Service des Affaires européennes
décembre 2004TITRE VIII. L'UNION ET SON ENVIRONNEMENT PROCHE
Article I-57 : L'Union et son environnement proche
1. L'Union développe avec les pays de son voisinage des relations privilégiées, en vue d'établir un espace de prospérité et de bon voisinage, fondé sur les valeurs de l'Union et caractérisé par des relations étroites et pacifiques reposant sur la coopération.
2. Aux fins du paragraphe 1, l'Union peut conclure des accords spécifiques avec les pays concernés. Ces accords peuvent comporter des droits et obligations réciproques ainsi que la possibilité de conduire des actions en commun. Leur mise en oeuvre fait l'objet d'une concertation périodique.
Commentaire
Cet article est nouveau. Il définit les relations entre l'Union européenne et les États qui lui sont voisins, autrement dit la « politique de voisinage » de l'Union.
Aujourd'hui, aucune mention de la politique de voisinage n'existe dans les traités, même si cette politique, lancée par une lettre conjointe du commissaire européen Chris Patten et du Haut Représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune, Javier Solana, en août 2002, a fait déjà l'objet de plusieurs communications de la Commission incluant des propositions saluées et encouragées par le Conseil européen. L'article I-57 donne donc une base juridique à ces initiatives.
Au paragraphe 1, la définition des États concernés est large (États du voisinage), ce qui permet d'inclure des pays n'ayant pas de frontières directes avec l'Union, et les objectifs sont assez généraux, puisqu'il s'agit d'établir un espace de prospérité et de bon voisinage caractérisé par des relations étroites et pacifiques. Une mention est faite des valeurs de l'Union, ce qui permet de prendre pleinement en compte le respect de la démocratie et de l'État de droit, mentionnés dans le Préambule de la Constitution qui dispose également que l'Union se fonde sur les valeurs indivisibles et universelles de dignité humaine, de liberté, d'égalité et de solidarité.
La déclaration n° 11 annexée à la Constitution précise, à propos de cet article, que « l'Union prendra en compte la situation particulière des États de petite dimension territoriale entretenant avec elle des relations spécifiques de proximité. »
Le paragraphe 2 définit les instruments de la politique de voisinage, précisant qu'elle se traduit par la conclusion d'accords spécifiques, dont la mise en oeuvre fait l'objet d'une concertation périodique.
TITRE IX. L'APPARTENANCE À L'UNION
Article I-58: Critères d'éligibilité et procédure d'adhésion à l'Union
1. L'Union est ouverte à tous les États européens qui respectent les valeurs visées à l'article I-2 et s'engagent à les promouvoir en commun.
2. Tout État européen qui souhaite devenir membre de l'Union adresse sa demande au Conseil.
Le Parlement européen et les parlements nationaux sont informés de cette demande. Le Conseil statue à l'unanimité après avoir consulté la Commission et après approbation du Parlement européen, qui se prononce à la majorité des membres qui le composent. Les conditions et les modalités de l'admission font l'objet d'un accord entre les États membres et l'État candidat. Cet accord est soumis par tous les États contractants à ratification, conformément à leurs règles constitutionnelles respectives.
Commentaire
Le paragraphe 1 de l'article I-58 reprend les dispositions du deuxième paragraphe de l'article I-1 (voir à cet article), qui ne modifie pas la substance du droit actuel.
Le paragraphe 2 reprend les dispositions de l'article 49 du traité sur l'Union européenne. Il introduit une information du Parlement européen et des Parlements nationaux sur toute demande d'adhésion à l'Union.
Article I-59: La suspension de certains droits résultant de l'appartenance à l'Union
1. Le Conseil, sur initiative motivée d'un tiers des États membres, sur initiative motivée du Parlement européen ou sur proposition de la Commission, peut adopter une décision européenne constatant qu'il existe un risque clair de violation grave par un État membre des valeurs visées à l'article I-2. Le Conseil statue à la majorité des quatre cinquièmes de ses membres après approbation du Parlement européen.
Avant de procéder à cette constatation, le Conseil entend l'État membre en cause et peut lui adresser des recommandations, en statuant selon la même procédure.
Le Conseil vérifie régulièrement si les motifs qui ont conduit à une telle constatation restent valables.
2. Le Conseil européen, sur initiative d'un tiers des États membres ou sur proposition de la Commission, peut adopter une décision européenne constatant l'existence d'une violation grave et persistante par un État membre des valeurs énoncées à l'article I-2, après avoir invité cet État à présenter ses observations en la matière. Le Conseil européen statue à l'unanimité, après approbation du Parlement européen.
3. Lorsque la constatation visée au paragraphe 2 a été faite, le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, peut adopter une décision européenne qui suspend certains des droits découlant de l'application de la Constitution à l'État membre en cause, y compris les droits de vote du membre du Conseil représentant cet État. Le Conseil tient compte des conséquences éventuelles d'une telle suspension sur les droits et obligations des personnes physiques et morales.
En tout état de cause, cet État reste lié par les obligations qui lui incombent au titre de la Constitution.
4. Le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, peut adopter une décision européenne modifiant ou abrogeant les mesures qu'il a adoptées au titre du paragraphe 3, pour répondre à des changements de la situation qui l'a conduit à imposer ces mesures.
5. Aux fins du présent article, le membre du Conseil européen ou du Conseil représentant l'État membre en cause ne prend pas part au vote et l'État membre en cause n'est pas pris en compte dans le calcul du tiers ou des quatre cinquièmes des États membres prévu aux paragraphes 1 et 2. L'abstention de membres présents ou représentés ne fait pas obstacle à l'adoption des décisions européennes visées au paragraphe 2.
Pour l'adoption des décisions européennes visées aux paragraphes 3 et 4, la majorité qualifiée se définit comme étant égale à au moins 72% des membres du Conseil représentant les États membres participants, réunissant au moins 65% de la population de ces États.
Lorsque, à la suite d'une décision de suspension des droits de vote adoptée conformément au paragraphe 3, le Conseil statue, à la majorité qualifiée, sur la base d'une des dispositions de la Constitution, cette majorité qualifiée se définit de la même manière qu'au deuxième alinéa ou, si le Conseil agit sur proposition de la Commission ou du ministre des Affaires étrangères de l'Union, comme étant égale à au moins 55 % des membres du Conseil représentant les États membres participants, réunissant au moins 65 % de la population de ces États. Dans ce dernier cas, une minorité de blocage doit inclure au moins le nombre minimum de membres du Conseil représentant plus de 35 % de la population des États membres participants, plus un membre, faute de quoi la majorité qualifiée est réputée acquise.
6. Aux fins du présent article, le Parlement européen statue à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés, représentant la majorité des membres qui le composent.
Commentaire
Cet article reprend, pour l'essentiel, les dispositions de l'article 7 du traité sur l'Union européenne, sous réserve des modifications nécessaires pour prendre en compte la nouvelle définition de la majorité qualifiée pour les décisions du Conseil.
Article I-60: Le retrait volontaire de l'Union
1. Tout État membre peut décider, conformément à ses règles constitutionnelles, de se retirer de l'Union.
2. L'État membre qui décide de se retirer notifie son intention au Conseil européen. À la lumière des orientations du Conseil européen, l'Union négocie et conclut avec cet État un accord fixant les modalités de son retrait, en tenant compte du cadre de ses relations futures avec l'Union. Cet accord est négocié conformément à l'article III-325, paragraphe 3. Il est conclu au nom de l'Union par le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, après approbation du Parlement européen.
3. La Constitution cesse d'être applicable à l'État concerné à partir de la date d'entrée en vigueur de l'accord de retrait ou, à défaut, deux ans après la notification visée au paragraphe 2, sauf si le Conseil européen, en accord avec l'État membre concerné, décide à l'unanimité de proroger ce délai.
4. Aux fins des paragraphes 2 et 3, le membre du Conseil européen et du Conseil représentant l'État membre qui se retire ne participe ni aux délibérations ni aux décisions européennes du Conseil européen et du Conseil qui le concernent.
La majorité qualifiée se définit comme étant égale à au moins 72% des membres du Conseil représentant les États membres participants, réunissant au moins 65% de la population de ces États.
5. Si l'État qui s'est retiré de l'Union demande à adhérer à nouveau, sa demande est soumise à la procédure visée à l'article I-58.
Commentaire
Cet article est nouveau. A l'heure actuelle, les traités ne contiennent aucune disposition concernant le retrait volontaire de l'Union. Et, selon l'article 54 de la convention de Vienne sur le droit des traités, conclue le 23 mai 1969, lorsqu'un traité ne contient aucune disposition concernant la dénonciation ou le retrait, ceux-ci ne sont possibles que si toutes les parties y consentent (il est toutefois admis qu'un droit de retrait existe, même en l'absence de disposition expresse, s'il est établi qu'il entrait dans les intentions des parties d'en admettre la possibilité, ou bien si un droit de retrait est déductible de la nature du traité : or, ni l'une ni l'autre de ces conditions ne sont clairement réunies dans le cas de l'Union). De fait, pour que le Groenland puisse sortir de l'Union, en 1985, il a fallu une modification des traités, ratifiée par tous les États membres.
Il est à noter que le retrait de l'Union est uniquement volontaire ; aucune procédure d'exclusion n'existe, même en cas de violation des valeurs de l'Union.
La notification de l'intention de retrait ouvre une période de deux ans durant laquelle un accord doit être conclu entre l'Union et l'État membre souhaitant se retirer, afin de définir les modalités du retrait ; à défaut d'accord, à l'expiration de cette période, le retrait est de droit, sauf si l'État membre et l'Union décident d'un commun accord d'un nouveau délai. L'accord est conclu par le Conseil statuant à la majorité qualifiée (celle-ci se définit dans ce cas comme 72 % au moins des États membres réunissant au moins 65 % de la population des États, l'État membre désirant se retirer n'étant pas pris en compte) après approbation du Parlement européen (statuant à la majorité simple avec tous ses membres, y compris les députés élus dans l'État membre désirant se retirer). Si un État membre ayant quitté l'Union désire adhérer à nouveau à celle-ci, la procédure de droit commun pour les adhésions s'applique.