M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Estier pour explication de vote.
M. Claude Estier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais, en quelques mots, expliquer mon vote au nom du groupe socialiste.
La France a donc ratifié, en vertu de la loi du 27 décembre 1994, l'acte final du cycle de l'Uruguay conclu à Marrakech, le 15 avril 1994, auquel est incorporé l'accord sur les aspects des droits de la propriété intellectuelle qui touchent au commerce.
Initialement, il avait été envisagé de faire de cet accord un code séparé auquel l'adhésion aurait été facultative. Il a finalement été intégré à l'accord de Marrakech, ce qui lui confère un caractère quasi universel, eu égard au nombre des ratifications.
L'accord sur les aspects des droits de la propriété intellectuelle qui touchent au commerce contient soixante-treize articles. Il a pour objet de réduire « les distorsions et les entraves en ce qui concerne le commerce international en tenant compte de la nécessité de promouvoir une protection efficace et suffisante des droits de la propriété intellectuelle, afin de faire en sorte que les mesures et les procédures visant à faire respecter ces droits ne deviennent pas elles-mêmes des obstacles au commerce légitime ».
Il s'agit donc de poser des normes minimales auxquelles les lois des pays industrialisés sont déjà conformes dans leurs grandes lignes. Le droit français atteignant déjà le minimum énoncé par l'accord, les modifications qu'il convient d'apporter au code de la propriété intellectuelle sont très limitées. C'est l'objet de ce projet de loi.
Nous constatons que ce texte étend le bénéfice du traitement national aux membres de l'Organisation mondiale du commerce, qui succède au GATT. Il précise ensuite le régime des licences non volontaires en confirmant leur caractère non exclusif et en liant leur transmission à celle du fonds de commerce, de l'entreprise ou d'une partie de l'entreprise.
Il prévoit de renforcer la protection des appellations d'origine géographique des vins et spiritueux à l'égard des pays tiers de la Communauté européenne.
Nous voyons bien cependant que la disposition la plus intéressante de ce texte est le renversement de la charge de la preuve en matière de contrefaçon de brevet de procédé dans deux hypothèses : lorsque le produit est nouveau ou lorsque la probabilité est grande que le produit identique ait été obtenu par le procédé breveté.
Nous nous associons à ces modifications, qui permettront de réduire les distorsions de concurrence liées notamment à la contrefaçon. Nous voterons donc ce projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Laffitte.
M. Pierre Laffitte. Mes chers collègues, la brièveté des débats ne doit pas masquer l'importance de ce texte. Elle est d'autant plus grande que, dans notre monde moderne, la propriété intellectuelle et tout ce qui est immatériel devient de plus en plus prééminent par rapport aux aspects matériels de l'économie.
Nous avons fait un bon travail. La France, en l'occurrence, a joué un rôle tout à fait moteur dans cette Organisation mondiale du commerce, pour ce qui est de son domaine spécifique. Toutefois, nous devrons sans doute d'ici peu aborder le problème des services et produits, notamment multimédias, et de tout ce qui transite sur le réseau des réseaux. Je crois savoir que nous aurons très bientôt à débattre d'un texte qui est en cours d'élaboration conjointement par les services de M. Douste-Blazy et par les vôtres, monsieur le ministre. Le sujet est très important et il nous faudra assez rapidement prendre position.
Notre groupe votera bien entendu ce texte.
M. François Giacobbi. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, notre pays dispose d'une législation sur la propriété intellectuelle très ancienne.
Ainsi, avec Beaumarchais, dès 1791, le droit d'auteur tel que nous le connaissons dans notre pays est devenu un droit historique, démocratique, de fait un droit de l'homme à part entière auquel nous restons attachés.
Le texte qui nous est soumis aujourd'hui modifie le code de la propriété intellectuelle en application de l'accord instituant l'Organisation mondiale du commerce.
Nous avons, en son temps, eu l'occasion, mes collègues communistes et moi-même, d'exprimer ici notre désaccord sur l'OMC, dont le seul but était et demeure de renforcer davantage encore le libéralisme des échanges commerciaux au profit des seules puissances économiques et, au premier chef, de la plus puissante d'entre elles, les Etats-Unis.
S'agissant donc de protection du droit d'auteur, les règles découlant de l'accord ADPIC ne pouvaient être qu'en deçà de notre législation, comme l'indique sans ambiguïté l'exposé des motifs du projet de loi que nous examinons : « Sur les différents points abordés, il pose - l'accord - des normes minimales auxquelles les lois des pays industrialisés sont déjà conformes dans leurs grandes lignes. Dans ces conditions, les modifications qu'il convient d'apporter au code de la propriété intellectuelle sont très limitées, le droit français atteignant déjà le minimum énoncé par l'accord. »
Le texte étend les conditions de protection des recueils d'oeuvres, ce dont nous nous félicitons.
Cependant, l'essentiel des modifications apportées concerne le régime des licences non volontaires, avec une limitation, à savoir que l'importation est assimilée à une exploitation dudit brevet.
Ce texte n'apporte donc pas de véritables modifications à notre régime de protection du droit d'auteur. Sera-t-il en mesure de résoudre les problèmes de contrefaçon qui coûtent considérablement à notre économie ? Nous en doutons, tant son origine ultra-libérale le rend inadapté au but recherché.
L'ensemble de ces raisons nous amènent à réserver notre vote sur ce projet de loi. Nous nous abstiendrons donc.
M. le président. La parole est à M. Blanc.
M. Paul Blanc. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la session vient de débuter par l'examen d'un texte technique modifiant le code de la propriété intellectuelle en application de l'accord sur les aspects des droits de la propriété intellectuelle qui touche au commerce.
Je voudrais vous remercier, monsieur le ministre, d'avoir contribué, par ce texte, à harmoniser les dispositions du code de la propriété intellectuelle au regard de l'accord instituant l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC. Mais je tiens également à remercier notre collègue Charles Jolibois, rapporteur de la commission des lois, des indications claires et précises qu'il a bien voulu nous donner.
Sans revenir sur les articles du présent texte, qui a été excellemment analysé, j'estime que la Haute Assemblée ne peut qu'approuver l'extension aux ressortissants des pays signataires de l'OMC du bénéfice du traitement national dans le domaine des brevets, de la topographie, des semi-conducteurs et des marques. En ce qui concerne notamment les licences obligatoires, la simplification qu'apporte un contrôle a posteriori , en remplacement d'un contrôle a priori , ne peut que rendre plus simple et plus clair le régime de ces licences.
De la même façon, l'article 9 tend à renverser la charge de la preuve en matière de contrefaçon des brevets de procédé. Cette nouvelle disposition permettra, dans certains cas en nombre limité, de mettre à la charge du défendeur l'obligation de faire la preuve qu'il a obtenu le produit identique par un procédé différent.
Enfin, le troisième aspect de ce texte que la Haute Assemblée ne peut qu'approuver tient aux dispositions de l'article 11, qui vise à organiser la protection des indications géographiques pour les vins et les spiritueux, et à la rendre opposable non seulement aux pays de l'Union européenne mais aussi aux pays tiers.
L'ensemble des dispositions de ce texte satisfait le groupe auquel j'appartiens. Il devrait permettre de réduire les distorsions de concurrence, notamment celles qui sont liées à la contrefaçon. C'est la raison pour laquelle les membres du groupe du Rassemblement pour la République voteront ce projet de loi, tel qu'il a été amendé par la Haute Assemblée. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.
M. Ivan Renar. Le groupe communiste républicain et citoyen s'abstient.
M. Emmanuel Hamel. Moi aussi !

(Le projet de loi est adopté.)

20