M. le président. Par amendement n° 22, M. Gérard Larcher, au nom de la commission spéciale, propose d'insérer, après l'article 7, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - 1° Les personnes qui exercent, dans une zone franche urbaine définie au 3 du B de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, une activité non salariée non agricole mentionnée aux a et b du 1° de l'article L. 615-1 du code de la sécurité sociale, sont exonérées, dans les limites d'un taux et d'un plafond fixés par décret, du versement de leurs cotisations sociales au titre de l'assurance maladie et maternité, de l'assurance vieillesse et des allocations familiales, pendant une période de cinq ans à compter de la délimitation de la zone franche urbaine ou de la date à laquelle elles ont commencé ou repris leurs activités.
« 2° Le droit à l'exonération prévue au 1°) est subordonné à la condition que les personnes concernées soient à jour de leurs obligations à l'égard des organismes de recouvrement des cotisations d'assurance maladie, d'assurance vieillesse et d'allocations familiales ou aient souscrit un engagement d'apurement progressif de leurs dettes.
« II. - La perte de recettes entraînée pour les régimes de sécurité sociale par l'application des dispositions du I ci-dessus est compensée à due concurrence par l'institution d'une taxe additionnelle à la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat mentionnée au 2° de l'article 3 de la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 modifiée, instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. MM. Jean-Pierre Fourcade, Serge Franchis et nombre d'orateurs ont dit tout l'intérêt que portait la commission spéciale et que portera, sans nul doute, la Haute Assemblée à cet amendement.
Nous sommes partis, messieurs les ministres, de l'excellente étude d'impact que le ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration a conduite, en nous rappelant que la préoccupation était double : d'une part, le maintien et le développement de l'emploi dans ces zones et, d'autre part, la contribution, au travers de l'activité commerciale et artisanale, à la vie quotidienne, c'est-à-dire à la vie sociale de ces zones.
A l'examen du tableau des établissements existants par tranche et nombre de salariés, nous constatons que 63 % des établissements existants n'ont aucun salarié.
Le texte qui nous arrive de l'Assemblée nationale, s'il traite - et nous partageons cette préoccupation - des entreprises ou des établissements commerciaux ou artisanaux qui ont des salariés, ne prévoit rien pour ceux qui « s'accrochent », souvent avec beaucoup de courage, à leur fonds de commerce, lequel a perdu en dix, quinze, voire vingt ans beaucoup de sa valeur par rapport à la valeur de référence. Ils ne peuvent donc pas compter sur la vente de ce fonds pour envisager demain le temps de la retraite avec une relative sérénité financière.
La commission spéciale propose donc pour les aider à se maintenir de les faire bénéficier de dispositions comparables à celles qui profiteront aux entreprises ayant au moins un salarié. Ils verraient au travers de cette disposition que la représentation nationale compte sur eux pour « tenir », et je sais, messieurs les ministres, que vous comptez aussi sur eux pour les « liants » sociaux, les liens qu'ils représentent.
Ils sont des liens sociaux parce qu'ils sont au quotidien, les creusets de l'intégration par la rencontre.
Ils sont des liens parce qu'ils sont des éléments de la vie économique qui permettent d'éviter le repli sur soi-même.
A cet égard, les auditions des représentants économiques issus de ces quartiers en difficulté ont été très claires. Voilà pourquoi nous proposons d'étendre le champ des exonérations des cotisations personnelles des commerçants et artisans correspondant, comme pour les salariés, aux risques maladie-maternité, vieillesse, invalidité-décès et au titre des allocations familiales.
Nous renvoyons à un décret le soin de fixer le taux d'exonération, étant entendu que, dans notre rapport écrit, nous suggérons au Gouvernement de retenir un taux de 50 %. Nous mesurons l'effort financier que cela représente.
Dans la discussion générale et au cours de l'examen des articles, vous nous avez appelé, messieurs les ministres, à comprendre et partager les difficultés que rencontre le Gouvernement. Ces difficultés, nous les partageons tellement que nous les soutenons, même quand c'est difficile. Mais, comme Sénèque le disait, il n'y a que ce jour-là que cela compte. En effet, quand c'est facile, par beau temps, ma petite soeur navigue, monsieur le ministre. (Sourires.)
M. Eric Raoult, ministre délégué à la ville et à l'intégration. La fin n'est pas de Sénèque ! (Nouveaux sourires.)
M. Gérard Larcher, rapporteur. Non, elle émane d'un penseur plus récent, Gérard Larcher.
Cette disposition nous semble être l'un des maillons importants et concrets du dispositif qui sera applicable à partir du 1er janvier prochain aux commerçants et aux artisans. Quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, nous pourrons encourager ceux-ci car nous aurons des mesures concrètes à leur annoncer. Nous pourrons leur montrer l'effort entrepris par le Gouvernement pour qu'ils puissent tenir en attendant, notamment l'établissement public national pour l'aménagement et la restructuration des espaces commerciaux et artisanaux.
Voilà pourquoi nous attachons une grande importance à cette disposition. Nous mesurons l'effort demandé mais, en même temps, nous nous appuyons, messieurs les ministres, sur cette connaissance du quotidien qui nous permet d'aller au-delà des chiffres pour apporter parfois une réponse aux problèmes auxquels nous nous heurtons chaque jour.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Gaudin, ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration. Voilà l'exemple même de l'excellent dialogue qui s'est noué entre le Gouvernement, M. Raoult et moi-même, et la commission spéciale puisque nous avons beaucoup travaillé et dialogué sur ce point.
M. Gérard Larcher, rapporteur. C'est vrai !
M. Jean-Claude Gaudin, ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration. Le Gouvernement partage pleinement le souci de la commission de favoriser le maintien et le développement de l'entreprise individuelle. M. Larcher nous a, à cet égard, parfaitement convaincus. Je tiens toutefois à signaler l'effort déjà accompli par l'Etat en ce domaine, telles l'exonération de l'impôt sur le revenu dont bénéficieront les entrepreneurs individuels et l'exonération des taxes professionnelle et foncière dans les zones franches urbaines.
Je tiens à rappeler, par ailleurs, que des dispositifs existent pour les non-salariés non agricoles qui sont déjà en difficulté. Ils peuvent d'ores et déjà bénéficier de dispositifs d'exonération de cotisations très importants.
Cependant, comprenant le souci du Sénat de répondre plus complètement au soutien de l'activité économique que constitue l'apport majeur du pacte de relance pour la ville, même si cet amendement représente un coût certain, pour ne pas dire important - c'est une nouveauté - le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Haute Assemblée. Dans ces conditions, il lève le gage.
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 22 rectifié.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Gérard Larcher, rapporteur. Je voudrais tout d'abord remercier les ministres, car le dialogue que nous avons eu sur ce point a été fructueux. Nous avons essayé d'appréhender concrètement la situation.
Si la commission s'est rendu compte, très rapidement, de l'importance de cette mesure, elle y a vu une disposition tendant non pas à obtenir un peu plus d'argent, mais à répondre très concrètement au problème. Voilà pourquoi le Gouvernement a levé le gage. J'ai cru comprendre que le curseur de la sagesse se déplaçait positivement. Je vous en remercie, messieurs les ministres.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 22 rectifié.
M. André Vezinhet. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Vezinhet.
M. André Vezinhet. S'agissant de cet important problème, qui vient d'être évoqué excellemment par M. le rapporteur, ...
M. Jean-Claude Gaudin, ministre de l'aménagement du territoire, de la ville et de l'intégration. Et par le Gouvernement ! (Sourires.)
M. André Vezinhet. J'y viendrai, monsieur le ministre. L'initiative revient tout de même à M. le rapporteur.
Cet important problème constitue l'élément de quotidienneté dans nos quartiers. En effet, la petite entreprise est celle qui, au pied de l'immeuble, va assurer l'activité, donc la vie, mais aussi, ne l'oublions pas, la sécurité. Cette disposition recueille donc l'approbation du groupe socialiste.
Cependant, et vous allez penser que je suis têtu, le coût qu'elle engendrera - je prends rendez-vous - aurait été largement compensé par la suppression des effets d'aubaine que nous évoquions tout à l'heure, si l'amendement y afférent avait été adopté.
Cela étant dit, je suis heureux que cette disposition ait été acceptée par le Gouvernement.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 22 rectifié, pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 7.
Articles 8 et 9