M. le président. Par amendement n° 20, MM. Régnault, Angels, Mme Bergé-Lavigne, MM. Charasse, Haut, Lise, Massion, Miquel, Moreigne, Sergent et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 34, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Après le premier alinéa du I de l'article 1647 E du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Au titre de 1998 et des années suivantes, le taux de valeur ajoutée figurant au premier alinéa est fixé à 1 %. »
« II. - Le second alinéa du I de l'article 1647 E du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Cette imposition minimale ne peut avoir pour effet de mettre à la charge de l'entreprise un supplément d'imposition dépassant un seuil fixé par décret. »
« III. - Le paragraphe II de l'article 1647 E du code général des impôts est ainsi rédigé :
« II . - Le supplément d'imposition, défini par différence entre la cotisation résultant des dispositions du I et la cotisation de taxe professionnelle déterminée selon les règles définies au III, est versé au fonds national de péréquation de la taxe professionnelle. »
« IV. - L'augmentation des ressources du fonds national de péréquation de taxe professionnelle résultant de l'application de cet article n'est pas prise en compte dans le calcul à structure constante défini à l'article 32 de la loi de finances pour 1996.
« V. - Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées par une réduction a due concurrence de la dotation budgétaire de l'Etat au fonds national de péréquation de la taxe professionnelle et par le relèvement des tarifs mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »
La parole est à M. Régnault.
M. René Régnault. Cet amendement, auquel nous tenons beaucoup, a été dicté par deux idées fondamentales.
La première part du constat selon lequel, en matière de taxe professionnelle, il existe entre les entreprises des différences de traitement tout à fait importantes, et donc un certain nombre d'inégalités, ce qui entraîne certains effets pervers en matière de localisation d'entreprises et d'aménagement du territoire.
Le seconde, c'est qu'en matière de péréquation les moyens dont dispose le fonds national sont relativement faibles par rapport aux besoins qui se font jour et qui mériteraient d'être satisfaits.
Cet amendement vise donc à instaurer une cotisation minimale de taxe professionnelle. Le principe en est déjà acquis depuis 1996 : le groupe socialiste du Sénat s'était félicité de constater que l'idée recueillait un large accord au sein de la Haute Assemblée. C'était là, en effet, une avancée intéressante face aux inégalités des entreprises devant la taxe professionnelle.
Cette disposition constitue également un premier pas vers une modification de l'assiette de la taxe professionnelle en permettant une moindre taxation des entreprises de main-d'oeuvre, une moindre pénalisation de l'emploi et une meilleure prise en compte des secteurs capitalistiques.
Elle aurait pu également constituer un bon outil pour renforcer les moyens de la péréquation financière entre les collectivités locales, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
Toutefois, la mesure prise à l'occasion de la loi de finances pour 1996 a manqué d'ambition puisque le taux retenu - 0,35 % - était très faible, puisque n'étaient pas prises en compte les entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à 50 millions de francs, puisqu'il était procédé à un plafonnement strict de la hausse. Au total, très peu d'entreprises ont été concernées, pour un rapport symbolique de l'ordre de 50 millions de francs alors que l'on attendait dix fois plus.
Par ailleurs, le gouvernement précédent avait attribué au budget de l'Etat le produit de cette cotisation minimale, alors qu'il s'agit pourtant clairement d'une imposition locale ; nous l'avons beaucoup regretté.
Une refonte du dispositif est donc nécessaire, et tel est l'objet de cet amendement n° 20.
En premier lieu, il prévoit de relever à 1 % le taux de la cotisation minimale, ce qui permettra à cette cotisation de remplir réellement ses objectifs. Le plafonnement devra être établi afin de permettre une augmentation réelle, mais progressive, de la ressource. Le dispositif doit également être revu dans la perspective de l'élimination indispensable d'un certain nombre de verrous qui avaient été introduits en 1996.
En second lieu, l'amendement prévoit l'attribution de cette cotisation minimale aux collectivités locales, par le biais du Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle le FNPTP, qui pourra ainsi remplir pleinement son rôle de rééquilibrage des ressources entre collectivités locales.
Cela correspondra à un souhait profond clairement exprimé par les élus locaux, les maires en particulier, tel qu'ils se plaisent à le rappeler lors de leurs congrès successifs, et il y a quelques semaines encore, en votre présence, monsieur le secrétaire d'Etat, à la porte de Versailles.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Alain Lambert, rapporteur général. Lors de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances, nous sommes convenus d'attendre le rapport que doit nous présenter le Gouvernement. Ce rapport nous avait été annoncé sous quelques jours, nous l'attendons sous quelques heures maintenant. Nous aurons donc, avec M. René Régnault, toutes les occasions de l'examiner.
Je lui suggère, de surcroît, de retirer son amendement, parce que le renvoi au pouvoir réglementaire pour la définition des règles de plafonnement ne paraît pas très constitutionnel. A défaut, l'avis de la commission serait défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat. Le principe peut être satisfaisant, mais cet amendement n'est pas opportun. Nous aurons l'occasion de parler de fiscalité locale l'an prochain. Par conséquent, je demande, une nouvelle fois, à M. Régnault de bien vouloir retirer son amendement.
M. le président. Monsieur Régnault, j'entends des appels convergents... L'amendement est-il maintenu ?
M. René Régnault. Je crois que, dans cette enceinte, il y a un accord pour qu'un minimum de taxe professionnelle soit instauré. Il est important, bien sûr, de retenir qu'une réflexion devrait être lancée très prochainement, à la suite d'un rapport que vous avez promis, monsieur le secrétaire d'Etat, lors de l'examen de projet de loi de finances initiale pour 1998.
Je veux donc être convaincu de vous avoir convaincu, monsieur le secrétaire d'Etat, (sourires) qu'il s'agit d'un amendement d'appel et qu'il aura bien une suite concrète dans le cadre des réflexions à venir, c'est-à-dire dans les prochains jours. En conséquence, devant votre approbation, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 20 est retiré.
M. Paul Girod. Je le reprends !
M. le président. Il s'agit donc de l'amendement n° 20 rectifié.
Vous avez la parole, monsieur Paul Girod, pour le défendre.
M. Paul Girod. A partir de l'instant où l'amendement est retiré, nous ne pouvons plus en discuter et c'est la raison pour laquelle je le reprends à mon compte, pour quelques instants !
Sur cette affaire de taxe professionnelle minimale, il existe, au sein des élus locaux, un assez large assentiment autour de deux idées maîtresses.
Premièrement, les bases actuelles de la taxe professionnelle sont, par nature, un sujet de perplexité pour tout le monde. Je le rappelle, le Sénat, en 1979, avait consacré des mois à essayer de mettre en place une loi de simulation - d'ailleurs, une simulation a bien eu lieu à la suite, mais ses conclusions ont été pour le moins surprenantes, voire choquantes - pour essayer de trouver d'autres bases. Il s'agissait de se rapprocher de la valeur ajoutée. Cependant, on s'est heurté à une impossibilité pratique faute de pouvoir mettre en place un système d'identification de tout ce qui est frais de siège et autres aspects entrant dans la valeur ajoutée qui ne sont pas localisables sur chaque établissement.
Deuxièmement, nous en sommes tout à fait conscients, il existe un vrai problème d'alimentation, au bénéfice du Trésor, d'un certain nombre de péréquations et de compensations de dégrèvements, qu'il a lui-même mis en place et qui ne peuvent pas profiter exagérément aux entreprises déjà très peu imposées au titre de la taxe professionnelle, quelquefois d'ailleurs à la suite d'astuces et de manipulations assez étonnantes au niveau des groupes. M. Revet connaît bien ces problèmes, il en reparlera sans doute tout à l'heure.
Nous en sommes tous assez d'accord, et sur toutes les travées, il faut réfléchir, sinon à une part nationale de la taxe professionnelle, en tout cas à un dispositif qui concilie la contribution locale et l'autonomie locale et, en même temps, un minimum de justice et d'efficacité à partir de la valeur ajoutée, mais cela ne peut être qu'une part nationale.
Cela dit, je retire l'amendement.
M. le président. L'amendement n° 20 rectifié est retiré.
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