nettes. Il n'est pourtant pas certain que
le bilan de ces deux flux soit équilibré puisqu'aussi bien
l'amélioration des résultats d'une entreprise publique est,
patrimonialement, amplifiée par le jeu des multiples boursiers qui sont
susceptibles d'intervenir au moment de son évaluation.
29
« Pour prolonger notre envol - Rapport sur les soutiens
publics à la construction aéronautique civile »
Sénat - Commission des finances M. Yvon Collin - n° 367
du 24 juin 1997.
30
Sur longue période, en revanche, les interrelations entre
activité et recherche-développement. sont étroites.
31
Politique qui aurait rapporté quelques 5 milliards de
francs à l'entreprise entre 1993 et 1996
32
Cette solution a, semble-t-il, nécessité un
arbitrage de la commission des opérations de bourse compte tenu de son
originalité comptable.
33
L'année 1998n a été moins favorable (v.
suppra.
34
Source : Crédit Lyonnais Securities
Europe