B. L'ÉTAT PARTENAIRE DÉFAILLANT
Selon la
DATAR, le bilan final de l'exécution des troisièmes contrats de
plan ne sera publié qu'à l'été 2000.
A ce jour, ne sont disponibles que la synthèse des bilans
d'exécution de l'Etat et des Régions pour la période
1994-1998, d'une part, les prévisions d'exécution établies
en début d'année 1999 par les ministères et
collationnées par la DATAR, d'autre part.
Votre rapporteur ne s'attachera donc pas à un commentaire
détaillé de l'exécution des troisièmes contrats de
plan. En raison de l'imprécision des concepts et des résultats,
cette
démarche
serait d'ailleurs
vaine
: le bilan
d'exécution des contrats de plan 1994-1999 ne sera jamais connu qu'avec
une marge d'erreur de plusieurs pour-cent.
Les données provisoires transmises par la DATAR (cf. encadré
ci-dessous) appellent toutefois quelques
observations
.
LE BILAN PROVISOIRE DES TROISIÈMES CONTRATS DE PLAN SELON LA DATAR
Crédits engagés (sur la période
1994-1998)
Ces crédits ont été engagés par les préfets.
Les bilans établis par ces derniers au cours du premier semestre 1998,
selon des méthodes et des bases qui varient d'une région à
l'autre, montrent que les taux d'engagement de la part Etat par région
au 31 décembre 1998 pour les cinq premières
années sont les suivants :
- Alsace : 72,81 %
- Aquitaine : 67 %
- Auvergne : 80,74 %
- Bourgogne : 78,04 % en crédits engagés et attribués
- Bretagne : 68,89 % en crédits affectés
- Centre : 75,02 %
- Champagne-Ardennes : 68 %
- Corse : 69,86 %
- Franche Comté : 75 %
- Ile-de-France : 82 %
- Languedoc-Roussillon : 71,27 %
- Limousin : 72,25 %
- Lorraine : 76,2 %
- Midi-Pyrénées : 81 % en crédits affectés
- Nord-Pas-de-Calais : 74,2 %
- Basse Normandie : 66,7 %
- Haute Normandie : 70,78 %
- Pays de la Loire : 72,2 %
- Picardie : 79,19 %
- Poitou-Charentes : disponible ultérieurement
- Provence Alpes Côte d'Azur : 72 %
- Rhône-Alpes : 85 %
- Taux moyen métropole sur 21 régions : 74,31 %.
Les variations entre les taux d'une région à l'autre
dépendent de la méthode suivie par les partenaires pour
l'établissement de leur bilan conjoint, de l'avancement d'ou ou
plusieurs projets, du poids du programme routier ou encore de conditions
spécifiques telles que, par exemple, le mode de financement du volet
routier en Ile de France. Il n'est donc pas possible de procéder
à des comparaisons d'un contrat à un autre.
En ce qui concerne les conseils régionaux, les résultats suivants
sont disponibles : Alsace 90,93 %, Aquitaine 82 %, Auvergne
111,67 %, Bourgogne 88,4 %, Bretagne 81,35 %, Centre
78,39 %, Champagne Ardennes 77 %, Corse 67,56 %, Ile de France
83 %, Limousin 75,25 %, Lorraine 101,4 %, Midi
Pyrénées 89 %, Nord Pas-de Calais 85,6 %, Basse
Normandie 85,32 %, Haute Normandie 73,11 %, Pays de la Loire
84,10 %, Picardie 84,4 % en crédits affectés, Provence
Alpes Côte d'Azur 80 %, Rhône Alpes 95 %.
Crédits programmés en 1999
L'année 1999 est la dernière année des contrats en cours
puisque ces derniers arrivent à échéance le 31
décembre 1999.
Les programmations établies par les ministères permettent
d'atteindre un total national de
92,43 %
tous ministères
confondus et de
96,12 %
sans le ministère de l'Equipement.
5 ministères ou secteurs sont à 100 % : il s'agit des
ministères ou secteurs de l'Emploi formation, de l'Aménagement du
territoire, de la Ville, de la Justice, des Rapatriés, de la Concurrence
et de la répression des fraudes.
2 ministères ou secteurs se situent entre
98
et
100 %
: il s'agit des secteurs de l'Evaluation mise en oeuvre
par le Commissariat général du Plan et de l'Artisanat.
5 se situent entre 95 et 98 % : il s'agit des secteurs du Commerce
(
97,94 %
), de l'enseignement supérieur
(
95,38 %
), de la Recherche (
95,80 %
), de
l'Environnement (
95,39 %
), de la Défense
(
97,35 %
).
6 se situent entre le taux moyen de
92,43 %
et
95 %
: il s'agit de l'industrie (
94,73 %
), du
Commerce extérieur (
94,98 %
), de l'Enseignement secondaire
(dont les résultats partiels, hors DOM, sont de
94,12 %
), de
l'Outre-mer (
94,62 %
) et de Jeunesse et Sports
(
92,51 %
,
100 %
hors Ile de France) et de l'Agriculture
(
92,83 %
).
6 secteurs sont très éloignés non seulement de l'objectif
de
100 %
mais du taux moyen puisqu'ils se situent au dessous de
90 %
: il s'agit des secteurs de santé social
(
85,01 %
), de la Culture (
82,08 %
), de l'Equipement
(
87,73 %
), des Affaires étrangères
(
88,42 %
), de la Coopération (
75,13 %
) et des
Charges communes (
77,41 %
).
Perspectives 2000
Le Premier ministre a, par circulaire, donné instruction aux ministres
de prendre les dispositions nécessaires pour que les contrats en cours
soient achevés dans les meilleures conditions.
Source : DATAR.
• Selon la DATAR, au 31 décembre
1998
, les administrations
centrales avaient délégué aux préfets
79,99
%
du montant total des contrats. En d'autres termes, les engagements de
l'Etat portés aux contrats de plan n'auraient été
exécutés qu'aux quatre cinquièmes à
l'échéance initialement prévue pour le contrat.
Selon les estimations prévisionnelles établies par la DATAR, le
taux d'exécution des contrats, au sens du ratio
délégations de crédits/ engagements initiaux pourrait
atteindre
92,4 %
à la fin de
1999
.
En d'autres termes, l'étalement des contrats sur une année
supplémentaire n'aura pas permis à l'Etat de
respecter
pleinement ses engagements initiaux.
Le rythme de délégation des crédits programmé pour
1999
, qui ne s'élève qu'à 12,5 % des engagements
des contrats de plan, est d'ailleurs particulièrement faible :
à ce rythme, il aurait fallu huit ans à l'Etat pour respecter des
engagements prévus pour cinq ans. Ce rythme contraste vivement avec le
dynamisme exceptionnel des
recettes
fiscales et avec
l'accélération des dépenses publiques en 1999.
Votre rapporteur ne peut que s'interroger sur cette
lenteur
au moment
où s'élaboraient et se négociaient les nouveaux contrats
de plan.
• Ce taux d'exécution prévisionnel de 92 % peut
paraître à certains observateurs "
satisfaisant
".
Néanmoins, même si la comparaison intertemporelle de bilans aussi
approximatifs doit être maniée avec la plus grande réserve,
ce taux d'exécution ressort à un niveau inférieur au taux
d'exécution " officiel " des engagements de l'Etat inscrits
dans les deuxièmes contrats de plan (1989-1993) - entre 94 % et
120 % selon les régions
111(
*
)
-, et ce, alors même que le
taux de croissance annuel moyen sur la période 1994-1999 (+2,2 %
par an
112(
*
)
), fut sensiblement
supérieur à celui atteint au cours de la période 1989-1993
(+1,7 % par an).
En outre, si l'on rapporte ce taux d'exécution au prorata des
années (six au lieu de cinq), et si on en défalque les
crédits de fonctionnement correspondant à l'année 1999 (de
l'ordre de 2 %), on peut estimer que
le taux
d'effort annuel de
l'Etat ressort à 75 % de ses engagements initiaux.
Les Régions sont donc parfaitement fondées à estimer que
" l'Etat n'a pas honoré ses engagements
".
• Au contraire de la situation qui avait prévalu pour les
deuxièmes contrats de plan, le taux d'exécution des engagements
de l'Etat ne diffère toutefois pas significativement d'une région
à l'autre.
L'Etat a donc réparti la pénurie de ses crédits avec
équité
entre les régions.
La DATAR précise d'ailleurs que "
les administrations centrales
étaient très
vigilantes
à cet égard
[
pour éviter des écarts de taux
d'exécution
]. Seul un problème technique pour une grosse
opération pouvait expliquer une différence de taux. Ainsi, la
région Poitou-Charentes voit-elle son taux baisser du fait de la non
réalisation d'une opération ferroviaire que les partenaires
envisageaient dès 1998 de reprendre dans le prochain contrat de plan. De
même, la région Languedoc-Roussillon a un taux inférieur
aux autres du fait du faible degré d'avancement de la RN 88 en
Lozère
".
De même, la Direction du Budget a réparti la pénurie des
crédits entre les ministères. En effet, selon la DATAR,
"
la règle définie pas la Direction du Budget
était que tous les budgets des administrations centrales devaient
contribuer à la réduction du déficit budgétaire.
Les orientations politiques de l'Etat avaient davantage porté sur la
méthode, c'est à dire la déconcentration, que sur la
désignation de priorités en termes de mesures
".
Satisfaisante en équité, ce résultat n'en soulève
pas moins des questions en terme de pertinence économique : ces
réductions de crédit homothétiques ont-elles permis la
mise en oeuvre des dépenses les plus
efficientes
?
• Contrairement à l'Etat, les
Régions
ont
joué le jeu de la contractualisation et ont honoré leurs
engagements.
Certes, les Régions ont vu mécaniquement certaines de leurs
dépenses réduites par le retard des projets mis en oeuvre par
l'Etat, notamment en matière routière. Cela explique que seule
l'Auvergne atteignait à la fin de 1998 un taux d'exécution
supérieur à 100 %.
Néanmoins, pour le reste, les Régions ont en
général mis en place leurs crédits au rythme annuel
prévu. Compte tenu de l'allongement d'un an des contrats, le taux
d'exécution des Régions dépasserait ainsi 100 % dans de
nombreux secteurs.
Les Régions ont en outre largement
dépassé leurs
engagements
dans certains secteurs pour pallier la défaillance de
l'Etat. Par exemple, la Région Picardie s'est substituée à
l'Etat pour répondre aux besoins exprimés par les bailleurs
sociaux.
• Il résulte donc de la défaillance de l'Etat une
distorsion
de
l'équilibre
initial du contrat.
Par exemple, alors que la Région Basse-Normandie devait financer
46,2 % des engagements cumulés de l'Etat et de la Région aux
termes du contrat signé (2,487 milliards de francs sur un total de
5,347 milliards de francs), elle avait mobilisé 52,3 % des
financements mis en place à la fin de 1998 (2,122 milliards de
francs sur un total de 4,056 milliards de francs).
Dans plusieurs Régions, cette distorsion est d'ailleurs
supérieure à ce que suggèrent les chiffres
détaillés supra. En effet que les taux d'exécution
calculés recouvrent des réalités différentes pour
l'Etat et pour la Région en matière d'infrastructures
routières : dans le cas de l'Etat, ces taux s'appliquent à
des crédits engagés ou affectés, tandis que pour les
Régions, ces taux recouvrent le volume des fonds de concours
effectivement versés à l'Etat.
• Ce constat explique les attentes exprimées par les
Régions en termes de
rattrapage
pour les quatrièmes
contrats de plan.
Ce constat soulève aussi deux
questions
interdépendantes :
-
pourquoi
cette défaillance de l'Etat ?
- quelle
portée
reste-t-il aux contrats de plan ?
Ce rapport proposera des éléments de réponse à ces
questions après l'examen détaillé des écarts
d'exécution des contrats de plan entre secteurs.