LOI DE FINANCES POUR 1998
Suite de la discussion d'un projet de loi
M. le président.
Nous reprenons la discussion du projet de la loi de finances pour 1998, adopté
par l'Assemblée nationale.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Régnault.
M. René Régnault.
Monsieur le secrétaire d'Etat, le projet de loi de finances que vous nous
présentez répond aux engagements pris devant les Français. Il s'agit d'un
budget pour la croissance, pour l'avenir et pour la solidarité.
Il s'inscrit dans la nouvelle politique demandée par les Français et que mène,
avec bonheur, le Gouvernement depuis juin dernier. Il s'agit d'une politique
responsable, transparente, proche des préoccupations des Français, porteuse
d'un projet pour notre société, à l'aube de l'an 2000, conciliant l'efficacité
économique nécessaire dans une économie ouverte et concurrentielle et la
solidarité, qui permet à chacun d'être reconnu et d'avoir sa place dans cette
société, non seulement par l'emploi mais aussi par l'exercice des droits
fondamentaux au logement, à la santé, à l'éducation et à la sécurité.
C'est un budget pour la croissance, disais-je. Même s'il convient encore de
faire preuve de prudence, nous observons une accélération progressive,
trimestre après trimestre, de la croissance, qui nous permet raisonnablement
d'espérer sortir de la conjoncture de fond qu'a connue notre économie au cours
de ces dernières années et qui a été caractérisée par une croissance molle.
Deux raisons principales expliquent, selon moi, cette situation.
La première a trait à une politique monétaire inadaptée. Aujourd'hui, ce débat
est en grande partie dépassé puisque le dollar est reparti à la hausse et que
les taux d'intérêt sont désormais relativement peu élevés. Toutefois, il faut
être vigilant et ne pas céder aux tentations, ainsi que l'a montré la récente
et regrettable hausse des taux. Comme quoi, en économie, il faut être prudent
et savoir raison garder !
La seconde raison de la situation dont nous avons hérité tient à la stagnation
de la demande. Le moteur de la demande interne est bloqué depuis plusieurs
années, ce qui s'explique notamment par une faible consommation des ménages,
conduisant à de faibles investissements. Trois causes principales peuvent être
avancées.
La première tient à l'accroissement de l'épargne de précaution, du fait,
notamment, de la hausse du chômage.
La seconde est la stagnation, voire la réduction, du pouvoir d'achat,
constatée chaque année par la majorité des Français. Un seul chiffre illustrera
mon propos : le pouvoir d'achat des salariés a baissé de 1,6 % en 1996. Les
augmentations de salaires ont été globalement très faibles, et le partage des
revenus entre salaires et profits s'est effectué à l'avantage de ces derniers.
A cela s'ajoutent ce qu'il convient d'appeler deux tours de vis fiscaux, l'un
du gouvernement de M. Balladur et l'autre de celui de M. Juppé.
M. Alain Lambert,
rapporteur général de la commission des finances, du contrôle budgétaire et
des comptes économiques de la nation.
Et le troisième du présent
gouvernement !
M. René Régnault.
La troisième cause de la stagnation de la demande est une politique budgétaire
et fiscale à contresens, qui a consisté à renforcer l'offre - plus de 200
milliards de francs d'allégements de charges ont été décidés pour les
entreprises alors que leurs résultats étaient globalement convenables - et à
pressurer la demande, pourtant défaillante, en creusant les inégalités. C'est
ainsi que l'augmentation de la CSG fut appliquée sans baisse des cotisations,
et que sont intervenus le RDS, la hausse des impôts indirects, à concurrence de
150 milliards de francs environ, et la baisse des impôts directs.
Les gouvernements précédents portent donc une grande part de responsabilité
dans la persistance de cette croissance molle avec, notamment, ses conséquences
sur l'emploi.
Le 1er juin dernier, les Français, sollicités par le président de votre
majorité,...
M. Alain Lambert,
rapporteur général.
Le Président de la République !
M. René Régnault.
... ont clairement condamné cette politique et voté pour une nouvelle, fondée
sur le soutien à la demande et permettant d'obtenir enfin une croissance rapide
et pérenne de la consommation et de l'investissement.
Des mesures ont déjà été prises, dont on peut constater les premiers effets.
Je songe, notamment, au quadruplement de l'allocation de rentrée scolaire et au
transfert des cotisations sur la CSG, avec un gain de plus de 1 % de pouvoir
d'achat pour les salariés.
Ce projet de loi de finances poursuit dans cette voie en prévoyant notamment
une baisse de la TVA sur le logement social, une déduction d'impôt pour
l'entretien de la résidence principale, une augmentation des aides personnelles
au logement, une réduction de la taxe d'habitation pour de nombreuses familles
moins favorisées et le rétablissement de la réduction d'impôt pour frais de
scolarité, pour ne citer que quelques exemples.
L'inversion des priorités est également manifeste au travers de l'arrêt de la
progression des prélèvements obligatoires enregistrée depuis 1993 et fort bien
illustrée par M. le ministre de l'économie, voilà quelques instants.
Les prélèvements de l'Etat baissent de 0,2 point dans le PIB, pour ne
représenter plus que 15 %. Au total, les prélèvements obligatoires diminueront
même légèrement, passant de 46 % à 45,9 %.
La majorité du Sénat parle cependant « d'une hausse des impôts considérable »,
plus de 51 milliards de francs en 1998.
M. Alain Lambert,
rapporteur général.
C'est un constat !
M. René Régnault.
Les mesures nouvelles d'augmentation des impôts sont pourtant inférieures à 14
milliards de francs.
M. Alain Lambert,
rapporteur général.
Par rapport à quoi ?
M. René Régnault.
Toutefois, M. le rapporteur général inclut des mesures prises en 1997. Il n'a
pas vu ou feint de ne pas voir qu'il y a eu un 1er juin 1997.
M. Alain Lambert,
rapporteur général.
Si !
M. René Régnault.
Il inclut des mesures visant à compenser les insuffisances de recettes de
cette année et l'abandon de la réforme Juppé ; tout le monde sait maintenant
que cette remarquable et très médiatisée réduction de l'impôt sur le revenu
n'était pas financée.
Cette mauvaise querelle, bassement politicienne, de la part de l'ex-majorité
est donc, à nos yeux, peu convaincante, d'autant moins qu'elle est soulevée par
ceux qui avaient réussi le tour de force d'augmenter de deux points les
prélèvements obligatoires, soit environ 200 milliards de francs.
M. Alain Lambert,
rapporteur général.
Pourquoi ne les baissez-vous pas ?
M. Marc Massion.
Chaque chose en son temps !
M. René Régnault.
Nous assurons un certain nombre de priorités. Tout à l'heure, M. le ministre
de l'économie, des finances et de l'industrie, en faisant référence à la règle
des trois - et non pas à la règle de trois !
(Sourires)
- a montré quelles étaient les priorités du Gouvernement pour
l'immédiat. Nous y adhérons, et vous aussi, dans votre for intérieur.
M. Alain Lambert,
rapporteur général.
Mais vous maintenez tous les impôts que vous
critiquez !
M. René Régnault.
Lorsque la situation se sera encore améliorée, nous pourrons aller plus
loin.
M. Christian Poncelet,
président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes
économiques de la nation.
On verra !
M. René Régnault.
Il est vrai, monsieur le rapporteur général, que les prévisions du
Gouvernement éveillent en vous une crainte, en elle-même fort louable. Vous
parlez d'optimisme excessif, de pari fort et d'effets pervers de la nouvelle
politique économique. Votre crainte mérite d'être examinée.
M. Alain Lambert,
rapporteur général.
Avec bienveillance !
(Sourires.)
M. René Régnault.
Il se pourrait en effet que se répète le précédent de 1995, dans lequel la
phase de reprise de l'économie s'était essoufflée. Toutefois, la raison, je
l'ai dit, en était l'absence de moteur interne, due en grande partie au serrage
de vis fiscal. En l'occurrence, nous pouvions parler d'effets pervers de la
politique économique.
Or, la politique économique du gouvernement de M. Jospin permet justement la
relance de la demande interne, et vous en constatez les premiers effets. Elle
évite les erreurs précédentes - que vous persistez par ailleurs à défendre,
monsieur le rapporteur général - et c'est pourquoi nous sommes, quant à nous,
optimistes. De plus, je doute fort que les Français puissent, pour leur part,
davantage vous croire aujourd'hui que voilà quelques semaines.
Déjà, les premiers éléments de la réussite apparaissent. Le pouvoir d'achat
augmente désormais de manière significative et des emplois sont créés. En 1998,
ces mouvements devraient être amplifiés, avec un gain de pouvoir d'achat du
revenu disponible de 2,3 % et environ 200 000 créations d'emplois nettes.
La demande anticipée par les chefs d'enteprise est également largement
positive. L'investissement devrait, là encore, selon toute vraisemblance,
repartir, et de manière soutenue. Les dernières enquêtes le confirment. Il
s'agit d'un constat qui résulte de l'analyse des faits.
Cette politique de soutien de la demande et d'accompagnement de la reprise
permettra donc, après 1997, année de transition, année d'accélération
progressive de la croissance, que 1998 soit la première - et nous nous en
réjouissons tous, je pense, dans cette enceinte, comme ailleurs - ...
M. Alain Lambert,
rapporteur général.
Eh oui, il faut souhaiter le succès de la France !
M. Christian Poncelet,
président de la commission des finances.
Monsieur Régnault, comme l'a
écrit La Fontaine, « en toute chose, il faut considérer la fin » !
M. René Régnault.
S'agissant de la fin, je vous invite à anticiper le constat que nous devinons
: avec la croissance qui repart et qui s'accélérera progressivement, 1998 sera,
nous l'espérons bien, la première de plusieurs années de croissance solide
permettant de rattraper les retards accumulés et de réduire le chômage, et ce à
partir d'une économie et de finances publiques assainies.
Budget de soutien à la politique d'accompagnement de la reprise, ce budget est
également porteur d'avenir et est orienté résolument vers la jeunesse.
D'abord, il inscrit clairement notre pays dans l'Europe. Les budgets de 1997
et de 1998 portent une contrainte historique, qui a été rappelée. En effet, ils
servent de référence pour la mise en place de la monnaie unique européenne. Or,
compte tenu des mauvais résultats des budgets précédents, nous étions assez
loin du critère des 3 % de déficit. Toutes les prévisions impartiales du
printemps
(M. le rapporteur général sourit.),
émanant d'experts incontestables et
incontestés, étaient supérieures à 4 %.
La dissolution avait d'ailleurs été largement dictée - c'est de notoriété
publique, ce n'est plus contesté, même si cela fait un peu sourire - par cette
situation et par la perspective d'une politique de rigueur pour atteindre les
critères de Maastricht.
Or, il n'est pas imaginable que la France prenne le risque politique de
l'échec de cette grande idée, indispensable pour que l'Europe retrouve une
certaine liberté d'action, et puisse parler en position de force par rapport à
nos partenaires pour mettre fin aux dérèglements monétaires et financiers.
Il fallait donc corriger ces déficits et revenir dans l'épure des 3 %, ce qui
impliquait un effort de plus de 80 milliards de francs. Celui-ci a été accompli
dans la loi portant mesures d'urgence à caractère fiscal et financier, et dans
le présent projet de budget par la stabilisation des dépenses de l'Etat en
termes réels, ce qui est tout de même une performance assez importante pour
être remarquée et soulignée. Cela traduit la volonté politique de réserver la
croissance de la richesse à la solidarité.
Signalons que cela a été fait sans artifices ni dissimulation, contrairement
aux budgets précédents, qui accumulaient les annonces non financées,
(M. Jean Chérioux proteste),
telles que la réduction de l'impôt sur le
revenu, les recettes exceptionnelles, la sous-estimation des déficits et les
prévisions artificielles.
M. Jean Chérioux.
Et le gouvernement Bérégovoy ? Pour ce qui est de la sous-estimation des
déficits, il s'y connaissait !
(Exclamations sur les travées socialistes.)
M. René Régnault.
Ah ! monsieur Chérioux, je ne vous avais pas encore entendu !
Ensuite, c'est un budget d'avenir, car il permet d'envisager rapidement la fin
de l'augmentation de notre dette publique.
On a assez dit cet après-midi à quel point c'était important. Vous-même,
monsieur le président de la commission, et vous aussi, monsieur le rapporteur
général, vous avez beaucoup insisté sur l'état de la dette publique,
suffisamment pour convenir avec nous que les choix actuels et l'action conduite
par le Gouvernement vont dans la bonne direction.
Ce budget permettant d'envisager rapidement la fin de l'augmentation de notre
dette publique...
M. Alain Lambert,
rapporteur général.
Et le report de la dette sociale ?
M. René Régnault.
On s'en occupe aussi, monsieur le rapporteur général ! Et c'est heureux, car
on ne peut pas dire que le Sénat nous ait beaucoup aidés pour réduire la dette
sociale !
M. Alain Lambert,
rapporteur général.
Le report de la dette sociale, c'est l'avenir ?
M. René Régnault.
En 1998, le déficit primaire sera d'environ 20 milliards de francs, soit une
réduction de plus de moitié par rapport à 1997. Or un Etat qui s'endette est un
Etat qui reporte la charge des dépenses sur les générations futures et qui perd
les marges de manoeuvre pour toute action budgétaire.
Faut-il rappeler que la dette publique a quasiment doublé depuis 1992, avec
une augmentation de 81 %, soit 1 700 milliards de francs, et une hausse de 30
000 francs par Français ? Le service de la dette représente désormais plus de
20 % des dépenses, ce qui est considérable.
Enfin, ce budget est un budget d'avenir, car, dans ce contexte de rigueur, il
dégage les moyens nécessaires à la construction de la société de demain.
Je l'ai dit, cette société doit permettre l'efficacité économique nécessaire
dans une économie ouverte et concurrentielle. C'est pourquoi ce projet de
budget prévoit un soutien aux PME innovantes.
Mais l'efficacité économique, ce sont aussi les infrastructures, et
l'augmentation de 6,2 % des crédits d'équipements civils est, à cet égard, une
bonne chose ; c'est également l'intelligence et la recherche, la formation des
hommes, secteurs dans lesquels on ne peut que saluer l'effort réalisé dans ce
projet de budget.
La société de demain doit également permettre à chacun de trouver sa place,
par l'emploi d'abord, mais aussi par l'exercice des droits fondamentaux au
logement, à la santé, à l'éducation, à la sécurité, à la justice et à la
culture.
Tous ces secteurs sont privilégiés dans ce projet de budget. Les crédits pour
l'emploi progressent de 9,3 %, et 8 milliards de francs sont consacrés à la
mise en place de 150 000 emplois-jeunes. Les crédits croissent de 8,6 % pour le
logement, de 3,1 % pour l'éducation nationale, l'action sociale et la santé, de
2,1 % pour l'intérieur, de 4 % pour la justice et de 3,7 % pour la culture.
Ces priorités ne trouvent pourtant pas grâce aux yeux de la majorité
sénatoriale, qui nous propose de faire des coupes claires dans ces budgets.
M. Alain Lambert,
rapporteur général.
Pas dans celui de la justice !
M. René Régnault.
Dans la plupart d'entre eux !
Elle nous propose de supprimer les crédits pour les emplois-jeunes, pour le
financement des trente-cinq heures, pour l'augmentation du salaire des
fonctionnaires. Ce sont des choix qu'elle entend assumer, y compris devant la
jeunesse.
M. Alain Lambert,
rapporteur général.
Nous y reviendrons lors de l'examen de la deuxième
partie !
M. René Régnault.
Chers collègues de la majorité sénatoriale, c'est ce que vous vous préparez à
faire, mais c'est ce que vous pouvez encore éviter de faire.
M. Alain Lambert,
rapporteur général.
Je le répète : nous en reparlerons lors de l'examen
de la deuxième partie !
M. René Régnault.
J'en prends acte et je vous donne rendez-vous. Par conséquent, nous pouvons
penser que la majorité sénatoriale changera de position à la suite des
explications apportées par les uns et les autres ; cela l'honorerait.
M. Christian Poncelet,
président de la commission des finances.
Il n'est pas interdit de rêver
!
M. René Régnault.
Chers collègues de la majorité sénatoriale, minorité dans le pays, vous
semblez ne pas avoir entendu la volonté démocratique de notre pays. Elle a
sévèrement condamné votre politique,...
M. Alain Lambert,
rapporteur général.
Et, dans le passé, la vôtre !
M. René Régnault.
... celle que vous souteniez dans cet hémicycle.
(Exclamations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Elle en a appelé une autre, celle que, avec courage, détermination et dans
le respect du pacte républicain, conduit le gouvernement de M. Lionel
Jospin.
Pourtant, vous vous obstinez, parfois à grand peine, à opposer un autre
budget, celui des causes de la dissolution du printemps dernier, celui que la
majorité démocratique du pays a condamné, celui de l'échec de la France. La
majorité sénatoriale n'entendrait-elle qu'elle même et serait-elle incapable de
saisir l'expression du suffrage universel ?
M. Alain Lambert,
rapporteur général.
Selon vous, toute opposition est-elle illégitime ?
M. René Régnault.
Voudrait-elle se condamner et en même temps condamner l'institution qui est la
nôtre, la Haute Assemblée ?
Ne sauriez-vous, monsieur le rapporteur général, entendre que les
préoccupations de quelques grands propriétaires fonciers, des détenteurs
substantiels d'épargne, des gros actionnaires...
M. Alain Lambert,
rapporteur général.
L'argument est nouveau !
M. René Régnault.
... et, indirectement, des entreprises à travers le souci que vous marquez
des préoccupations pour la rémunération des dividendes ?
(Protestations sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Je m'interroge sur les motivations qui peuvent être les vôtres.
Pour être cohérent, il faut, bien entendu, diminuer - c'est votre proposition
- les dépenses publiques, les charges sociales, réduire le nombre de
fonctionnaire sans dire lesquels, car toutes les communes rurales veulent un
instituteur, tout le monde veut plus de sécurité, plus de gendarmes, de
policiers, dans les quartiers des villes comme en milieu rural. Mais avec quoi
?
(Exclamations sur les travées des Républicains et Indépendants.)
Vous proposez d'affaiblir la solidarité au détriment des producteurs de
richesses, des plus faibles, des plus démunis.
M. Alain Lambert,
rapporteur général.
Absolument pas !
M. René Régnault.
Alors, il faut le dire clairement. Nous, les socialistes de la Haute
Assemblée, sommes profondément en désaccord avec votre logique, vos choix, vos
orientations politiques et sociales. Nous soutenons ce qui répond à l'attente
de la volonté large et profonde du pays.
M. Alain Lambert,
rapporteur général.
C'est la démocratie !
M. René Régnault.
C'est en effet la démocratie qui a dégagé une majorité sur un projet que le
Gouvernement met en oeuvre et que nous appuyons.
M. Jean Chérioux.
On verra la suite !
M. René Régnault.
Troisième appréciation : c'est un budget pour une meilleure justice
sociale.
Au contraire des gouvernements précédents qui allégeaient l'impôt direct et
accroissaient l'impôt indirect, c'est-à-dire l'impôt le plus inéquitable,
l'objectif de la réforme fiscale, qui sera réalisée sur l'ensemble de la
législature, c'est un impôt direct plus juste et des impôts sur la consommation
moins lourds.
La première étape est effectuée dans ce budget, avec l'effacement d'un certain
nombre d'avantages excessifs sur les impôts sur les sociétés et sur le revenu.
C'était une des priorités du groupe socialiste du Sénat. Il en avait tenu
compte dans les propositions qu'il avait faites l'année dernière, et nous
sommes heureux d'en voir aujourd'hui les traductions. Par exemple, le plafond
de réduction d'impôt pour les emplois à domicile sera ramené à 22 500 francs au
lieu de 45 000 francs, ce qui touche 5 % des bénéficiaires et 0,25 % des
familles.
Il faut poursuivre et, progressivement, revenir à un impôt réellement
progressif.
Les investissements dans les DOM-TOM et dans la construction et la réparation
navales devront également être revus afin que soit trouvé un système adéquat
évitant tout effet d'aubaine pour ceux que l'on pourrait qualifier de «
privilégiés » et qui ont pu trouver ici une bonne raison d'effacer une partie
de l'impôt qu'ils avaient à acquitter.
De même, sur l'impôt sur les sociétés, nous proposerons des amendements contre
l'évasion fiscale.
La baisse de la TVA est également engagée dans ce budget. Nous proposerons au
Gouvernement de nouvelles avancées en la matière.
Enfin, le groupe socialiste du Sénat est très attentif à la fiscalité
écologique et à la fiscalité locale. De profondes réformes devraient être
réalisées l'année prochaine. Là encore, nous proposerons plusieurs pistes de
réflexion et certaines avancées pourraient être réalisées dans ce projet de
budget.
Sur la fiscalité écologique, en attendant une réforme de la taxe intérieure
sur les produits pétroliers, il est indispensable d'encourager l'achat de
véhicules propres et de réformer le calcul de la puissance fiscale.
Les collectivités territoriales et leurs établissements publics de coopération
sont des partenaires incontournables de l'action de l'Etat pour la réussite de
ses objectifs fondamentaux ; le plan emplois-jeunes en est la dernière
illustration.
Monsieur le secrétaire d'Etat, la volonté et la détermination des maires sont
réelles ; leur sens des responsabilités, de responsabilités nouvelles et
actuelles, est évident, vous l'avez vérifié ce matin. En témoigne l'attention
soutenue et positive qu'ils viennent de réserver aux ministres et au Premier
ministre, au discours duquel ils ont été particulièrement attentifs, lors du
congrès de l'Association des maires de France qui vient de se tenir à la porte
de Versailles.
Face aux efforts demandés, les élus locaux ont apprécié l'engagement du
Gouvernement de ne pas modifier le taux de cotisation à la CNRACL en 1998 ;
toutefois, monsieur le secrétaire d'Etat, il faut convenir que l'avenir de la
caisse est posé et que sa participation de 18,7 milliards de francs pour 1996 à
la solidarité nationale est très importante.
M. Christian Poncelet,
président de la commission des finances.
On verra cela après les
élections !
(Sourires.)
M. Alain Lambert,
rapporteur général.
On ne peut pas tout faire en même temps !
M. René Régnault.
Les attentes sont très grandes également dans des domaines essentiels de la
vie locale et la réforme de l'intercommunalité est aujourd'hui à un tournant de
son évolution.
Il faut que l'esprit fondamental qui a dicté les dispositions de la loi du 6
février 1992 soit concrètement et effectivement garanti - mieux, consolidé -
grâce à une coopération fondée sur la notion de projet commun avec un
élargissement du champ des compétences, tout en assurant solidarité,
transparence et démocratisation par un partage équitable des ressources - je
pense notamment à la taxe professionnelle unique - et une meilleure lisibilité
par les citoyens-administrés et par l'ensemble des élus municipaux du
territoire de coopération.
Est alors ici posée la question de la place et de la part du suffrage
universel direct.
En 1998, nous assisterons aussi à la sortie du pacte de stabilité financière.
Les collectivités territoriales qui, au cours de cette période, ont été privées
d'une part substantielle des dégrèvements de taxe professionnelle doivent se
voir reconnaître un meilleur traitement. Elles doivent notamment bénéficier des
fruits de la croissance.
Face à leurs engagements et à leurs charges - emplois, environnement,
solidarité, etc. - nous proposerons que leurs ressources pour 1998 soient
abondées au travers du produit du relèvement de la contribution minimum de taxe
professionnelle. Nous déposerons un amendement en ce sens.
M. Alain Lambert,
rapporteur général.
Ah !
M. René Régnault.
Enfin, monsieur le secrétaire d'Etat, nous attendons des engagements précis et
concrets quant à la mise en oeuvre de la réforme de la fiscalité locale qui a
été engagée en 1990 et dont l'application en 1999 devrait être un objectif
absolu.
Sur toutes ces questions, notamment sur celle de l'évolution de
l'intercommunalité et de la solidarité financière qui la sous-tend, les débats
qui suivront seront pour nous l'occasion d'approfondir nos analyses et nos
propositions.
Monsieur le secrétaire d'Etat, nous ne doutons pas de la volonté du
Gouvernement. Nous attendons ses réponses - nous savons qu'il travaille - et
nous attendons ses engagements. D'ores et déjà, le groupe socialiste veut
l'assurer de son soutien constructif et sans réserve.
(Applaudissements sur
les travées socialistes.)
M. Christian Poncelet,
président de la commission des finances.
Le contraire nous aurait surpris
!
11