B. UN DROIT À L'EXPÉRIMENTATION DANS LES CONTRATS DE PLAN ?
Les
contrats de plan laissent fort peu de place à des politiques ou à
des
dispositifs innovants
. Cela résulte notamment de la
primauté accordée par les ministères au respect des
procédures établies à Paris, plutôt qu'à
l'efficience et à l'adéquation des projets aux besoins locaux.
Pourtant, la région est une échelle appropriée pour
expérimenter des politiques publiques et les contrats de plan
constituent a priori un cadre particulièrement pertinent pour
élaborer, mettre en oeuvre et évaluer ces
expérimentations
. En effet, l'élaboration des contrats de
plan peut améliorer la réflexion préalable ; la mise
en oeuvre partenariale des contrats faciliterait le suivi de ces politiques
expérimentales et de leurs effets ; enfin les contrats de plan
prévoient des dispositifs d'évaluation.
Le rapport CHÉRÈQUE préconisait ainsi que "
les
contrats de plan constituent le cadre d'innovations expérimentales,
en laissant plus de souplesse aux partenaires, par exemple en matière
d'interventions économiques
".
Plus généralement, certaines Régions revendiquent un
" droit à l'expérimentation
" dans les contrats
de plan, qui devrait être introduit par voie législative, s'il
devait déroger au droit national existant.
Pour s'opposer à cette idée, les services de l'Etat avancent
parfois que ces expérimentations ne seraient pas conformes au
droit
communautaire
, notamment en matière d'interventions
économiques.
Cet argument n'est que partiellement recevable. Certes, il est exact que les
dispositifs expérimentaux d'intervention économique
contractualisés devraient être
"
notifiés
" pour approbation à la
Commission
européenne
préalablement à leur mise en oeuvre.
Cependant, les délais d'instruction par la Commission (2 mois) ne
sont pas de nature à entraver l'élaboration et la
négociation des contrats. Surtout, on voit mal la Commission
européenne refuser la mise en oeuvre de dispositifs innovants,
dès lors que ceux-ci s'inscriraient explicitement dans le cadre de la
réglementation communautaire relative aux aides aux entreprises.
En particulier, les aides d'un montant cumulé inférieur à
100 000 Euros pour la même entreprise sur une période de
3 ans sont dispensées de notification, sous réserve qu'elles ne
concernent pas les secteurs soumis à des règles communautaires
spéciales en matière d'aide d'Etat (automobile, construction
navale, fibres synthétiques, sidérurgie, agriculture et
pêche).
Compte tenu de cette règle dite
de minimis
, la
réglementation européenne n'interdit aucunement la mise en place
dans le cadre des contrats de plan de politiques innovantes en faveur des
petites entreprises
, sous réserve que les autorités
publiques s'assurent du respect de ce plafond de 100 000 Euros par
entreprise sur 3 ans, c'est à dire mettent en place un
système
de suivi
des aides allouées à une même entreprise par
l'ensemble des collectivités publiques.
De manière plus générale, le renforcement des
contrôles communautaires sur les " aides d'Etat " aux
entreprises rend d'ailleurs indispensable aussi bien la mise en place de ce
système de suivi, que la refonte de la législation sur les
interventions économiques des collectivités locales
annoncée depuis plusieurs années déjà et sans cesse
différée.
En effet, notre législation, fondée sur des distinctions
byzantines obsolètes entre aides directes et aides indirectes, est
d'autant plus contournée que son respect n'assure de toute façon
aucune sécurité juridique aux collectivités et aux
entreprises au regard du droit communautaire
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*
)
.
Au total, l'introduction dans les contrats de plan de dispositifs
d'intervention économique innovants pourrait précéder et
peut-être dépassionner, l'indispensable réforme de la
législation sur l'intervention économique des
collectivités locales.