M. le président. Je suis saisi d'une motion n° 46, présentée par MM. Allouche, Autain et Badinter, Mme ben Guiga, MM. Biarnès, Delanoé, Dreyfus-Schmidt et Estier, Mme Durrieu, M. Mélenchon, Mmes Pourtaud et Printz, MM. Richard et Rocard, et les membres du groupe socialiste et apparentés, et tendant au renvoi à la commission.
Cette motion est ainsi rédigée :
« En application de l'article 44, alinéa 5, du règlement, le Sénat décide qu'il y a lieu de renvoyer à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale le projet de loi adopté par l'Assemblée nationale, portant diverses dispositions relatives à l'immigration (n° 165, 1996-1997).
Je rappelle que, en application du dernier alinéa de l'article 44 du règlement, ont seuls droit à la parole sur cette motion l'auteur de l'initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d'opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
Aucune explication de vote n'est admise.
La parole est à Mme ben Guiga, auteur de la motion.
Mme Monique ben Guiga. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il me revient, au nom du groupe socialiste, de demander le renvoi de ce projet de loi à la commission. Les raisons techniques qui motivent une telle demande la justifieraient à elles seules, mais j'y ajouterai les arguments philosophiques et politiques qui ont tant d'importance pour nous, Français établis hors de France, car ils sont au coeur de notre fidélité à notre pays.
Les raisons techniques sont les suivantes : cette loi aurait justifié la consultation pour avis, d'une part, de la commission des affaires sociales et, d'autre part, de la commission des affaires étrangères. Ces deux commissions n'ont pas été saisies ; nous demandons qu'elles le soient.
M. Pierre Biarnès. Très bien !
Mme Monique ben Guiga. La commission des affaires sociales aurait dû être saisie parce que les articles 3 bis, 3 ter et 10 touchent au code du travail. C'est ainsi que les articles 3 bis et 3 ter tendent à faire infliger, par l'autorité administrative, une sanction de retrait du titre de séjour à l'étranger employeur de main-d'oeuvre illégale. Nous approuvons totalement la sévérité de la répression de ce délit, et nous aimerions bien que la majorité sénatoriale se montre constamment, je dis bien « constamment », déterminée à lutter contre l'exploitation des travailleurs les plus démunis. (Très bien ! sur les travées socialistes.)
Mais le retrait de cette disposition de la loi sur le travail illégal et son insertion dans un texte relatif à l'immigration est inacceptable.
M. Jacques Mahéas. Tout à fait !
Mme Joëlle Dusseau. Très bien !
Mme Monique ben Guiga. On renforce ainsi l'amalgame - car là, il y a amalgame ! - entre le travail clandestin et les étrangers en situation irrégulière,...
M. Jacques Mahéas. Absolument !
Mme Monique ben Guiga. ... alors que ceux-ci ne représentent que 6 % des personnes verbalisées pour ce délit.
M. Roland Courteau. C'est vrai !
Mme Monique ben Guiga. Par ailleurs, ces articles instituent une sanction administrative pour un délit non constitué, au stade de l'infraction.
M. Guy Allouche. Très bien !
Mme Monique ben Guiga. Enfin - et c'est le plus grave - ils instituent une double peine pour l'étranger, cela deux semaines après que la majorité sénatoriale, sous l'influence de lobbies patronaux, a atténué, par maints artifices, les mesures sévères votées par l'Assemblée nationale à l'encontre des employeurs de main-d'oeuvre illégale et de leurs tout-puissants commanditaires. Il y a là deux poids deux mesures. Soyez puissant ou misérable !
M. Jacques Mahéas. Absolument !
Mme Monique ben Guiga. C'est inacceptable !
De tels articles, même s'ils étaient équitables, ne sont pas à leur place dans un texte sur l'immigration. Ils étaient du ressort de la commission des affaire sociales.
M. Roland Courteau. Absolument !
Mme Monique ben Guiga. Il en est de même de l'article 10, qui institue des contrôles d'identité sur les lieux de travail, effectués par des officiers de police judiciaire hors de la présence d'inspecteurs du travail. Est-il cohérent de prétendre, au quatrième alinéa de cet article, que l'on contrôle l'identité des personnes occupées « dans le seul but de vérifier qu'elles figurent sur le registre », c'est-à-dire, en principe, pour vérifier le caractère légal ou illégal de l'emploi, et, simultanément, de retirer cette attribution aux inspecteurs du travail ? Disons-le clairement, s'il s'agit de préparer des rafles d'étrangers à la sortie de l'atelier, les officiers de police judiciaire sont certainement compétents. En revanche, s'il s'agit de réprimer le travail illégal, que les coupables - employeurs et employés - soient Français ou étrangers, le transfert de compétence est totalement injustifié. (Marques d'approbation sur plusieurs travées socialistes.)
Pour ces trois articles, nous demandons que la commission des affaires sociales soit consultée.
Par ailleurs, la commission des affaires étrangères aurait dû être saisie, pour trois raisons.
D'abord, en raison du problème diplomatique qui est posé par la rétention du passeport de l'étranger en situation irrégulière. Ensuite, en raison des conséquences que ce texte peut avoir sur le statut des Français établis à l'étranger, dans leur pays de résidence. Enfin - et c'est le plus important - en raison de la dimension diplomatique de ces dispositions, qui concernent des citoyens de plusieurs dizaines de nations avec lesquelles nous entretenons les plus étroites relations.
Tout d'abord, la rétention d'un passeport étranger se heurte au fait que cette pièce appartient non pas à son détenteur, mais à l'Etat qui l'a émis. La mention en est portée sur votre passeport, sur le mien et ainsi que le vôtre, sur tous les passeports étrangers ; c'est la règle.
Seuls quelques pays, telle l'Arabie Saoudite, retiennent des passeports, mais ne sont pas des références d'Etat de droit.
M. Jean Chérioux. Oh !
Mme Monique ben Guiga. La France ne peut guère se targuer de leur procédé humiliant et irrespectueux du droit d'aller et venir pour rendre légale, une fois de plus, une pratique administrative attestée - cela se fait dans la plupart des préfectures - mais jusqu'à ce jour parfaitement illégale. Nous proposerons, par un de nos amendements, un moyen de s'assurer de l'identité d'un étranger en situation irrégulière, tout en lui laissant la seule pièce d'identité qu'il détient, qui lui assure un minimum de sécurité administrative en France et grâce à laquelle il pourra quitter de son propre chef le territoire français...
M. Robert Pagès. Absolument !
Mme Monique ben Guiga. ... sans avoir à aller récupérer un passeport détenu il ne sait où.
M. Jean Chérioux. Et qu'il pourra détruire par la suite !
Mme Monique ben Guiga. Nul besoin, pour obtenir ce résultat, de porter atteinte à la souveraineté d'Etats qui subissent déjà bien assez d'humiliations en la personne de leurs ressortissants émigrés, et nous qui vivons à l'étranger, nous entendons cela tous les jours.
Et les Français établis à l'étranger ? Se figure-t-on que notre politique à l'égard des étrangers en France n'a aucune incidence sur leur sort ? On aurait tout de même pu interroger la commission des affaires étrangères sur ce point.
Je représente ici 1,7 million de Français établis dans le monde entier.
M. Michel Caldaguès. Mais pas la commission des affaires étrangères !
M. Charles de Cuttoli. Vous n'êtes pas la seule à les représenter ! Nous sommes douze !
Mme Monique ben Guiga. La moitié d'entre eux, qui résident dans l'Union européenne, ont vu leur statut juridique s'améliorer parce qu'ils sont devenus des citoyens européens. Tous les autres, avec des nuances liées au régime politique de leur pays de résidence et à leur propre statut socio-économique, savent, comme les étrangers en France, ce que signifie la privation de citoyenneté.
C'est la fragilité du statut, quand il faut renouveler sa carte de séjour, son permis de travail tous les ans. C'est l'insécurité juridique pour sa personne ou pour ses biens, quand une législation d'exception vous prive des droits reconnus aux ressortissants du pays. C'est l'insécurité provoquée par des pratiques administratives xénophobes qui renchérissent sur cette législation d'exception.
C'est trop souvent cela notre vécu d'expatriés. Demandez-le aux mères françaises auxquelles leurs enfants ont été arrachés à l'étranger, à la suite de procédures juridiques iniques. Demandez-le à la mère de Sana et Sabrina retenues en Egypte depuis l'âge de deux et trois ans et qui ont oublié leur mère ! Demandez-le aux deux enfants qui sont retenus en Allemagne. Vous verrez ! (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Jean Chérioux. Cela n'a rien à voir !
M. Josselin de Rohan. C'est hors sujet !
Mme Monique ben Guiga. C'est trop souvent cela le vécu des étrangers en France. Dans notre pays aussi les étrangers sont séparés de leurs enfants.
M. Jean Chérioux. Cela n'a rien à voir ! C'est ridicule ! C'est une assimilation scandaleuse !
Mme Monique ben Guiga. C'est la première raison pour laquelle nous, Français de l'étranger, nous sommes nombreux à nous sentir solidaires des étrangers en France. (Applaudissements sur les travées socialistes et protestations sur les travées du RPR.)
M. Josselin de Rohan. N'importe quoi !
Mme Monique ben Guiga. Mais il faut prendre conscience aussi que nous sommes nous-mêmes atteints en France par la xénophobie qui frappe les étrangers. Nous sommes plurinationaux, pour la moitié d'entre nous. Ne l'oubliez pas ! Et c'est nous qui représentons la France à l'étranger ! Nous portons en France des patronymes délictueux. Notre nationalité française est suspectée. Nous sommes atteints en la personne de nos enfants, sangs mêlés qui conjuguent parfois le délit de faciès avec le délit de patronyme. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. Josselin de Rohan. Ce que vous dites est odieux ! Vous n'avez pas le droit de parler ainsi !
M. Jean Chérioux. C'est scandaleux !
M. Pierre Biarnès. C'est pourtant la vérité !
M. Jean-Luc Mélenchon. La vérité est là !
Mme Monique ben Guiga. Nous sommes atteints par la suspicion sur les mariages dits mixtes (Exclamations sur les travées du RPR.) ...
M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie, laissez Mme ben Guiga s'exprimer.
Mme Monique ben Guiga. Nous sommes atteints, disais-je, par la suspicion sur les mariages mixtes parce que, évidemment, nous, nos enfants, épousons les étrangers au milieu desquels nous vivons. Et là, brutalement, les exigences de l'administration deviennent compliquées, totalement incompréhensibles, surtout depuis 1993.
M. Jacques Mahéas. Çà, c'est du vécu !
M. Jean Chérioux. Vous n'avez pas entendu parler des mariages blancs ?
Mme Monique ben Guiga. Où célébrer le mariage ? Comment obtenir le droit de vivre ensemble en France ? L'histoire d'amour tourne vite au cauchemar kafkaïen.
Nous sommes atteints, nous aussi, par le poids de la procédure du certificat d'hébergement et par la procédure du visa, ainsi que par leur arbitraire.
Comment recevoir nos parents, nos collègues, nos amis étrangers lors de nos séjours en France ? La course d'obstacles administratifs qui leur est imposée, ainsi qu'à nous, tourne souvent à l'impossibilité de les accueillir.
Enfin, nous sommes atteints, évidemment, dans nos pays de résidence parce que la règle des relations internationales est la réciprocité. Quand, sur l'initiative de la majorité socialiste, le Parlement unanime a accordé aux étrangers en 1984 des cartes de séjour de dix ans impliquant le droit au travail, les Français expatriés ont obtenu le même avantage dans de nombreux pays et cela a transformé leur vie. Nous pouvons craindre, à l'occasion de la renégociation de conventions bilatérales d'établissement, ou même par des mesures unilatérales de rétorsion, de perdre ces garanties dont nous savons le prix.
A contrario, comment espère-t-on favoriser l'expatriation de centaines de milliers de jeunes Français - le rêve du président de cette assemblée et celui du Président de la République - en réduisant les droits des étrangers en France ? L'incohérence est manifeste. On ne peut vouloir à la fois une immigration à taux zéro en France et une forte expatriation française.
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Nous parlons de l'immigration irrégulière !
Mme Monique ben Guiga. Les migrations sont des échanges. Si la France donne l'exemple d'une fermeture hermétique - et nécessairement illusoire - les autres pays agiront-ils différemment ? (Exclamations sur plusieurs travées du RPR.)
M. Josselin de Rohan. Personne ne dit cela !
Mme Marie-Claude Beaudeau. Si !
Mme Monique ben Guiga. Nous avons des Français clandestins - qui ne sont pas des aventuriers - irréguliers, sans papiers, partout,...
M. Jean Chérioux. Partout ! Il n'y a que cela !
Mme Monique ben Guiga. ... aux Etats-Unis, en Amérique latine, en Asie, partout où la législation est aussi déraisonnablement verrouillée que la nôtre.
Enfin, la question de la cohérence de ce projet de loi avec notre politique francophone a-t-elle été évoquée par la commission des lois ? Il n'en apparaît rien. Là aussi, la commission des affaires étrangères aurait pu donner un avis éclairé.
Pour l'essentiel, les étrangers auxquels vous voulez interdire en France le séjour irrégulier - tout autant que le séjour régulier pour dire la vérité - à voir les restrictions apportées à la délivrance des visas de tourisme, d'études et au regroupement familial, ces étrangers dis-je, sont des ressortissants des pays du Maghreb et de l'Afrique subsaharienne. Or, c'est avec leurs Etats que notre coopération est la plus active et la plus largement financée. Nous finançons des programmes de remise à niveau des systèmes scolaires en langue française, nous faisons rêver des générations d'élèves et d'étudiants sur la France, en français, et nous voudrions qu'ils n'aient pas l'idée de venir dans notre pays, étudier, passer des vacances et, pour une toute petite minorité d'entre eux, s'y fixer ? (Protestations sur les travées du RPR.)
M. Jean Chérioux. Régulièrement !
Mme Monique ben Guiga. Notre politique est là, totalement schizophrène, et se résume en ce discours absurde : « Apprenez le français, pensez en français, pensez comme des Français, aimez la France, achetez français,... »
M. Jean-Pierre Schosteck. Et respectez les lois de la France !
Mme Monique ben Guiga. ... mais, surtout, ne mettez pas le pied en France ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes et exclamations sur les travées du RPR.)
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Et venez régulièrement dans notre pays, en respectant les lois de la France !
M. Jean Chérioux. Respectez les lois de la France !
M. Jacques Mahéas. La sincérité vous gênerait-elle ?
Mme Monique ben Guiga. Plus grave encore aux yeux des Français qui connaissent l'opinion internationale : la politique que l'on mène en France depuis 1993 en matière de police des étrangers porte atteinte à la dignité et au prestige international de la France. (M. Paul d'Ornano sourit.) Aujourd'hui, la France est trop souvent perçue dans le monde comme un pays xénophobe dans lequel les atteintes aux droits de l'homme et à l'Etat de droit se multiplient.
M. Jean-Pierre Schosteck. Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre !
Mme Monique ben Guiga. La xénophobie montante en France se manifeste d'abord, pour l'étranger, dans les services de délivrance des visas dans les consulats. Allez-y donc, mon cher collègue !
Installés à l'économie, dans des locaux inadaptés, trop petits, parfois sordides, sans salle d'attente ou avec une salle d'attente sans siège, ces services de visas n'ont jamais été dotés que d'agents en contrat précaire, sans formation, sous-payés, souvent sans réelle couverture sociale et surmenés.
De ce fait, ce lieu de première rencontre entre l'étranger et la France est un lieu de confrontation, où la courtoisie est absente.
Quand sera-t-il donné au ministère des affaires étrangères les moyens d'effectuer cette tâche ingrate ?
M. Jean Chérioux. On est loin du débat !
Mme Monique ben Guiga. Les diplomates sont contraints, faute de moyens, de défaire dans les services des visas les liens qu'ils passent leur temps à tisser dans toutes leurs autres activités. C'est une politique de Pénélope, pour ne pas dire une politique de Gribouille.
Enfin, l'image de la France est ternie par la progression du Front national, ...
M. Josselin de Rohan. Vous l'aidez puissamment par vos propos !
M. Jean Chérioux. C'est vous qui l'encouragez ! Il n'a jamais été aussi fort que depuis 1981 !
Mme Monique ben Guiga... non seulement aux élections, mais surtout dans les esprits. Les démons des années quarante agissent à nouveau dans notre pays. Et rappelons-nous que, dès 1938, l'opinion y avait été préparée par des lois de contrôle des étrangers déjà contraires aux principes républicains.
M. Jean Chérioux. Pas de larmes de crocodile !
Mme Monique ben Guiga. Nous sommes dans une situation semblable aujourd'hui. Sous le coup des mutations économiques, culturelles et, surtout, du chômage, des pans de plus en plus larges de la société ont perdu leurs repères. L'opinion est fragilisée. Elle ne sait plus où commence ni où s'arrête la légalité républicaine.
Contrairement à votre conviction, que je crois réellement sincère, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, une telle loi contribue à la montée de la xénophobie, car elle donne à croire que c'est en restreignant la liberté individuelle des étrangers, en les privant de la protection de la justice pour les soumettre aux procédures expéditives de l'administration et de la police, que la sécurité et l'emploi reviendront en France.
La xénophobie est malheureusement installée dans la société française, les étrangers au milieu desquels nous vivons, nous, dans le monde entier, le savent, et ils s'en inquiètent : pour la France d'abord, et surtout pour les valeurs qu'elle incarne à leurs yeux
Si la France transige avec l'Etat de droit, si elle instaure une législation d'exception pour les étrangers, si elle se soustrait au devoir de donner asile aux réfugiés - et c'est le cas en ce moment pour les Algériens victimes de la guerre - de quelle dignité pourrons-nous nous prévaloir, nous Français à l'étranger ? Au nom de quoi la France prétendra-t-elle tenir son rang dans le monde ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées socialistes ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jacques Larché, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Il y aurait beaucoup à dire sur l'intervention que nous venons d'entendre.
Sur le fond, tout d'abord, il existe dans notre droit un principe, la présomption d'innocence, dont je voudrais croire en cet instant qu'elle peut être transformée en présomption de bonne foi. Je voudrais le croire car, à vous entendre, madame ben Guiga, on se rend compte que vous avez sans cesse détourné ce texte dans vos affirmations, dans vos commentaires, dans vos projections.
Nous savons ce que nous voulons faire. Nous vous l'avons dit, et nous le répétons : ce projet de loi vise à protéger les étrangers en situation régulière et à empêcher une immigration clandestine qui ne peut que nuire, précisément, à la situation de ceux qui sont régulièrement installés sur notre sol.
Vous ne voulez pas le voir, nous ne voulez pas l'admettre. Vous vous êtes lancée dans un débat de fond quelque peu passionné qui était très loin d'une motion de renvoi à la commission.
Nous vous avons écoutée. Est-il besoin de vous dire que vous ne nous avez pas convaincus ?
Un sénateur socialiste. C'est dommage !
M. Jacques Larché, président de la commission des lois. Les remarques que vous avez faites étaient si éloignées de ce que nous avons l'intention de faire qu'il existe sur ce point, reconnaissons-le, un fossé entre vous et nous, entre ce que nous voulons faire et ce que vous affectez de croire que nous voudrions faire, bien que vous sachiez très bien qu'il n'en est rien.
Sur le plan de la procédure, ensuite, vous auriez souhaité que deux commissions soient saisies. Président de la commission des lois, je n'ai jamais été saisi d'une telle demande, ni de la commission des affaires sociales ni de la commission des affaires étrangères. L'avez-vous proposé au sein de votre commission ? Je n'en sais rien.
Vous nous le proposez maintenant. Acceptez de croire que cette demande, à supposer qu'elle soit fondée - et je ne vois pas pourquoi elle le serait - apparaît quelque peu tardive.
Reste un élément, que vous n'avez d'ailleurs pas complètement traduit dans votre propos, au sujet du « travail sérieux de la commission des lois ».
J'ai la faiblesse de penser que nous avons fait un travail sérieux. Je ne vais pas vous le détailler, je sais simplement que les membres de la commission des lois n'ont pas pensé un seul instant qu'ils avaient bâclé leur ouvrage. Le contraire d'un travail sérieux n'est-il pas, en effet, un travail bâclé ?
Nous avons donc abouti à un texte, dont nous allons maintenant débattre. Un certain nombre de propositions émanent de vos rangs. Nous les avons examinées, nous aurons l'occasion de dire ce que nous en pensons et il n'apparaîtra pas, je pense, à la Haute Assemblée qu'il soit nécessaire de revenir devant la commission des lois pour les examiner à nouveau. Quant à l'avis de la commission des affaires sociales, il n'a pas été demandé, pas plus que celui de la commission des affaires étrangères, et il ne suffit pas que l'un de ses membres le fasse pour que cette demande soit tenue pour valable.
Nous allons donc, avec votre permission et après le vote, négatif, je pense, de la majorité de la Haute Assemblée, entamer notre travail, c'est-à-dire l'examen d'un texte dont nous avons la faiblesse de penser qu'il est équilibré et qu'il correspond à un certain nombre de besoins essentiels. (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendant, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Je mets aux voix la motion n° 46, repoussée par la commission et par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe du RPR.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.
(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 97:
Nombre de votants | 317 |
Nombre de suffrages exprimés | 317 |
Majorité absolue des suffrages | 159 |
Pour l'adoption | 96 |
Contre | 221 |
Nous passons à la discussion des articles.
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