M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Hoeffel, pour explication de vote.
M. Daniel Hoeffel. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, bien entendu, je voterai la présente proposition de loi, mais permettez-moi d'insister très brièvement sur quatre de ses caractéristiques, qui ont d'ailleurs été mentionnées tout à l'heure au cours de la discussion générale.
En premier lieu, cette proposition de loi est le fruit d'une démarche consensuelle, toutes tendances politiques confondues. Elle exprime non seulement notre attachement, à nous parlementaires, au régime local, mais aussi l'attachement de notre population à son régime local.
En deuxième lieu, s'agissant d'un régime local, d'aucuns pourraient estimer que c'est un héritage désuet. Mais nous considérons, pour notre part, suivant en cela notre collègue M. Dreyfus-Schmidt, que c'est plutôt une piste d'avenir qui pourrait être explorée, afin qu'elle soit utilisée sur un plan plus général. En effet, ce régime est géré au plus proche du terrain et des réalités, c'est-à-dire à un niveau où l'on a le sentiment que l'acte de gestion porte ses fruits et que l'on en voit les conséquences. C'est la contrepartie d'un effort, qui est accordée par une institution gérée par les syndicats, les mutualistes et les familles. Pourquoi ne pas généraliser ce système ?
En troisième lieu, notre régime est équilibré. Voilà qui montre d'ailleurs qu'il est possible, même en matière de sécurité sociale, d'avoir des régimes équilibrés ! Il est vrai que la proximité de la gestion y est, à mon avis, pour beaucoup. Quoi qu'il en soit, les propositions qui nous sont faites sont raisonnables et permettent de préserver cet équilibre financier.
En quatrième lieu, enfin, nous réaliserons aujourd'hui un geste d'équité et de justice vis-à-vis de ceux qui, après avoir cotisé durant toute leur vie de labeur, ont quitté, à un moment ou à un autre, l'Alsace-Moselle.
En cet instant, monsieur le secrétaire d'Etat, je tiens à vous remercier, de votre appui : n'avez-vous pas levé le gage que constituait l'article 5 de cette proposition de loi ?
Je remercie également la commission des affaires sociales et son président, qui a eu l'occasion, avec une délégation, voilà quelques années, de venir sur place pour y étudier le régime local. Il en aura probablement tiré le sentiment que, loin d'être périmé, ce régime est peut-être prémonitoire.
Enfin, je remercie le rapporteur de ce texte, M. Jean-Louis Lorrain, car ses arguments convaincants auront permis d'arracher à notre assemblée un accord qui, je l'espère, sera unanime. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Fischer.
M. Guy Fischer. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le groupe communiste républicain et citoyen votera cette proposition de loi, qui vise à permettre aux retraités ayant quitté les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle mais ayant cotisé un certain nombre de trimestres au régime local d'assurance maladie de continuer à bénéficier de ce régime.
Il s'agit bien évidemment, comme de nombreux orateurs l'ont rappelé, d'une mesure de justice sociale pour des salariés légitimement attachés à un régime particulièrement avantageux, surtout face aux remises en cause et aux baisses de remboursements subies par les salariés affiliés au régime général.
C'est donc là une mesure de justice ; je pense, en particulier, aux dizaines de milliers de salariés de la sidérurgie qui, de plan de casse en plan de restructuration, ont été obligés de s'expatrier hors de leur département pour trouver un emploi. Mais ce n'est qu'un exemple parmi tant d'autres.
Il est bien normal que des salariés ayant cotisé parfois plusieurs dizaines d'années ne soient pas doublement pénalisés.
Nous souhaitons donc, comme M. Hoeffel, que puissent être explorées les pistes qui ont été ouvertes, notamment, par M. Dreyfus-Schmidt. En effet, une telle couverture sociale étendue satisferait à n'en pas douter nombre d'exclus soumis au régime du forfait journalier. Mais nous aurons l'occasion d'en reparler !
Comme je l'ai dit en introduction, nous voterons donc le texte qui nous est proposé. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. Ostermann.
M. Joseph Ostermann. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, le texte qui nous est soumis aujourd'hui revêt à mes yeux, comme à ceux des collègues de mon groupe, une très grande importance.
En effet, d'abord, à l'époque où notre Haute Assemblée avait chargé la commission des affaires sociales, sous la responsabilité de son président, M. Fourcade, de rédiger un rapport d'information sur le régime local d'assurance maladie dans les départements d'Alsace et de Moselle - c'était en février 1992 - il m'avait semblé, à la suite des nombreux entretiens que nous avions pu avoir avec les responsables locaux de la sécurité sociale, qu'il faudrait, le moment venu, permettre au législateur de se prononcer sur cette situation.
C'est donc très volontiers que j'ai accepté d'être cosignataire de la proposition de loi préparée par notre collègue et ami, Daniel Hoeffel.
Par ailleurs, il faut avoir conscience du grand intérêt que la population d'Alsace et de Moselle attache à ce régime local.
Il s'agit pour elle tout à la fois d'une partie importante de son héritage historique et d'une dimension devenue essentielle de son avenir, un élément de sa spécificité.
Ce texte devrait, à mons sens, faciliter une meilleure organisation d'un système qui, s'il a déjà maintes fois fait ses preuves, doit aujourd'hui être adapté aux exigences du XXIe siècle.
Le problème principal qui se pose concerne les conditions dans lesquelles les retraités, anciens bénéficiaires du régime, pourraient de nouveau être couverts par celui-ci.
Si, dans un article du projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économiques et financier, le gouvernement précédent avait déjà envisagé, en avril 1997, de réintégrer ces retraités qui ne sont plus domiciliés en Alsace-Moselle, la proposition que nous étudions à ce jour devrait, en assouplissant le principe de territorialité, conférer une base légale à cette disposition.
Il nous paraît fondamental, du point de vue de l'équité, que puissent continuer à bénéficier de ce régime, sous certaines conditions, alors même qu'ils résident hors des trois départements, les pensionnés de vieillesse qui y ont cotisé dans le passé, les titulaires de pensions d'invalidité et de rentes « accidents du travail » ainsi que les bénéficiaires d'allocations de chômage et de préretraite.
La mise en exergue, à l'article 4 du texte, de l'instance de gestion de ce régime local d'assurance maladie n'est pas inutile. Elle a le mérite de souligner le rôle moteur qui est le sien, compte tenu des enjeux qui sont en cause.
Je tiens d'ailleurs à souligner sur ce point l'excellent travail de notre collègue Jean-Louis Lorrain, qui a permis de réaffirmer l'autonomie du régime, en mentionnant que les cotisations sont déterminées par l'instance de gestion.
Si, après la guerre, le général de Gaulle a suscité l'impulsion nécessaire à la création d'un système de sécurité sociale à l'échelon national, le souhait de Jacques Chirac de favoriser la prise en compte des spécificités locales est aujourd'hui en train de se réaliser.
Les Alsaciens-Mosellans ne réclament pas la reconnaissance d'un particularisme exacerbé, mais veulent se donner les moyens d'une efficacité en matière de prestation sociale.
C'est pourquoi à titre personnel, mais aussi au nom du groupe du RPR, j'apporte mon plus vif soutien aux dispositions de la présente proposition de loi. (Applaudissements.)
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission des affaires sociales. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Pierre Fourcade, président de la commission. Monsieur le secrétaire d'Etat, je veux, d'abord, remercier le Gouvernement d'accepter la proposition de loi de notre collègue Daniel Hoeffel, proposition rapportée de manière parfaite par M. Lorrain et sur laquelle va intervenir dans un instant un vote unanime et consensuel, ce qui, dans la période actuelle, est tout de même assez rare.
Ce texte présente, à mes yeux, un triple intérêt.
Premièrement, il montre qu'en décentralisant la gestion d'un système d'assurance maladie - en l'espèce, nous sommes dans le cadre de trois départements - on a une meilleure connaissance des problèmes concrets qui sont posés à nos concitoyens et une meilleure maîtrise de l'évolution des dépenses. En effet, à l'examen de l'évolution du régime, régime que nous avions étudié sur place, en 1992, comme l'a rappelé M. Ostermann, on s'aperçoit que la progression des dépenses de maladie, en dépit d'un taux de remboursement très fort, est tout à fait raisonnable.
Deuxièmement - c'est une caractéristique tout à fait intéressante du régime - on constate que les avantages supplémentaires accordés par rapport au régime général découlent de l'acceptation par les salariés d'une cotisation supplémentaire. Cette cotisation est faible ; de 1 %, elle sera portée à 1,2 % dans certains cas.
Cela prouve, en tout cas, que l'ensemble des salariés de ces trois départements acceptent une augmentation de leurs charges en contrepartie d'un remboursement à 90 %, de l'effacement du forfait hospitalier, etc.
Dans la conjoncture actuelle, alors que nous nous demandons toujours s'il vaut mieux organiser des remboursements, des déremboursements ou organiser différemment l'ensemble du financement des dépenses de santé, ce point me paraît important.
Enfin, troisièmement, on voit que ce régime ne s'oriente nullement vers la fiscalisation. Il repose sur des cotisations : cotisations des entreprises, qui ne sont pas concernées par ce texte puisqu'elles gardent, notamment en matière de retraite, une cotisation analogue à celle qu'elles acquittent sur l'ensemble du territoire national, et cotisations supplémentaires des salariés.
Cela montre qu'on pourrait sans doute non pas généraliser le système, monsieur Dreyfus-Schmidt, car chaque région a ses spécificités, ses traditions, ses habitudes, mais parvenir à une meilleure maîtrise de notre système de protection sociale en le décentralisant, en confiant à ceux qui sont sur le terrain la faculté de déterminer ce qui est possible en matière de cotisations supplémentaires au regard des avantages procurés.
Encore une fois, je remercie le Gouvernement de s'être associé à la proposition de loi de M. Hoeffel. J'espère que nos collègues de l'Assemblée nationale lui accorderont le même soutien. Cela permettrait de marquer que, en matière de protection sociale, on peut aujourd'hui, dans ce pays, trouver un consensus, quelles que soient les sensibilités. C'est une démonstration à laquelle, pour sa part, la commission des affaires sociales du Sénat est très attachée. (Applaudissements.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi.
(La proposition de loi est adoptée.)
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