B. LES MODALITÉS DE L'ÉTALEMENT DES CONTRATS DE PLAN

• Selon le ministère de l'Intérieur, " d'un point de vue technique et financier, pour l'ensemble des ministères, le total des tranches des années 1997 et 1998 a été divisé en trois et délégué aux préfets sur trois ans au lieu de deux ans.

Cette réduction a concerné plus particulièrement les crédits d'investissement
[soit les 5/6 èmes des contrats de plan ]

En ce qui concerne les crédits de fonctionnement , une réduction des dotations annuelles aurait compromis de nombreuses actions dans les régions [
comme le fonctionnement d'associations ]. La DATAR et la Délégation interministérielle à la Ville ont donc obtenu de déléguer des dotations de titre IV [ fonctionnement ] plus élevées que la réduction imposée à l'ensemble des ministères . "

Malgré cette exemption, les crédits de fonctionnement délégués chaque année ont été réduits .

• D'un point de vue formel , cet étalement des contrats de plan aura pris la forme d'une décision unilatérale de l'Etat, ce qui n'est pas sans soulever quelques questions.

La lettre circulaire du 19 septembre 1996 estimait que " cette possibilité [ d'étalement des contrats de plan ] est ouverte à l'Etat par le deuxième alinéa de l'article 12 de la loi du 29 juillet 1982 qui prévoit une attribution des crédits dans le cadre des contrats de plan, dans la limite des dotations ouvertes par la loi de finances de l'année. Une clause reprenant cette formulation figure d'ailleurs dans le contrat de votre région ".

Cependant, tous les contrats de plan prévoyaient également des modalités précises de révision des contrats, fondées sur le parallélisme des formes (consultation préalable, décision prise en CIAT par l'Etat, délibération du Conseil régional, etc.).

De toute évidence, ni la lettre, ni l'esprit de ces dispositions n'ont été respectés. La doctrine juridique estime ainsi que cette décision est formellement illégale.

Il est vrai que les modalités de révision des contrats étaient particulièrement lourdes, longues, solennelles, donc difficiles à gérer d'un point de vue politique et peu adaptées aux impératifs de maîtrise rapide des finances publiques.

Mais l'Etat aurait pu à tout le moins consulter préalablement les Régions, ne serait-ce que pour convenir de manière concertée des modalités d'application de sa décision.

La Cour des Comptes estime d'ailleurs que le principe d'annualité budgétaire a été " abusivement utilisé pour remettre en cause des arbitrages et des décisions antérieurs " 106( * ) .

Pourtant, si cette décision a soulevé des protestations, elle n'a entraîné aucun recours devant les tribunaux administratifs. Comme plusieurs d'entre elles l'indiquent à votre rapporteur, les Régions ont ainsi " pris acte " de la décision unilatérale de l'Etat.

Selon certains observateurs, cela proviendrait du " soulagement " des Régions, leurs propres engagements diminuant d'autant.

Il semble plutôt y voir un signe de la sagesse des Régions : compte tenu des délais de jugement, un recours eût été sans effet. Par surcroît il apparaissait à certaines Régions peu opportun que les tribunaux connaissent d'une décision politique de cette nature.

Cette procédure n'en pose pas moins de nouveau la question de la portée attachée aux contrats de plan. A titre d'exemple, une Région estimait cette décision " possible car les contrats de plan n'ont aucune valeur juridique ".

• Quoi qu'il en soit, " pour ne pas pénaliser les régions ", l'Etat leur a offert la possibilité de faire des avances pour les programmes qu'elles jugeaient prioritaires. En d'autres termes, les Régions pouvaient éviter le retard de certains projets si elles acceptaient, en principe à titre transitoire, de prendre en charge les parts de financement incombant à l'Etat.

De nombreuses régions ont ainsi consenti à l'Etat des avances sur fonds de concours , notamment en 1997 (par exemple, 145 millions de francs en Poitou-Charentes, plus de 100 millions de francs en Lorraine, etc.), mais l'Etat n'a pas toujours débloqué ses cofinancements par la suite.

Le principe de ces avances fut d'ailleurs controversé. En effet, on craignait que ce dispositif ne favorisât une meilleure exécution des contrats de plan dans les régions les plus " riches ", donc les plus en mesure de mobiliser des financements de trésorerie.

Au vu des premiers bilans d'exécution établis par la DATAR, cette crainte ne paraît toutefois guère fondée : les Régions qui ont accordé le plus d'avances à l'Etat ne semblent pas bénéficier d'une meilleure exécution du contrat.

A contrario , cela soulève la question de l'efficacité de ces avances, puisque l'Etat a allégé sa trésorerie au détriment de celle des Régions, sans que les contrats soient finalement mieux exécutés.

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