M. le président. M. Pierre Hérisson appelle l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur l'installation des citoyens helvétiques dans les communes frontalières.
Si ceux-ci ont la possibilité d'acquérir une résidence en France, elle ne peut être occupée qu'à titre secondaire. Or la plupart de ces résidents les occupent à titre principal. Ces citoyens helvétiques, bien que représentant des consommateurs potentiels qui paient leurs impôts locaux, ne sont pas totalement comptabilisés dans le recensement de la population pour le calcul de la dotation globale de fonctionnement des communes. Une résidence secondaire ne compte que pour un habitant, quel que soit le nombre d'occupants. Ces résidents ne donnent pas lieu non plus à la perception, au bénéfice de la commune, de la part du Fonds de rétrocession genevois.
Cet état de fait pourrait conduire, à terme, à un sérieux déséquilibre financier pour les communes, qui doivent malgré tout construire des équipements publics en rapport avec leur population réelle.
En conséquence, il lui demande de bien vouloir lui préciser les mesures qui seront mises en oeuvre pour que les communes frontalières bénéficient d'une DGF et du Fonds de rétrocession genevois en rapport avec un décompte total d'habitants résidant dans ces communes. (N° 8.)
La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères et concerne les résidents helvétiques en France.
Monsieur le secrétaire d'Etat, de nombreux élus du genevois Haut-Savoyard à la tête de communes frontalières me font part de leurs inquiétudes concernant un phénomène qui a tendance à s'amplifier.
Les citoyens helvétiques, s'ils ont parfaitement le droit d'acquérir une résidence en France - ce qui, je le souligne, n'est pas réciproque - ne peuvent néanmoins légalement le faire qu'à titre de résidence secondaire. Or la plupart de ces résidences sont, en réalité, occupées par des familles à titre principal.
Un change favorable et un pouvoir d'achat supérieur en France sont autant de raisons qui incitent de nombreux citoyens helvétiques à habiter de manière permanente leurs résidences dites secondaires.
Les communes frontalières souffrent également d'une importante spéculation, qui augmente considérablement la pression foncière et qui rend, par conséquent, difficile l'accession à la propriété pour nos propres concitoyens.
Si la présence même de citoyens helvétiques sur ce territoire frontalier n'est pas tellement, en elle-même, un problème majeur, nos élus déplorent néanmoins le fait qu'elle ne soit pas entièrement prise en compte pour la perception de certaines recettes destinées à couvrir les charges induites au niveau communal, voire départemental.
En effet, ces citoyens helvétiques, bien qu'ils représentent des consommateurs potentiels qui paient leurs impôts locaux, ne sont néanmoins pas totalement comptabilisés dans le recensement de la population communale et, de ce fait, ils ne sont pas pris en compte pour le calcul de la dotation globale de fonctionnement versée à chaque commune, une résidence secondaire ne comptant, pour l'INSEE, que pour un habitant.
En outre, ils ne donnent pas lieu non plus, malgré leur situation de fait de « frontaliers », à la perception de la part du fonds de rétrocession genevois revenant à chaque commune au prorata de sa population frontalière.
Enfin, étant immatriculés en Suisse, ils ne s'acquittent pas de la vignette automobile française, dont le produit revient au conseil général.
Nos élus craignent réellement que cette situation de fait ne conduise inévitablement, à plus ou moins long terme, à un sérieux déséquilibre financier et civique, puisque la population réelle, en constante augmentation, n'est pas prise en compte au titre de la population recensée.
L'Etat entend-il donner aux communes frontalières les moyens de financer les équipements publics qui sont à leur charge, en tenant compte de la population réelle ?
Qu'envisage-t-il pour la perception de la part du fonds de rétrocession genevois concernant ces habitants ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat.
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget. M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères, m'a demandé de répondre à votre question, monsieur le sénateur.
Je commencerai, comme vous l'avez d'ailleurs fait, par rappeler quel est l'état du droit en la matière.
La population prise en compte pour le calcul de la dotation globale de fonctionnement, la DGF, est la population totale qui résulte des recensements, généraux ou complémentaires, majorée d'un habitant par résidence secondaire, ces données étant recensées par les services de l'Institut national de la statistique et des études économiques, l'INSEE.
Les citoyens étrangers, quant à eux, sont recensés comme résidant à titre principal en France s'ils déclarent y occuper leur résidence principale.
A l'inverse, ils sont recensés comme occupant une résidence secondaire s'ils mentionnent que leur résidence principale n'est pas située sur le territoire français. Seuls les personnels d'ambassade dérogent à ces dispositions en raison du principe d'extraterritorialité.
Un Etat peut toutefois n'autoriser ces citoyens à déclarer leur résidence principale à l'étranger que s'ils l'occupent plus d'un certain nombre de mois dans l'année. Tel est le cas des citoyens français, qui ne peuvent déclarer avoir leur résidence principale à l'étranger que s'ils y résident plus de six mois au cours d'une année.
Dans le cas présent, l'opposition soulevée ne peut donc trouver son origine que dans la législation helvétique. Dans la mesure où un citoyen suisse peut déclarer avoir sa résidence principale en France, cette dernière sera recensée comme telle par l'INSEE et prise en compte également à ce titre pour la calcul de la DGF.
Les communes frontalières bénéficient donc d'une DGF calculée selon les règles identiques à celles qui sont mises en oeuvre dans les autres communes, et leur dotation tient compte des charges occasionnées par les résidents à titre principal comme par les résidents à titre secondaire.
Par ailleurs, les communes concernées des départements de la Haute-Savoie et de l'Ain, peuvent, vous l'avez évoqué, bénéficier du Fonds de rétrocession genevois, qui a été institué pour compenser les charges résultant d'un surplus de population en raison des travailleurs frontaliers et qui est affecté au subventionnement d'investissements à caractère collectif.
M. Pierre Hérisson. Je demande la parole.
M. le président. La parole est à M. Hérisson.
M. Pierre Hérisson. Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous remercie de votre réponse. Vous avez pris soin d'étudier la situation sur le terrain.
S'agissant du département de la Haute-Savoie et du pays de Gex plus particulièrement, il existe effectivement le fonds de rétrocession genevois. Cela m'amène à vous faire une suggestion.
Il serait nécessaire, que le ministère des affaires étrangères examine précisément la méthode de calcul de ce fonds et engage une négociation pour tenter d'atténuer cette injustice qui frappe certes l'ensemble des résidences secondaires ; peu importe que les citoyens soient helvétiques, français ou étrangers.
La suggestion que je vous fais mérite d'autant plus d'attention que les communes frontalières rencontrent des difficultés financières.
Il faut ajouter à cela le taux de chômage très élevé qui est enregistré dans ces communes frontalières, pourtant considérées, à une époque, comme un eldorado où l'on venait s'installer en espérant obtenir par la suite un permis de travail en Suisse, et bénéficier ainsi du change favorable.
Le bénéficiaire direct de ce fonds de rétrocession genevois est le conseil général de la Haute-Savoie. Il est vivement souhaitable que le ministre des affaires étrangères examine avec le plus grand soin ce problème.

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