RAPPEL AU RÈGLEMENT
M. Paul Loridant.
Je demande la parole pour un rappel au règlement.
M. le président.
La parole est à M. Loridant.
M. Paul Loridant.
Monsieur le président, mon intervention se fonde sur les articles 11 et 36 du
règlement.
L'annonce de la privatisation du groupe Thomson a suscité un tel émoi dans
tout le pays que M. le Premier ministre vient d'annoncer - enfin, dirais-je -
la tenue d'un débat à l'Assemblée nationale.
Comment le Président de la République et son Premier ministre peuvent-ils
décider de leur propre chef d'engager quinze milliards de francs pour préparer
le démantèlement et la vente à un prix d'ami d'une entreprise aussi importante
pour la recherche et pour l'avenir industriel de notre pays ? Peuvent-ils
choisir seuls le ou les repreneurs ?
Je rappelle que Thomson emploie 80 000 salariés et réalise annuellement 75
milliards de francs de chiffre d'affaires, ce qui permet à la France de
disposer d'une position stratégique de premier ordre dans l'électronique tant
civile que militaire.
Au-delà des chiffres, Thomson représente aussi un savoir-faire considérable et
un potentiel de recherche et de développement important.
Dans le département de l'Essonne, un vif émoi s'est emparé des salariés du
centre de recherche de Thomson-Corbeville à Orsay, qui craignent, à juste
titre, de voir disparaître le fruit de leurs travaux au profit d'un groupe
coréen.
Contrairement aux affirmations de M. le Premier ministre, tout indique
aujourd'hui que Thomson souffre moins d'une mauvaise gestion que du manque de
moyens financiers et des mauvaises orientations imposées par l'Etat
actionnaire.
Les difficultés du groupe public sont liées à sa participation au capital du
Crédit lyonnais, aux retards de paiement de la Direction générale pour
l'armement et à une évidente sous-capitalisation de Thomson-Multimédia, qui
contraint cette filiale à s'endetter pour financer ses investissements.
Dans cette affaire, il paraît totalement aberrant que la représentation
nationale, les salariés et leurs représentants ainsi que les élus des communes
et des départements dans lesquels sont situés les laboratoires et les usines de
Thomson soient mis devant le fait accompli et soumis en quelque sorte au fait
du prince.
A cet égard, je tiens à saluer l'heureuse initiative du maire de Pessac, qui a
réuni, dans un souci de coordination, les élus des communes où sont implantées
des filiales de Thomson.
C'est pourquoi le groupe communiste républicain et citoyen a demandé, la
semaine dernière, la constitution d'une commission d'enquête parlementaire sur
les conditions annoncées pour la privatisation du groupe Thomson.
Nous demandons vivement la tenue d'un véritable débat au sein de notre
assemblée sur la situation de ce groupe et le rôle qu'il pourrait et devrait
jouer dans le cadre de la politique industrielle ambitieuse dont notre pays a
tant besoin.
A cette fin, nous vous demandons, monsieur le président, d'être notre avocat
auprès du bureau du Sénat afin de permettre à la commission des finances et à
celle des affaires économiques d'auditionner les dirigeants et les syndicats du
groupe ainsi que les élus locaux concernés pour que le Gouvernement puisse
organiser devant le Sénat, et pas seulement devant l'Assemblée nationale, un
débat sur l'avenir du groupe Thomson.
(Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe communiste
républicain et citoyen ainsi que sur celles du groupe socialiste.)
M. le président.
Je vous donne acte, monsieur Loridant, de votre rappel au règlement. Je me
ferai votre interprète auprès du bureau du Sénat ; quant à être votre avocat,
c'est une autre affaire....
(Sourires.)
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