M. le président. Mme Gisèle Printz rappelle à Mme le ministre de l'environnement que, le 4 février dernier, un train de combustible nucléaire en provenance d'Allemagne a déraillé à Apach, à la frontière française.
Cet incident n'a eu heureusement aucune conséquence fâcheuse pour la sécurité des riverains. Il a causé cependant, à juste titre, une vive émotion et a suscité plusieurs questions de la part de la population, questions qui attendent une réponse du Gouvernement.
Premièrement, pourquoi ce convoi, en partance de Lingen, à la frontière entre l'Allemagne et les Pays-Bas, et à destination de l'Angleterre, effectue-t-il un parcours aussi long par voie terrestre en passant par la Lorraine, la Champagne-Ardenne et le Nord - Pas-de-Calais ?
Deuxièmement, est-il vrai que plusieurs convois identiques empruntent cet itinéraire plusieurs fois par semaine ?
Troisièmement, peut-on affirmer que la sécurité des populations est bien assurée ?
Quatrièmement, les causes de l'accident d'Apach ont-elles pu être définies de manière formelle ?
Enfin, cinquièmement, la possibilité d'un attentat commis par des militants antinucléaires allemands est-elle concevable ?
Les populations de ces régions étant très inquiètes, elle demande à Mme le ministre de l'environnement de les rassurer en prenant toutes les mesures pour que de tels incidents ne se reproduisent plus. (N° 607.)
La parole est à Mme Printz. Mme Gisèle Printz. Madame le ministre, le mardi 4 février 1997, un train de combustible nucléaire en provenance d'Allemagne a déraillé à Apach, petit village situé à la frontière franco-allemande.
La locomotive et les trois premiers wagons qu'elle tractait ont, pour une raison toujours indéterminée, quitté les rails alors que l'ensemble roulait à 28 kilomètres à l'heure.
Le train de marchandises, qui arrivait de Lingen, en Basse-Saxe, dans le nord de l'Allemagne, transportait, dans quatre wagons spécialement étudiés à cet effet, de l'uranium provenant de la centrale de Emsland, selon le ministre de l'environnement allemand, présent sur les lieux. Ces combustibles radioactifs étaient destinés à la centrale de retraitement de Sellafield, en Angleterre.
Cet incident n'a eu, heureusement, aucune conséquence fâcheuse pour la sécurité des riverains. Il a cependant causé, à juste titre, une vive émotion et a suscité de la part de la population plusieurs questions qui attendent une réponse du Gouvernement.
Premièrement, pourquoi ce convoi, en partance de Lingen, à la frontière entre l'Allemagne et les Pays-Bas, et à destination de l'Angleterre effectue-t-il un parcours aussi long par voie terrestre, en passant par la Lorraine, la Champagne-Ardenne et le Nord - Pas-de-Calais ?
Deuxièmement, est-il vrai que plusieurs convois identiques empruntent cet itinéraire plusieurs fois par semaine ?
Troisièmement, peut-on affirmer que la sécurité des populations est bien assurée ?
Quatrièmement, les causes de l'accident d'Apach ont-elles pu être définies de manière formelle ?
Cinquièmement, enfin, la possibilité d'un attentat commis par des militants antinucléaires allemands est-elle concevable ?
Les populations de ces régions sont très inquiètes. Elles vous demandent, madame le ministre, de les rassurer en prenant toutes les mesures pour que de tels incidents ne se reproduisent plus.
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Corinne Lepage, ministre de l'environnement. Madame le sénateur, voici les réponses que je souhaite apporter à vos questions, et d'abord à la première d'entre elles.
Les conteneurs qui rejoignent le port de Dunkerque sont ceux qui sont destinés à être retraités dans l'usine de retraitement de Sellafield, en Grande-Bretagne.
En son état actuel, la réglementation internationale du transport des matières radioactives par voie ferrée - convention dite « RID » - n'impose pas d'itinéraire dans la mesure où la sûreté doit être assurée par le conteneur.
L'industriel britannique BNFL, en charge des transports vers la Grande-Bretagne, a choisi Dunkerque, cette solution étant pour lui plus avantageuse pour les raisons suivantes.
Jusqu'à récemment, les combustibles irradiés étaient chargés avec leur wagon de transport dans le navire Nord - Pas-de-Calais. Dunkerque était le seul port du continent permettant ce type de liaison ferrée avec la Grande-Bretagne. Le Nord - Pas-de-Calais a toutefois été remplacé par un navire dédié au transport de combustibles irradiés depuis 1995, l' European Sheerwater, qui n'est plus soumis à la même contrainte.
Enfin, les transports à destination de la Grande-Bretagne proviennent aussi de Suisse et de Belgique. Dunkerque est alors apparu comme un bon compromis économique entre toutes les centrales d'où proviennent les combustibles irradiés pour lesquels cet industriel a des contrats.
J'en viens à votre deuxième question, concernant la fréquentation de l'itinéraire.
Oui, cet itinéraire est fréquenté : il circule à peu près 350 conteneurs de combustibles irradiés issus de centrales nucléaires, en France, tous les ans. Parmi ceux-ci, une centaine viennent d'Allemagne et passent par Forbach ou par Apach ; un tiers rejoint l'usine de retraitement de Sellafield via Dunkerque, les deux autres tiers rejoignant l'usine de retraitement de La Hague.
Troisième question : peut-on affirmer que la sécurité des populations est bien assurée ?
En l'état actuel de la réglementation - cette réglementation relève du ministère des transports - la sûreté du transport des combustibles irradiés repose fondamentalement sur le choix de conteneurs devant conserver leur intégrité en situations anormales et accidentelles. Ces conteneurs sont soumis à des épreuves réglementaires représentatives des situations accidentelles et faisant l'objet de recommandations internationales, dans le détail desquelles je n'entre pas. Ces colis doivent donc faire l'objet d'autorisations du ministère des transports, fondées notamment sur l'expertise des résultats des épreuves réglementaires par l'Institut de protection et de sûreté nucléaire, l'IPSN. Pour un contenu radioactif de 3 à 4 tonnes, ces conteneurs pèsent près de 100 tonnes. Cela vous donne la mesure.
L'IPSN est par ailleurs informé des incidents les plus mineurs survenant au cours du transport de ces conteneurs de combustibles irradiés. Il y en a eu vingt-cinq entre 1978 et 1995. Deux d'entre eux ont eu un impact direct sur le conteneur, sans conséquences graves, la plupart des autres ayant plutôt affecté le véhicule de transport lui même, sans aucune répercussion sur le conteneur.
Cependant, le nombre croissant de transports de combustibles irradiés du nucléaire ou de transports liés au nucléaire doit nous amener à nous interroger. Les mesures prises doivent-elles être renforcées ? L'organisation choisie est-elle la bonne ? La transparence et l'information du public sont-elles suffisantes ?
L'évolution, souhaitée par le Gouvernement, vers plus d'indépendance de l'expertise et plus de transparence de l'Institut de protection et de sûreté nucléaire va certainement dans le bon sens. Il faut un retour d'expertise de tous les incidents qui se seront produits, afin d'améliorer la sûreté.
Quatrième question : quelles sont les causes de l'accident d'Apach ?
L'accident a eu lieu sur une voie de service à l'occasion d'une manoeuvre, donc à faible vitesse. Ces voies font seulement l'objet d'une inspection visuelle périodique de la SNCF, à la différence des grandes lignes, qui font l'objet d'une inspection périodique par ultrasons. Le déraillement d'Apach est consécutif à la propagation d'une fissure longitudinale qui a progressé le long du rail jusqu'à une soudure, le passage du train ayant provoqué la rupture.
Enfin, en ce qui concerne les risques d'attentat, je dirai que la prévention contre ce type d'actes relève d'abord de mesures de police ; toutefois, les trains de transport de combustibles irradiés font l'objet d'un suivi particulier par la SNCF. Il s'agit, de surcroît, d'emballages robustes, comme le montre la réponse à la troisième question. Cela étant, si la préoccupation de l'attentat doit être très présente dans l'organisation de ces transports, la sûreté au quotidien - c'est-à-dire le risque d'accident de la circulation ou d'accident de manutention et ses conséquences - doit aussi être prise en compte à haut niveau, puisqu'il y a de plus en plus de transports de matières radioactives.
Telles sont, madame le sénateur, les réponses, circonstanciées, me semble-t-il, que je suis amenée à apporter à vos questions.
Mme Gisèle Printz. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à Mme Printz.
Mme Gisèle Printz. Madame le ministre, je vous remercie de vos réponses. J'espère qu'elles seront de nature à rassurer les populations concernées, à qui je les transmettrai.

TRACÉ DE RACCORDEMENT DE L'AUTOROUTE A 16
À LA FRANCILIENNE