ADOPTION
Discussion d'une proposition de loi en deuxième lecture
M. le président.
L'ordre du jour appelle la discussion en deuxième lecture de la proposition de
loi (n° 396, 1995-1996), adoptée avec modifications par l'Assemblée nationale
en deuxième lecture, relative à l'adoption. [Rapport n° 423 (1995-1996) et avis
n° 429 (1995-1996).]
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale.
Monsieur le
président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, alors
que nous abordons la seconde lecture de cette proposition de loi, je tiens tout
d'abord à souligner l'importance du travail accompli sur ce sujet si délicat
que constitue l'adoption.
Je voudrais rendre hommage à la commission des lois et à la commission des
affaires sociales du Sénat, et tout particulièrement à leurs rapporteurs, MM.
Luc Dejoie et Lucien Neuwirth, qui ont pris une part décisive dans les
améliorations apportées à ce texte. Je tiens à les en remercier très
sincèrement au nom du Gouvernement.
Au-delà des discussions très riches qui ont nourri jusqu'à présent les débats
au cours de la navette, une volonté commune s'est affirmée de donner à cette
loi relative à l'adoption les moyens de répondre mieux encore à cette exigence
fondamentale que constitue le droit pour l'enfant d'avoir une famille.
Les objectifs qui sous-tendent la proposition de loi - des procédures
d'adoption plus simples, plus sûres et plus justes - sont d'ores et déjà
atteints.
Au-delà des nuances qui ont pu être apportées au texte par chacune des
assemblées, l'essence même de celui-ci et l'équilibre entre les volets civil et
social sont restés intacts.
Quelques points seulement appellent encore une discussion, sur lesquels je
voudrais faire de brèves observations.
Je commencerai par le volet juridique du texte.
S'agissant, en premier lieu, de l'assouplissement des conditions requises pour
prononcer une adoption, votre commission des lois ne souhaite pas que soit
exigé un écart d'âge maximum entre adoptants et adoptés.
Des hésitations sont en effet permises dans la mesure où une telle règle peut
apparaître trop rigide, mais il est vrai que l'intérêt de l'enfant est de ne
pas avoir de parents trop âgés. La question reste donc ouverte.
En revanche, je suis sensible, malgré la difficulté qu'il y a à fixer la durée
du délai de rétractation du consentement à l'adoption, aux arguments militant
en faveur de son abaissement à deux mois.
Je crois que cette démarche procède de la recherche d'un équilibre entre des
intérêts divergents. J'aurai l'occasion de m'en expliquer à nouveau au cours
des débats.
S'agissant en second lieu des dispositions tendant à revaloriser l'adoption
simple, j'approuve pleinement le choix de votre commission des lois de
maintenir tel quel l'âge limite de l'adoption plénière, tant il est vrai que la
période postérieure à l'adolescence est le champ d'application privilégié de
l'adoption simple.
Reste la question de la terminologie en vigueur pour ce type d'adoption. Votre
commission des lois ne souhaite pas la modifier. Sur ce point également le
Gouvernement reste très ouvert.
En ce qui concerne la question du secret de l'identité, j'observe avec
satisfaction que votre commission des lois a estimé devoir expliciter le
contenu et les conséquences à l'égard de l'enfant du principe, posé à l'article
30 de la présente proposition de loi, de lever le secret initialement
demandé.
Je m'interroge en revanche sur le seuil de l'âge de treize ans qui a été
introduit dans le même article.
Je crois en effet que le critère de l'âge doit être réservé aux seuls cas où
le mineur doit consentir à un acte modifiant son statut juridique. Il semble
donc que la communication des renseignements le concernant pourrait être plus
logiquement subordonnée au critère de l'aptitude au discernement, tel que
retenu par la convention internationale des droits de l'enfant.
Reste enfin un dernier point auquel, vous le savez, le Gouvernement attache
une importance particulière : je veux parler de l'introduction d'une norme de
conflit de lois relative à l'adoption d'enfants étrangers.
Je partage pleinement le point de vue adopté par votre commission des lois à
cet égard.
En effet, au-delà de tous les arguments d'ordre juridique, l'affirmation pure
et simple de la suprématie de la loi française sur la loi du pays d'origine de
l'enfant, lorque celle-ci prohibe l'adoption, pourrait conduire à donner aux
mineurs concernés un statut différent en France et dans son pays d'origine, et
ouvrir ainsi la voie à des trafics illicites.
La loi pourrait alors être détournée de sa finalité, ce que, à l'évidence
personne ne souhaite. Le Gouvernement soutiendra, par conséquent, l'amendement
de suppression de l'article 15 déposé par votre commission des lois.
Concernant, à présent, le volet familial de la proposition de loi, je
souhaiterais revenir un instant sur les avancées du texte que nous examinons
aujourd'hui.
Je voudrais, tout d'abord, rendre hommage aux travaux de la Haute Assemblée.
Vos réflexions ont été guidées, mesdames, messieurs les sénateurs, par le souci
de favoriser l'adoption de tous les enfants, mêmes grands ou supposés
difficilement adoptables en raison de leur état de santé, de leur handicap ou
de leur origine ethnique.
S'agissant de la simplification et de l'assouplissement des procédures pour
les candidats à l'adoption, un accord s'est déjà dégagé sur l'abaissement de
l'âge minimum et, en cas d'adoption conjointe, sur la durée du mariage requise
pour adopter, ainsi que sur la reconnaissance de la validité nationale de
l'agrément.
Je souhaite néanmoins m'arrêter un instant sur la procédure de délivrance de
l'agrément, et notamment sur le point de savoir s'il est préférable qu'il soit
exprès ou tacite.
Le Gouvernement partage à l'évidence avec votre assemblée le souci de réduire
les délais dans ce domaine, car ceux-ci constituent une épreuve pour les
adoptants, et il faut faire en sorte que les échéances fixées soient
respectées. Il ne faudrait pas, en revanche, qu'elles se transforment en
couperet, et que les agréments délivrés dans ces conditions, sans que les
enquêtes sociales et médicales aient été réalisées, entraînent un refus des
orphelinats étrangers de confier des enfants, dans la mesure où certains pays
attachent plus de prix aux enquêtes qu'à l'agrément lui-même.
Il ne me semble pas, du reste, qu'il y ait en matière de délais des
difficultés qui appelleraient une modification de la procédure. Je ne suis
qu'exceptionnellement saisi sur ce point particulier, et pour des cas ponctuels
demandant une instruction plus longue compte tenu de leur complexité.
Le Gouvernement considère que l'agrément tacite n'est sans doute pas l'élément
de procédure le mieux adapté aux circonstances de l'adoption.
Je m'engage, cependant, à tenir le plus grand compte de votre préoccupation de
clairement définir les étapes de la procédure.
Je voudrais, enfin, revenir un instant sur le principe de la parité des droits
sociaux en matière de prestations aux adoptants.
Je tiens à saluer tout particulièrement le travail de la commission des
affaires sociales et de son rapporteur sur ce sujet. Vous avez, monsieur le
rapporteur, très précisément traduit les conséquences juridiques et
administratives de ce souci de parité et je voudrais vous en remercier.
Vous contribuez également, aujourd'hui, à faire avancer de manière décisive la
parité des droits sociaux entre mères adoptantes non salariées et mères
adoptantes salariées. Il est vrai qu'aujourd'hui les premières sont moins
indemnisées que les secondes.
MM. Claude Huriet, Jean-Louis Lorrain et Jacques Machet avaient attiré
l'attention du Gouvernement sur ce sujet complexe à l'occasion de la première
lecture. Nous avons depuis lors travaillé en étroite collaboration avec votre
commission des affaires sociales pour parvenir à une solution satisfaisante.
C'est, je crois, chose faite aujourd'hui avec l'amendement que vous soumettra
votre rapporteur pour avis, M. Neuwirth.
Cette nouvelle disposition, si elle est adoptée, comme je le souhaite, portera
donc à un même niveau les indemnisations versées à l'occasion d'une adoption
dans les deux régimes, salariés et non salariés.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Très bien !
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Le Gouvernement s'engagera, par ailleurs, à allonger
par voie réglementaire la durée de versement des indemnités forfaitaires
journalières des mères adoptantes non salariées de trente jours en cas
d'adoptions multiples, comme cela existe déjà en cas de naissances multiples
pour les mères biologiques non salariées.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, les quelques précisions que je
voulais d'ores et déjà porter à votre connaissance avant que s'engage le débat
en deuxième lecture, devant la Haute Assemblée, de cette proposition de loi.
(Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et
de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du
suffrage universel, du règlement et d'administration générale.
Monsieur le
président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, au cours de la
deuxième lecture de cette proposition de loi relative à l'adoption, je
reprendrai les propos que j'ai tenus lors de la première lecture : ce texte a
pour objet de rendre les conditions et les procédures d'adoption plus simples,
plus sûres et plus justes, sans remettre en cause, bien évidement, les
principes fondamentaux qui la régissent.
Je l'ai dit à plusieurs reprises, il s'agit avant tout un texte d'adaptation,
même si une ou deux avancées significatives ont été proposées entre-temps par
l'Assemblée nationale. Elles ont d'ailleurs été soulignées à l'instant par M.
le secrétaire d'Etat.
D'autres points, même s'ils ne figurent pas explicitement dans le texte, ont
été l'objet de la réflextion de notre Haute Assemblée en première lecture.
De manière générale, ce qui importe avant tout, c'est l'enfant, et lui seul.
D'autres considérations sont dignes d'attention, mais elles passent bien après
l'intérêt de l'enfant, nous devons le rappeler. A cet effet, il importe de
faire en sorte que toute la procédure d'adoption soit plus simple et plus
compréhensible, comme nous devons faire en sorte aussi que l'enfant adopté soit
le plus possible assimilé aux autres enfants.
Ces principes ont été présents à l'esprit non seulement de nos commissions,
mais aussi du Sénat tout entier.
Comme lors de la première lecture, la commission des lois s'intéressera au
titre premier, qui modifie le code civil, tandis que le reste du texte sera
traité par la commission des affaires sociales et par son rapporteur, M. Lucien
Neuwirth. Mais le rapporteur au fond que je suis vous demandera, bien
évidemment, d'adopter les amendements qui seront présentés par M. le rapporteur
pour avis.
A l'issue des lectures qui ont eu lieu à l'Assemblée nationale et au Sénat,
dix-sept articles demeurent en discussion sur le titre premier. Ce chiffre peut
paraître important, mais il recouvre un certain nombre de modifications
formelles qui ne devraient pas susciter de difficultés majeures.
Certaines dispositions nouvelles ont été introduites par l'Assemblée
nationale. Elles sont, au yeux de la commission des lois, tout à fait
judicieuses. Je pense par exemple à la sanction possible du parent naturel qui
n'informe pas l'autre parent de son changement d'adresse. S'agissant de
l'exercice de droit de visite, cela peut évidemment poser des problèmes ! Je
pense également à l'information du parent qui a reconnu l'enfant le premier en
cas de reconnaissance par le second parent. Le simple bon sens nous fait
approuver une telle disposition.
L'Assemblée nationale a par ailleurs supprimé trois dispositions introduites
par le Sénat qui avaient pour objet d'inscrire dans le code civil la faculté de
recueillir des renseignements non identifiants - j'utilise cette expression
parce qu'il faut bien l'employer, affreuse soit-elle, je le répète pour la
énième fois - auprès des parents qui remettent leur enfant aux fins d'adoption,
en demandant le secret de leur identité. Cette possibilité de recueillir et
consigner des éléments dits non identifiants constitue, à mon sens, une avancée
essentielle. Elle existait peut-être dans la pratique, mais elle n'avait pas de
base légale.
La Haute Assemblée avait voulu solenniser cette possibilité - sinon
révolutionnaire, du moins très nouvelle - en l'inscrivant dans le code civil.
L'Assemblée nationale s'y est cependant refusée, au nom d'une logique qui
m'échappe. Quoi qu'il en soit, nous ne nous battrons pas sur ce thème.
L'absence de mention dans le code civil se traduira par une moindre solennité,
mais cela n'a guère d'importance.
Je vous proposerai, en revanche, de reprendre certaines des positions que nous
avions prises en première lecture, notamment en supprimant l'introduction d'une
différence d'âge maximale entre l'adoptant et l'adopté, qui est inutile et ne
peut présenter que des inconvénients. En première lecture, l'Assemblée
nationale proposait de fixer cette différence d'âge à quarante-cinq ans ;
aujourd'hui, elle nous propose de la porter à cinquante ans. Cela nous paraît
inutile, nous vous proposerons donc de revenir au texte actuel, qui ne prévoit
aucun écart d'âge maximal, et donc de supprimer l'article 3.
Se pose aussi la question de la réduction du délai de rétractation du
consentement à l'adoption, que l'Assemblée nationale avait fixé initialement à
six semaines. Nous avions expliqué que c'était trop court, parce que, pendant
ce bref délai, la mère pouvait être malade ou se trouver dans des conditions
physiques ou morales telles qu'elle pouvait ne pas avoir le temps suffisant
pour prendre sa décision en pleine connaissance de cause.
J'avais proposé, au nom de la commission des lois, de porter ce délai à deux
mois. Le Sénat m'avait largement démenti et avait choisi d'en rester au délai
actuel de trois mois. L'Assemblée nationale a repris les deux mois initialement
proposés par la commission des lois. Je n'aurai pas l'outrecuidance de chercher
à violer la Haute Assemblée, en quelque sorte, et je m'en tiendrai aux trois
mois qu'elle a retenus en première lecture. Nous verrons bien comment les
choses se passeront ultérieurement en commission mixte paritaire ! Au
demeurant, j'indique dès à présent que j'espère que nous aboutirons alors à un
heureux résultat.
Par ailleurs, sur un sujet que M. le secrétaire d'Etat a évoqué, la question
de l'adoption internationale, le texte adopté par l'Assemblée nationale conduit
non seulement à donner une sorte d'encouragement aux trafics d'enfants, mais
encore à nier les principes du droit international privé. Comment imaginer
pouvoir, dans un Etat de droit comme le nôtre, dans un pays qui respecte le
droit international, affirmer purement et simplement dans notre législation
que, si un autre pays ne reconnaît pas l'adoption, voire la prohibe, le juge
français passera outre ? Il est difficile de l'accepter pour un juriste, ne
serait-ce qu'au nom du simple bon sens, d'autant plus, comme cela a déjà été
rappelé en première lecture, qu'une jurisprudence récente de la Cour de
cassation règle pour l'instant au cas par cas la quasi-totalité des
difficultés.
Le droit est évolutif, les lois sont évolutives ; nous verrons bien, dans
quelques années, s'il n'est pas possible de faire mieux. Aujourd'hui, nous
disposons d'un moyen pragmatique pour nous en sortir - je vous prie de me
pardonner cette expression triviale - et je considère qu'il vaut mieux s'en
tenir à ce moyen.
La question de l'agrément administratif avait entraîné quelques difficultés.
Celles-ci sont levées et nous proposerons une rectification purement formelle,
qui ne devrait pas poser de problème.
De fait, il reste peu de points importants parmi les divergences qui
subsistent entre l'Assemblée nationale et le Sénat.
Un accord est en effet intervenu pour le recueil facultatif des éléments dits
non identifiants ainsi que pour l'accès de l'enfant à ces informations dès sa
minorité, avec l'accord de son représentant légal, ce qui est tout à fait
légitime. Il en va de même, en cas de remise de l'enfant aux fins d'adoption,
de la limitation à un an de la possibilité pour les parents biologiques de
demander l'anonymat. C'est également une question de bon sens. On ne peut pas
demander l'anonymat alors que l'enfant a quatre ou cinq ans, car il a non
seulement constitué des souvenirs mais aussi établi des relations avec ses
parents adoptifs. Pendant les douze premiers mois de sa vie, l'anonymat peut
sans doute être respecté ; nous l'avions proposé, cela a été accepté en
première lecture par le Sénat.
Il n'y a donc plus de difficultés en la matière, sous réserve de préciser,
comme le Sénat l'avait souhaité en première lecture, que l'accès aux éléments
non identifiants ne sont ouvert qu'au mineur de treize ans.
L'Assemblée nationale a introduit en deuxième lecture une disposition qui nous
semble devoir être retenue : le parent qui demande le secret de son identité
doit être informé qu'il lui est possible de renoncer ultérieurement à ce
secret. L'enfant devenu majeur pourra alors, s'il le demande, connaître
l'identité de ses parents biologiques.
Cette disposition n'était pas juridiquement nécessaire puisque, en vertu des
principes généraux du droit, une personne est toujours en droit de renoncer à
une protection juridique dont elle a demandé à bénéficier. Celui qui avait
demandé le secret a donc toujours la possiblité de renoncer à ce secret ! Cela
étant, si chacun est supposé connaître la loi, ce n'est pas forcément évident
pour tout le monde et, en l'inscrivant dans la loi, ce sera peut-être plus
clair. Cela permettra également de préciser dans quelle mesure l'enfant peut,
s'il le souhaite, accéder à l'identité de ses parents lorsque ceux-ci ont levé
le secret.
La commission des lois souhaite cependant compléter ce dispositif. Supposons
qu'un enfant abandonné, dont les origines sont inconnues, ait fait l'objet
d'une adoption. Si ses parents biologiques, par la suite, renoncent au secret
de leur identité, cela nous paraît tout de même la moindre des choses que les
parents adoptifs, qui élèvent et voient grandir l'enfant, en soient informés,
ne serait-ce que pour préparer l'enfant à recevoir ou à demander - puisqu'il
doit la demander - cette information.
En conclusion, sous réserve des quelques modifications que nous vous proposons
et des quelques réserves que je viens d'exprimer, la commission des lois vous
demande d'adopter la présente proposition de loi.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales.
Monsieur le
secrétaire d'Etat, mes chers collègues, à l'issue de la première lecture du
présent texte, qui a eu lieu les 23 et 24 avril 1996, ici même en séance
plénière, il restait trente-quatre articles en discussion concernant les quatre
titres pour lesquels votre commission des affaires sociales était saisie pour
avis, soit, respectivement, le titre II modifiant le code de la famille et de
l'aide sociale, le titre III relatif à la sécurité, sociale, le titre IV
concernant le code du travail et le titre V portant sur les autres
dispositions. Sur ces trente-quatre articles encore en navette, la moitié
concernait le seul titre II.
Compte tenu des dispositions adoptées par l'Assemblée nationale en deuxième
lecture, le 30 mai 1996, ne restent plus soumises à l'examen de la Haute
Assemblée que vingt dispositions, dont un article additionnel, pour quinze
articles conformes. Ces quinze articles se trouvent essentiellement dans les
parties relatives au code de la sécurité sociale, au code du travail - ce titre
ayant été adopté totalement conforme - et aux autres dispositions où ne
subsiste plus qu'un seul article en discussion.
Voyons quelles sont les dispositions adoptées par l'Assemblée nationale en
deuxième lecture.
Elles ont trait essentiellement au titre II relatif au code de la famille et
de l'aide sociale. Certes, l'Assemblée nationale a entériné un certain nombre
des apports de votre commission des affaires sociales, mais en y apportant des
précisions ou des modifications rédactionnelles.
On relève également des divergences d'appréciation entre l'Assemblée nationale
et la Haute Assemblée, à propos notamment de l'agrément tacite, que l'Assemblée
nationale a supprimé. De même, celle-ci a rétabli la notion de mineur capable
de discernement, ainsi que la mise à la charge des conseils généraux du
remboursement des salaires des représentants des associations non membres de
l'UNAF, l'Union nationale des associations familiales, au sein des commissions
d'agrément et la création d'une prestation destinée à aider les assistantes
maternelles qui adoptent.
Parallèlement, en cohérence avec les dispositions qu'elle a adopté au titre
Ier relatif au code civil, l'Assemblée nationale n'a pas rétabli le délai de
rétractation qu'elle avait fixé initialement à six semaines. Comme l'a indiqué
notre collègue Luc Dejoie, elle a opté pour un délai de deux mois.
Toutefois, une seule disposition véritablement nouvelle a été introduite en
deuxième lecture par l'Assemblée nationale. Cette disposition mentionne,
explicitement, que, lors de l'établissement du procès-verbal, la personne qui
demande le secret de son identité lorsqu'elle remet un enfant au service d'aide
sociale à l'enfance doit être informée de la possibilité de faire connaître
ultérieurement celle-ci. Cette identité ne pourra alors être communiquée qu'à
l'enfant majeur et sur demande expresse de ce dernier. Cette précision semble
utile à votre commission des affaires sociales, qui estime, toutefois, que le
texte initial ne l'excluait pas. Mais si cela va sans dire, cela va peut-être
mieux en le disant !
S'agissant des dispositions relatives au code de la sécurité sociale, nous
constatons avec satisfaction que l'Assemblée nationale a repris, à une
différence minime près, la rédaction de l'article posant le principe de la
parité d'accès aux droits sociaux entre naissance et adoption qu'avait
initialement proposée la commission des affaires sociales. Elle a enfin
réintroduit le principe de prêts par les régimes de prestations familiales pour
faciliter l'adoption d'enfants à l'étranger.
Quelles sont les propositions de la commission des affaires sociales ?
S'agissant précisément de ces prêts, la commission des affaires sociales n'a
pas suggéré elle-même leur suppression. Cependant, elle ne trouve pas opportun
de créer, comme M. le secrétaire d'Etat à la santé et à la sécurité sociale l'a
fort justement dit, le 30 mai 1996, à l'Assemblée nationale, une prestation
familliale qui viendra s'ajouter aux vingt-sept déjà existantes. Elles ne
souhaite toutefois pas que cette suppression que propose aujourd'hui le
Gouvernement soit mal comprise et mal interprétée, comme cela avait pu être le
cas en première lecture alors qu'un triple souci la motivait : celui de ne pas
privilégier l'adoption d'enfants à l'étranger par rapport à celle des pupilles
de l'Etat dont une majorité n'est pas adoptée ; celui de ne pas rendre encore
plus complexe le régime des prestations familiales ; celui, enfin, de ne pas
contrevenir au principe d'égalité des droits sociaux entre naissance et
adoption qu'elle venait d'établir.
A ce point du débat, je veux indiquer que deux approches différentes se
dégagent entre le rapporteur de la commision spéciale de l'Assemblée nationale
et nous-mêmes.
Nous pensons que la priorité essentielle est de donner une famille à un
enfant, d'où notre choix de tout faire pour raccourcir les délais de trop
longues procédures qu'il convient de simplifier, afin que, d'atermoiements en
lenteurs excessives, on ne retarde plus abusivement l'âge auquel un enfant est
enfin déclaré adoptable.
Nous devons tout faire également pour éviter que certains établissements
d'accueil ne deviennent, de fait, des parkings payants - et bien payés - pour
enfants abandonnés et pour que soient rigoureusement contrôlées les raisons
avancées pour les déclarer inadoptables.
De telles attitudes et des délais d'adoption qui durent parfois cinq ans
conduisent tout droit à l'adoption d'enfants étrangers trop souvent à travers
des opérations mercantiles.
A cet égard, je conteste les déclarations du rapporteur à l'Assemblée
nationale et publiées au
Journal officiel,
à la page 3670 : « Nous
abordons là l'un des points de désaccord avec nos collègues sénateurs. Ceux-ci
ont en effet supprimé la possibilité d'accorder à des couples qui souhaitent
adopter un enfant à l'étranger des prêts destinés à faciliter cette adoption,
au motif qu'il est souhaitable de favoriser l'adoption d'enfants français
puisque, de ce fait, deux tiers des enfants adoptables ne sont pas adoptés.
»
Nous sommes encore moins d'accord avec lui quand il dit : « Un tel
raisonnement est tout à fait recevable, sauf qu'il faut prendre en compte que,
parmi ces enfants adoptables mais non adoptés, il y a une très grande
proportion d'enfants handicapés. Si l'on avait poussé la logique jusqu'à terme,
il aurait donc fallu faire en sorte que l'aide sociale facilite l'adoption
d'enfants handicapés. »
« Par conséquent - conclut le rapporteur à l'Assemblée nationale je ne crois
pas que l'on puisse aujourd'hui refuser un prêt à des couples souhaitant
adopter des enfants à l'étranger au motif qu'il existe des enfants adoptables
en France, mais des enfants dits "à particularités". »
Je conteste avec la dernière énergie de tels propos. En effet, je ne connais
pas de statistiques qui donnent des indications aussi alarmistes concernant les
enfants pupilles de l'Etat en France, Mais peut-être M. le secrétaire d'Etat
possède-t-il des informations plus précises à ce sujet. Quoi qu'il en soit, il
me semble faux de prétendre que, parmi les deux tiers des enfants qui ne sont
pas adoptés, une grande partie sont des handicapés.
Compte tenu des conditions d'adoption actuelles, et s'il s'agit simplement,
pour un couple, de trouver un enfant, il est bien plus aisé de le chercher à
l'étranger, sur un autre continent, plutôt que d'attendre, peut-être en vain,
cinq ans pour être autorisé à adopter en France.
Le challenge, c'est de savoir si nous aurons la capacité, le courage de
bousculer des situations établies, pour ne pas dire sclérosées, si nous serons
capables d'avoir le sursaut salvateur qui poussera nos administrations
préfectorales, sociales, ministérielles à faire passer le souffle qui balaiera
les conformismes paralysants pour qu'enfin on ne se contente plus de « déplorer
» que les deux tiers des enfants abandonnés ne sont pas adoptés parce qu'ils ne
sont pas administrativement déclarés adoptables.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Très bien !
M. Lucien Neuwirth,
rapporteur pour avis.
En revanche, toujours sur le titre III, la
commission souhaite reprendre à son compte un amendement que M. Claude Huriet
avait déposé en première lecture et portant sur l'accroissement de la durée de
cessation d'activité indemnisée pour les femmes adoptantes exerçant une
profession libérale. Elle estime parachever ainsi la réforme de la couverture
maternité des femmes exerçant une profession libérale qu'elle avait initiée,
par voie d'amendement, lors de la loi relative à la famille du 25 juillet
1994.
Elle considère, d'ailleurs, que c'est également la volonté du Gouvernement,
qui vient de confirmer, si j'ai bien compris, son intention d'améliorer les
dispositions actuelles.
L'essentiel des propositions de la commission des affaires sociales concerne
le titre II.
Tout d'abord, en cohérence avec la commission des lois saisie au fond, la
commission des affaires sociales propose, pour le temps de rétractation, de
revenir au délai actuel, qui avait été adopté par la Haute Assemblée en
première lecture, à savoir trois mois, et de réintroduire la notion de mineur
âgé de plus de treize ans.
S'agissant du principal apport de l'Assemblée nationale en deuxième lecture, à
savoir la possibilité pour la personne qui a demandé le secret de son identité
de lever celui-ci, la commission, si elle est bien entendu d'accord sur le
principe, a souhaité lui apporter quelques compléments.
Tout d'abord, il lui a semblé de bon sens que les parents adoptifs, sans que
leur soit révélée l'identité de la personne qui lève le secret, sachent si
ledit secret a été levé.
Ensuite, il convient de se demander s'il faut limiter au seul enfant la
connaissance de cette identité, dans la mesure où la commission d'accès aux
documents administratifs, la CADA, s'est prononcée récemment en faveur de la
communication du dossier d'un pupille de l'Etat décédé à ses ayants droit
majeurs. Elle vous propose donc de suivre cette jurisprudence récente.
Par ailleurs, l'Assemblée nationale n'ayant pas précisé les modalités de
conservation de l'identité ainsi révélée - alors qu'il s'agit d'un
renseignement essentiel - la commission vous propose de faire comme pour les
autres renseignements, les conserver sous la responsabilité du président du
conseil général.
La commission des affaires sociales a également souhaité rétablir la formule
de l'agrément tacite dans la mesure où elle estime que cette disposition
pourrait être une sauvegarde des droits des futurs adoptants et qu'il convient
de contraindre l'administration à faire diligence.
A ce sujet, monsieur le secrétaire d'Etat, j'ai pris acte de votre désir de
raccourcir ces procédures. C'est, en fin de compte, ce qui avait motivé le
choix de la majorité de la commission d'aller dans le sens de l'agrément
tacite.
Enfin, la commission des affaires sociales, fidèle à son attitude en première
lecture, a voulu ne pas infliger de charges supplémentaires aux conseils
généraux, qu'il s'agisse de la rémunération de certains membres des commissions
d'agrément ou de la création d'une nouvelle prestation pour les assistantes
maternelles qui adoptent.
La commission des affaires sociales vous demande donc, mes chers collègues,
d'adopter la partie de ce texte pour lequel elle était saisie pour avis, sous
réserve de ses observations et des amendements qu'elle a déposés.
(Très bien
! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants
et de l'Union centriste.)
M. le président.
La parole est à M. Sérusclat.
M. Franck Sérusclat.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
j'affirme que je suis en plein accord avec mon collègue M. Dejoie sur un point.
Mais cet accord implique un désaccord tout aussi déterminé sur les conséquences
qui en découlent.
Je suis en accord complet sur ce qui est important, l'enfant, et donc en
désaccord complet sur le fait qu'il ne puisse pas connaître son identité
d'origine. Le texte nous revient, en effet, presque comme si l'on n'en avait
pas débattu dans cette enceinte.
Sur les points importants, l'Assemblée nationale semble avoir retenu ses
positions sans tenir compte de nos propositions. Qu'elle n'ait pas tenu compte
de celles des socialistes, on peut l'admettre à la rigueur, ; mais qu'elle
n'ait pas tenu compte de celles qui émanaient d'autres groupes, c'est bien plus
contestable.
Je m'associerai bien entendu aux discussions sur ces points-là. Mais vous
comprendrez bien que, pour nous, la défense de l'intérêt des enfants est
primordiale.
Depuis le 24 mai, date de la discussion en première lecture par le Sénat, les
enfants adoptés nous ont d'ailleurs inlassablement fait part de leurs
souffrances et de la nécessité, pour eux, de connaître leur identité pour
pouvoir construire leur personnalité. Ils n'ont pas pour autant mis en cause
leur insertion dans la famille qui les avait adoptés.
Je crois que là, nous nous heurtons vraisemblablement à une vision un peu trop
« adultocentriste ». Tous les parents adoptants ne partagent pas ce point de
vue, mais certains souhaitent effectivement qu'il n'y ait pas de risque, comme
ils disent.
Curieusement, ces adoptants-là sont souvent ceux qui souhaitent adopter un
enfant très jeune comme si c'était pour eux un moyen de masquer leur stérilité.
Leur vécu s'accommode donc très bien de l'expression « né de », qui est un
non-sens, une faute légale, que l'Assemblée nationale a pourtant maintenue.
Il est inadmissible de considérer qu'un enfant est « né de » parents adoptifs.
L'expression « fils de » aurait été beaucoup plus satisfaisante. C'est là un
point fort, et il est tout à fait dommage de ne pas avoir eu l'audace de
déverrouiller le secret, d'autant qu'il le sera forcément par l'application et
le respect de conventions internationales, en particulier celles qui donnent le
droit à l'enfant d'avoir connaissance de ses origines.
De plus, la pratique de plus en plus répandue d'enfants non français crée
immédiatement une différence. Il est évident que certains enfants n'ont pas
besoin de longs discours pour comprendre que leurs parents sont des parents
adoptifs. On va donc se trouver dans cette situation insupportable avec, d'un
côté, des enfants privés du droit de connaître leur identité d'origine et, de
l'autre, des enfants qui les connaîtront et que des parents adoptifs emmèneront
même dans leur pays d'origine pour la découvrir. J'ai récemment connu le cas de
parents qui, ayant adopté deux petites Indiennes, ont trouvé tout à fait normal
de les conduire en Inde.
Je vous remercie en tout cas, monsieur le rapporteur de la commission des
lois, d'avoir insisté sur ce trompe-l'oeil, sur cette redondance, qui consiste
à introduire dans une loi une autorisation qui existe déjà. Cela traduit un
comportement que je ne qualifierai pas de malhonnête, le mot serait trop fort,
mais qui n'est ni strict ni régulier. En effet, cela revient à faire croire
qu'on donne une possibilité nouvelle alors qu'on sait bien qu'elle est du seul
ressort de l'intéressé, s'il a laissé des éléments secrets permettant de
connaître son identité. Or il ne reviendra sûrement pas, même s'il le peut, car
le désir de l'oubli est fort aussi. Alors que nos collègues croient avoir
ouvert une porte, il s'agit en définitive d'un faux-semblant, et je vous
remercie de l'avoir indiqué.
Mon point de désaccord le plus fort porte sur les notions non identifiantes.
En effet, il est bien évident qu'on ne peut pas identifier par des indications
non identifiantes. Par conséquent, monsieur le rapporteur, il ne faut pas
espérer qu'il s'agit là d'une ouverture utile : c'est aussi une fausse
ouverture.
Je ne m'étendrai pas sur l'article 15. Je laisse à Mme Monique ben Guiga, qui
est plus au fait de ces problèmes internationaux, le soin de développer cet
article, qui serait la consécration dans la loi de la jurisprudence de la Cour
de cassation. Mais nous savons combien la jurisprudence est aléatoire et
combien elle peut varier. Sur ce point encore, il nous faudra bien de toute
façon honorer nos signatures en toute clarté.
La disposition relative à la réduction des délais de rétractation du
consentement à l'adoption serait presque amusante si toutefois ce domaine-là
prêtait à sourire. Ramené de trois mois à deux mois par l'Assemblée nationale,
au lieu de six semaines en première lecture, nous souhaitons lui conserver sa
durée actuelle de trois mois.
En langage vulgaire, on appelle cela des discussions de marchands de tapis !
Ce n'est pas sérieux pour des législateurs tels que nous sommes. Je crois que
trois mois sont effectivement nécessaires pour éviter, comme vous l'évoquiez
tout à l'heure, que des incidents n'interviennent. Il faut surtout du temps
pour l'accompagnement psychologique, pour que s'estompe ce moment tragique et
que la relation maternelle puisse à nouveau jouer. Ce délai permet, en un mot,
une relative tranquillité.
Au fond, ce texte donne l'impression qu'on veut aller plus vite mais, pour
moi, cela n'est peut-être pas le plus important. Dans des circonstances que je
me permettrai d'évoquer rapidement, les décisions prises ou non à l'occasion de
ce texte créent surtout, chez moi, un sentiment d'incertitude et d'inquiétude.
Au risque peut-être de froisser certains de mes collègues, d'en irriter
d'autres, peut-être même de me tromper, je crains effectivement que deux
d'entre elles surtout ne soient portées par un souci de moraliser la
société.
Pourquoi avoir exclu les concubins ? L'union spontanée d'un couple serait-elle
a priori
chargée de difficultés ? N'aurait-elle pas des chances de
pérennité, de fidélité ? Actuellement, un enfant sur trois naît chez un couple
de concubins. La légitimité du mariage n'est-elle pas surtout un moyen
d'organiser les incidents, notamment le divorce, puisqu'il est plus facile de
respecter ou de protéger l'enfant dans ce cas-là ? Pourquoi une telle exclusion
alors que l'on a accepté le recours à la procréation médicalement assistée pour
les concubins ? Il est vrai que l'intervention de Mme Missoffe avait été
particulièrement émouvante à cette occasion et peut-être a-t-elle été
déterminante ?
L'exclusion de droit à laquelle on parvient pour l'adoption amorce peut-être
une réflexion et une tentative de moralisation. Ne faut-il pas, d'une façon ou
d'une autre, punir celui qui a fauté, lui ou ses descendants ?
Et si, aujourd'hui, rien d'autre ne laissait percer une telle tentation, un
tel désir de moralisation ? Dans certains domaines, peut-être notre société
est-elle aujourd'hui quelque peu débridée ? Mais elle a des lois ; il faut
qu'elle sache les appliquer.
Je ne vais pas revenir sur le choix entre zygote et embryon. Selon M. Mattei
lui-même, on ne sait pas quand le zygote devient embryon, ni quand l'embryon
devient foetus. En revanche, on sait fort bien - et je n'ai jamais discuté
cette interprétation - que la vie commence quand le spermatozoïde entre dans
l'ovocyte ; mais il n'y a pas de personne encore. Ce sont ces éléments-là qui
s'ajoutent à cette première inquiétude.
J'en viens à la seconde. Tout récemment, un préfet, parce qu'il était
chrétien, a interdit une activité musicale. Pouvait-il exciper de cette qualité
? C'est déjà une interprétation de son rôle dans le contexte que j'évoquais.
Monseigneur Lustiger a également fait part, dans une publication, de son
inquiétude face à ce qu'il considère comme une situation grave : le fait que la
loi civile prime sur la loi morale.
Existent aussi aujourd'hui des tentations, peut-être nécessaires, de
réglementer Internet, notamment en matière de pédophilie. Mais nous savons fort
bien que le code pénal permet d'ores et déjà d'intervenir effectivement.
Veut-on trouver tout à coup dans Internet des choses choquantes, comme
aujourd'hui on trouve des photos choquantes ? Qui détermine qu'elles sont
choquantes ?
Nous entrons dans une démarche qui pourrait être interprétée, je reste très
prudent, comme le souhait non seulement de moraliser mais également de faire en
sorte que la France soit effectivement la fille aînée de l'Eglise.
M. Emmanuel Hamel.
Elle l'est !
M. Franck Sérusclat.
Aujourd'hui, nous avons une inquiétude dernière à cause du débat qui vient
d'être engagé en Espagne. En effet, le Premier ministre, qui a rencontré le
responsable diocésain de l'éducation, envisage de réintroduire l'enseignement
religieux obligatoire à l'école.
Ce ne sont peut-être là que billevesées d'une personne qui s'inquiète à tort,
mais je le dis d'autant plus facilement que si nous sommes dans un espace
confidentiel, nos débats auront quand même des répercussions nationales, ne
serait-ce que par le
Journal officiel
!
Telles sont les remarques que je voulais présenter. Si aucun des amendements
qui ont été déposés par le groupe socialiste n'est adopté, nous ne voterons pas
ce texte, malgré l'intérêt qu'il présente, en raison des lacunes qu'il contient
et des inquiétudes qu'il suscite.
M. Emmanuel Hamel.
Nous le regretterons !
M. le président.
La parole est à Mme ben Guiga.
Mme Monique ben Guiga.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues,
cette proposition de loi, telle qu'elle nous revient de l'Assemblée nationale,
est décevante, à deux titres au moins.
Elle reste trop centrée sur les adultes, sur la volonté de répondre
prioritairement au désir d'enfant de couples malheureusement frappés par la
stérilité. La rupture, voulue trop précoce, des liens avec les parents
biologiques et la négation de la réalité du lien avec les grands-parents dans
le cas de l'adoption par un conjoint témoignent de cette orientation.
Elle n'atteint pas non plus son objectif proclamé qui est d'adapter notre
législation interne au fait que les enfants adoptés en France sont
majoritairement étrangers et qu'ils le seront de plus en plus.
Certes, faciliter la démarche des candidats à l'adoption est un objectif
louable, à condition qu'il s'agisse de lever des obstacles administratifs
inacceptables. Mais encore faut-il veiller, à ce que, sous couvert de
simplification administrative, on n'en vienne pas à dévaloriser l'agrément,
démarche sociale et psychologique indispensable aux candidats à l'adoption pour
vérifier leur propre capacité affective et matérielle à accueillir et à
accompagner jusqu'à l'âge adulte un enfant fragilisé. Au motif que l'agrément
n'est pas délivré dans des conditions satisfaisantes dans tel ou tel
département, on en vient à autoriser le magistrat à prononcer une adoption
malgré un refus d'agrément. J'espère que notre assemblée ne réintroduira pas
non plus sa délivrance tacite.
De mon point de vue, ce ne serait pas responsable à l'égard de l'enfant. C'est
grâce aux entretiens avec des assistants sociaux spécialisés, avec de bons
psychiatres et avec des groupes de parents adoptifs que les candidats à
l'adoption prennent conscience de la profondeur de leur désir, de leur capacité
à sacrifier des objectifs professionnels et des habitudes de loisirs et de vie
sociale aux soins à prodiguer à l'enfant qu'ils adoptent. Il y a une ascèse
préparatoire à l'adoption, qui renforce la générosité de la démarche et qui
garantit aux enfants les meilleures conditions d'accueil. Il ne faudrait pas
que les dispositions du texte qui nous revient de l'Assemblée nationale
allègent à l'excès des contraintes qui sont nécessaires.
Je regrette donc d'avoir à dire que le texte, en son état actuel, vise à
favoriser l'appropriation d'enfants par des couples plutôt que l'accueil des
enfants abandonnés au sein d'une famille.
Ainsi, la dévalorisation de l'agrément et l'absence d'incitation forte à
l'accompagnement psycho-pédagogique des familles relèvent de la même erreur
d'appréciation qui consiste à assimiler l'adoption à une naissance biologique.
C'est sur la même fiction qu'est fondé le refus de l'accès aux origines, en
dépit de la demande pressante des adoptés, que le Parlement a commencé enfin à
entendre. Je crois que, en l'occurrence, nos efforts n'auront pas été tout à
fait vains.
En ce qui concerne l'adoption internationale, la réintroduction de l'article
15 me paraît vraiment témoigner d'une méconnaissance des réalités des relations
diplomatiques et juridiques internationales. Nous prétendons, par ce texte,
adapter notre législation interne à l'adoption internationale telle que la
convention de la Haye signée par la France le 5 avril 1995 l'organise et nous
introduisons simultanément dans cette législation interne une norme qui entre
en contradiction avec cette convention. Ce n'est pas conséquent ! Une
convention internationale n'est ni un contrat, ni une convention bilatérale,
lesquels n'engagent que les deux parties signataires : elle définit des normes
de droit international qui engagent les signataires bien au-delà de la
réciprocité d'une convention bilatérale.
Enfin, quel est l'intérêt d'introduire une disposition en réalité inapplicable
? Or l'article 15, tel qu'il est rédigé, est inapplicable. Les pays visés
n'ignorent pas l'adoption, il faut le répéter. Ils la prohibent. Il n'y a pas «
d'absence de législation, dans le pays d'origine, sur l'adoption » comme le
précise l'article 15 ; il y a interdiction.
L'article 15 ne pourra donc pas être appliqué pour des enfants adoptés, en
dépit de la législation locale au Maroc et en Algérie, grâce à des magistrats
ou à des notaires peu scrupuleux, ce qui est d'ailleurs source d'erreurs pour
les parents de bonne foi.
En adoptant l'article 15, nous nous placerions en contradiction avec nos
engagements internationaux sans pour autant résoudre le cas des enfants adoptés
illégalement au Maroc ou en Algérie.
Le problème posé par ces enfants est réel, mais la solution proposée, bien
qu'inspirée par un sincère souci de leur venir en aide, n'est réellement pas
pratiquable.
L'intérêt des enfants, dans ce domaine comme dans tous les autres, doit être
notre guide, comme le respect bien entendu des législations étrangères. Le
blocage vient, à mon avis, du fait que nous avons une connaissance lacunaire
des législations musulmanes.
Je me suis fait confirmer, lors d'un récent déplacement à Alger, par une des
juristes qui font autorité en matière de droit de la famille au Maghreb, que
l'adoption simple peut être conciliable avec le droit musulman parce qu'elle ne
substitue pas une filiation juridique à la filiation biologique.
Notre erreur sur le droit musulman est de dire qu'il interdit l'adoption. Ce
qu'il interdit, c'est la substitution d'une filiation juridique à la filiation
biologique. Or, l'adoption simple ne produit pas cette substitution.
Cette voie mériterait d'être sérieusement explorée ; elle ajouterait une
solution à celle qui est déjà offerte par l'arrêt de la Cour de cassation du 10
mai 1995.
Il convient de trouver une solution pour la vingtaine d'enfants actuellement
concernés par cette difficulté liée au fait qu'ils ont été adoptés
illégalement, souvent à l'insu des parents, dans un pays du Maghreb.
Pour autant, il ne faut pas placer la France dans une situation intenable au
regard du droit international en inscrivant dans notre législation une
disposition en réalité inapplicable.
(Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur certaines travées
du RDSE.)
M. le président.
La parole est à Mme Borvo.
Mme Nicole Borvo.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le
texte qui nous revient en deuxième lecture n'est pas, en l'état, pleinement
satisfaisant.
Comme je l'ai dit en première lecture, tout ce qui ira dans le sens d'une
amélioration de la législation existante sur l'adoption aura notre soutien,
particulièrement pour mieux garantir ce qui nous tient le plus à coeur : les
droits de l'enfant.
Comprenons-nous bien : il s'agit non pas, au nom des droits de l'enfant, de
prétendre juger avec des
a priori
des situations individuelles et
souvent désespérées, ou d'arbitrer en faveur de la famille adoptive contre les
liens biologiques, mais de reconnaître que l'adoption n'est pas seulement
l'affaire des parents adoptants ou des parents d'origine, mais d'abord celle de
l'enfant adopté.
Un enfant est une personne humaine à part entière, et c'est seulement lorsque
son intérêt l'exige qu'il peut être adopté.
N'oublions pas que l'adoption est réciproque : l'enfant, lui aussi, doit
adopter ses parents, avec son identité et son histoire personnelle. Il doit
tout à la fois assumer la construction d'une famille avec ses parents adoptifs
et la souffrance indélébile de l'abandon et de la quête de ses origines, quels
qu'en soient les éléments connus. La loi ne peut privilégier l'un de ces
aspects par rapport à l'autre.
De même, l'amélioration des dispositions législatives sur l'adoption ne peut
pas gommer les inégalités sociales et la crise qui touche tant de monde
aujourd'hui, tout particulièrement les enfants.
Comme l'a dit très justement mon amie Muguette Jacquaint lors de son
intervention à l'Assemblée nationale, n'y a-t-il pas contradiction à vouloir
améliorer la loi sur l'adoption et, dans le même temps, à pérenniser les
saisies et les expulsions, dont la brutalité est particulièrement traumatisante
pour les enfants ?
Sans céder à l'illusion qu'il serait possible, par la loi écrite, de remédier
aux inégalités économiques qui se creusent dans notre pays, il est de notre
devoir de soutenir tout ce qui ira dans le sens d'une amélioration des services
sociaux.
Si nous reconnaissons que la loi écrite ne peut résoudre tous les problèmes
sociaux, elle se doit, en revanche, de ne pas être à la traîne des évolutions
de la société.
Monsieur le secrétaire d'Etat, vous pourrez de plus en plus difficilement
faire la sourde oreille en ce qui concerne les transformations des notions de
couple et de famille.
Le mariage n'est plus, depuis un certain nombre d'années, la seule manière de
vivre en couple.
Chez les jeunes, le mariage est même devenu minoritaire.
Nous réitérons notre regret que le législateur n'ait pas profité de ce texte
pour donner aux concubins les mêmes droits qu'aux personnes mariées.
La garantie du « projet parental » peut exister dans les deux cas, et c'est la
justice qui doit en apprécier la réalité.
Nous proposions également que l'âge requis pour adopter soit abaissé à
vingt-cinq ans, dans un souci d'harmonisation européenne. Toutefois,
l'abaissement de l'âge des deux époux de trente ans à vingt-huit ans aux termes
de la proposition de loi va dans le bon sens.
S'agissant de l'écart d'âge maximum entre les adoptants et les adoptés, qui a
été porté en deuxième lecture à cinquante ans par l'Assemblée nationale, nous
soutiendrons la proposition de la commission des lois du Sénat, qui tend à la
supprimer.
Il serait, en effet, injuste que l'institution de cet écart d'âge maximal
empêche l'adoption par des couples plus âgés ayant déjà eu des enfants ou par
des grands-parents tout à fait en mesure de constituer une famille pour des
enfants.
Pour ce qui est de l'accouchement anonyme et du secret des origines, il s'agit
de bien distinguer les deux et d'éviter une confusion qui ne pourrait que
remettre en cause la possibilité pour les femmes en grande détresse de pouvoir
donner la vie dans des conditions sanitaires satisfaisantes.
Ne pas respecter ce choix douloureux, ce serait pousser des femmes ou des
familles à se mettre dans des situations qu'elles estiment ne pas pouvoir
assumer.
Il n'est pas souhaitable de déstabiliser par la levée de l'anonymat les femmes
qui seront tentées - et qui pourra les en empêcher dans ce cas ? - dans le
meilleur des cas, de faire de fausses déclarations d'identité et, dans le pire
des cas, d'accoucher dans des conditions d'hygiène précaires pour préserver
l'anonymat, mettant ainsi en danger l'enfant qui aurait pu être mis au monde
dans une structure hospitalière.
Nous ne pourrons donc accepter la création d'un organisme central de recueil
des renseignements, qui serait une atteinte à l'anonymat.
En revanche, nous approuvons la possibilité pour la mère de donner des
renseignements ne permettant pas son identification.
Cette possibilité donnée à l'enfant d'avoir accès, y compris dans le cadre de
l'accouchement anonyme, à des renseignements non identifiants sur ses parents
va dans le bon sens, mais seulement si ces renseignements recueillis ne
permettent pas de porter de jugement de valeur sur la mère, le père ou la
personne qui remet l'enfant aux services de l'aide sociale à l'enfance.
Le fait de donner aux femmes la possibilité de bénéficier d'un accompagnement
psychologique et social, mesure proposée par la commission des lois, est
également une bonne chose.
Nous nous opposons, en revanche, aux pratiques de certaines administrations
qui refusent de lever le secret concernant les origines des enfants élevés par
l'aide sociale ou adoptés par des familles.
Il est nécessaire, selon nous, que, si l'administration dispose de ces
renseignements, les parents adoptifs, le jeune adulte ou l'enfant avec l'accord
de ses parents puissent les consulter librement. Nous soutiendrons toute
amélioration allant en ce sens.
Venons-en maintenant à un autre aspect de l'adoption qui a pris une importance
croissante : je veux parler, bien sûr, de l'adoption internationale.
La France est le deuxième pays d'accueil au monde, le premier en Europe. La
croissance du nombre d'enfants adoptés est le fait de l'adoption à l'étranger,
nous le savons. L'importance de ce phénomène nous oblige à trouver des
solutions satisfaisantes pour les enfants ainsi adoptés.
Je suis obligée de constater que, en l'état actuel des débats, nous n'avons
pas vraiment progressé sur ce sujet.
Notre préoccupation concernant l'adoption est d'assurer en premier lieu le
bonheur de l'enfant et non pas de satisfaire exclusivement l'envie d'enfant
ressentie par les parents.
Nous approuvons toutes les mesures proposées pour moraliser les procédures
d'adoption d'un enfant étranger.
Tous ceux qui en font une filière « commerciale » doivent être poursuivis, et
je ne peux que partager l'indignation de M. le secrétaire d'Etat au sujet des «
catalogues d'enfants » diffusés sur Internet.
Par ailleurs, les deux tiers des adoptions internationales sont réalisés par
les futurs parents adoptifs eux-mêmes, sans qu'ils passent par les cinquante
oeuvres d'adoption d'enfants en France, ce qui n'est pas sans poser
problème.
Cette situation favorise sans doute l'existence de certaines filières, en
particulier dans les pays où l'adoption est prohibée ou n'est pas
réglementée.
La résolution de ce problème n'est pas évidente. Il aurait été préférable,
comme j'ai eu l'occasion de le dire en première lecture, que la France se donne
les moyens nécessaires pour améliorer les relations bilatérales avec les Etats
concernés et agisse en faveur d'une amélioration grâce aux conventions
internationales, qui restent insuffisantes quant aux procédures d'adoption,
plutôt que d'engager, avec l'article 15, un conflit de lois qui risque d'être
considéré par les gouvernements de certains pays comme une déclaration de «
guerre juridique ». En effet, cela peut avoir pour conséquence d'inciter les
gouvernements à faire pression sur leurs juges pour qu'ils ne rendent plus de
jugements favorables à la sortie d'enfants du territoire en vue d'une adoption
en France.
Toutefois, il est vrai, comme l'a relevé M. Mattei, qu'en 1994 près de trois
quarts des 2 414 enfants entrés en France pour être adoptés venaient de pays
non signataires de la convention de La Haye et dont la loi nationale ignorait
ou prohibait l'adoption.
Aujourd'hui, au regard de la loi française, ces enfants sont donc dans une
situation précaire, puisque ceux qui ne pourront bénéficier d'une adoption
plénière n'auront pas la qualité de Français alors qu'ils auront été élevés sur
le territoire national.
Nous nous inquiétons du sort de ces enfants qui, à l'âge de dix-huit ans,
subiront alors le sort réservé aux étrangers par les lois Pasqua.
Nous voyons encore une fois l'effet néfaste de ces lois dont nous demandons,
par ailleurs, l'abrogation.
A l'heure actuelle, l'avenir de ces enfants est dans les mains de la
jurisprudence de la Cour de cassation, qui leur reconnaît la possibilité de
bénéficier de l'adoption plénière, et donc de la nationalité française.
Nous proposions en première lecture de consolider ce fragile édifice et
d'accorder la nationalité française à l'ensemble des pupilles qui ne la
possèdent pas.
Nous déposerons de nouveau cet amendement, qui permettra, s'il est adopté, de
lever les angoisses des parents adoptifs d'enfants adoptés à l'étranger dont le
statut juridique n'aura pas pu être entièrement défini.
J'en reviens à l'article 15 : si nous sommes contre l'introduction d'un
conflit de lois qui nous semble dommageable, nous comprenons également la
crainte éprouvée par les familles adoptantes que le refus de transcrire la
jurisprudence de la Cour de cassation ne soit perçu par les juges français
comme un signal de ne plus accorder d'adoptions plénières et donc de détruire
le fragile édifice de la naturalisation.
Nous ne pouvons qu'espérer que, quoi qu'il arrive, la jurisprudence poursuive
dans la voie actuelle et que les juges ne se laissent pas perturber par les
incohérences et les maladresses de certains qui, en posant le problème de cette
façon, créent autant de difficultés qu'ils en résolvent. Pour notre part, nous
ne pouvons pas suivre l'Assemblée nationale en la matière.
En revanche, nous nous félicitons que la commission des affaires sociales ait
retenu finalement le prêt sans intérêt pour couvrir les dépenses importantes
rendues nécessaires par une adoption d'un enfant étranger.
Cela m'amène à parler du volet social de cette proposition de loi.
Si nous nous réjouissons, comme je viens de le dire, du crédit sans intérêt
attribué aux parents adoptant un enfant à l'étranger, nous regrettons que le
texte que l'on nous propose soit passé par les fourches caudines de
l'ordonnance du 24 janvier 1996, qui octroie les prestations familiales sous
conditions de ressources. Il en va, évidemment, de l'égalité des enfants, mais,
en l'occurrence, c'est une égalité par le bas.
S'agissant de l'âge maximal pour la perception des différentes prestations,
qui serait l'âge de la fin de l'obligation scolaire, permettez-moi de dire
qu'il n'est pas sérieux de faire des économies de bouts de chandelles !
Nous nous réjouissons, en revanche, de l'allocation de remplacement pour les
femmes exerçant une profession libérale qui adoptent un enfant. Il s'agit d'une
nouveauté introduite par la commission des affaires sociales du Sénat,
nouveauté qui a été l'objet d'un de nos amendements en première lecture.
En l'état actuel des choses, cette proposition de loi constitue indéniablement
un progrès. Nous souhaitons donc la voter, et nous espérons qu'elle sera
utilement améliorée par nos débats.
(Applaudissements sur les travées du
groupe communiste républicain et citoyen, ainsi que sur les travées
socialistes.)
M. le président.
La parole est à Mme Dusseau.
Mme Joëlle Dusseau.
Monsieur le président, je termine ce festival de dames, je parle, bien sûr,
des trois dernières intervantes. Tout à l'heure, M. Neuwirth, regardant
l'hémicycle, a dit que nous étions presque à parité. C'est effectivement
presque vrai, mon cher collègue !
Quoi qu'il en soit, je souhaiterais vivement que le Sénat, dans sa grande
sagesse, tienne compte, dans ses votes à venir, de ces voix de femmes qui
viennent de s'élever, comme de celle des hommes, bien sûr.
A l'occasion de cette deuxième lecture de la proposition de loi relative à
l'adoption, je voudrais dire, à la fois, ma satisfaction pour les quelques
avancées qui me semblent avoir eu lieu, aussi bien en première lecture au Sénat
qu'en deuxième lecture à l'Assemblée nationale, et mon inquiétude devant
certains aspects du texte.
S'agissant du délai de rétractation de la mère qui décide d'abandonner son
enfant, que le texte qui nous était soumis, en première lecture, portait à six
semaines, nous avions été plusieurs, dans cette enceinte, à le juger trop bref
et à souligner la grande détresse de ces femmes, qui sont très souvent en
rupture avec leur milieu familial se trouvent donc confrontés à une extrême
solitude, à des problèmes de logement, etc.
Après un débat long et passionné, nous avions décidé de maintenir le délai
actuellement en vigueur : trois mois. Cela me semblait extrêmement sage.
Malheureusement, l'Assemblée nationale est revenue sur ce délai, coupant en
quelque sorte la poire en deux, pour le porter à deux mois.
La commission des lois propose au Sénat de revenir à trois mois. Nous sommes
nombreux à approuver cette position. Je souhaite que ceux d'entre nous qui nous
représenteront en commission mixte paritaire ne considèrent pas ce délai comme
un point de négociation possible et qu'ils soient déterminés à ne pas céder.
S'agissant de l'adoption par des concubins, le Sénat et l'Assemblée nationale
ont malheureusement voté dans le même sens. Je regrette vivement, avec
d'autres, que le Parlement ait ainsi fermé une porte, ne laissant ouvertes que
deux possibilités : l'adoption soit par un couple marié, soit par une personne
seule.
Il y a là, je le répète, une aberration. Ou alors, il fallait aller au bout de
cette logique et prévoir que seuls les gens mariés peuvent adopter. Au lieu de
quoi, on a préféré une solution bancale.
En première lecture, M. Dejoie nous avait expliqué que, certes, les concubins
en tant que tels n'auraient pas le droit d'adopter mais que l'un des membres du
couple le pourrait. Ainsi, c'est le père adoptif ou, plus souvent sans doute,
la mère adoptive qui sera le seul représentant légal.
Dans quelle situation mettons-nous les parents futurs et l'enfant lui-même ?
Quelle situation familiale créons-nous avec une telle disposition ? Imaginez
que l'enfant dise à celui qui n'est ni réellement ni légalement son père ou sa
mère : « C'est l'autre qui m'a adopté et donc tu ne peux pas me faire cette
remarque ! »
Il y a là quelque chose d'humainement invivable. Je ne comprends pas ! Ni
l'intervention de M. Huriet, qui pensait comme nous, ni nos propres arguments
n'ont, hélas ! convaincu le Sénat.
Comme l'a dit M. Sérusclat, nous revenons ainsi sur des avancées que nous
avions réalisées ici même. En effet, au cours des très riches débats sur la
bioéthique, nous avions décidé qu'un couple non marié pouvait avoir recours à
l'assistance médicale à la procréation. Or voilà que nous refusons à ce même
couple, si la fécondation
in vitro
, par exemple, échoue, la possibilité
d'adopter un enfant ! Au nom de quoi ? Je ne vois qu'une explication : c'est un
repli frileux sur des valeurs morales étroites.
On a parlé de texte d'adaptation. Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'en
adoptant cette disposition le Sénat et l'Assemblée nationale ne paraissent pas
animés d'un souci d'adaptation de notre législation à l'évolution de la
société. On a tout à l'heure rappelé qu'un tiers des naissances étaient le fait
de couples non mariés. Selon les chiffres de l'INED, tous âges confondus, près
de 20 p. 100 des couples vivent hors mariage. Il y a donc bien discordance avec
l'évolution actuelle de la société.
J'en viens, enfin, à l'importante question de l'accouchement anonyme ou de
l'accouchement secret. Manifestement, la confusion sémantique entre les deux
termes est totale : « anonyme » égale « secret ». Eh bien, non ! La loi prévoit
l'accouchement secret, mais l'accouchement secret n'est pas nécessairement
anonyme. Du fait de cette confusion, nous rencontrerons un jour des difficultés
à la fois d'interprétation et de concordance avec les textes européens.
J'avais déposé un amendement visant à supprimer l'accouchement sous X. C'était
peut-être un peu excessif, et je n'ai pas déposé à nouveau un tel amendement.
Je veux bien croire que, dans certains cas, les femmes veuillent absolument
préserver leur anonymat. Il reste que, malgré cette disposition permettant aux
femmes d'accoucher anonymement, on a trouvé encore récemment deux bébés dans
des poubelles. Cela prouve bien que cette disposition n'empêche malheureusement
pas que se produisent des faits aussi affligeants lorsque les femmes sont
vraiment en situation de détresse.
En tout cas, je ne vois pas au nom de quoi on interdirait aux femmes qui
veulent accoucher dans le secret de laisser des renseignements identifiants qui
resteront secrets jusqu'au moment où interviendra, éventuellement, une levée du
secret, ce qui permettra à l'enfant devenu adulte d'accéder à ces
renseignements.
Tout le monde le sait, un secret, c'est quelque chose qui est connu de
quelques rares personnes, mais ce n'est pas quelque chose d'inconnu.
L'Assemblée nationale a fait une petite avancée en prévoyant que,
ultérieurement, la mère pourrait revenir sur sa décision. Ce n'est pas
suffisant : allons jusqu'au bout, mes chers collègues, prévoyons que non
seulement elle pourra ultérieurement lever l'anonymat mais qu'elle peut aussi
décider d'accoucher secrètement, c'est-à-dire en laissant des renseignements
identifiants, qui seront conservés par telle ou telle instance, à définir, de
telle manière que, avec son accord, le secret puisse être éventuellement levé,
lorsque l'enfant est devenu adulte.
Tels sont, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les différents
éléments que je souhaitais soumettre à votre réflexion.
(Mme ben Guiga applaudit.)
M. le président.
La parole est à M. Fourcade.
M. Jean-Pierre Fourcade.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, au
moment où s'achève cette discussion générale, je voudrais présenter quelques
observations.
Je rappellerai d'abord, pour éviter que l'on ne se perde dans les détails, que
l'amélioration et la simplification de notre régime de l'adoption sont l'un des
trois volets de la politique familiale que nous cherchons à mettre en place
depuis un certain nombre d'années.
De même que, à l'époque de la discussion du texte sur l'interruption
volontaire de grossesse, le Gouvernement avait pris l'engagement de tout mettre
en oeuvre pour lutter contre la stérilité des couples - et nous avons obtenu
des résultats à cet égard, les lois relatives à la bioéthique en témoignent -
il est clair qu'une politique familiale bien comprise suppose une
simplification des procédures d'adoption.
Dans une telle optique, ce qui prime, c'est l'épanouissement de le cellule
familiale et des enfants, non la joie égoïste du couple. Quand on raconte tant
de choses sur l'évolution de la société, il n'est pas inutile de fixer
clairement ce préalable.
Reconnaissons que, grâce à notre collègue député M. Mattéi - malgré, monsieur
Neuwirth, ce qu'il a pu dire en première lecture ! - la proposition de loi dont
nous débattons aujourd'hui comporte quelques éléments importants : la
généralisation de l'agrément, certaines améliorations concernant les délais et
les conditions de l'adoption, ainsi que l'avancée qui a été obtenue - même si
Mme Dusseau la trouve insuffisante, elle est réelle - s'agissant de la levée du
secret des origines, qui peut permettre de répondre à un certain nombre de
préoccupations et qui, dans l'état actuel de notre droit, représente un
progrès.
Je souhaite donc que, grâce aux efforts des deux commissions, en accord avec
l'Assemblée nationale, nous puissions trouver des solutions satisfaisantes sur
les points qui restent litigieux.
A mes yeux, monsieur le secrétaire d'Etat, deux véritables difficultés
subsistent.
Tout d'abord, la notion d'enfant adoptable n'a pas été suffisamment
précisée.
M. Neuwirth a eu tout à fait raison de dire qu'il fallait favoriser au maximum
l'adoption d'enfants français. A cet égard, je salue, bien sûr, le dévouement
de tous les services, composés d'hommes et de femmes admirables, dans tous les
départements, qui s'occupent de l'aide à l'enfance. Mais ils doivent comprendre
que leur objectif essentiel dans une société comme la nôtre n'est pas de «
conserver » les enfants dans des structures collectives : il est de faciliter
l'adoption des enfants adoptables.
Je souhaite donc que l'on étende le plus possible la notion d'enfant
adoptable, même si certains mettent en avant des handicaps rédhibitoires, même
si certains estiment que, passé tel âge, les enfants ne peuvent plus guère
s'adapter à une famille.
Par conséquent, nous avons intérêt, tant sur le plan législatif que sur celui
du fonctionnement des conseils généraux, à réduire les délais de manière que
les enfants restent effectivement adoptables. Cela ne joue, certes, que sur
quelques centaines de cas par an, mais, sur plusieurs années, cela finit par
faire quelques milliers de cas.
La seconde difficulté, qui est bien plus délicate à traiter, est celle que
soulève l'adoption internationale.
C'est manifestement parce que nombre de blocages administratifs ont freiné
l'adoption interne que certaines familles ont été poussées vers l'adoption
internationale. Or, qui dit adoption internationale dit règles difficilement
codifiables et pratiques plus ou moins commerciales.
Si l'adoption internationale doit continuer d'être encouragée, le Gouvernement
français doit faire en sorte de l'encadrer et de la moraliser en passant des
accords bilatéraux avec les gouvernements des pays principalement concernés.
Selon le texte de la proposition de loi et compte tenu des propositions des
deux rapporteurs, l'adoption internationale va se trouver de plus en plus
assimilée à l'adoption interne. On unifie ainsi les mécanismes de prises en
charge sociale. Tout cela va dans le bon sens.
Il reste que, en raison d'un taux de natalité en régression, quoi qu'on en
dise, le nombre d'enfants adoptables en France est relativement faible, ce qui
incite des familles à l'adoption internationale. Il faut les sécuriser et leur
donner les possibilités d'adoption les plus normales et les plus régulières
possibles.
J'ai peur que ce texte ne permette pas de régler totalement ces deux problèmes
sur lesquels je souhaitais insister. J'espère néanmoins que des progrès
pourront être enregistrés sur ces deux points et je me félicite des avancées
qu'il permet d'ores et déjà de réaliser au regard de notre politique
familiale.
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Hervé Gaymard,
secrétaire d'Etat.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les
sénateurs, nous aurons bien sûr l'occasion, à la faveur de l'examen des
articles, de revenir sur un certain nombre de questions qui ont été soulevées
au cours de cette discussion générale. Pour ma part, je me ferai l'écho de ce
que M. le garde des sceaux, retenu par une autre obligation, ne peut vous dire
lui-même aujourd'hui sur les sujets qui relèvent de son autorité.
Je voudrais tout d'abord remercier l'ensemble des intervenants et, madame
Dusseau, des intervenantes, de la qualité, de la hauteur de vue et de la
chaleur de leurs réflexions. Chacun a bien conscience que, sur un texte de
cette nature, ce ne sont pas uniquement la raison et le droit qui comptent : il
y a également place pour la conviction, la passion et l'écoute de l'autre.
Vous avez, les unes et les autres, bien illustré non seulement la difficulté
de légiférer sur un tel sujet, mais aussi la nécessité de remettre
périodiquement l'ouvrage sur le métier. En effet, la société évolue, les
problèmes changent, et le rôle du législateur est de prendre en compte ces
modifications. M. le rapporteur a bien résumé les lignes de force de cette
proposition de loi. Nous travaillons pour les enfants ; c'est pourquoi il faut
avoir des procédures et des textes plus simples, plus compréhensibles et, dans
toute la mesure possible, assimiler l'enfant adopté à l'enfant biologique. Je
crois que nous sommes tous animés par cette idée parce qu'elle relève tout
simplement du bon sens.
M. le rapporteur pour avis a, lui aussi, évoqué la nécessité de simplifier et
d'accélérer les procédures.
Il m'a interrogé sur les chiffres relatifs aux causes de non-adoption mais
nous ne pouvons, de par leur nature, les connaître vraiment. Certes, des
chiffres circulent, comme celui que vous avez cité. Mais, à partir du moment où
les dossiers n'ont pas été soumis aux commissions d'éducation spéciales, il est
extrêmement difficile d'avoir des chiffres très fiables. Toutefois, ne
l'oublions pas, un enfant est un enfant et il ne faut pas vouloir le classer
dans une catégorie plutôt qu'une autre.
Je suis également convaincu que nous devons alléger les procédures, car leur
complexité peut conduire à prendre des décisions qui ne sont pas très
satisfaisantes.
M. Sérusclat a évoqué de très nombreux sujets sur lesquels nous reviendrons
plus en détail lors de l'examen des articles. Il a parlé de moralisation et a
notamment soulevé le problème d'Internet. Les débats qui ont eu lieu à ce sujet
devant l'Assemblée nationale ont résulté, comme l'a expliqué M. Jean-François
Mattei, le rapporteur de l'Assemblée nationale, de l'adoption sur catalogue. En
effet, après avoir pianoté sur Internet, il a reçu, quelques semaines plus
tard, un catalogue en couleur comprenant des photographies d'enfants. Il était
même possible de choisir la couleur des yeux et celle de la peau et un prix en
dollars était mentionné.
Il est vrai que ce procédé est intolérable mais il ne faut pas se cacher la
difficulté de légiférer en ce domaine. M. Sérusclat a d'ailleurs, à juste
titre, souligné que les outils existent déjà dans notre code pénal.
Le Gouvernement, par la voix du garde des sceaux, a confié à Mme
Falque-Pierrotin, qui est maître des requêtes au Conseil d'Etat, le soin
d'examiner les moyens d'éviter de telles dérives en ce domaine car elles
remettent en cause le fondement même de notre société et le respect de
l'autre.
Mme ben Guiga a particulièrement insisté sur la question que soulève notamment
l'article 15, qui, au Sénat comme à l'Assemblée nationale, a suscité de longs
débats. Nous aurons l'occasion d'y revenir longuement mais je voudrais, d'ores
et déjà, lui dire, même si le Gouvernement ne partage pas son opinion, à quel
point j'ai été sensible à la qualité de sa réflexion et à sa connaissance
approfondie des différentes législations étrangères, notamment du droit
musulman qui est parfois difficile à appréhender et surtout à comparer à notre
droit civil, compte tenu de la structure différente de nos sociétés.
Mme Borvo a également évoqué, au début de son propos, la nécessité de
respecter avant tout le droit de l'enfant. Tel est bien l'objet de ce débat.
Nous devons faire prévaloir dans toute la mesure possible l'intérêt de l'enfant
dans l'ensemble des dispositions de cette proposition de loi.
Il est vrai que des questions difficiles se posent. Mme Borvo a notamment
évoqué les problèmes posés à la fois par l'accouchement sous X et par la notion
de secret des origines. Il n'est pas aisé de trancher de telles questions. Nous
avons tous bien conscience que la vérité n'est pas détenue entièrement par l'un
ou par l'autre. Elle résulte toujours d'un compromis entre des conceptions
contradictoires. Voilà d'ailleurs l'intérêt et la difficulté d'un tel débat.
Je tiens à remercier Mme Dusseau pour l'approche qui a été la sienne,
notamment sur ce sujet. Nous avons bien conscience qu'il s'agit là d'un domaine
dans lequel, pour citer Montesquieu, « il faut parfois légiférer en tremblant
». C'est bien la haute conscience du législateur à l'égard d'un tel texte qui
permet d'apporter autant de précisions, de précautions et d'attention envers
l'autre.
M. Fourcade, enfin, a rappelé les grands objectifs et les apports essentiels
de cette proposition de loi, et je l'en remercie. Si, en seconde lecture, le
législateur se concentre sur les problèmes qui restent encore en discussion, il
peut parfois, à la veille d'une commission mixte paritaire, perdre de vue
l'essentiel.
M. Fourcade a également évoqué deux difficultés.
S'agissant du concept d'enfant adoptable, je partage entièrement ses
réflexions. En effet, en tant qu'élu local, responsable de la commission des
affaires sociales de mon département, je perçois quotidiennement sur le terrain
ce à quoi il fait allusion. Je ne puis donc qu'être très favorable à ce que
l'association des présidents de conseils généraux et le Gouvernement
travaillent ensemble en ce domaine.
Je crois, comme vous l'avez dit, qu'il suffit de peu de chose pour que la
situation s'améliore. En tout cas, pour ma part, je retiens votre suggestion.
M. Jacques Barrot et moi-même nous prendrons dans les prochains jours les
initiatives qui s'imposent.
S'agissant de l'adoption internationale, qui est en quelque sorte une «
réflexion-miroir » par rapport à votre première observation, chacun est bien
conscient de la nécessité d'encadrer et de moraliser les procédures. Le nombre
d'adoption d'enfants étrangers diminuera si nous parvenons à mieux définir le
concept d'enfant adoptable. Voilà qui démontre bien que ce texte est peut-être
plus un point de départ qu'un aboutissement.
Je tiens à me rallier à l'hommage que M. Fourcade a rendu aux personnels qui,
dans les départements et les administrations de l'Etat, travaillent en ce
domaine car leur tâche n'est pas facile et elle doit encore s'accroître.
Telles sont, monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames,
messieurs les sénateurs, les quelques réflexions que je voulais vous livrer
avant que nous abordions l'examen des articles.
(M. Jean Delaneau remplace M. Paul Girod au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. JEAN DELANEAU
vice-président
M. le président.
Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ? ...
La discussion générale est close.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Je demande la parole.
M. le président.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Luc Dejoie,
rapporteur.
Monsieur le président, je demande une suspension de séance
d'une vingtaine de minutes pour permettre à la commission d'examiner les
amendements.
M. le président.
Le Sénat va, bien entendu, accéder à votre demande.
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